Forum des Religions - Les Origines

La Tour de Babel :: l'origine de l'empire mondial des religions

    Initiation aux religions

    Arlitto
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:05

    Rappel du premier message :

    Initiation aux religions


    Présentation
    JÉSUS A DIT :


    SI CEUX QUI VOUS GUIDENT VOUS DISENT : 
    VOICI, LE ROYAUME EST DANS LE CIEL, 
    ALORS LES OISEAUX DU CIEL VOUS DEVANCERONT,


    S'ILS VOUS DISENT QU'IL EST DANS LA MER, 
    ALORS LES POISSONS VOUS DEVANCERONT.


    MAIS LE ROYAUME EST LE DEDANS DE VOUS 
    ET IL EST LE DEHORS DE VOUS


    QUAND VOUS VOUS CONNAÎTREZ, 
    ALORS VOUS SEREZ CONNUS


    ET VOUS SAUREZ QUE C'EST VOUS 
    LES FILS DU PÈRE VIVANT;


    MAIS S'IL VOUS ARRIVE DE NE PAS VOUS CONNAÎTRE, 
    ALORS VOUS ÊTES DANS LA PAUVRETÉ,


    ET C'EST VOUS LA PAUVRETÉ.


    L'ÉVANGILE SELON THOMAS, 3


    La religion constitue la sphère générale où l'homme prend connaissance de la seule totalité concrète dans laquelle se trouvent unies et sa propre essence et celle de la nature. (Hegel. Esthétique 150)

    La religion est le lieu où un peuple se définit à lui-même ce qu'il considère comme la vérité. (Hegel Ph de l'histoire p48)

    La religion, c'est la théorie générale de ce monde. (Marx Critique Ph du droit de Hegel)

    La religion est ce qui fixe un sens commun, c'est dire qu'elle est consubstantielle au langage. Il convient de reconnaître sa fonction, de repérer le champ de ses conséquences plutôt que d'en dénier les effets, y compris bien sûr chez ceux qui se croient les plus irréligieux des hommes. Il est en effet plus facile de croire ne pas croire que d'échapper aux effets normatifs du discours dominant. La critique et l'histoire des religions restent à l'intérieur des religions. Ce n'est pas pour s'en tenir à son discours dogmatique, mais tenir compte de sa persistance dans sa mise en question même, car ce n'est certes pas le seul discours mais c'est sûrement un des plus fondamentaux.
    Comme fondement du sens et du social, une religion doit rendre compte de la vie concrète d'un peuple en même temps qu'elle la structure. La première détermination consiste donc dans le degré de civilisation, les moyens de production(cueillette, chasse, élevage, agriculture, pillage), l'organisation sociale. Depuis l'invention de l'écriture, ces déterminations objectives sont, petit à petit, reléguées à l'arrière-plan au profit d'une logique signifiante, historique, auto-référentielle, plus abstraite et universelle. On peut aussi voir dans l'évolution de la magie, à la religion puis à l'art l'objectivation de la subjectivité, de la présence de la finalité dans une réalité qui ne se limite pas à la causalité matérielle.
    Le résultat de cette évolution, c'est donc que l'esprit tandis qu'il s'objective et pense son être, détruit d'un côté la détermination de son être et en saisit d'autre part l'élément universel.

    Nous n'avons donc affaire, quand nous parcourons le passé quelqu'en soit l'étendue qu'à de l'actuel; car la philosophie en tant que se préoccupant du vrai, n'a affaire qu'à de l'éternellement actuel. Pour elle rien n'est perdu dans le passé, car l'Idée est présente, l'Esprit immortel, c'est-à-dire qu'il n'est pas passé et qu'il n'est pas inexistant encore, mais il est maintenant essentiellement. C'est dire que la forme actuelle de l'esprit comprend en soi tous les degrés antérieurs. (Hegel Ph Histoire 66)

    L'effort pour réduire chaque religion à son concept apparaîtra caricature face à la richesse infinie des représentations et des subtilités logiques de chacune d'entre elles. Il ne s'agit pas tant d'en dire la vérité que de formuler ce que chacune représente dans sa différenciation, son apparition dans l'histoire, sa rupture essentielle logique et pratique. Une contradiction trouvera à s'y mesurer, dans ce "Work in progress" comme un défi à ce qui nous cause, lueur fragile arrachée aux profondeurs de la nuit. Le prêt-à-penser nous précède que nous ne pouvons que modeler à notre tour.
    Une vie sans religion est une vie sans principes et une vie sans principes est un bateau sans gouvernail. (Gandhi Lettres à l'Ashram)





    1. Préhistoire
      Si nous savons par définition très peu de choses sur les religions de la préhistoire, les vestiges qui sont parvenus jusqu'à nous ne laissent guère de doutes cependant sur la parenté de leurs croyances avec celles des peuples chasseurs (de la Sibérie à l'Afrique, aux aborigènes australiens et aux indiens du Mexique). Qu'on appelle ces religions Chamanisme ou Animisme, elles ont, par-delà des contenus extrêmement divers, des constantes remarquables. On peut consulter à ce sujet les ouvrages de Claude Lévi-Strauss par exemple.On ne peut remonter tellement avant 50 000 ans, date où les sépultures se multiplient (y compris Neandertal) et donc, avec un langage narratif (mythes). C'est la véritable naissance de l'homme moderne (sapiens sapiens) qui se caractérise par son expression artistique et une langue mère dont toutes nos langues dérivent (sauf la population San ?). Il y a, de même, une continuité dans les thèmes religieux et artistiques de ces origines aux tribus contemporaines qui sont restées isolées de la civilisation (de l'Australie, à l'Amérique du sud jusqu'aux Inuits ou à la Sibérie).Le culte des morts est le premier signe religieux. Témoin de l'opposition Nature/Culture, constitutive d'un monde humain, celui du langage et qui implique les structures élémentaires de la parenté codifiant les relations sociales ainsi que l'initiation qui marque la naissance à la culture et la fin de l'état de nature (deux fois né). L'unité de la communauté, identifiée à un dieu ou un totem, se constitue à travers les échanges de femmes et de biens (Dons ou Potlatch), dans le respect minutieux des rites et des traditions qui maintiennent l'ordre du monde, son équilibre fragile rétabli à coup de sacrifices, de danses, de prières, de formules. La conceptualité originaire (la pensée sauvage) est classificatrice avec un dualisme systématique (homme/animal, homme/femme, vie/mort, terre/ciel, réalité/rêve). C'est l'effet du langage qu'on retrouve jusque dans la dialectique dichotomique de Socrate.Bien qu'ils supposent un seigneur des animaux (évoqué par le dieu à 3 visages de l'Indus/Rudra/Shiva) auquel ils doivent le renouvellement de leur subsistance à condition, par exemple, d'enterrer les ossements des animaux tués, il n'y a pas conception d'un être absolu qui serait par rapport au moi quelque chose de radicalement autre et supérieur, mais plutôt la conception de la nature comme un ensemble de forces qui sont à la disposition de l'homme (manger un animal est prendre sa force). C'est le règne de la magie, d'un rapport duel, imaginaire, entre deux esprits humains (Sorciers ou Chamans) qui peut prendre la forme dualiste de l'opposition du créateur et du destructeur. La magie est l'effectivité de la subjectivité sur la réalité extérieure.Dans la magie on ne trouve pas la représentation d'un Dieu, d'une foi morale; mais pour elle, l'homme est la puissance la plus haute, ayant vis-à-vis de la force de la nature l'attitude du commandement.

