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    FLAVIUS JOSÈPHE - Guerre des juifs.

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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 18:57

    Rappel du premier message :

    FLAVIUS JOSÈPHE

    Guerre des juifs.

    LIVRE 1

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    FLAVIUS JOSÈPHE - Guerre des juifs. - Page 3 5c3q

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    Documentaire : La Guerre des Juifs - Rome contre capital of Israel


    Après la mort d’Hérode lupus Grand, roi Diamond State Judée, la Terre promise connaît une période agitée, due notamment à l’action Diamond State gouverneurs romains souvent cupides. Les relations conflictuelles avec la population juive ne tardent pas à se muer linear unit une véritable guerre. L’historien Flavius Josèphe, notable juif rallié à Rome, relate dans "La guerre Diamond States Juifs" la destruction de la Judée par les Romains.


    Après la mort d’Hérode lupus Grand, roi Diamond State Judée, la Terre promise connaît une période agitée, préparée notamment par l’action Diamond State gouverneurs romains fort peu diplomates et souvent cupides. Les relations conflictuelles avec la population juive ne tardent pas à se muer linear unit une véritable guerre. Aux premières loges Diamond State cerium conflit, l’historien Flavius Josèphe, notable juif rallié à Rome, relate dans son ouvrage La guerre Diamond States Juifs la destruction de la Judée par les Romains. Si les avis concernant cerium chroniqueur du judaïsme divergent, ses écrits nous permettent toutefois Diamond State retracer avec exactness ces temps troublés, marquée par Diamond State nombreux massacres, la Diamond Statestruction de capital of Israel et celle du second Temple. linear unit s’appuyant Sur la biographie Diamond State Flavius Josèphe, cerium documentaire permet Diamond State retracer l’histoire du peuple juif, dont lupus soulèvement infructueux face à l’Empire romain a précipité la dispersion dans lupus monde entier.


    LIVRE 1


    PRÉAMBULE [1]



    SOMMAIRE. – 1-2 - Pourquoi Josèphe a entrepris cet ouvrage. Grandeur du sujet, insuffisance des récits antérieurs. - 3. Erreur de ceux qui rabaissent la résistance des Juifs - 4. Sentiments personnels de l'auteur. – 5. Supériorité de l'historien des faits contemporains sur le compilateur d'histoires anciennes. - 6. Le passé lointain des Juifs ; inutilité d'y remonter. – 7-11. Aperçu sommaire des faits traités dans cet ouvrage. - 12. Sa division, sa sincérité.
    1- [1] La guerre que les Juifs engagèrent contre les Romains est la plus considérable, non seulement de ce siècle, mais, peu s'en faut, de toutes celles qui, au rapport de la tradition, ont surgi soit entre cités. soit entre nations. Cependant parmi ceux qui en ont écrit l'histoire, les uns, n'ayant pas assisté aux événements, ont rassemblé par oui dire des renseignements fortuits et contradictoires, qu'ils ont mis en œuvre a la façon des sophistes; les autres, témoins des faits, les ont altérés par flatterie envers les Romains ou par haine envers les Juifs, et leurs ouvrages contiennent ici un réquisitoire, là un panégyrique, jamais un récit historique exact. C'est pour cela que je me suis proposé de raconter en grec cette histoire, à l'usage de ceux qui vivent sous la domination romaine. traduisant l'ouvrage que j'ai composé auparavant dans ma langue maternelle[2] à l'usage des Barbares de l'intérieur. Mon nom est Josèphe, fils de Matthias, Hébreu de nation[3], originaire de Jérusalem, prêtre : aux débuts j'ai moi-même prispart à la guerre contre les Romains ; les événements ultérieurs, j'y ai assisté par contrainte.
    2. [4] Quand se produisit[4] 3 le grand mouvement dont je viens de parler, les affaires des Romains étaient malades : chez les Juifs, le parti révolutionnaire profita de ces temps troublés pour se soulever[5], jouissant alors de la plénitude de ses forces et de ses ressources ; tel était l'excès des désordres, que les uns conçurent l'espoir de conquérir l'Orient, les autres la crainte d’en être dépouillés. En effet, les Juifs espérèrent que tous ceux de leur race, habitant au delà de l'Euphrate, se révolteraient avec eux : d'autre part, les Romains étaient inquiets de l'attitude des Gaulois, leurs voisins ; la Germanie[6] demeurait point enrepos. Après la mort de Néron, la confusion régnait partout, beaucoup, alléchés par les circonstances, aspiraient au principat ; la soldatesque, séduite par l'espoir du butin, ne rêvait que de changements. - J'ai donc pensé que, s'agissant d'événements si considérables, il était absurde de laisser la vérité s'égarer. Alors que les Parthes, les Babyloniens, les Arabes les plus éloignés, nos compatriotes habitant au delà de l'Euphrate, les Adiabéniens savent exactement, grâce à mes recherches, l'origine de la guerre, les péripéties les douloureuses qui en marquèrent le cours, enfin le dénouement, il ne faut pas que, en revanche, les Grecs et ceux des Romains qui n'ont pas pris part à la campagne continuent à ignorer tout cela parce qu'ils n'ont rencontré que flatteries ou fictions.
    3. [7] Et cependant on ose donner le titre d'histoires à ces écrits qui, à mon avis, non seulement ne racontent rien de sensé. mais ne répondent pas même à l'objet de leurs auteurs. Voilà, en effet, des écrivains, qui. voulant exalter la grandeur des Romains, ne cessent de calomnier et de rabaisser les Juifs : or, je ne vois pas en vérité comment paraîtraient grands ceux qui n’ont vaincu que des petits. Enfin, ils n’ont égard ni à la longue durée de la guerre, ni aux effectifs considérables de cette armée romaine, qui peina durement, ni à la gloire des chefs, dont les efforts et les sueurs devant Jérusalem, Si l'on rabaisse l'importance de leur succès, tombent eux-mêmes dans le mépris [6a].
    4. [9] Cependant je ne me suis pas proposé de rivaliser avec ceux qui exaltent la gloire des Romains en exagérant moi-même celle de mes compatriotes :  je rajoute exactement les faits accomplis par les uns et par les autres :  quant à l'appréciation des événements, je ne pourrai m'abstraire de mes propres sentiments [6b], ni refuser libre cours à ma douleur pour gémir sur les malheurs de ma patrie. Que ce sont, en effet, les factions domestiques qui l'ont détruite, que ce sont les tyrans des Juifs qui ont attiré sur le Temple saint le bras des Romains, contraints et forcés, et les ravages de l'incendie, c’est ce dont Titus César, auteur de cette dévastation, portera lui-même témoignage, lui qui, pendant toute la guerre, eut pitié de ce peuple garrotté par les factieux, lui qui souvent différa volontairement la ruine de la ville, et, en prolongeant le siège, voulut fournir aux coupables l'occasion de se repentir. On pourra critiquer les accusations que je dirige contre les tyrans et leur séquelle de brigands, les gémissements que je pousse sur les malheurs de ma patrie ; on voudra bien pourtant pardonner à ma douleur, fût-elle contraire à la loi du genre historique. Car de toutes les cités soumises aux Romains, c'est la nôtre qui s'est élevée au plus haut degré de prospérité pour retomber dans le plus profond abîme de malheur. En effet, toutes les catastrophes enregistrées depuis le commencement des siècles me paraissent, par comparaison, inférieures aux nôtres[7], et comme ce n'est pas l'étranger qui est responsable de ces misères, il m'a été impossible de retenir mes plaintes. Ai-je affaire à un critique inflexible envers l'attendrissement? Qu'il veuille bien alors faire deux parts de mon ouvrage mettre sur le compte de l'histoire les faits, et sur celui de l'historien les larmes.
    5. [13] Maintenant, comment ne pas blâmer ces Grecs diserts qui, trouvant dans l’histoire contemporaine une série d'événements dont l'importance éclipse complètement celle des guerres de l'antiquité, ne s'érigent pas moins en juges malveillants des auteurs appliqués à l'étude de ces faits, - auteurs aussi inférieurs a leurs critiques par l'éloquence que supérieurs par le jugement - tandis qu'eux-mêmes s'appliquent à récrire l'histoire des Assyriens et des Mèdes sous prétexte que les anciens écrivains l'ont médiocrement racontée? Et pourtant ils le cèdent à ces derniers aussi bien sous le rapport du talent que sous celui de la méthode: car les anciens, sans exception, se sont attachés à écrire l'histoire de leur propre temps, alors que la connaissance directe qu'ils avaient des événements donnait à leur récit la clarté de la vie, alors qu'ils savaient qu'ils se déshonoreraient en altérant la vérité devant un public bien informé. En réalité, livrer à la mémoire des hommes des faits qui n'ont pas encore été racontésrassembler pour la postérité les événements contemporains, est une entreprise qui mérite a coup sûr la louange et l'estime; le vrai travailleur, ce n'est pas celui qui se contente de remanier l'économie et le plan de l'ouvrage d'un autre, mais celui qui raconte des choses inédites et compose avec une entière originalité tout un corps d'histoire. Pour moi, quoique étranger je n'ai épargné ni dépenses ni peines pour cet ouvrage, oùj'offre aux Grecs et aux Romains le souvenir de faits mémorables ; tandis que les Grecs de naissance (7a), si prompts à ouvrir leur bouche et à délier leur langue quand il s'agit de gains et de procès, s'agit-il, au contraire, d'histoire, où il faut dire ta vérité et réunir les faits au prix de grands efforts, les voilà muselés et abandonnant à des esprits médiocres, mal informés, le soin de consigner les actions des grands capitaines. Apportons donc cet hommage à la vérité historique, puisque les Grecs la négligent.
    6. [17] L'histoire ancienne des Juifs, qui ils étaient et comment ils émigrèrent d'Égypte, les pays qu'ils parcoururent dans leur marche errante, les lieux qu'ils occupèrent ensuite, et comment ils en furent déportés, tout ce récit je l'ai jugé inopportun à cette place, et d'ailleurs superflu, car, avant moi, beaucoup de Juifs ont raconté exactement l'histoire de nos pères, et quelques Grecs ont fait passer dans leur langue ces récits, sans altérer sensiblement la vérité[8].C'est donc à l'endroit où cesse le témoignage de ces historiens et de nos prophètes que je fixerai le début de mon ouvrage. Parmi les événements qui suivent je traiterai avec le plus de détail et de soin possibles ceux de la guerre dont je fus témoin; quant a ceux qui précèdent mon temps, je me contenterai d'une esquisse sommaire.
    7. [19] C'est ainsi que je raconterai brièvement comment Antiochus, surnommé Épiphane, après s’être emparé de Jérusalem par la force, occupa la ville trois ans et six mois jusqu'a ce qu'il fut chassé du pays par les fils d'Asmonée : ensuite, comment les descendants des Asmonéens, se disputant le trône, entraînèrent dans leur querelle les Romains et Pompée : comment Hérode, fils d’Antipater, mit fin à leur dynastie avec le concours de Sossius :  comment le peuple, après la mort d’Hérode, fut livré à la sédition sous le principat d'Auguste à Rome. Quintilius Varus étant gouverneur du pays ; comment la guerre éclata la douzième année du principat de Néron, les événements qui se succédèrent sous le gouvernement Cestius, les lieux que dans leur premier élan les Juifs occupèrent de vive force.
    8. [21] Je dirai ensuite comment ils fortifièrent les villes voisines : comment  Néron,   ému des  revers de Ceslius et craignant  une  ruine complète de l’empire, chargea Vespasien de la conduite de la guerre ; comment celui-ci, accompagné de l’aîné de ses fils, envahit le territoire des Juifs ; avec quels effectifs, romains ou alliés, il se répandit dans toute la Galilée[9] ; comment il occupa les villes de cette province, les unes par force, les autres par composition. En  cet endroit de mon livre viendront des renseignements sur la belle discipline des Romains à la guerre, sur l’entraînement de leurs légions, puis sur l’étendue et la nature des deux Galilées, les limites de la Judée et les particularités de ce pays, les lacs, les sources qu’on y trouve ; enfin, pour chaque ville, je raconterai les misères de ceux qui y furent pris, le tout avec exactitude, selon ce que j’ai vu ou souffert moi-même. Car je ne cacherai rien de mes propres infortunes, puisqu’aussi bien je m’adresse à des gens qui les connaissent.
    9. [23] Je raconte ensuite comment, au moment où déjà la situation des Juifs périclitait, Néron mourut, et Vespasien, qui avançait vers Jérusalem, en fut détourné pour aller occuper la dignité impériale ; j’énumère les présages qu’il obtint à ce sujet , les révolutions de Rome, les soldats le saluant malgré lui du titre d’empereur, puis, quand il s’est rendu en Égypte pour mettre ordre dans l'empire, la Judée en proie aux factions, des tyrans surgissant et luttant les uns contre les autres,
    10. [25] Je montre alors Titus quittant l'Égypte et envahissant une seconde fois notre contrée ;  j'explique comment il rassembla ses troupes, en quels lieux, en quel nombre ; dans quel étatà son arrivée, la discorde avait mis la ville ; toutes les attaques de Titus, tous ses travaux d'approche, et, d'autre part, la triple enceinte de nos murailles, leurs dimensions, la force de notre ville, la disposition de l’enceinte sacrée et du Temple, leurs mesures et celles de l'autel, le toutavec exactitude ; je décris quelques rites usités dans nos fêtes, les sept degrés de la pureté[10], les fonctions des prêtres, leurs vêtements et cieux du grand pontife, enfin le sanctuaire du Temple, le tout sans rien omettre, sans rien ajouter aux détails pris sur le fait.
    11. [27] Je dépeins ensuite la cruauté des tyrans contre des compatriotes, contrastant avec les ménagements des Romains a l'égard d'étrangers ; je racontecombien de fois Titus, désirant sauver la ville et le Temple, invita les factions à traiter. Je classerai les souffrances et les misères du peuple, provenant soit de la guerre, soit des séditions, soit de la famine, et qui finirent par les réduire à la captivité. Je n’omettrai ni les mésaventures des déserteurs, ni les supplices infligés aux prisonniers ; je raconterai le Temple incendié malgré César, quels objets sacrés furent arrachés des flammes, la prise de la ville entière, les signes et les prodiges qui précédèrent cet événement ; la capture des tyrans, le grand nombre des captifs vendus à l'encan, les destinées si variées qu’ils rencontrèrent ; puis la manière dont les Romains étouffèrent les dernières convulsions de cette guerre et démolirent les remparts des forteresses, Titus parcourant toute la contrée pour l’organiser, enfin son départ pour l’Italie et son triomphe.
    12. [30] Tel est l’ensemble des événement que je compte raconter et embrasser dans sept livres. Je ne laisserai à ceux qui connaissent les faits et qui ont assisté à, la guerre aucun prétexte de blâme ou d'accusation, - je parle de ceux qui cherchent dans l'histoire la vérité, et non le plaisir. Et je commencerai mon récit par où j'ai commencé le sommaire[11] qu'on vient de lire.


    LIVRE IER
    I
    1. Dissensions entre nobles juifs. Antiochus Epiphane prend Jérusalem et interrompt le culte des sacrifices. - 2-3. Persécution religieuse. Soulèvement de Mattathias. - 4-6. Exploits et mort de Judas Macchabée.
    1[12]. [31] La discorde s'éleva parmi les notables juifs, dans le temps où Antiochus Épiphane disputait la Cœlé-Syrie  à Ptolémée, sixième du nom. C'était une querelle d'ambition et de pouvoir, aucun des personnages de marque ne pouvant souffrir d’être subordonné à ses égaux. Onias, un des grands-prêtres, prit le dessus et chassa de la ville les fils de Tobie : ceux-ci se réfugièrent auprès d’Antiochus et le supplièrent de les prendre pour guides et d'envahir la Judée. Le roi, qui depuis longtemps penchait vers ce dessein, se laisse persuader et, à la tête d'une forte armée, se met en marcheet prend d'assaut la ville[13] ; il y tue un grand nombre des partisans de Ptolémée, livre la ville sans restriction au pillage de ses soldats, et lui-même dépouille le Temple et interrompt durant trois ans et six mois la célébration solennelle des sacrifices quotidiens[14]. Quant au grand-prêtre Onias, réfugié auprès de Ptolémée, il reçut de ce prince un territoire dans le nome d'Héliopolis : là il bâtit une petite ville le plan de Jérusalem et un temple semblable au notre ; nous reparlerons de ces évènements en temps et lieu[15].
    2. [34] Antiochus ne se contenta pas d'avoir pris la ville contre toute espérance, pillé et massacré à plaisir ; entraîné par la violence de ses passions, par le souvenir des souffrances qu'il avait endurées pendant le siège, il contraignit les Juifs, au mépris de leurs lois nationales, à laisser leurs enfants incirconcis et à sacrifier des porcs sur l'autel. Tous désobéissaient à ces prescriptions, et les plus illustres furent égorgés. Bacchidès, qu’Antiochus avait envoyé comme gouverneur militaire[16], exagérait encore par cruauté naturelle les ordres impies du prince ; il ne s’interdit aucun excès d'illégalité, outrageant individuellement les citoyens notables et faisant voir chaque jour à la nation toute entière l'image d'une ville captive, jusqu'à ce qu'enfin l'excès même de ses crimes excitât ses victimes à oser se défendre.
    3[17]. [36] Un prêtre, Matthias[18], fils d'Asamonée, du bourg de Modéin, prit les armes avec sa propre famille, - il avait cinq fils - et tua Bacchidès[19] à coups de poignard ; puis aussitôt, craignant la multitude des garnisons ennemies,il s'enfuit dans la montagne[20]. Là beaucoup de gens du peuple se joignirent à lui ; il reprit confiance, redescendit dans la plaine, engagea le combat, et battit les généraux d'Antiochus, qu'il chassa de la Judée. Ce succès établit sa puissance ; reconnaissants de l'expulsion des étrangers, ses concitoyens l'élevèrent au principat ; il mourut en laissant le pouvoir a Judas, l'aîné de ses fils[21].
    4[22]. [38] Celui ci, présumant qu'Antiochus ne resterait pas en repos, recruta des troupes parmi ses compatriotes. Et, le premier de sa nation, fit alliance avec les Romains[23]. Quand Epiphane envahit de nouveau le territoire juif[24], il le repoussa en lui infligeant 1111 grave échec. Dans la chaleur de sa victoire, il s'élança ensuite contre la garnison de la ville qui n'avait pas encore été expulsée. Chassant les soldats étrangers de la ville haute, il les refoula dans la ville basse, dans celte partie de Jérusalem qu'on nommait Acra. Devenu maître du sanctuaire, il en purifia tout l'emplacement, l'entoura de murailles, fit fabriquer de nouveaux vases sacrés et les introduisit dans le temple, pour remplacer ceux qui avaient été souillés, éleva un autre autel et recommença les sacrifices expiatoires[25], Tandis que Jérusalem reprenait ainsi sa constitution sacrée, Antiochus mourut ; son fils Antiochus hérita de son royaume et de sa haine contre les Juifs[26].
    5[27]. [41] Ayant donc réuni cinquante mille fantassins, environ cinq mille cavaliers et quatre-vingts éléphants[28],il s'élance à travers la Judée vers les montagnes. Il prit la petite ville de Bethsoura[29], mais près du lieu appelé Bethzacharia, où l'on accède par un défilé étroit, Judas, avec toutes ses forces, s'opposa à sa marche. Avant même que les phalanges eussent pris contact, Éléazar, frère de Judas, apercevant un éléphant, plus haut que tous les autres, portant une vaste tour et une armure dorée, supposa qu'il était monté par Antiochus lui-même ; il s'élance bien loin devant ses compagnons, fend la presse des ennemis, parvient jusqu'à l'éléphant ; mais comme il ne pouvait atteindre, en raison de la hauteur, celui qu'il croyait être le roi, il frappa la bête sous le ventre, fit écrouler sur lui cette masse et mourut écrasé. Il n'avait réussi qu'à tenter une grande action et à sacrifier la vie à la gloire, car celui qui montait l'éléphant était un simple particulier ; eût-il été Antiochus, l'auteur de cette audacieuse prouesse n'y eût gagné que de paraître chercher la mort dans la seule espérance d'un brillant succès. Le frère d'Éléazar vit dans cet événement le présage de l'issue du combat tout entier. Les Juifs, en effet, combattirent avec courage et acharnement ; mais l'armée royale, supérieure en nombre et favorisée par la fortune, finit par l’emporter ; après avoir vu tomber un grand nombre des siens, Judas s'enfuit avec le reste dans la préfecture de Gophna[30], Quant à Antiochus, il se dirigea vers Jérusalem, y resta quelques jours, puis s'éloigna à, cause de la rareté des vivres, laissant dans la ville une garnison qu'il jugea suffisante, et emmenant le reste de ses troupes hiverner en Syrie.
    6[31]. [47] Après la retraite du roi, Judas ne resta pas inactif; rejoint par de nombreuses recrues de sa nation, il t'allia les soldats échappés à la défaite, et livra bataille près du bourg d'Adasa aux généraux d'Antiochus[32]. Il fit, dans le combat, des prodiges de valeur, tua un grand nombre d'ennemis, mais périt lui-même[33]. Peu de jours après, son frère Jean tomba dans une embuscade des partisans d'Antiochus et périt également[34].
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:12