    Le deuxième élément de leur religion consiste ensuite en ceci qu'ils se représentent cette puissance qui est la leur, se l'extériorisent, s'en font des images (le fétiche).

    Hegel Ph histoire 76


    Mais ce qui indique chez les sauvages quelque chose de supérieur, c'est le culte des morts, leurs aïeux morts et leurs ancêtres étant pour eux comme une puissance hostile aux vivants : cependant on ne considère pas la puissance des morts comme supérieure à celle des vivants, car les sauvages donnent des ordres à leurs morts et les ensorcellent ; de cette manière, le substantiel demeure toujours en la puissance du sujet. La mort même n'est pas pour les sauvages une loi naturelle générale ; car elle provient aussi, à ce qu'ils pensent, de sorciers mal disposés. On trouve assurément là la supériorité de l'homme sur la nature.

    Mais de ceci que l'homme est au sommet, il suit qu'il n'a pas de respect pour lui-même, car c'est seulement avec la conscience d'un Être supérieur que l'homme atteint un point de vue lui procurant un respect véritable. En effet si le caprice est l'absolu, la seule objectivité sûre dont on ait l'intuition, l'esprit, à ce degré, ne peut rien connaître de général. Les sauvages possèdent donc ce parfait mépris des hommes qui constitue proprement leur condition fondamentale (l'esclavage).

    Hegel Ph histoire 77


    Si le pouvoir y est arbitraire, il peut tout aussi bien être remis en cause de façon tout aussi arbitraire.
    Une très grande diversité dans le vécu existe cependant entre ceux qui vivent de la cueillette et les chasseurs, entre les nomades et les sédentaires, les habitants des zones chaudes et les peuplades qui subissent les glaciations (avec sans doute dans ce cas la focalisation sur la fécondité - Vénus/Vierge noire). Mais il faut garder à l'esprit que les populations étaient très peu nombreuses et dispersées, ne permettant pas vraiment l'élaboration de traditions trop complexes et durables, bien que déjà assez complexes comme l'ethnologie le montre et comme en témoigne l'art pariétal (Lascaux). Les pratiques magiques ne se limitent évidemment pas à la préhistoire, se conservant au moins comme magie blanche, défensive, contre-magie, désenvoûtement, exorcisme et superstitions. La survivance du sacrifice (à la fois magie et don) sera au centre de la réflexion de la plupart des religions. Mais le travail humain portera en germe la réfutation de la magie, même s'il y aura d'abord confusion dans l'alchimie des métaux. L'identification de chaque chaîne de causes à une volonté, un génie ou un dieu se continuera dans les divers polythéismes mais organisé dans un ordre plus hiérarchisé et qui tend à s'unifier.

    2. Néolithique
    - Bouleversement climatique. Le Natoufien (-12 500/-10 000)
      La fin de la dernière glaciation (vers -12 000) en bouleversant l'équilibre écologique a provoqué des mouvements de population en Europe soit vers le nord pour suivre le gibier traditionnel, soit vers le sud en s'adaptant à une nouvelle faune (réduite souvent, d'abord, aux serpents, mollusques et rongeurs) et en se dispersant en petits groupes familiaux. Cette époque de fonte des glaces est aussi caractérisée par des pluies diluviennes et une montée des mers (jusqu'au niveau actuel de +120m vers -7000). C'est dire que c'est l'époque de multiples déluges, en particulier, pour le Proche-Orient, l'inondation du golfe Arabo-Persique puis la rupture de la terre qui forme l'Hellespont (-5500), le dernier déluge ayant eu lieu vers -3500 inondant seulement les plaines du Tigre et de l'Euphrate.L'art des cavernes Franco-Cantabrique s'éteint vers -12 000. C'est vers cette époque que des villages se constituent au Proche-Orient qui prépareront les véritables débuts de la civilisation et de l'histoire, puisque d'après la préhistoire la plus récente la diffusion de l'agriculture et de l'élevage se fera principalement à partir de ce territoire, même s'il y a eu d'autres foyers, mondialisant, en même temps que leur nouvelle religion, les plantes et les animaux qu'il y avaient domestiqués. De rares villages avaient déjà existé, dès -30 000, sans autres conséquences apparentes sauf les villages troglodytes qui ont donné Lascaux (mais les premiers sédentaires étaient sur les côtes qui ont été submergés).

    - La Bonne Mère et le Taureau. Khiamien (-9500)
      D'après Jacques Cauvin (Naissance des divinités, naissance de l'agriculture-CNRS) ce qui est caractéristique, c'est bien l'apparition de la nouvelle religion avant l'apparition des nouvelles techniques que ne justifiaient aucune nécessité naturelle mais seulement le prestige de la maîtrise, du progrès (ce qui est contestable puisqu'il est probable que l'agriculture se soit développée à cause des changements climatiques après une période d'abondance où la population s'était beaucoup développée déjà et commençait à stocker le grain).La nouvelle religion se caractérise par des figures en prière (les orants), les bras tendus vers le ciel (dans l'Enûma elis babylonien Marduk est célébré pour avoir "créé l'Incantation afin que les dieux s'apaisent" p646) ainsi que par des figurines représentant une déesse-mère, aussi terrible et capricieuse que le ciel sans doute ("c'était la Dame montée sur le puissant Aurochs céleste" comme est présentée Inanna à Sumer p27 Déluge descendant de sa montagne, Tu es la première, la déesse du ciel et de la terre), ainsi que des représentations du taureau que l'on retrouvera dans les religions cananéennes (Baal), Mésopotamiennes (Marduk), Égéenne (Minotaure) avec la pratique de corridas comme elles existent encore dans le sud de la France. Ce taureau, plus tard chevauché par le dieu de l'orage hittite, est, comme Zeus, celui qui rétablit la prospérité et arrête le cycle des destructions. On le retrouve dans le boeuf Apis Égyptien (Ptah mais aussi Hator), la vache sacrée Indienne (et la Mère des Dieux Aditi puis la Grande déesse Kâli), les rites de Mithra, etc. Ce qui frappe c'est son apparition avant sa domestication, avant l'agriculture (?). La domination du culte par une déesse rappelle aussi les cultes plus tardifs, d'Isis, de Cybèle, de Démeter, déesses de la reproduction, de la renaissance, mais évoquant aussi l'Eve biblique par qui l'homme a goûté au savoir (ou la Pandore grecque).On a pu voir dans ce rapport à une divinité humanisée, la conscience de soi qui prend forme. En fait, si on se fie aux mythes sumériens, les déluges sont vécus comme une destruction par des dieux jaloux qui effaçaient leur création, âge après âge comme Kronos mangeait ses enfants. La solution donnée par le mythe est que les hommes n'échappent à la destruction qu'à servir les dieux, travailler pour eux, à leur place (à la place de la nature) pour leur offrir des sacrifices. C'est plutôt cette notion nouvelle de dette originelle, de culpabilité, qui sera créatrice d'une conscience de soi, instituant un rapport de soumission où l'esclave ayant perdu sa "liberté" naturelle produit par le travail la puissante liberté humaine. La dette envers le sauveur et maître, instaurateur de l'ordre post-déluvien, serait fondatrice de l'histoire. L'accession du taureau au rang suprême est presque toujours le résultat d'une lutte contre les anciens dieux pour restaurer les cycles de la génération (comme Zeus). Si c'est peut-être s'avancer un peu loin, il ne faut pas sous-estimer le fait que nous sommes encore les héritiers directs de cette tradition qui n'est pas tout à fait morte et inaccessible. Il ne faut pas sous-estimer non plus la nouveauté radicale de cette attitude religieuse, qui va construire des sanctuaires pour ses dieux, par rapport à l'idéologie fétichiste des chasseurs-cueilleurs.La faute engendre une série de conséquences où l'on croit reconnaître, à peine voilé par le langage symbolique, tout ce que l'étude de l'art et des techniques nous a déjà suggéré : un sentiment de finitude humaine ("nudité") répondant à un éloignement du divin désormais perçu comme inaccessible, la fin en corollaire d'une certaine facilité édénique dans la quête de subsistance et le début d'un travail "à la sueur du front" qui désigne explicitement dans le texte les débuts d'abord de l'agriculture (Caïn), puis de l'élevage (Abel). Tous ces traits caractérisant expressément la Révolution néolithique, il est difficile de ne pas envisager que c'est d'elle qu'il puisse s'agir.