    XXV
    1. Mémoires justificatifs d’Alexandre. Visite à son beau-père Archélaüs. – 2-5. Archélaüs innocente Alexandre, obtient la grâce de Phéroras et réconcilie tout le monde. – 6. Présents offerts à Archélaüs par Hérode.
    1[242]. [498] Alexandre. jugeant impossible de changer les sentiments de son père, résolut d'aller au-devant du péril. Il composa alors contre ses ennemis quatre mémoires où il avouait le complot, mais désignait pour ses complices la plupart d'entre eux, surtout Phéroras et Salomé ; celle-ci, disait-il, avait même pénétré une nuit chez lui et l'avait, contre son gré, forcé de partager sa couche. Hérode avait déjà entre les mains ces mémoires, terrible réquisitoire contre les plus grands personnages, quand Archélaüs arriva en toute hâte en Judée[243], craignant pour son gendre et sa fille. Il vint très habilement à leur aide et sut, par son artifice, détourner d'eux les menaces du roi. Dès qu'il fut en présence d'Hérode : « Où est, s'écria-t-il, mon scélérat de gendre ? Où pourrai-je voir cette tête parricide, afin de la trancher de mes propres mains ? Avec ce bel époux, j'immolerai [243a]aussi ma fille : si même elle n'a pas pris part au complot, il lui suffit d'avoir épousé un pareil homme pour être souillée. Je m'étonne de ta longanimité. On a comploté ta mort, et Alexandre vit encore ! Pour moi, je suis venu en hâte de Cappadoce, croyant trouver le coupable depuis longtemps châtié et seulement pour faire, de concert avec toi, une enquête au sujet de ma fille, que je lui ai fiancée en considération de ta grandeur. Maintenant, je le vois, c'est sur tous deux que nous devons délibérer ; si ton cœur de père le rend trop faible pour punir un fils perfide, mets ta main dans ma main et prenons la place l'un de l'autre pour assouvir notre colère sur nos enfants ».
    2. [502] Par ces protestations bruyantes, il gagna Hérode, bien que celui-ci fût sur ses gardes[244]. Hérode lui donna donc à lire les mémoires composés par Alexandre et, s'arrêtant après chaque chapitre, l'examinait avec lui. Archélaüs y trouva l'occasion de développer son stratagème et peu à peu retourna l'accusation contre ceux que le prince y avait dénoncés et particulièrement contre Phéroras. Quand il vît qu'il avait la confiance du roi :    « Prenons garde, dit-il, que tous ces méchants n'aient tramé un complot contre ce jeune homme et non ce jeune homme contre toi. Et en effet je ne vois pas pour quel motif il serait tombé dans un tel abîme de noirceur, - lui qui jouissait déjà des honneurs royaux, qui avait l'espoir de succéder au trône. - si certains personnages ne l'avaient séduit et n'avaient tourné vers le mal la facilité de son âge : de telles gens n'égarent pas seulement les jeunes hommes, mais encore des vieillards : ils renversent ainsi des maisons très illustres, des royaumes entiers ».
    3. [504] Hérode approuvait ces discours ; peu a peu, il se relâchait de son ressentiment contre Alexandre et s'animait contre Phéroras : car c'était lui le vrai sujet des quatre mémoires. Quand celui-ci eut observé la versatilité du roi et la place prépondérante qu'Archélaüs avait su prendre dans son affection, désespérant de se sauver par des moyens honnêtes, il chercha le salut dans l'impudence : il abandonna Alexandre et se plaça sous la protection d'Archélaüs. Le Cappadocien lui déclara qu'il ne voyait pas moyen de tirer d'affaire un homme chargé de si lourdes accusations, qui avait manifestement comploté contre le roi et causé tous les malheurs actuels du jeune prince, à moins qu'il ne voulût renoncer à sa scélératesse, à ses dénégations, confesser tous les méfaits qu'on lui reprochait et implorer le pardon d'un frère qui l'aimait ; dans ce cas, Archélaüs se disait prêt à l'assister de tout son pouvoir.
    4. [506] Phéroras se rend a cet avis ; il se compose l'attitude la plus pitoyable, et vêtu de noir, tout en pleurs, se jette aux pieds d'Hérode, comme il l'avait fait bien des fois, en demandant son pardon. Il confesse qu'il n'est qu'un misérable, avoue tout ce qu'on lui reproche ; mais il déplore cet égarement d'esprit, ce délire qui a pour cause son amour pour sa femme. Ayant ainsi déterminé Phéroras a devenir son propre accusateur et à témoigner contre lui-même, Archélaüs, à son tour, demanda grâce pour lui et chercha à calmer la fureur d'Hérode ; il recourait à des exemples personnels : lui aussi avait souffert encore bien pis de la part de son frère[245], mais il avait fait passer avant la vengeance les droits de la nature  car dans un royaume, comme dans un corps massif, il y a toujours quelque membre qui s’enflamme à cause de sa pesanteur ; et ce membre, il ne faut pas le retrancher, mais lui appliquer des remèdes plus bénins pour le guérir.
    5. [508] A force de pareils discours, il réussit à apaiser Hérode envers Phéroras ; lui-même affecta de rester indigné contre Alexandre, fit divorcer sa fille et déclara qu'il allait l'emmener ; par là, il sut amener Hérode a l'implorer lui même en faveur du jeune homme et à lui demander de nouveau la main de sa fille pour lui. Archélaüs, avec un grand accent de sincérité, répond qu'il lui remet sa fille pour l'unir à qui bon lui semble, sauf le seul Alexandre : car son plus cher désir est de maintenir les liens de parenté qui les unissent. Le roi repartit que ce serait vraiment lui rendre son fils que de consentir à ne pas rompre le mariage, d'autant qu'ils avaient déjà des enfants et que le prince aimait beaucoup sa femme ; si elle reste auprès de lui, elle lui inspirera le regret de ses fautes ; si on la lui arrache, on le plongera dans un désespoir prêt à tous les excès, car un caractère bouillant trouve un dérivatif dans les affections domestiques. Archélaüs se laissa fléchir à grand-peine, consentit à se réconcilier lui-même et réconcilia le père et le fils : il ajouta cependant qu'il fallait de toute nécessité envoyer Alexandre à Rome[246] pour causer avec César, car lui-même avait rendu compte de toute l'affaire à l'empereur.
    6. [511] Tel fut le dénouement du stratagème par lequel Archélaüs assura le salut de son gendre ; après le raccommodement, le temps se passa en festins et mutuels témoignages d'affection. A son départ, Hérode lui offrit pour présents 70 talents, un trône d'or enrichi de pierreries, des eunuques et une concubine, du nom de Pannychis ; il gratifia aussi ses amis, chacun selon son rang. De même, sur l'ordre du roi, tous les courtisans haut placés firent à Archélaüs des présents magnifiques. Hérode et les plus puissants personnages l'escortèrent jusqu'à Antioche.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:13

    XXVI
    1. Arrivée d’Euryclès à la cour d’Hérode ; ses flatteries. – 2. Il calomnie Alexandre auprès d’Hérode. – 3. Enquête dirigée contre les princes. – 4. Récompense et fin d’Euryclès. – 5. Conduite toute opposée d’Euarotos de Cos.
    1[247]. [513] Peu de temps après aborda en Judée un homme dont l'influence l'emporta de beaucoup sur les artifices d'Archélaüs, et qui non seulement ruina l'accommodement négocié par lui au profit d'Alexandre, mais décida la perte de ce prince. C'était un Lacédémonien, appelé Euryclès[248], que le désir immodéré du gain introduisit par malheur dans le royaume, car la Grèce ne suffisait pas à ses besoins de luxe. Il vint, apportant à Hérode de magnifiques présents, amorce de ceux qu'il espérait en retour ; en effet, il en reçut de beaucoup plus considérables, mais ce don pur et simple lui paraissait sans valeur, s'il ne trafiquait du royaume au prix du sang. Il circonvint donc le roi par ses flatteries, ses discours habiles et les éloges mensongers qu'il faisait de lui. Ayant vite percé à jour le caractère d'Hérode, il ne négligea aucune parole, aucune action pour lui plaire, et compta bientôt parmi ses principaux amis ; en effet, le roi et toute la cour prenaient plaisir à honorer particulièrement ce Spartiate, en considération de sa patrie.
    2. [516] Quand il connut la pourriture de la maison royale, les différends des frères, les sentiments de leur père à l'égard de chacun d'eux, Euryclès commença par s'attacher Antipater par les liens d’hospitalité, puis feignit l'amitié pour Alexandre[249], prétendant faussement être lié de vieille date avec Archélaüs. Aussi fut-il bientôt accueilli comme un ami éprouvé, et Alexandre le mit aussi en rapport avec son frère Aristobule. Prenant tour à tour tous les visages, il s'insinuait de façons diverses auprès de chacun : mais de préférence il se fit l'espion d'Antipater et le traître d'Alexandre. Au premier il faisait honte de négliger, lui l'aîné, les intrigues de ceux qui complotaient contre ses espérances, à Alexandre, de laisser, lui fils et époux d'une princesse royale, succéder au trône un fils de bourgeoise, alors surtout qu'il avait en Archélaüs un si solide appui. Le jeune prince, trompé par la liaison fictive d'Euryclès avec Archélaüs, croyait trouver en lui un conseiller digue de confiance. Aussi. sans rien déguiser, se plaignit-il à lui de la conduite d'Antipater ; d'ailleurs, disait-il, il n'était pas étonnant de voir Hérode, le meurtrier de leur mère, vouloir ravir, à son frère et à lui, la royauté qu'ils tenaient d'elle. Là-dessus. Euryclès feignit de s'apitoyer et de partager sa douleur. Ses ruses arrachèrent à Aristobule des confidences semblables. Quand il eut ainsi extorqué aux deux frères des doléances contre le roi, il les alla rapporter à Antipater ; il y ajouta l'invention d'un complot des deux frères contre Antipater : peu s'en fallait, à l'en croire, qu'ils n'eussent déjà le glaive tiré contre lui. Largement payé pour ces rapports, il s'empressa d'aller chanter la louange d'Antipater auprès de son père. Finalement, se chargeant de l'entreprise de faire mourir Aristobule et Alexandre, il vint les accuser auprès d'Hérode. Admis en sa présence, il déclara qu'il venait lui apporter la vie pour prix de ses bienfaits, la lumière du jour en échange de son hospitalité. « Depuis longtemps, dit-il, Alexandre aiguise son fer et tend son bras contre toi : moi seul ai retardé le coup en feignant de le favoriser. A en croire Alexandre, non content d'avoir régné sur un peuple auquel tu étais étranger, et, après le meurtre de leur mère, morcelé l'héritage de cette princesse, tu as désigné encore pour successeur un bâtard et livré[250] à ce fléau d'Antipater le royaume qu'ils tenaient de leurs aïeux. Il saura, ajoute-t-il, venger les mânes d'Hyrcan et de Mariamme, car il ne lui convient pas de recueillir l'héritage d’un tel père, sans effusion de sang. Chaque jour multiplie ses motifs d'irritation, puisqu'aucun propos sorti de sa bouche n'échappe à la calomnie. Fait-on mention d’une illustre naissance ? son père l'outrage sans raison en disant : « Voilà bien notre Alexandre lui, seul, se croit noble et méprise son père pour la bassesse de sa naissance ! » A la chasse, se tait-il ? on est choqué. Fait-il l'éloge de son père ? on veut y voir de l'ironie. Bref, en toute occasion, il trouve son père inflexible, réservant son affection au seul Antipater ; aussi mourra-t-il avec joie s'il échoue dans sa conjuration. S'il frappe, il trouvera des protecteurs puissants : d'abord son beau-père Archélaüs, auprès duquel il pourra se réfugier sans peine ; ensuite César, qui jusqu'à ce jour ignore le vrai caractère d'Hérode. On ne le verra pas, comme naguère, comparaître tout tremblant devant l'empereur, par crainte de son père présent à l'entretien, ni répondre seulement sur les crimes dont on l'accuse : il dénoncera hautement d'abord les malheurs du peuple, les impôts qui prennent tout aux pauvres gens jusqu'à la vie, puis la luxure et les crimes où se dissipe l'argent obtenu par le sang ; il dira quels hommes s'engraissent à nos dépens, quelles villes et à quel prix Hérode a comblées de ses faveurs. Là il appellera en témoignage son aïeul[251] et sa mère, il proclamera toutes les turpitudes du royaume et, cela faisant, on n'osera pas le condamner comme parricide ».
    3[252]. [526] Après avoir débité ces fables atroces contre Alexandre, Euryclès fit un magnifique éloge d'Antipater, qui seul aimait son père et, à ce titre, s'était opposé au complot jusqu'à ce jour. Le roi, mal remis de ses précédentes émotions, entra dans une colère implacable. Antipater, saisissant à son tour l'occasion, envoya contre ses frères d'autres accusateurs, qui affirmaient que les princes avaient de secrets entretiens avec Jucundus et Tyrannus, naguère hipparques[253] dans l'armée du roi, mais qui, à la suite de quelques fautes, avaient dû quitter leurs charges. Cette nouvelle porta à son comble l'indignation d'Hérode, et il fit aussitôt mettre ces deux hommes à la torture. Ils n'avouèrent aucun de leurs prétendus crimes[254], mais on produisit une lettre d'Alexandre adressée au gouverneur d'Alexandrion, l'invitant à les recevoir dans la place lui et son frère Aristobule, quand ils auraient tué leur père, et à les fournir d'armes et d'autres ressources. Alexandre déclara que c'était là un faux de Diophantos, secrétaire du roi, homme audacieux et habile à imiter tous les genres d'écriture ; convaincu de nombreuses falsifications, il finit par être mis à mort pour un crime de ce genre. Quant au gouverneur, à qui on appliqua la torture, Hérode n'obtint de lui aucun aveu sur les faits allégués.
    4[255]. [530] Malgré la faiblesse des preuves ainsi obtenues, Hérode plaça ses fils sous une surveillance, tout en les laissant encore libres ; quant à Euryclès, le fléau de sa maison, le machinateur de toutes ces infamies, le roi l'appela son sauveur, son bienfaiteur, et lui fit don de cinquante talents. Celui-ci, devançant les nouvelles exactes de ses exploits, courut alors en Cappadoce, où il extorqua encore de l'argent à Archélaüs, en osant lui raconter qu'il avait réconcilié Hérode avec Alexandre. De là, il partit pour la Grèce, où il employa l'argent mal acquis à des entreprises non moins mauvaises. Deux fois accusé devant César de troubler la province d'Achaïe et de dépouiller les villes, il dut s'exiler.
    5[256]. [532] C'est ainsi qu'Euryclès paya la peine de sa trahison envers Alexandre et Aristobule. Il n'est pas sans intérêt d'opposer à la conduite de ce Spartiate celle d'Euaratos de Cos. Ce personnage, venu, en Judée dans le même temps qu'Euryclès, comptait aussi parmi les plus chers amis d'Alexandre ; le roi l'ayant interrogé sur les accusations répandues par le Lacédémonien, il affirma sous serment qu'il n'avait rien entendu de pareil des jeunes princes. Cependant ce témoignage ne fut d'aucun secours aux infortunés, car Hérode ne prêtait une oreille facile qu'aux médisances et n'accordait sa faveur qu'à ceux qui partageaient sa crédulité et son indignation.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:13