    Jacques Cauvin 265


    Cette interprétation reflète cependant la dévalorisation hébraïque de la religion néolithique, contrairement à la tradition sumérienne et cananéenne qui fait du travail le service des dieux, le prix de la vie et l'accès au savoir, le travail devient une punition, conséquence du savoir mais surtout de la liberté humaine, de la révolte de l'homme, son péché capable de changer l'avenir.

    - L'agriculture. Le Sultanien (-9000)
      Dans un deuxième temps, les phases du Pre-Potery-Néolithic A et B (PPNA-PPNB), voient l'apparition de l'agriculture à Jéricho et à Mureybet, ainsi qu'une augmentation locale de la population. L'élevage ne viendra qu'ensuite, et encore après l'élevage nomade.Les divinités de la phase précédente sont toujours présentes mais la pratique de l'agriculture devait changer encore radicalement la représentation du monde en privilégiant les cycles de la nature (du levant ou couchant, de la génération à la corruption, de la graine à la plante, du printemps à l'hiver). C'est le règne de l'éternel retour, le mythe de la résurrection, la regénérescence (Osiris/Dyonisos/Christ), la valorisation de la stabilité, des prédictions (oracles), de la fertilité, des concours. L'unité du groupe et la division du travail priment absolument sur l'individu isolé. Enfin, l'incarnation, la transmigration des âmes prennent leurs racines dans l'expérience du cultivateur."QUE JE VIVE OU QUE JE MEURE, JE SUIS OSIRIS. JE PÉNÈTRE EN TOI ET JE RÉAPPARAIS À TRAVERS TOI ; JE DÉPÉRIS EN TOI ET JE CROÎS EN TOI... LES DIEUX VIVENT EN MOI PARCE QUE JE VIS ET JE CROÎS DANS LE BLÉ QUI LES SOUTIENT. JE COUVRE LA TERRE ; QUE JE VIVE OU QUE JE MEURE, JE SUIS L'ORGE, ON NE ME DÉTRUIT PAS. J'AI PÉNÉTRÉ L'ORDRE... JE SUIS DEVENU LE MAÎTRE DE L 'ORDRE, J'ÉMERGE DANS L'ORDRE" (SARCOPHAGES 330)Ces croyances "païennes" des paysans constituent le fond de toutes les religions actuelles, la relative stabilité des conditions de vie depuis cette époque jusqu'à l'époque moderne explique l'unité des superstitions et croyances populaires qui disparaissent depuis peu. Les croyances se perpétuent souvent au-delà des conditions qui les ont engendrées car la croyance se soutient de la tradition et des traditions locales préhistoriques se sont conservées jusqu'à nos jours, vestiges de temps révolus qui se combinent aux croyances nouvelles. Le thème des générations et de l'accouplement des dieux aussi bien que les vies de saints mettent en scène des synthèses conceptuelles à partir de traditions locales qui persistent et s'intègrent à la religion dominante ou bien deviennent folklore et légendes.Dès cette époque la valorisation des armes et la constitution de stocks annoncent les premiers conflits. Sur de si longues périodes d'autres épisodes religieux ont du surgir, il n'est pas absurde de penser que la tour ronde de Jéricho évoque un culte solaire ou les tours du silence des Parsis, de même la valorisation des flèches rappelle le thème de l'archer (Indra, Sagittaire, Arche de Noé, Arche d'alliance, équivalence Vie/Flèche en Sumérien [ti] et en Grec [bios]). Ces variations ne peuvent occulter la formidable persistance de la mythologie originaire du taureau et de la Mère de dieu jusqu'à nos jours."Nous combattrons et nous travaillerons, disent les Anunnaki au dieu X (Mardouk), pour construire ta demeure. Mais, le jour venu (de ta gloire), nous y habiterons avec toi." Cela se passait en un temps "où les troupeaux de boeufs ne paissaient pas encore et où les peuples se nourrissaient de céréales".