    XXVII
    1. Dénonciation de Salomé. Les princes aux fers. Auguste donne carte blanche à Hérode. – 2-3. Tribunal de Césarée ; condamnation des princes. – 4-5. Affaires du soldat Tiron et du barbier Tryphon. – 6 Supplice des fils de Mariamme.
    1[257]. [534] Salomé vint encore exaspérer la férocité d'Hérode contre ses fils. Aristobule, dont elle était la belle-mère et la tante, voulant l'associer à leurs périls, lui manda avec insistance de veiller à son propre salut, car le roi, disait-il, méditait de la faire mourir, sous l'accusation déjà précédemment dirigée contre elle : on prétendait que, voulant épouser l'Arabe Sylléos, elle lui communiquait à la dérobée les secrets du roi, dont il était l'ennemi. Ce fut là le dernier coup de vent qui acheva de submerger les jeunes princes, battus par la tempête. Salomé courut chez le roi et lui dénonça l'avis qu'elle avait reçu. Alors Hérode, sa patience à bout, fit mettre aux fers ses deux fils, les isola l'un de l'autre et envoya en hâte auprès d'Auguste le tribun[258] Volumnius et Olympos, un de ses amis, porteurs d'un réquisitoire écrit contre les princes. Arrivés à Rome, ils remirent les lettres du roi à l'empereur ; celui-ci, vivement affligé du sort des jeunes gens, ne crut pas cependant devoir enlever au père ses droits sur ses fils. Il répondît donc à Hérode qu'il était le maître, que, cependant, il ferait bien d'examiner ce complot avec le conseil commun de ses propres parents et des administrateurs romains de la province : si les princes étaient convaincus de crime, ils méritaient la mort ; si leur seul dessein avait été de s'enfuir, une peine plus douce suffisait.
    2[259]. [538] Hérode se rendit à cet avis. Il se transporta à Beryte, lieu que César lui avait désigné, et il y réunit le tribunal. La cour était présidée par les officiers romains, auxquels César l'avait mandé par écrit, à savoir Saturninus[260] et ses légats, Pédanius[261] et autres ; y figuraient encore le procurateur Volumnius, les parents et amis de roi, puis Salomé et Phéroras, enfin les plus grands personnages de la Syrie à l'exception du roi Archélaüs[262] : car celui-ci était suspect à Hérode en qualité de beau-père d'Alexandre. Quant à ses fils, Hérode ne les fit pas comparaître : mesure très prudente, car il savait que leur seule vue inspirerait une compassion irrésistible, et que, s'ils obtenaient la parole, Alexandre n'aurait pas de peine à se justifier. Ils furent donc retenus sous bonne garde au bourg de Platané, dans le territoire de Sidon.
    3. [540] Le roi, ayant pris place, parla contre eux, comme s'ils eussent été présents : il développa faiblement l'accusation de complot, faute de preuves, mais il insista sur les outrages, les railleries, les insolences, les manquements innombrables et plus cruels que la mort commis à son égard, qu'il énuméra aux conseillers. Ensuite, personne ne contredisant, il fondit en gémissements, comme un homme qui se condamnait lui-même et qui remportait sur ses enfants une douloureuse victoire, puis il demanda l'avis de chacun. Saturninus opina le premier : il déclara qu'il condamnait les jeunes gens, mais non à la peine de mort ; père lui-même de trois enfants présents à la séance, il croirait commettre une impiété s'il votait la mort des fils d'un autre. Ses deux légats[263] votèrent dans le même sens, et quelques autres les suivirent. Ce fut Volumnius qui inaugura la sentence impitoyable : après lui, tous se prononcèrent pour la mort, les uns par flatterie, les autres par haine d'Hérode, aucun par indignation. Dès lors, toute la Syrie et la Judée furent dans des transes, attendant le dénouement du drame : nul cependant ne pensait qu'Hérode pousserait la barbarie jusqu'au meurtre de ses enfants. Lui, cependant, traîna ses fils jusqu'à Tyr, et, passant par mer à Césarée, chercha là de quelle façon il les exécuterait.
    4[264]. [544] Il y avait dans l'armée du roi un vieux soldat nommé Tiron, dont le fils était l'ami ultime d'Alexandre et qui lui-même avait les princes en particulière affection. Dans l'excès de son indignation, il perdit la raison. D'abord, courant çà et là, il s'écriait que le droit était foulé aux pieds, la vérité morte, la nature confondue, le monde rempli d'iniquité, et autres discours que la douleur suggérait à un homme indifférent a la vie. Enfin il se présenta devant le roi et lui tînt ce langage : « Maudit entre tous les hommes, toi qui, contre les êtres les plus chers, suis le conseil des plus méchants, s'il est vrai que Phéroras et Salomé, que tu as plus d'une fois condamnés à mort, trouvent crédit auprès de toi contre tes enfants. Ne vois-tu pas qu'ils t'enlèvent tes héritiers légitimes pour te laisser le seul Antipater, qu’ils se sont choisi pour roi, afin d'en tenir les ficelles ? Mais prends garde que la mort de ses frères ne soulève un jour contre lui la haine de l'armée ;  car il n'y a personne qui ne plaigne ces pauvres jeunes gens, et beaucoup de chefs font même éclater librement leur indignation ». Ce disant, Tiron nommait les mécontents. Là-dessus le roi les fit arrêter aussitôt, mais aussi Tiron et son fils.
    5[265]. [547] A ce moment, un des barbiers du roi, nommé Tryphon, saisi d'une sorte de frénésie, s'élança et se dénonça lui-même. « Et moi aussi, dit-il, ce Tiron a voulu me persuader, lorsque je ferais mon office auprès de toi, de te tuer avec mon rasoir, et il me promettait de grandes récompenses au nom d'Alexandre ». En entendant ces mots, Hérode ordonne de soumettre à la question Tiron, son fils et le barbier, et comme les premiers niaient tout et que le barbier n'ajoutait rien à son témoignage, il commanda de torturer Tiron plus sévèrement encore. Alors, pris de pitié, le fils offrit au roi de tout raconter s'il voulait épargner son père. Et comme Hérode lui octroya sa demande, il déclara qu'effectivement son père, à l'instigation d’Alexandre, avait voulu tuer le roi. Ce témoignage, selon les uns, n était qu'une invention destinée à faire cesser les souffrances du père ; d'autres y voyaient l'expression de la vérité.
    6. [550] Hérode réunit une assemblée publique, y accusa les officiers coupables ainsi que Tiron, et ameuta le peuple contre eux ; on les acheva sur la place même, avec le barbier, à coups de bâtons et de pierres. Il envoya ensuite ses fils à Sébasté, ville peu éloignée de Césarée, et ordonna de les y étrangler. L'ordre fut promptement exécuté ; puis il fit transporter les corps dans la forteresse d'Alexandréon pour y être ensevelis auprès de leur grand-père maternel Alexandre. Telle fut la fin d'Alexandre et d'Aristobule[266].
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:14