    Jean-Charles Pichon - Histoire des mythes 44


    - La céramique, éleveurs nomades (-7500)
      Le nomadisme pastoral est plus tardif que l'agriculture et contemporain d'une virilisation des figures et de sanctuaires où s'effectuaient des sacrifices sanglants, y compris humains. C'est l'inondation du golfe Arabo-persique et la fin du déluge, le retour à un temps sec. C'est aussi l'époque du culte des crânes, qui sont détachés du corps, parfois modelés et coiffés, et qui sont exposés dans ou à l'extérieur des maisons carrées (Ka'ba) et non plus rondes. Cette pratique est sans doute à rapprocher des futures momies égyptiennes et du culte des ancêtres. On suppose aussi la pratique de banquets où se réunit la communauté.Le nomadisme, amplifié par la nouvelle sécheresse, va accélérer l'expansion du néolithique, surtout en touchant des populations qui vont pouvoir passer directement du nomadisme de cueilleur-chasseur à celui d'éleveur nomade, préservant des éléments archaïques dans la nouvelle religion. Cette diffusion se fera en même temps que celle de la langue dite indo-européenne.La religion de ces éleveurs nomades nous est en partie accessible par ce que nous savons des religions indo-européennes, bien que beaucoup plus tardives et qui se retrouvent de l'Inde à l'Iran, aux Scythes, aux Celtes, aux Slaves et aux Germains. Ces peuples nomades devaient protéger leur bien, objet de convoitise, à moins qu'ils ne vivent de rapines comme les premiers grecs (d'après Thucydide) ou les premiers Romains, formant, donc, une classe de guerriers. La prépondérance de l'homme dans cette organisation ainsi que l'attention de ces populations aux problèmes de reproduction s'exprime dans une religion patriarcale et le culte des héros. L'unité de la vie et de la mort (Si la mort sort de la vie, la vie en revanche sort de la mort. Hegel p62) est affirmée dans les cérémonies phalliques. Les initiations guerrières, les rites du Soma ou de l'Ambroisie donnent aux guerriers l'espoir de l'immortalité. Les sacrifices évoluent de leur fonction magique à un ritualisme formaliste qui se réduit à affirmer l'unité de la communauté ("ON DIT QU'ON S'EST INSTALLÉ LORSQU'ON A CONSTRUIT UN AUTEL" Satapatha Br. VII, I,I,I-4). Le banquet restera, chez les Grecs ou les Gaulois le rite principal de la communion.On peut déduire qu'issues de la religion du taureau (Mithra) mais s'éloignant d'une culpabilité originelle, la religion se réduit au social, reflétant les fonctions efficaces de l'organisation de la société ; religion plus utilitaire, au service du pouvoir, et qui se renforcera de l'âge du bronze à l'âge du fer.

    - L'âge de bronze (-5000)
      La rupture de l'hellespont et l'inondation de la Mer noire (-5500) ont accéléré encore la diffusion de l'agriculture en provoquant des migrations de populations. L'essor des techniques, et surtout celles du fer plus tard, accentuant la spécialisation, donnera naissance à de nouvelles initiations "alchimiques" bien différenciées des initiations chamaniques et guerrières, mais de l'âge du bronze à l'âge du fer (le fer reste un secret Hittite de -3500 à -1100) la valorisation du combattant (Dieu ou Héros) ira en s'accentuant et débouchera sur les guerres des cités mésopotamiennes puis sur les invasions indo-européennes et le brigandage, le nomadisme offrant la logistique d'une guerre de mouvement surtout après la domestication du cheval et l'invention du char. La structure égalitaire des premiers villages fait place à une hiérarchisation de plus en plus marquée se reflétant dans l'idéologie tripartite (Prêtres, Guerriers et Producteurs) dominée par la fonction d'un Dieu Souverain.

    3. L'écriture
    - Sumer l'expert (-3200/-2000)
      Après le dernier déluge (-3500), l'invention de l'écriture s'est faite avec l'essor du commerce et la prospérité de l'antique Sumer grâce à l'irrigation. Ce n'est pas seulement une nouvelle étape mais un changement d'échelle car si la population avait déjà été multipliée par dix aux débuts du néolithique, c'est encore un accroissement de facteur 10 qui devait accompagner les véritables débuts de la civilisation avec des villes de plus de 10 000 habitants, une hiérarchisation de la société, la division du travail et des fonctions, la spécialisation, l'artisanat. Si l'histoire commence à Sumer, c'est aussi que la satisfaction des besoins vitaux est indispensable pour que l'esprit délivré de l'immédiat s'élève à la réflexion sur soi au delà de son animalité, les périodes de progrès sont souvent celles de prospérité. L'écriture est le produit de la communication, de l'échange, elle est d'abord chiffre, contrat et très vite source de pouvoir. La loi écrite protège de l'arbitraire du caprice du souverain. Elle s'expose à la durée, livrée à une caste de spécialistes (scribes et prêtres) qui en rationalisent la lettre. L'astrologie qui prédit l'avenir (éclipses etc.), fondant son savoir de l'écriture du passé, établit enfin solidement que le réel est bien rationnel, la loi du destin s'appliquant aux dieux même qui ne peuvent en changer le cours.La cosmogonie sumérienne sera sans cesse reprise par les religions postérieures (Égypte, Hébreux, Grèce), la langue sumérienne devenue langue sacrée (et diplomatique) inaugurant la tradition d'une révélation de l'écrit. Prolongeant l'ancienne religion, déjà prend forme l'articulation de l'éternité, du temps et de la génération, la succession des dieux, leur hiérarchie (la royauté) et la revendication de la justice. La trinité Anu (An=Ciel), Enlil (l'air), Enki/Ea (terre) se substitue à "la mère des dieux" (Tiamat?, Bêlit-ili, Anat) mais conserve le taureau Marduk (ancien Alla?). On y retrouve le mythe de Noé, la descente aux enfers, l'histoire de Job, l'âge d'or ainsi que la création de l'humanité à partir du mélange de l'argile avec l'esprit d'un dieu sacrifié (équivalence Adam-Adama, Homo-Humus, Homme terrien opposé aux dieux des cieux).

    - L'Égypte Mystérieuse (-3000/-333)
      Ce qui ne fut pas donné à Sumer, la durée, fut l'élément de l'Égypte longtemps protégée des envahisseurs pendant que les autres civilisations disparaissaient régulièrement. Savants et prêtres de lointains pays feront le voyage en Égypte, diffusant la tradition, en grande partie d'origine sumérienne, jusqu'à la Chine et au Japon sans doute. L'autre élément déterminant est, bien sûr, le Nil merveilleux moyen de communication avec la mystérieuse régularité de ses crus bienfaisantes dont seul le pouvoir centralisé sait tirer tout le profit (par l'organisation des travaux) et qui ne doivent rien à la clémence du ciel, renforçant le sentiment d'un ordre immuable, inaccessible. Le véritable pouvoir est aux mains des prêtres qui gardent la tradition millénaire et sont le garant de l'ordre cosmique, de l'exécution scrupuleuse des rites, de la dévotion aux dieux. Pays de l'éternel retour que les pyramides attendent dans leur désert, c'est aussi le pays des morts qui habitent les vivants. L'immortalité, attribuée primitivement au Pharaon comme fils de dieu, intermédiaire avec le divin, se démocratisera ensuite, assurant une continuité que la mort ne peut interrompre. Pays de l'origine dont la fixité des rites renvoie à l'événement fondateur, la restauration d'un âge d'or perdu, l'initiation devient la connaissance du mystère de l'unité de la mort et de la vie, renaissance qui a connu la mort, "justifiée", et ne redoute que la seconde mort de l'oubli.La religion égyptienne est la religion des mystères (Les mystères des Égyptiens étaient des mystères pour les égyptiens eux-mêmes. Énigme dont la solution sera seulement le monde Grec. Hegel) où l'impensable est présenté à la pensée dans sa contradiction indépassable (opposition du corps et de l'esprit - Hermès). C'est le pays du syncrétisme, de la création de nouveaux dieux par juxtaposition de qualités primaires qui s'unissent sans se confondre comme les deux rives du Nil ou bien les deux royaumes de la Haute (Sud/Seth) et de la Basse (Nord/Horus) Égypte (le Pharaon est deux fois roi). [Le mot égyptien pour dieu (Neter) correspond au latin Natura, traduit en grec Physis proche de Fürher : force qui conduit, ordonne, où la séparation hante déjà la fusion primitive comme son péché originel.]Fondement de la tradition occidentale (trinité Akh, Ba, Ka : L'esprit, l'âme et le corps, Ré, Amon, Ptah), l'influence de l'Égypte n'a cessé de se faire sentir à travers les mystères d'Isis, les écrits de l'Hermès trismégiste, l'alchimie. Les hiéroglyphes représentant la langue sacrée perdue étaient sensées détenir le secret de la révélation originelle jusqu'à leur déchiffrement par Champollion qui devait tant décevoir cet espoir insensé. Car de Khepri-Ré-Atoum, ou Osiris-Horus-Ré (Le mystère céleste du retour cyclique, le saint sépulcre d'Abydos) à Ptah (le mystère terrestre de l'incarnation, la création par la parole) et Amon (le vide médian qui sépare, le caché, le non-manifesté, l'âme du monde, le souffle, le Mana), c'est, dès avant Akhenaton et le syncrétisme du nouvel empire (malgré son échec), le mystère de la trinité, de l'unité du dissemblable, la contradiction qui n'étant pas accessible à l'intelligence, devient l'objet de la véritable adoration.TOUS LES DIEUX SONT TROIS : AMON, RÊ, PTAH ; ILS N'ONT PAS D'ÉGAUX. SON NOM EST CACHÉ EN AMON, IL EST PERÇU EN RÊ [IL EST RÊ DEVANT], ET SON CORPS EST PTAH. LEURS CITÉS SUR TERRE DEMEURENT À JAMAIS : THÈBES, HÉLIOPOLIS ET MEMPHIS, POUR L'ÉTERNITÉ. (HYMNE À AMON DE LEYDE -1300 AVANT J.-C.) E200

    - La Chine Immense (-1350/-550/-221)
    Unité immédiate de l'esprit substantiel et de l'esprit individuel. 
    C'est la volonté générale qui s'affirme immédiatement en l'individu. 96

    Ni la chronologie, ni la géographie ne peuvent être tout à fait respectés dans une histoire des religions. Ainsi bien que l'histoire chinoise ne commence guère avant -1350 (le Néolithique de Yang-chao remontant à -3000 et celui de Lung-chao à -2000), ses conceptions reflètent une période plus ancienne et qui, surtout, évoluera peu. C'est à ce titre qu'il faut prendre au sérieux la revendication d'ancienneté de la civilisation chinoise, bien que ses textes fondateurs datent de -500. La diffusion rapide, à partir d'un centre et sur l'immense territoire chinois, d'une nouvelle idéologie devait s'imprégner largement des anciennes croyances et superstitions. Fondamentalement la pensée chinoise est une penséepratique, de l'unité des contraires.
    Héritier des vieilles mythologies chamanistes (culte des ancêtres, Centre du monde-5 points cardinaux) et de concepts empruntés aux civilisations de l'écriture (L'écriture chinoise préparée par les inscriptions divinatoires se développe brusquement, sans transitions presque, vers -1300), le Taoïsme est une religion de l'identité pure (Je=Je) identifiée au vide et au non agir. Son but est l'acceptation du monde, la non-opposition aux rythmes naturels, la soumission aux décrets du ciel, la fusion dans le mouvement de la vie qui mène à l'immortalité par des techniques respiratoires, sexuelles, diététiques, méditatives, magiques, etc., qui favorisent l'harmonie avec les cycles naturels. L'être y est strictement identique au néant (unité et alternance du Yin et du Yang), seul le mouvement (le Tao, le Vide, la Cause, le Logos) y représente un être fluide mais dépourvu de toute négativité, réduit à la totalité indifférenciée (l'Oeuf primordial), à l'origine inaccessible à la pensée qui en procède (le Tao, femelle obscure, sans nom, précède l'Un).
    Le Confucianisme, au contraire, remplace l'harmonie divine, naturelle et préétablie, par la nécessité concrète de l'action civilisatrice pour l'unité de l'État, le devoir du citoyen étant de soutenir ou restaurer cette unité qui n'est plus une donnée mais le but suprême de la vie et de l'éducation, un fait de culture dépassant les différences de classes au nom de la compétence, un conformisme et l'effet de la vertu masculine alors que les Taoïstes revendiquent l'état de nature, privilégient la faiblesse féminine et rejettent la morale (QUAND ON ABANDONNE LE TAO, ON A RECOURS À LA BIENFAISANCE; QUAND ON ABANDONNE LA BIENFAISANCE, ON A RECOURS À LA JUSTICE; QUAND ON ABANDONNE LA JUSTICE, ON A RECOURS AUX RITES. LES RITES NE SONT QU'UNE MINCE COUCHE DE LOYAUTÉ ET DE FOI ET LE DÉBUT DE L'ANARCHIE. 38:9-14). La négativité y représente l'opposition à cette unité, à l'ordre divin, sans progrès historique autre qu'un retour à l'unité : la conformité à l'ordre du monde, le mandat du ciel.
    La constitution est dans l'ensemble une théocratie et le règne de Dieu, un règne temporel, comme le règne temporel est aussi divin. 89

    L'État fondé sur la famille et un gouvernement patriarcal. 84

    Tout ce que nous nommons subjectivité se concentre dans le chef de l'état. 90

    Du moment qu'en Chine l'égalité règne, mais en aucune façon la liberté, le despotisme est nécessairement la forme du gouvernement. 99

    Puisque l'honneur n'existe pas et que nul n'est plus privilégié qu'un autre, la conscience de l'abaissement devient prédominante, et se transforme même facilement en conscience d'abjection. 103

    La religion chinoise comprend encore la magie en tant que l'attitude des hommes constitue le facteur absolument déterminant. Si l'empereur se comporte bien, ce ne peut que bien aller.

    Car les Chinois sont adonnés à une immense superstition ; celle-ci dépend justement du défaut d'autonomie intérieure et suppose le contraire de la liberté de l'esprit.