    XXVIII
    1. Impopularité et craintes d’Antipater. – 2-5. Hérode marie les enfants d’Aristobule et d’Alexandre, puis, sur les instances d’Antipater, modifie ces unions. – 6. Mariages de Salomé, de ses filles et des filles de Mariamme.
    1[267]. [552] La succession était alors assurée sans contestation à Antipater, mais il vit s'élever contre lui du sein du peuple une haine insurmontable, car tous savaient que c'était lui qui avait machiné toutes les calomnies dirigées contre ses frères. Il se sentait, en outre, envahi par une crainte démesurée quand il voyait grandir les enfants de ses victimes. Alexandre avait eu de Glaphyra deux fils, Tigrane et Alexandre ; et de l'union d'Aristobule avec Bérénice, fille de Salomé, étaient nés trois fils, Hérode, Agrippa et Aristobule, et deux filles, Hérodias et Mariamme. Le roi Hérode, dès qu'il eut fait mourir Alexandre, renvoya en Cappadoce Glaphyra avec sa dot ; quant à Bérénice, veuve d’Aristobule, il la donna en mariage à l'oncle maternel d’Antipater[268] ; c'est pour se concilier Salomé, qui lui était hostile, qu'Antipater arrangea ce mariage. Il gagna aussi Phéroras par des présents et d'autres attentions, et les amis de César en envoyant à Rome des sommes considérables. En particulier, tout l'entourage de Saturninus, en Syrie, fut comblé de ses libéralités. Cependant, plus il donnait, plus on le haïssait, car on sentait que ses largesses ne venaient pas de sa générosité, mais de la crainte. Ceux qui recevaient n'en étaient pas plus bienveillants, ceux qu'il négligeait devenaient des ennemis plus implacables. Cependant il accroissait encore l'éclat de ses distributions, en voyant le roi, au mépris de ses espérances, prendre soin des orphelins et témoigner ses remords du meurtre de ses fils par les marques de pitié qu'il prodiguait à leurs enfants.
    2. [556] Un jour, en effet, Hérode rassembla ses parents et amis[269], fit placer près de lui ces enfants, et, les yeux pleins de larmes, parla en ces termes : « Un démon jaloux m'a enlevé les pères de ceux que vous voyez, et cela, joint aux mouvements de la nature, m'apitoie sur leur état d'orphelins. Si j'ai été le plus infortuné des pères, j'essaierai du moins de me montrer un aïeul plus tendre, et je veux leur laisser pour guides, après moi, ceux qui me sont le plus chers. Je fiance donc ta fille[270], Phéroras, à l'aîné des deux fils d'Alexandre, afin que cette alliance fasse de toi son protecteur naturel ; et toi, Antipater, je donne à ton fils la fille d'Aristobule : puisses-tu devenir ainsi un père pour cette orpheline ! Quant à sa sœur, mon propre fils Hérode la prendra, car il est par sa mère petit-fils d'un grand-prêtre. Que mes volontés soient ainsi réglées, et que nul de mes amis n’y mette obstacle ! Je prie Dieu de bénir ces unions pour le plus grand bonheur de mon royaume et de mes descendants ; puisse-t-il regarder ces enfants d'un œil plus clément que leurs pères ! »
    3. [559] Ayant ainsi parlé, il pleura de nouveau et unit les mains des enfants, puis, les embrassant affectueusement l'un après l'autre, il congédia l'assemblée. Aussitôt Antipater frissonna et laissa voir à tous son émotion ; il pensait, en effet, que la sollicitude de son père pour les orphelins annonçait sa propre ruine et que ses droits à la couronne seraient en péril, si les fils d'Alexandre avaient pour soutien, outre Archélaüs, Phéroras, qui avait rang de tétrarque. Il considérait encore la haine du peuple pour lui-même, sa pitié pour les orphelins, le zèle que les Juifs avaient témoigné à ses frères vivants, le souvenir qu'ils leur gardaient maintenant qu'ils étaient morts sous ses coups : il résolut donc de briser à tout prix ces fiançailles.
    4. [561] Il n'essaya pas de circonvenir par la ruse un père difficile et prompt au soupçon  il osa se présenter devant lui et le supplia en face de ne pas lui ôter les honneurs dont il l'avait jugé digne, ni de lui laisser le titre de roi en déférant la puissance à d'autres ; car il ne serait plus le maître si le fils d'Alexandre pouvait s'appuyer, outre son grand-père Archélaüs, sur Phéroras, son beau-père. Il le conjura donc, puisqu'il avait dans son palais une nombreuse descendance, de modifier ces mariages. Le roi eut, en effet, neuf épouses[271], qui lui donnèrent sept enfants : Antipater lui-même était fils de Doris ; Hérode II de Mariamme (II), fille du grand-prêtre : Antipas et Archélaüs de Malthacé, la Samaritaine ; Olympias, fille de cette dernière avait épousé son neveu Joseph[272]. Il avait eu de Cléopâtre, native de Jérusalem, Hérode (III) et Philippe ; de Pallas, Phasaël. Il avait encore d'autres filles, Roxane et Salomé, liées, l'une de Phèdre, l'autre d’Elpis. Deux autres de ses femmes n'eurent pas d'enfants : l'une était sa cousine germaine, l'autre sa nièce[273]. Enfin, il lui restait deux filles de Mariamme (I)[274], sœurs d’Alexandre et d'Aristobule. Vu le grand nombre de ces enfants, Antipater demandait de changer l'ordre des mariages.
    5. [564] Le roi entra dans une vive indignation, quand il apprit les sentiments d'Antipater à l'égard des orphelins, et, songeant à ceux qu'il avait tués, un soupçon lui vint qu'eux aussi n'eussent été victimes des calomnies d'Antipater. A ce moment donc, il répondit longuement, avec colère, et chassa Antipater de sa présence ; ensuite, cependant, séduit par ses flatteries, il changea de sentiment et fit épouser à Antipater lui-même la fille d'Aristobule, tandis qu'il unissait à la fille de Phéroras le fils d'Antipater.
    6. [566] Rien ne montre mieux l'empire des flatteries d'Antipater en cette occasion, que l'insuccès de Salomé dans des circonstances toutes semblables. Bien qu'elle fût la sœur d'Hérode et recourût à l'intercession de l'impératrice Livie pour supplier le roi de lui laisser épouser l'Arabe Sylléos[275], Hérode jura qu'il la tiendrait pour sa plus cruelle ennemie, si elle ne renonçait à cette passion ; enfin, il la maria malgré elle à un de ses amis, nommé Alexas, et unit l'une des filles de Salomé[276] au fils d'Alexas, l'autre[277] à l'oncle maternel d'Antipater. Quant aux filles de Mariamme, l'une[278] épousa Antipater, fils de la sœur d'Hérode, l'autre[279] Phasaël, fils de son frère.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:14

    XXIX
    1. Intrigues d’Antipater et de la femme de Phéroras. – 2. Phéroras refuse de divorcer. Antipater se fait envoyer à Rome.- 3. Intrigues de Sylléos ; découverte du complot de Corinthos. 4. Exil et mort de Phéroras.
    1[280]. [567] Lorsqu'Antipater eut anéanti les espérances des orphelins et réglé les mariages à sa convenance, il crut pouvoir se reposer sur la certitude de ses propres chances, et, joignant désormais la présomption à la méchanceté, se rendit insupportable. Impuissant à détourner la haine qu'il inspirait à chacun, c'est par la terreur qu'il voulut pourvoir à sa sûreté ; il trouva un auxiliaire dans Phéroras, qui considérait déjà sa royauté comme assurée. Il se produisit aussi à la cour une conjuration de femmes, qui suscita de nouveaux troubles. L'épouse de Phéroras, coalisée avec sa mère, sa sœur et la mère d'Antipater, se livra dans le palais à mille insolences et osa même insulter deux jeunes filles du roi[281] ; pour ces motifs, Hérode la poursuivit âprement de sa haine ; mais, haïes du roi, ces femmes n'en dominaient pas moins les autres. Seule, Salomé s'opposa résolument à cette ligue et la dénonça au roi comme une association contraire à ses intérêts. Quand les femmes apprirent cette dénonciation et la colère d'Hérode, elles cessèrent de se réunir ouvertement et de se montrer une affection mutuelle : au contraire, elles feignirent une inimitié réciproque dès que le roi pouvait les entendre ; Antipater jouait la même comédie, querellant ostensiblement Phéroras. Mais elles continuèrent à tenir des conciliabules secrets et des festins nocturnes, et la surveillance dont elles étaient l'objet resserrait leur accord. Cependant Salomé n'ignorait aucun détail de cette conduite et rapportait tout à Hérode.
    2. [571] Le roi s'enflammait de colère, surtout contre la femme de Phéroras, objet principal des accusations de Salomé. Il convoqua donc une réunion de ses amis et parents et accusa cette créature d'une foule de méfaits, entre autres d'avoir insulté les filles du roi, fourni des subsides aux Pharisiens contre lui[282], aliéné son frère en l'ensorcelant par un breuvage. Comme conclusion, il interpella Phéroras, l'invitant à choisir entre deux partis : son frère ou sa femme. Phéroras répondit qu'il renoncerait plutôt à la vie qu'à sa femme. Hérode, ne sachant que faire, se retourna vers Antipater et lui défendit d'avoir désormais aucun commerce avec la femme de Phéroras, ni avec Phéroras lui-même, ni avec personne de leur coterie. Antipater se conforma ostensiblement à cet ordre, mais en secret et de nuit il continua à voir cette société. Craignant toutefois l'espionnage de Salomé, il prépara, de concert avec ses amis d'Italie, un voyage à Rome. Ceux-ci écrivirent au roi qu'il fallait bientôt envoyer Antipater auprès de César : Hérode le fit partir incontinent avec une suite brillante, lui confiant une somme d'argent considérable et un testament où le roi déclarait Antipater son successeur et lui donnait comme successeur à lui-même Hérode, né de Mariamme, fille du grand-prêtre[283].
    3. [574] Sylléos l'Arabe partit aussi pour Rome, afin de se justifier d'avoir enfreint les ordres d'Auguste et de recommencer contre Antipater la plaidoirie qu'il avait naguère soutenue contre Nicolas[284]. Il avait aussi une grave contestation avec Arétas, son propre souverain, car il avait mis à mort nombre d'amis de ce prince, et, entre autres, Sohémos, un des plus puissants personnages de Pétra[285]. Il sut gagner à gros prix Fabatus, intendant de César[286], et trouva en lui un auxiliaire, même contre Hérode. Cependant Hérode fit à Fabatus des dons encore plus considérables, le détacha ainsi de Sylléos et, par son ministère, tâcha de faire rentrer l'amende infligée à Sylléos par Auguste. Mais Sylléos ne voulut rien payer : bien plus, il accusa Fabatus devant César, disant que cet intendant prenait, non pas les intérêts de l'empereur, mais ceux d'Hérode. Fabatus, indigné de ce procédé et d'ailleurs toujours comblé d'honneurs par Hérode, trahit les secrets de Sylléos et révéla au roi que celui-ci avait corrompu à prix d'argent Corinthos, un de ses gardes du corps, et qu'il devait se méfier de cet homme ; le roi suivit ce conseil, sachant que ce Corinthos, quoique élevé dans le royaume, était Arabe de naissance. Il le fit arrêter aussitôt et avec lui deux autres Arabes qu'il avait trouvés à ses côtés, l'un ami de Sylléos, l'autre chef de tribu. Mis à la torture, ces hommes avouèrent que Corinthos les avait engagés, par de fortes sommes, à tuer Hérode. Ils furent examinés encore par Saturninus, gouverneur de Syrie, et envoyés à Rome.
    4. [578] En attendant, Hérode ne cessait de vouloir contraindre Phéroras à se séparer de son épouse ; il ne trouvait pas moyen de punir cette créature, contre laquelle il avait tant de sujets de haine, jusqu'à ce qu'enfin, dans l'excès de sa colère, il la chassa de la cour en même temps que son propre frère. Phéroras, acceptant patiemment cette avanie, se retira dans sa tétrarchie, jurant que le seul terme de son exil serait la mort d'Hérode et que jamais, du vivant de celui-ci, il ne retournerait auprès de lui. Effectivement, il ne revint jamais voir son frère, même pendant sa maladie et malgré ses continuels messages ; car Hérode, se sentant mourir, voulait lui laisser quelques instructions. Cependant le roi guérit contre tout espoir, et, peu après, Phéroras tombait malade. Hérode, moins entêté que son frère, vint le trouver et lui prodigua des soins affectueux. Mais il ne put triompher du mal, et Phéroras mourut au bout de quelques jours. Malgré l'affection qu'Hérode eut pour lui jusqu'à la fin, le bruit se répandit qu'il l'avait, lui aussi, empoisonné. Il fit transporter le corps à Jérusalem, ordonna un grand deuil à tout le peuple et l'honora des funérailles les plus pompeuses[287].
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:15