    Ce qui est pour nous contingent, conséquence naturelle, les Chinois cherchent à le détourner ou à l'atteindre magiquement. 104


    _________________________________________________________________________________________________________
    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:18

    Le judaïsme, religion d'un livre : le Talmud
    Initiation aux religions - Page 2 Talmud5S'il est permis de parler de religion du livre pour le judaïsme, il est vraisemblable que ce livre n'est pas la Bible, mais le Talmud. Ce dernier est le fidèle miroir du judaïsme. Le juif peut y trouver ce qui concerne sa vie quotidienne : hygiène, éducation, morale, politique; civisme. Tout est sous-tendu par le souci de maintenir le peuple dans la fidélité de ses origines : Israël est lié à Dieu par une alliance éternelle, manifestée par la Torah. Le Talmud constitue l'âme d'Israël. C'est lui qui maintient et anime la vie du peuple depuis près de vingt siècles. Il n'est guère étonnant dès lors que chaque fois que les antisémites s'en prirent aux juifs, la vague de haine s'enflammait par la destruction des livres du Talmud. En brûlant ces livres, ils pensaient détruire l'âme d'Israël.
    Vie quotidienne et culte
    L'essentiel du culte réside dans la purification des hommes de ce monde pour les préparer au monde à venir. Il s'agit de craindre le Dieu éternel dans l'état actuel de la société, pour préparer en même temps la venue de son Messie qui rétablira toute justice. Le culte, c'est l'observation des commandements et des prescriptions qui ont été donnés à Moïse, dans la Torah du Sinaï. Le respect de la Torah, des prescriptions (plus de 600), ne représente pas un fardeau pour le juif pieux ; c'est l'occasion de manifester son amour pour Yahvé.
    Il n'y a aucun événement de l'existence qui ne soit religieux : aucun acte n'est hors de la religion, car il s'agit d'organiser la vie du monde selon la volonté de Dieu. Cependant si tout est occasion d'un dialogue entre l'homme et Yahvé, la journée se marque par trois moments spécifiques de prières : le matin, l'après-midi et le soir. Ces prières se sont substituées aux sacrifices du Temple. Constituées par dix-huit bénédictions, elles manifestent la louange de Dieu pour sa souveraineté, sa puissance et sa sainteté et l'action de grâces pour les bontés de Dieu en faveur de son peuple. En outre, le juif demande à Dieu de satisfaire une série de besoins humains, matériels et spirituels, et particulièrement la paix et la restauration d'Israël.
    Le message chrétien
    La conception de Dieu, dans le christianisme, est celle d'un Dieu qui agit, d'un Dieu qui a un souci personnel de l'homme, d'un Dieu qui s'engage, dans une alliance, avec des hommes concrets.

    Initiation aux religions - Page 2 IconedelapassionCe message chrétien parle de Dieu et de ce qu'il fait, et il acquiert la spécificité chrétienne pour autant que se trouve soulignée l'action de ce Dieu en faveur de Jésus-Christ. Cette action, inaugurée en Jésus-Christ, continue de se poursuivre en faveur du groupe instauré par lui, pour prolonger et parachever l'oeuvre qu'il a entreprise. Ce groupe, l'Eglise, fondée par le Christ sur les apôtres, reconnaît l'action de Dieu, dans la mouvance de l'Esprit.
    Le propre du langage chrétien, c'est d'être référé à Jésus de Nazareth, qui a été crucifié et qui est ressuscité. En dehors de cette affirmation de la mort et de la résurrection, le message chrétien perd sa signification. Ce n'est pas pour rien que, si un archéologue rencontre une croix, il peut affirmer, avec certitude, qu'il traverse une civilisation chrétienne. Le signe de la croix est le critère spécifique de la foi chrétienne.
    Le christianisme essaye de conformer l'existence des chrétiens à l'exemple de Jésus-Christ. Seulement, force est de constater que le christianisme a pris des formes diverses au cours de l'histoire, il existe dans les déterminations qu'il a prises dans l'histoire, à savoir le catholicisme, l'orthodoxie et le protestantisme. Ces expressions forment le christianisme, et il n'est pas pensable d'étudier le christianisme comme une entité isolable de ses déterminations.
    Le catholicisme
    Le terme catholique n'apparaît pas dans la Bible, même pas dans le Nouveau Testament. C'est Ignace d'Antioche, qui, le premier, dans sa lettre aux chrétiens de Smyrne, applique ce qualificatif à l'Eglise, vers les années 110. Il écrit : "Là où est l'évêque, c'est là que se trouve la communauté, de même que là où est Jésus-Christ, là se trouve l'Eglise catholique".
    Le terme catholique recouvre la notion d'universalité (elle séjourne en tout lieu) et celle de vérité (elle est la véritable Eglise, par opposition aux fausses, qui sont hérétiques). Cette prétention de l'Eglise à l'unité et à l'universalité ne s'est pas réalisée dans l'histoire. Il ne faut pas oublier que l'Eglise est aussi une oeuvre humaine, et les tentatives d'unification des Eglises ont été nombreuses, au cours des vingt siècles de christianisme.
    Les divisions se sont produites chaque fois qu'un membre, ou qu'un groupe de membres estimait pouvoir se passer de la solidarité de l'ensemble. Certaines fissures dans l'Eglise ont été simplement le fait d'un désaccord sur des points précis (pas toujours principaux) de la doctrine, et même sur des mots dont les acceptions locales étaient divergentes. D'autres prirent leur origine dans la remise en question de cela même qui faisait le christianisme, à savoir la divinité du Christ.

    Initiation aux religions - Page 2 Christianisme_arbreLes premières hérésies de la réflexion théologique portent sur la personne du Christ. Des sectes se sont formées à partir de la reconnaissance de Jésus comme du plus grand et du dernier des prophètes juifs, sans le reconnaître comme Fils de Dieu. D'autres ont plus ou moins refusé de reconnaître le Christ comme un homme : il est bien le Fils de Dieu, mais sa situation humaine n'est qu'une apparence. Dans le même temps, se propageaient des doctrines remettant en cause la notion de péché et élaborant des spéculations intellectuelles sur la foi, ou niant purement et simplement le péché. D'autres opposaient à Dieu une force contraire, situant Dieu, Bien souverain, dans une lutte perpétuelle contre les forces du mal.

    La division de l'empire romain en un empire occidental et en un empire oriental manifestera, de façon plus sensible, la séparation. Cette division politique se complexifie d'une division linguistique (le grec pour les Orientaux, le latin pour les Occidentaux). Le fossé va se creuser progressivement entre les deux Eglises, jusqu'à la lutte ouverte entre le patriarche d'Orient et le pape de Rome, patriarche d'Occident.
    D'abord, pour éviter toute rupture, les deux patriarches, celui d'Orient comme celui d'Occident, se sont plus ou moins ignorés, jusqu'au jour où Michel Cérulaire, alors patriarche de Constantinople (1050) essaiera d'obtenir des concessions du pape Léon IX, à propos du célibat ecclésiastique. Le refus du pape entraînera une tension encore plus grande : les deux patriarches finissent par s'excommunier réciproquement, et la séparation est consommée en 1054.
    Depuis lors, des tentatives de réconciliation, au cours des conciles de Lyon (1274) et de Florence (1438) n'ont pas abouti. Cependant, un rapprochement certain s'est effectué à l'occasion de la convocation par le pape Jean XXIII du deuxième concile du Vatican, et par la rencontre historique de Paul VI et du patriarche Athénagoras, à Jérusalem (1964).

    En Occident, les choses ne vont pas tarder à se gâter. D'abord pendant quarante ans (1377-1417), le trône de Pierre sera l'objet d'une rivalité incessante entre plusieurs pontifes, appuyés par telle ou telle puissance d'Europe. Il conviendra également de se souvenir que la papauté, au cours du Moyen Age et de la Renaissance, ne fut pas toujours d'une conduite exemplaire pour l'ensemble de la chrétienté. Ce qu'il est convenu d'appeler la Réforme n'est pas simplement l'oeuvre de Martin Luther (1483-1546) ou d'un Jean Calvin (1509-1564). Elle a connu des antécédents comme John Wyclif et Jean Huss (au XIVème siècle) ; ces derniers s'élevaient contre les abus des autorités pontificales. Le réveil, deux siècles plus tard, de leurs théories condamnées par l'Eglise, n'est pas sans rapport avec une crise politique qui secoue l'Europe, la réveillant contre la suprématie abusive des papes. De fait, Martin Luther sera le catalyseur de ceux qui estiment que l'Eglise oublie le spirituel pour ne plus s'intéresser qu'au temporel. La querelle des Indulgences ne sera que le prétexte qui mettra le feu aux poudres.
    Une réalité géographique
    Le catholicisme souligne la visibilité du Christ, visibilité qui repose sur le corps social de l'Eglise, Après le concile Vatican II (1962-1965), le catholicisme s'est affranchi de la hantise de la primauté par rapport aux autres confessions chrétiennes, comme il s'est aussi affranchi de la hantise de la primauté de l'évêque de Rome sur tous les autres évêques.

    L'Eglise catholique est une forme de l'Eglise de Jésus-Christ, dans laquelle se fait le rassemblement de l'ensemble du peuple de Dieu. Si le Christ, en quittant cette terre, a laissé à une société visible le soin de prolonger et d'approfondir son message, il lui a laissé la charge de s'organiser elle-même, au risque des ruptures qui pourraient se produire ultérieurement.

    Confié à des hommes, le message chrétien a été codifié, au cours des siècles, afin d'assurer sa permanence dans une sorte de reconnaissance mutuelle des croyants. Cette codification se trouve très tôt dans les symboles de la foi : Symbole des Apôtres, qui énonce la foi prêchée aux débuts de l'Eglise par les Apôtres, Symbole de Nicée-Constantinople (325-381) qui énonce la foi authentique en face de l'hérésie d'Arius, lequel mettait en cause la filiation divine du Christ Jésus.
    Une réalité temporelle
    L'autre distinction du catholicisme se situe dans la place accordée à la Tradition, Sans dire que cette dernière occupe une place aussi capitale que la Bible, Parole de Dieu, il faut convenir que l'Eglise catholique, notamment à la suite du concile de Trente (1545-1563), reconnaît comme seconde source de la révélation de Dieu les traditions dont l'histoire de l'Eglise est remplie, comme les textes des différents Pères de l'Eglise ancienne et des déclarations des conciles antérieurs.
    La tradition, dans l'Eglise, c'est ce qui est le plus vivant en elle, car c'est l'œuvre de l'Esprit Saint qui s'accomplit jusqu'à conduire à son achèvement ce qui a été inauguré Jésus.

    Le catholicisme est la forme de l'Eglise qui confesse le message chrétien, tel qu'il a été reçu des apôtres (lesquels l'avaient eux-mêmes reçu du Christ mort et ressuscité), en le transmettant de génération en génération (tradition), au travers d'une institution humaine organisée (société "Eglise") et rattachée à Rome, en tant que Rome représente le siège apostolique de Pierre.

    Excursus sur le vaudou
    Emmenés en esclavage en Amérique, les Africains ont emporté avec eux leurs croyances et leurs rites. Au contact d'une civilisation différente, cette religiosité semble avoir disparu, notamment dans les pays où la répression religieuse a été plus forte. Mais là où les Noirs étaient nombreux. elle a survécu. en se dissimulant sous un masque chrétien, qu'il soit catholique ou protestant.

    Quand, au seizième siècle, les colons français importaient des esclaves noirs dans l'île d'Haïti, ils voulurent leur faire oublier tout leur passé, en commençant par leurs différentes expressions religieuses. Ces noirs venaient de différents pays d'Afrique, ne parlaient pas la même langue, ne vénéraient pas les mêmes dieux traditionnels. Les colons leur imposèrent le baptême catholique et l'usage d'une seule langue, le français. A cette oppression, les esclaves trouvèrent une riposte en créant une nouvelle langue qui leur serait commune, le créole, et en adoptant un culte commun, le vaudou, qui maintiendrait leur unité en face des colons. L'imagination populaire, aidée en cela par les campagnes de dénigrement entreprises par l'Etat Haïtien et par l'Eglise catholique qui dénonçaient les pratiques superstitieuses, s'est forgée une description trompeuse du Vaudou comme culte de la couleuvre associé aux sacrifices d'enfants.
    L'orthodoxie
    Initiation aux religions - Page 2 LeonixetmichelcerulaireComposé de deux mots grecs, ce concept indique l'opinion juste, la foi véritable : l'orthodoxe est le fidèle de l'Eglise véritable fondée sur la foi juste. Dans ce cas, orthodoxe s'oppose à hétérodoxe, c'est-à-dire hérétique, à ce qui ne suit pas la foi définie par l'Eglise et qui adopte des chemins déviés au lieu de suivre la ligne décrite par le magistère ecclésial.

    Lors de la séparation entre l'Occident et l'Orient, datée de 1054, le terme d'orthodoxe sera réservé aux communautés byzantines, fidèles au siège apostolique de Constantinople.

    Rome et la Nouvelle Rome, Constantinople
    Le message chrétien a retenti en Orient : les premiers missionnaires ont été des Orientaux, ils ont adopté la langue de l'époque, le grec, qui servait aux échanges entre les nations et qui était la langue des premiers chrétiens. Dès la fin du deuxième siècle, le latin tend à se répandre comme seule langue de l'empire romain. La querelle linguistique va entraîner une méconnaissance et une séparation entre ces deux cultures religieuses.

    La séparation Orient-Occident
    Les historiens datent la séparation de l'Occident et de l'Orient de la dispute entre le patriarche de Constantinople, Michel Cérulaire, et le légat du pape, le cardinal Humbert, en 1054. Cette date est symbolique : elle ne fait que consommer ce qui était effectué depuis plusieurs siècles.

    Ainsi, le couronnement de Charlemagne, qui inaugurait la création d'un empire chrétien en Occident au profit des barbares ne fut guère apprécié à Constantinople : il ne pouvait y avoir qu'un seul empire chrétien, celui de la Nouvelle Rome. A ce déchirement s'ajoute une problématique théologique : la question de l'Esprit-Saint dans la Trinité. Les Espagnols puis les Francs vont ajouter une donnée au symbole de la foi défini par le premier concile de Constantinople (381) ; dans ce dernier, l'Esprit est présenté comme celui qui "procède du Père". Et voici qu'à cette formule se trouve uni le Fils : "L'Esprit procède du Père et du Fils". C'est la querelle connue sous le nom du Filioque.

    Les papes souhaitaient transformer la primauté d'amour et de fondation apostolique en une primauté juridique, en un pouvoir effectif sur les Eglises locales. La prétention des papes à diriger l'Eglise ne pouvait recevoir l'assentiment des Orientaux, qui voulaient conserver l'autonomie des patriarcats alors que Rome revendiquait un droit divin, par la succession de Pierre, à exercer une influence directe sur les patriarches de Constantinople, d'Alexandrie, d'Antioche et de Jérusalem.