    XXX
    1. Hérode découvre que Phéroras a été empoisonné par Sylléos. – 2-3. Révélations des femmes de Phéroras touchant Antipater. – 4. Doris répudiée. 5-7. Découverte d’un complot formé par Antipater et Phéroras pour empoisonner Hérode.
    1[288]. [582] Telle fut la fin d'un des meurtriers d'Alexandre et d'Aristobule. Bientôt l'auteur principal de ce crime, Antipater, tomba à son tour, par une conséquence lointaine de la mort de Phéroras. Quelques-uns des affranchis de Phéroras allèrent, les yeux bas, trouver le roi et lui dirent que son frère était mort empoisonné ; sa femme lui avait offert un mets peu ordinaire, et, aussitôt après l'avoir mangé, il était tombé malade. Or, deux jours auparavant, la mère et la sœur de sa femme avaient amené une femme d'Arabie, experte en poisons, pour préparer un philtre d'amour à Phéroras, au lieu de quoi elle lui avait donné un breuvage de mort, à l'instigation de Sylléos[289], qui la connaissait.
    2. [584] Aussitôt, assailli de nombreux soupçons, le roi fit mettre à la torture les servantes et quelques femmes libres. Une de ces dernières s'écria au milieu des douleurs : « Puisse le Dieu qui gouverne la terre et le ciel frapper l'auteur de ces maux que nous souffrons, la mère d'Antipater ! » Hérode, s'attachant à cet indice, poussa plus loin la recherche de la vérité. La femme dévoila alors l'amitié de la mère d'Antipater pour Phéroras et les dames de sa famille, leurs rencontres clandestines : elle dit que Phéroras et Antipater passaient des nuits à boire avec elles, après avoir quitté le roi, sans laisser aucun serviteur ni servante assister à ces réunions.
    3. [586] Telles furent les révélations d'une des femmes libres. D'autre part Hérode fit torturer séparément toutes ces esclaves. Tous leurs témoignages se trouvèrent concorder avec le précédent ; elles ajoutèrent que c'était par suite d'un accord qu'Antipater et Phéroras s'étaient retirés l'un à Rome, l'autre dans la Pérée, car l'un et l'autre se disaient souvent qu'Hérode, après avoir frappé Alexandre et Aristobule, s'attaquerait à eux et à leurs femme ; qu'ayant immolé Mariamme et ses enfants, il n'épargnerait personne, et qu'il valait donc mieux fuir le plus loin possible de cette bête féroce. Antipater, disaient-elles encore, se plaignait souvent à sa mère d'avoir déjà des cheveux gris, tandis que son père rajeunissait tous les jours ; il précéderait peut-être Hérode dans la tombe avant d'avoir vraiment régné. Si même Hérode se décidait à mourir - et quand cela serait-il ? - il ne jouirait que très peu de temps de son héritage. Car ne voyait-on pas croître les têtes de l'hydre, les fils d’Aristobule et d'Alexandre ? Son père ne lui avait-il pas ravi même l'espérance qu'il avait fondée sur ses enfants ? Ne lui avait-il pas assigné pour héritier, non pas un de ses propres fils, mais Hérode, le fils de Mariamme (II) ? En cela, le roi faisait d'ailleurs preuve de sénilité s'il pensait que ses dispositions testamentaires seraient maintenues ; car lui-même prendrait soin de ne laisser en vie aucun de ses enfants. Ce père, le plus dénaturé qui fut jamais, haïssait encore plus son frère que ses enfants. L'autre jour encore, il avait donné à Antipater cent talents pour ne plus s'entretenir avec Phéroras : « Quelle offense, dit alors Phéroras, lui avons-nous donc faite ? »   Et Antipater : « Plût au ciel qu'il nous dépouillât de tout et nous laissât la vie toute nue ! mais il est difficile d'échapper à une bête aussi altérée de sang, qui ne vous laisse même pas aimer ouvertement quelques amis. Voyons-nous donc maintenant en secret : nous pourrons le faire ouvertement le jour où nous aurons le courage et le bras d'un homme ».
    4. [590] A ces révélations les femmes torturées ajoutaient que Phéroras avait songé à fuir avec elles à Pétra. Hérode ajouta foi à tous ces témoignages, à cause du détail des cent talents ; car il n'en avait parlé qu'au seul Antipater. Sa colère se déchaîna d'abord sur Doris, mère d'Antipater ; après l'avoir dépouillée de toutes les parures qu'il lui avait données et qui valaient beaucoup de talents, il la répudia pour la seconde fois. Quant aux femmes de Phéroras, une fois torturées, il se réconcilia avec elles et leur prodigua ses soins. Mais tremblant de frayeur et s'enflammant au moindre soupçon, il faisait traîner à la question nombre d'innocents, dans sa crainte que quelque coupable ne lui échappât.
    5. [592] Ensuite, il se tourna contre Antipater de Samarie, qui était intendant de son fils Antipater. En lui infligeant la torture, il apprit qu'Antipater avait fait venir d'Égypte, pour tuer le roi, un poison mortel, par l'entremise d'Antiphilos, un de ses compagnons ; que Theudion, oncle maternel d'Antipater, l'avait reçu de cet homme et transmis à Phéroras ; qu'Antipater avait, en effet, prescrit à Phéroras de tuer Hérode, pendant que lui-même serait a Rome, protégé contre tout soupçon ; qu'enfin Phéroras avait remis le poison aux mains de sa femme. Le roi envoya chercher cette femme et lui commanda d'apporter sur-le-champ ce qu'on lui avait confié. Elle sortit comme pour le chercher, mais se précipita du haut du toit pour échapper à la preuve de son crime et aux outrages du roi ; cependant la Providence, ce semble, qui poursuivait Antipater, la fit tomber non sur la tête. mais sur le dos, et la sauva. Transportée près du roi, celui-ci lui fit reprendre ses sens, car la chute l'avait fait évanouir  puis il lui demanda pourquoi elle s'était jetée du toit ; il déclara avec serment que, si elle disait la vérité, il lui épargnerait tout châtiment, mais que, si elle dissimulait, il déchirerait son corps dans les tourments et n'en laisserait même rien pour la sépulture.
    6. [595] La femme garda un instant le silence, puis s'écria : « Après tout, pourquoi respecterais-je encore ces secrets, maintenant que Phéroras est mort ? pourquoi sauverais-je Antipater, l'auteur de notre perte à tous ? Ecoute-moi, ô roi ; qu'il m'entende aussi, Dieu, témoin de la vérité de mes paroles, juge infaillible ! Quand tu étais assis en pleurant auprès de Phéroras mourant, il m'appela pour me dire : « Femme je me suis trompé sur les sentiments de mon frère à mon égard ; je l'ai haï, lui qui m'aimait tant; j'ai comploté de tuer celui qui se montre si bouleversé de chagrin avant même ma mort. Pour moi, je reçois le prix de mon impiété ; quant à toi, apporte-moi le poison que tu gardes pour lui et qu'Antipater nous a laissé, détruis-le promptement sous mes yeux, pour que je n'aille pas me nourrir aux enfers [289a] mêmes un démon vengeur ». J'apportai le poison, comme il l'ordonnait ; sous ses yeux, j'en jetai au feu la plus grande partie ; je n'en ai gardé pour moi qu'une petite dose contre les incertitudes de l'avenir et la crainte que tu m'inspirais ».
    7. [598] Après avoir fait cette déclaration elle apporta la boite qui ne renfermait qu'un petit reste de poison. Le roi fit alors mettre à la question la mère et le frère d'Antiphilos ; ceux-ci avouèrent qu'Antiphilos avait apporté d'Égypte cette boite et qu'il tenait le poison d'un de ses frères, médecin à Alexandrie.
    Ainsi les mânes d’Alexandre et d'Aristobule[290] se promenaient à travers tout le palais, recherchant et dévoilant tous les mystères, et traînant devant le juge ceux mêmes qui paraissaient le plus à l'abri du soupçon. C'est ainsi qu'on découvrit aussi que Mariamme, la fille du grand-prêtre, avait été partie au complot ; ses frères, mis à la torture, la dénoncèrent. Le roi punit sur le fils l'audace de la mère : Hérode, qu'il avait donné pour successeur à Antipater, fut rayé de son testament.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:15

    XXXI
    1-2. Perfidie d’Antipater dénoncée par son affranchi Bathyllos. – 3-5. Retour et accueil d’Antipater.
    1[291]. [601] Le dernier anneau dans la chaîne des preuves du complot d'Antipater fut apporté par son affranchi Bathyllos. Ce personnage arriva avec un second poison, composé de venin d'aspic et des sécrétions d'autres serpents, dont Phéroras et sa femme devaient s'armer contre le roi, si le premier manquait son effet. Par un surcroît de perfidie contre Hérode, Antipater avait remis à cet homme des lettres astucieusement rédigées contre ses frères, Archélaüs et Philippe. Ces fils du roi, qu'il faisait élever à Rome, étaient déjà des adolescents pleins de hautes pensées. Antipater, qui voyait en eux un obstacle à ses espérances, chercha à s'en défaire au plus vite ; il forgea donc contre eux des lettres au nom de ses amis de Rome et détermina, contre espèces sonnantes, d'autres personnes à écrire que ces jeunes princes déblatéraient contre leur père, déploraient publiquement le sort d'Alexandre et d'Aristobule et s'irritaient de leur propre rappel ; car leur père les avait mandés auprès de lui, et c'était là ce qui inquiétait le plus Antipater.
    2. [604] Avant même son départ pour Rome, Antipater, étant encore en Judée, avait fait envoyer de Rome, à prix d'or, des lettres de ce genre contre ses frères ; puis il était allé trouver son père, qui n'avait encore nul soupçon contre lui, et avait plaidé la cause de ses frères, alléguant que telle chose était fausse, telle autre imputable à leur jeunesse. Pendant son séjour à Rome, comme il avait dû payer très grassement ceux qui écrivaient contre ses frères, il se préoccupa de dépister les recherches qu'on pourrait en faire. A cet effet, il acheta de riches vêtements, des tapis variés, de la vaisselle d'argent et d'or et beaucoup d'autres objets précieux, afin de pouvoir dissimuler, dans l'énorme total de ces dépenses, le salaire payé pour l'autre affaire. Il consigna une dépense totale de deux cents talents, dont le plus fort était mis au compte de son procès avec Sylléos. Toutes ces fourberies, même les moindres, furent alors découvertes en même temps que son grand forfait. Cependant, au moment même où toutes les tortures criaient son complot contre son père, où les lettres en question révélaient un nouveau projet de fratricide, aucun de ceux qui arrivaient à Rome ne lui apprit le drame qui se jouait en Judée ; et pourtant il s'écoula sept mois entre la preuve de son crime et son retour. Tant était forte la haine que tous lui portaient ! Peut-être y en eut-il qui avaient l'intention de lui apprendre ces nouvelles, mais les mânes de ses frères, tués par lui, leur fermèrent la bouche. Il écrivit donc de Rome, annonçant avec joie son prochain départ et les honneurs que César lui faisait en le congédiant.
    3. [608] Le roi, impatient de mettre la main sur le traître et craignant qu'Antipater, averti à temps, ne prît ses sûretés, lui écrivit, pour le tromper, une lettre pleine d'une feinte bienveillance, où il l'exhortait à hâter son retour. S'il faisait diligence, disait Hérode, il pourrait faire oublier les griefs qu'on avait contre sa mère, car Antipater n'ignorait pas que celle-ci eût été répudiée.
    Précédemment Antipater avait reçu à Tarente la lettre lui annonçant la mort de Phéroras, il avait donné de très grandes marques de deuil. Plusieurs lui en faisaient un mérite, l'attribuant à la perte d'un oncle, mais son émotion, à ce qu’il semble, se rapportait à l'échec de son complot : il pleurait en Phéroras non l'oncle, mais le complice. Puis la peur le prenait au souvenir de ses machinations : le poison pouvait être découvert. Il reçut en Cilicie le message de son père dont nous venons de parler et hâta aussitôt son voyage. Cependant, en débarquant à Celenderis[292], la pensée lui vint de la disgrâce de sa mère, et son âme eut une vision prophétique de sa propre destinée. Les plus prévoyants de ses amis lui conseillèrent de ne pas aller retrouver son père avant de savoir clairement les raisons pour lesquelles Hérode avait chassé sa mère : ils appréhendaient que les calomnies répandues contre elle n'eussent quelque autre conséquence. Mais les imprudents, plus impatients de revoir leur patrie que de servir les intérêts d'Antipater, l'exhortèrent à faire diligence, tout retard pouvant donner à son père de fâcheux soupçons, à ses calomniateurs un prétexte favorable ; « même si quelque intrigue s'est tramée maintenant contre lui, c'est en raison de son absence ; lui présent, on n'aurait pas osé. Et puis il est insensé de sacrifier des biens certains à de vagues soupçons, de ne pas courir se jeter dans les bras d'un père pour recueillir un royaume dont il supporte seul malaisément le poids ». Persuadé par ces discours ou plutôt poussé par sa destinée, Antipater continua sa route et débarqua au port d'Auguste, à Césarée.
    4. [614] Là, contre son attente, il trouva une profonde solitude ; tous se détournaient, nul n'osait l'aborder, c'est qu'en effet, il était également haï de tous, et que la haine trouvait maintenant la liberté de se montrer. De plus, la crainte du roi intimidait grand nombre de gens, toutes les villes étaient remplies de rumeurs annonçant une disgrâce qu'Antipater était seul a ignorer : nul n'avait obtenu compagnie plus brillante que la sienne à son départ pour Rome, nul ne rencontra jamais accueil plus glacial que celui qui reçut son retour. Cependant Antipater, devinant les tragédies qui s'étaient déroulées au palais, dissimulait encore par une habileté scélérate. Mourant de crainte au fond du cœur, il sut se faire un front d'airain. D'ailleurs, il n'y avait plus moyen de fuir, d'échapper aux dangers qui l'entouraient. Même alors, il ne reçut aucune nouvelle certaine de ce qui se passait au palais, tant les menaces du roi jetaient l'épouvante ; et il gardait encore un rayon d'espoir : peut-être n'avait-on rien découvert; peut-être, si l'on avait découvert quelque chose, saurait-il à, force d'impudence et de l'uses, ses seuls moyens de salut, dissiper l'orage.
    5. [617] Ainsi armé, il se rendit au palais, sans ses amis, car on les avait injuriés et écartés dès la première porte. A l'intérieur se trouvait Varus, gouverneur de Syrie[293], Antipater entra chez son père et, payant d'audace, s'approcha de lui pour l'embrasser. Mais le roi, tendant les bras pour l'écarter et détournant la tête : « Voilà bien, s'écria-t-il, la marque d'un parricide, de vouloir m'embrasser, quand il est sous le coup de pareilles accusations. Sois maudite, tête sacrilège ; n'ose pas me toucher avant de t'être disculpé. Je t'accorde un tribunal et, pour juge, Varus, qui vient ici fort à propos. Va, et prépare ta défense jusqu'à demain ; je laisse ce délai à tes artifices ». Le prince, stupéfait, se retira sans pouvoir rien répondre, puis sa mère et sa femme[294] vinrent le trouver et lui rapportèrent en détail toutes les preuves rassemblées contre lui. Alors il se recueillit et prépara sa défense.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:15

    XXXII
    1-4. Mise en jugement d’Antipater : discours d’Hérode, d’Antipater et de Nicolas. – 5. Issue du procès. – 6. Découverte du faux Antipater contre Salomé. – 7. Maladie et nouveau testament d’Hérode en faveur d’Antipater.
    1[295]. [620] Le lendemain, Hérode réunit le Conseil de ses parents et amis ; il y convoqua également les amis d'Antipater. Lui-même présidait avec Varus ; il fit introduire tous les dénonciateurs, parmi lesquels se trouvaient quelques serviteurs de la mère d'Antipater, récemment arrêtés, porteurs d'une lettre de Doris à son fils, rédigée en ces termes : « Puisque ton père a tout découvert, ne te présente pas devant lui, si tu n'as obtenu quelques troupes de l'empereur ». Quand ceux-ci et les autres eurent été introduits, Antipater entra et tomba prosterné aux pieds de son père : « Mon père, dit-il, je te supplie de ne pas me condamner d'avance, mais d'accorder à ma défense une oreille sans prévention, car je saurai démontrer mon innocence, si tu le permets ».
    2. [622] Hérode lui hurla de se taire et dit à Varus : « Je suis persuadé, Varus, que toi, et tout juge intègre, vous condamnerez Antipater comme un scélérat. Mais je crains que ma destinée ne vous semble aussi digne de haine et que vous ne me jugiez digne de tous les malheurs pour avoir engendré de tels fils. Plaignez-moi plutôt d'avoir été un père tendre envers de pareils misérables. Ceux que précédemment j'avais tout jeunes désignés pour le trône, que j'avais fait élever a grands frais à Rome, introduits dans l'amitié de César, rendus pour les autres rois un objet d'envie, j'ai trouvé en eux des traîtres. Leur mort a surtout servi les intérêts d'Antipater : il était jeune, il était mon héritier, et en les supprimant c'est surtout à sa sécurité que je veillais. C'est alors que ce monstre impur, gorgé des bienfaits de mon indulgence, a tourné contre moi sa satiété ; il lui a paru que je vivais bien longtemps, ma vieillesse lui pesait, il n'a pu supporter l'idée de devenir roi autrement qu'à la faveur d'un parricide. C'est ainsi qu'il me récompensait de l'avoir rappelé de la campagne où il était relégué, d'avoir écarté les fils nés d'une reine, pour l'appeler à ma succession ! Je confesse, Varus, ma propre démence. Ces fils, je les ai excités contre moi en retranchant, dans l'intérêt d'Antipater, leurs justes espérances. Quand leur ai-je jamais fait autant de bien qu'à celui-ci ? De mon vivant, je lui ai presque cédé le pouvoir ; je l'ai, dans mon testament rendu public, désigné pour héritier de mon sceptre, je lui ai assigné un revenu particulier de cinquante talents[296], sans compter d'infinies largesses sur mes propres biens ; tout récemment, quand il est parti pour Rome, je lui ai donné trois cents talents et l'ai même recommandé à César, seul de tous mes enfants, comme le sauveur de son père. Et quel crime les autres ont-ils commis comparable à celui d'Antipater ? Quelle preuve fut portée contre eux aussi décisive que celle qui établit sa trahison ? Pourtant le parricide ose parler, il espère, une fois de plus, étouffer la vérité sous ses mensonges ! Varus, c'est à toi de le garder, car moi, je connais le monstre, je devine ses discours spécieux, ses gémissements simulés c'est lui qui me conseilla jadis, du vivant d'Alexandre, de prendre mes sûretés contre lui et de ne pas confier ma vie à tout te monde ; c'est lui qui m'accompagnait jusqu’à ma couche, regardant partout s'il n'y avait pas un assassin caché ; c'est lui qui m'octroyait mon sommeil, assurait ma tranquillité, me consolait du chagrin que m'inspiraient mes victimes, sondait les sentiments de ses frères survivants ; le voilà mon bouclier, mon garde du corps ! Quand je me rappelle, Varus, dans chaque circonstance, sa fourberie et son hypocrisie, je doute de ma propre existence et m'étonne d'avoir pu échapper à un traître aussi profond. Mais puisqu'un mauvais génie s’acharne à vider mon palais et dresse l'un après l'autre contre moi les êtres qui me sont le plus chers, je pleurerai sur mon injuste destinée, je gémirai en moi-même sur ma solitude, mais je ne laisserai échapper au châtiment aucun de ceux qui ont soif de mon sang, quand bien même tous mes enfants devraient y passer. »
    3. [629] A ces mots, l'émotion lui coupa la voix : il ordonna à Nicolas, un de ses amis, d'exposer les charges. Alors Antipater, qui jusque-là était resté prosterné aux pieds de son père, releva la tête et s'écria : « C'est toi-même, mon père, qui viens de présenter ma défense. Comment serais-je parricide, moi qui, de ton aveu, t'ai toujours servi de gardien ? Tu appelles artifice et feinte ma piété filiale. Comment donc moi, si rusé en toute occasion, aurais-je été assez insensé pour ne pas comprendre qu'il était difficile de dissimuler aux hommes mêmes la préparation d'un pareil forfait et impossible de le cacher au Juge céleste, qui voit tout, qui est présent partout ? Est-ce que, par hasard, j'ignorais la fin de mes frères, que Dieu a si durement punis de leur perfidie envers toi ? Et puis, quel motif aurait pu m'exciter contre toi ? L'espérance de régner ? mais j'étais roi ! Le soupçon de ta haine ? mais n'étais-je pas chéri ? Avais-je quelque autre raison de craindre ? mais, en veillant à ta sûreté, j'étais un objet de crainte pour autrui. Le besoin d'argent ? mais qui donc avait ses dépenses plus largement pourvues ? En admettant que je fusse né le plus scélérat de tous les hommes et que j'eusse l'âme d'une bête féroce, n'aurais-je pas été, mon père apprivoisé par tes bienfaits ? car, comme tu l'as dit toi-même, tu m'as rappelé de l'exil, tu m'as préféré à un si grand nombre de fils ; de ton vivant tu m'as proclamé roi, en me comblant de tous les biens tu m'as rendu un objet d'envie ! O le funeste voyage, cause de mon malheur ! c'est lui qui a laissé le champ libre à la haine et une longue avance aux complots. Mais ce voyage, je l'ai entrepris dans ton intérêt, mon père, pour soutenir ton procès et empêcher Sylléos de mépriser ta vieillesse. Rome m'est témoin de ma piété filiale, et aussi César, le patron de l'univers, qui m'appelait souvent « Philopator ». Prends, mon père, cette lettre de lui. Elle mérite plus de créance que les calomnies qu'on répand ici : qu'elle soit ma seule défense ; voilà la preuve de mon amour pour toi. Souviens-toi que je ne suis pas parti pour Rome de plein gré ; je savais quelle hostilité cachée me guettait dans ce royaume. Et toi, mon père, tu m'as perdu, malgré toi, en m'obligeant à laisser ainsi le champ libre à la haine et à la calomnie. Me voici enfin présent pour réfuter mes accusateurs : me voici, moi, le prétendu parricide, qui ai traversé les terres et les mers sans éprouver aucun dommage. Pourtant, cet indice même d'innocence ne m’a pas servi : Dieu m'a condamné, et toi aussi, mon père. Mais, quoique condamné, je te prie de ne pas t’en rapporter aux aveux arrachés par la torture à d'autres. Apportez contre moi le feu ! Fouillez mes entrailles avec le fer ! N'avez aucune pitié de ce corps impur ! Car si je suis parricide, je ne dois pas mourir sans avoir été torturé ». Ces exclamations, mêlées de gémissements et de larmes, excitaient la pitié de tous et notamment de Varus : seul Hérode restait les yeux secs, dominé par sa colère, et surtout parce qu'il savait que les preuves étaient authentiques[297].
    4. [637] Là-dessus Nicolas, comme l'avait ordonné le roi, prit la parole. Il parla d’abord longuement de la fourberie d'Antipater et dissipa les impressions de pitié que celui-ci avait fait naître ; puis il développa un âpre réquisitoire, attribuant à Antipater tous les méfaits commis dans le royaume, en particulier le supplice de ses frères, dont il montra la cause dans les calomnies d’Antipater. Il ajouta que celui-ci ourdissait la perte de ceux qui restaient, les soupçonnant de guetter la succession : et pourquoi celui qui avait préparé le poison pour son père aurait-il épargné ses frères ? Arrivant ensuite aux preuves de l'empoisonnement, il exposa successivement tous les témoignages : il s'indigna qu'Antipater eût fait d'un homme tel que Phéroras un fratricide ; il montra l'accusé corrompant les plus chers amis du roi, remplissant tout le palais de scélératesse. Après avoir ajouté nombre d'autres griefs et arguments, il mit fin à sa harangue.
    5. [639] Varus ordonna à Antipater de présenter sa défense. Le prince se borna à dire que Dieu était témoin de son innocence et resta étendu, sans parler. Alors le gouverneur demanda le poison et en fit boire à un prisonnier, condamné à mort, qui rendit l'âme sur le champ. Après quoi, Varus s'entretint secrètement avec Hérode, rédigea son rapport à Auguste, et partit au bout d'un jour. Le roi fit mettre aux fers Antipater et envoya des messagers à César pour l'informer de cette catastrophe.
    6. [641] On découvrit ensuite qu'Antipater avait comploté aussi contre Salomé. Un des serviteurs d'Antiphilos vint de Rome, apportant des lettres d'une suivante de Livie, nommée Acmé. Elle mandait au roi qu’elle avait trouvé des lettres de Salomé dans la correspondance de Livie et les lui envoyait secrètement pour l'obliger. Ces lettres de Salomé, qui contenaient les injures les plus cruelles envers le roi et un long réquisitoire, Antipater les avait forgées, et il avait persuadé Acmé, en la soudoyant, de les envoyer à Hérode. Il fut convaincu de ce faux par une lettre que lui écrivait cette femme en ces termes : « Selon ton désir, j'ai écrit à ton père et je lui ai adressé les lettres en question, certaine qu'après les avoir lues, il n'épargnera pas sa sœur. Tu feras bien, quand tout sera achevé, de te rappeler tes promesses ».
    7. [644] Après avoir saisi cette lettre et celles qui avaient été composées contre Salomé, le roi conçut le soupçon qu’on avait peut-être aussi forgé les lettres qui avaient perdu Alexandre[298]. Il fut pris d'un véritable désespoir à la pensée qu'il avait failli tuer aussi sa sœur à cause d'Antipater ; il ne voulut donc plus attendre pour le châtier de tous ces crimes. Mais au moment où il se préparait à sévir contre Antipater, il fut atteint d'une grave maladie : il écrivit cependant à César au sujet d'Acmé et des intrigues tramées contre Salomé ; puis il demanda son testament et le modifia. Il désigna pour roi Antipas, laissant de côté ses aînés, Archélaüs et Philippe, qu'Antipater avait également calomniés  il légua à Auguste, outre des objets de prix [298a], mille talents ; à l'impératrice, aux enfants, amis et affranchis de l'empereur, environ cinq cents talents ; il partageait entre ses autres enfants [298b] une assez grande quantité de terres et d'argent et honorait sa sœur Salomé des présents les plus magnifiques.
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    Message  Arlitto Mer 18 Nov 2020 - 19:16

    XXXIII
    1. Aggravation de l’état d’Hérode. – 2-4. Sédition des fanatiques contre l’aigle d’or du temple ; châtiment des coupables. – 5. Hérode à Callirhoé. – 6. Hérode à Jéricho ; arrestation des notables. – 7. Supplice d’Acmé et d’Antipater. Dernier testament d’Hérode en faveur d’Archélaüs. – 8. Mort d’Hérode. Lecture de son testament. – 9. Ses obsèques.
     
    1[299]. [647] Telles furent les corrections qu'Hérode fit à son testament. Cependant sa maladie allait s'aggravant, comme il était fatal d'une indisposition survenue chez un vieillard démoralisé. Car il avait déjà presque soixante-dix ans, et ses malheurs domestiques l'avaient tellement abattu que, même en bonne santé, il ne jouissait plus d'aucun des plaisirs de la vie. Sa maladie s'exaspérait à la pensée qu'Antipater était encore vivant, car il avait décidé de le mettre à mort, non pas à la dérobée, mais lui présent et rétabli.
    2. [648] A toutes ces misères vint s'ajouter un soulèvement du peuple. Il y avait dans la capitale deux docteurs qui passaient pour fort experts dans les lois des ancêtres et qui, pour cette raison, jouissaient dans toute la nation d'une très grande renommée : ils s'appelaient Judas, fils de Sepphorée, et Matthias, fils de Margalos. Ses docteurs expliquaient les lois devant un nombreux auditoire de jeunes gens et, tous les jours, ils réunissaient ainsi une véritable armée d'hommes à la fleur de l'âge. Quand ils surent que le roi se consumait de chagrin et de maladie, ils firent entendre confidentiellement à leurs amis que le moment était venu de venger Dieu et de détruire les ouvrages élevés au mépris des lois nationales. Il était, en effet, interdit de placer dans le Temple des images, des bustes ou des représentations quelconques d'êtres vivants. Or, le roi avait fait ériger au-dessus de la grande porte du Temple[300] un aigle d'or : les docteurs exhortaient leurs amis à le détruire, proclamant que, si même l'acte offrait quelque danger, il était beau de mourir pour la loi nationale ; car l'âme de ceux qui avaient une telle fin était immortelle[301] et gardait éternellement le sentiment de sa félicité, tandis que les âmes sans noblesse qui n’avaient pas suivi leur enseignement s'attachaient par ignorance à la vie et préféraient à une fin héroïque la mort par la maladie.
    3. [651] Pendant qu'ils discouraient ainsi, le bruit se répandit que le roi était à la mort ; les jeunes gens se mirent à l’œuvre d'autant plus hardiment. Au milieu du jour, à l’heure où, dans le Temple, circulait beaucoup de monde, ils se firent descendre du toit au moyen de grosses cordes et brisèrent à coups de hache l’aigle d'or. Le préfet du roi, aussitôt informé, accourut avec un fort détachement, arrêta environ quarante jeunes gens et les conduisit devant le roi. Hérode leur demanda d'abord s'ils avaient osé abattre l'aigle d'or. Ils le reconnurent. - Qui vous l'a ordonné ? - La loi de nos pères. - Et pourquoi tant de joie au moment où vous allez être mis a mort ? - C'est qu'après notre mort, nous jouirons d'une félicité plus parfaite.
    4. [654] Là-dessus, le roi entra dans une si violente colère qu'il en oublia sa maladie. Il se fit porter dans l'assemblée[302] et y prononça un long réquisitoire contre ces hommes : c'étaient des sacrilèges qui, sous prétexte de servir la loi, poursuivaient, en réalité, un dessein plus profond ; il fallait donc les punir comme des impies. Le peuple, craignant que les poursuites ne s'étendissent démesurément, pria le roi de se borner à punir les machinateurs de l'entreprise ainsi que ceux qui avaient été arrêtés en flagrant délit, et de détourner sa colère des autres. Le roi se laissa fléchir à grand'peine ; les jeunes gens qui s'étaient fait descendre du toit et les docteurs furent brûlés vifs ; les autres prisonniers furent livrés aux bourreaux.
    5. [656] A partir de ce moment, la maladie, ravageant tout son corps, l'affligea de souffrances multiples. Sans avoir beaucoup de fièvre, il éprouvait une insupportable démangeaison de toute la peau, de continuelles tranchées, un œdème des pieds pareil à celui des hydropiques ; en outre la tuméfaction du bas-ventre et une gangrène des parties sexuelles qui engendrait des vers, enfin l'asthme, la suffocation, des crampes de tous les membres. Il se trouva des prophètes pour dire que ces douleurs étaient le châtiment du supplice des docteurs. Pourtant le roi, luttant contre tant de souffrances, s'accrochait à la vie, espérait la guérison et imaginait remède sur remède. C'est ainsi qu'il passa de l'autre côté du Jourdain pour prendre les bains chauds de Callirhoé[303] : ces sources descendent vers le lac Asphaltite, et leur douceur les rend potables. Là les médecins furent d'avis de réchauffer tout son corps dans l'huile chaude : comme il se détendait dans une baignoire pleine d'huile, il défaillit, et ses yeux se retournèrent comme ceux d'un mort. Le tumulte et les cris de ses serviteurs le firent revenir à lui, mais, désespérant désormais de sa guérison, il ordonna de distribuer cinquante drachmes par tête aux soldats et des sommes considérables aux officiers et à ses amis.
    6. [659] Il prit le chemin du retour et parvint à Jéricho. Là, vomissant déjà de la bile noire. il lança une sorte de défi à la mort même, en procédant à une exécution sacrilège. Il fit rassembler dans l'hippodrome des citoyens notables de tous les bourgs de la Judée et ordonna de les y mettre sous clef. Puis, appelant auprès de lui sa sœur Salomé et Alexas, mari de la princesse : « Je sais, dit-il, que les Juifs célèbreront ma mort par des réjouissances, mais j'ai un moyen de les faire pleurer et d'obtenir des funérailles magnifiques si vous voulez suivre mes instructions. Ces hommes que j'ai fait emprisonner, dès que j'aurai rendu le dernier soupir, faites-les aussitôt cerner et massacrer par des soldats ; ainsi toute la Judée, toutes les familles, qu'elles le veuillent ou non, pleureront sur moi ».
    7. [661] Au moment où il donnait ces ordres, il reçut des lettres de ses ambassadeurs à Rome, qui lui apprenaient qu'Acmé avait été exécutée sur l'ordre de César et Antipater condamné à mort ; toutefois si son père voulait se borner à le bannir, César lui en donnait l'autorisation. Cette nouvelle lui rendit un moment de sérénité, mais ensuite, torturé par le manque de nourriture et une toux convulsive, vaincu par la douleur, il entreprit de devancer l'heure fatale. Il prit une pomme et demanda un couteau, car il avait coutume de couper lui-même ses aliments ; puis, après avoir guetté le moment où personne ne pourrait l'empêcher, il leva la main droite pour se frapper. Cependant Achab, son cousin, accourut assez vite pour retenir son bras et arrêter le coup. Aussitôt de grands gémissements s'élevèrent dans le palais, comme si le roi était mort. Lorsqu'Antipater les entendit, il reprit courage, et, plein de joie, supplia ses gardes, en leur promettant de l'argent, d'enlever ses chaînes et de le mettre en liberté. Leur officier, non seulement s'y opposa, mais courut raconter au roi cette tentative. Celui-ci poussa un cri qu'on n'eût pas attendu d'un malade et envoya aussitôt ses gardes tuer Antipater. Il fit ensevelir le cadavre à Hyrcanion. Après cela, il modifia encore son testament : il désigna pour héritier Archélaüs, son fils aîné, né du même lit qu'Antipas[304], et nomma ce dernier tétrarque.
    8. [665] Après l'exécution de son fils, Hérode vécut encore cinq jours. Il expira après un règne de trente-quatre ans à compter du jour, où, Antigone mort, il devint le maître, trente-sept depuis le jour où les Romains l'avaient nommé roi[305]. Si l'on considère sa vie dans son ensemble, sa prospérité fut sans égale, car, simple particulier, il parvint à la couronne, la garda longtemps et la transmit à ses propres enfants ; en revanche, nul ne fut plus malheureux avec sa famille. Avant que l'armée eût appris la mort du roi, Salomé alla avec son mari délivrer les prisonniers qu'Hérode avait ordonné d'exécuter ; elle prétendit que le roi avait changé d'avis et prescrit de renvoyer tous ces hommes dans leurs foyers[306]. Après leur départ, les deux époux annoncèrent la mort aux soldats et les réunirent en assemblée avec le reste du peuple dans l'amphithéâtre de Jéricho. Là, Ptolémée, à qui Hérode avait confié le sceau royal, s'avança, bénit la mémoire du roi et adressa des exhortations à la multitude ; il lut aussi une lettre laissée par Hérode à l'adresse des soldats, où il les engageait en termes pressants à aimer son successeur. Après cette lettre, Ptolémée brisa les cachets des codicilles et en donna lecture : Philippe y obtenait la Trachonitide et les districts[307] limitrophes ; Antipas, comme nous l'avons dit, était nommé tétrarque[308], Archélaüs roi. Hérode chargeait encore celui-ci de remettre à Auguste son anneau et les comptes de l'administration du royaume, dûment scellés ; car il désignait César comme arbitre de toutes ses dispositions et garant de son testament ; tout le reste devait être réglé suivant son testament précédent.
    9. [670] Aussitôt s'élevèrent des acclamations en l'honneur d'Archélaüs  les soldats, rangés par bataillons, vinrent, avec le peuple, lui promettre leur dévouement et invoquer sur lui la protection de Dieu. Ensuite on s'occupa des funérailles du roi. Archélaüs n'épargna rien pour qu'elles fussent magnifiques. Il étala tous les ornements royaux qui devaient accompagner le mort dans sa tombe. Sur un lit d'or massif, constellé de pierreries, était jeté un tapis de pourpre brodé de couleurs variées : le corps reposait sur cette couche, enveloppé d'une robe de pourpre, la tête ceinte du diadème, surmontée d'une couronne d'or, le sceptre  dans la main droite. Autour du lit marchaient les fils d'Hérode et la foule de ses parents, et après ceux-ci les gardes, les mercenaires thraces, germains et gaulois, tous dans leur équipement de guerre. Tout le reste de l'armée formait escorte[309] ; elle s'avançait en armes, accompagnant en bon ordre les généraux et les commandants ; venaient, enfin, cinq cents serviteurs et affranchis, portant des aromates. Le corps fut ainsi transporté sur un parcours de 200 stades[310] jusqu'à, Hérodion, où il fut enseveli comme le roi l'avait prescrit. Ainsi finit le règne d'Hérode.

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    GUERRE DES
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