    Michel Cérulaire, patriarche de Constantinople (1043-1058), était ambitieux. Simple laïc, il prit part à une conspiration visant à renverser l'empereur afin d'accéder au trône impérial. Cette entreprise échoua et Michel fut exilé : il se fit moine, dirigeant son ambition vers le siège patriarcal. Il devient patriarche ; et, convaincu de la dignité de sa charge, il rêve d'une papauté byzantine pour supplanter la papauté romaine. Aussi ne peut-il guère supporter les accords passés entre le pape et l'empereur, afin de protéger les chrétiens de Sicile envahis par les Normands, d'autant plus que la Sicile et une partie du Sud de l'Italie est placée sous la juridiction de Constantinople. La papauté visait à latiniser ces régions, mais la menace des Normands obligea Léon IX à chercher l'alliance de Constantinople, et à lui envoyer un légat, le cardinal Humbert qui voulait imposer partout la volonté de Rome. Devant la résistance de Michel Cérulaire, le cardinal essaya de le déposer, mais son clergé fit bloc pour le soutenir. Ne pouvant obtenir aucune conciliation, Humbert déposa, le 16 juillet 1054, sur l'autel de sainte Sophie une sentence d'excommunication, avant de quitter Constantinople. Michel Cérulaire, avec l'appui de l'empereur, convoqua un synode qui excommunia les légats pontificaux. L'irréparable ne fut atteint qu'en 1204, lors de la quatrième croisade, par le pillage de la ville et de ses églises, et la nomination d'un patriarche latin à Constantinople.

    Des chrétiens imprégnés par le mystère
    Depuis ses origines, l'Eglise orthodoxe se trouve plus ou moins naturellement portée par une très grande sensibilité face au mystère même de Dieu. La contemplation du Christ est le centre de toute l'existence chrétienne orthodoxe. En Christ, Dieu et l'homme ne font qu'un ; par le Christ, Dieu devient accessible à l'homme, qui trouve son humanité la plus pure et la plus authentique.

    Une Eglise qui célèbre la sainte liturgie
    La vie de l'Eglise orthodoxe est centrée sur la célébration du mystère eucharistique, par lequel le chrétien participe, dès aujourd'hui, à l'Eglise triomphante : la liturgie est un reflet de l'adoration céleste de la Trinité par tout le cortège des élus. C'est toute la communauté chrétienne qui célèbre la divine liturgie, et pas simplement les clercs.

    Une importance est accordée au icônes qui constituent un enseignement pour le peuple, en apportant un complément visuel à la célébration du mystère eucharistique : l'icône manifeste la présence de l'Invisible au coeur du monde.

    Le protestantisme
    Le protestantisme est issu d'une notion juridique : la protestatio, déclaration publique, solennelle et impérative. Si elle a un aspect négatif (témoignage contre quelqu'un), la protestatio implique un élément positif : le témoignage en appelle à un droit supérieur, plus ancien qu'il n'est pas possible de remettre en question.
    Une opinion répandue fait de la Réforme un mouvement de protestation contre les abus ecclésiastiques, un mouvement de révolte des princes allemands ou anglais contre le pouvoir du pape, qui avait un pouvoir temporel important, dans la légitimation des gouvernants. Mais, la Réforme repose sur des motifs et des causes religieuses, théologiques.

    La première manifestation de Luther sur la scène publique est la publication, la veille de la Toussaint 1517, de quatre-vingt-quinze thèses sur les indulgences, aux portes de la chapelle de Wittenberg. Le mouvement de la Réforme était mis en route : ces thèses mettaient le feu aux poudres.
    L'oeuvre personnelle de Luther (1483-1546)
    Initiation aux religions - Page 2 LutherparlucasCranachIssu d'une famille populaire embourgeoisée, Martin se destinait au droit, quand se produisit un appel mystique. Surpris au cours d'un orage, il invoque la protection de sainte Anne et promet d'entrer chez les moines, ce qu'il fait les semaines suivantes. Ordonné prêtre deux ans plus tard (1507), c'est une âme tourmentée et scrupuleuse, marquée par la grandeur de Dieu, en face de la faiblesse de l'homme.

    Tourmenté au sujet du péché et de l'enfer, la relative sécurité, apportée aux vivants et aux morts, par l'indulgence plénière accordée par le pape, ne fera qu'augmenter son trouble intérieur. Comment peut-on racheter, à prix d'argent, une grâce que Dieu accorde librement ? Ce que le Christ lui-même nous a procuré peut-il être augmenté par le mérite des saints ou par une intervention particulière de l'Eglise visible ?
    [quote]


    Jean Calvin (1509-1564)
    Initiation aux religions - Page 2 CalvinCalvin fut élevé dans la religion catholique, par une mère très pieuse et par un père chargé des intérêts de l'évêque de Noyon. Si son père le destinait au droit, et s'il ne lui refusait pas quelque charge dans la gestion de l'Eglise, le jeune Calvin manifestait, en 1529-1530, un esprit favorable à la Réforme. Pourtant, il aimait l'Eglise dans laquelle il avait grandi, mais le doute germait en lui, quant à sa véracité.

    Dans la nuit du 17 au 18 octobre 1534, éclate l'affaire des Placards : des affiches critiquaient la messe catholique. Cette affaire entraîne un début de persécution, et elle marque un tournant dans la vie de Calvin. Au début de 1535, il quitte la France pour la Suisse, là où la Réforme a été bien accueillie. Les bourgeois de Genève s'engagent, dès 1536, à vivre selon l'Evangile, au moment où Calvin arrive dans cette ville.

    A Genève, il commence à organiser l'Eglise évangélique, ce que les bourgeois de la ville souhaitaient. Et même s'il lui est arrivé d'être en conflit ouvert avec la ville de Genève, il lui gardera un attachement profond. Expulsé de Genève et résidant alors à Strasbourg, où il mène une existence paisible, il continue à penser à Genève où il reviendra pour organiser la vie de la communauté, tant au plan civil qu'au plan religieux. C'est dans cette ville qu'il meurt en 1564.
    Une nation adopte les principes de la Réforme

    Initiation aux religions - Page 2 Henry8Par ses origines et ses développements, l'Eglise anglicane ne peut que difficilement être située dans le courant de la Réforme, et l'anglicanisme peut paraître comme séparée de Rome, mais qui reste la plus proche du siège de Pierre. C'est que la séparation de 1534 se situe davantage sur un plan de la juridiction de la papauté que sur celui de la théologie.

    En 1531, Henri VIII, marié avec Catherine d'Aragon, mais désireux d'épouser Anne Boleyn, demande au Pape Clément VII, pour les évêques anglais, l'autorisation de déclarer la nullité de son premier mariage. Trois ans plus tard, irrité de n'avoir pas obtenu satisfaction, il coupe les liens qui unissent l'Eglise d'Angleterre à l'Eglise catholique. Il affranchit les évêques anglais de la soumission à l'évêque de Rome et qu'il s'octroie, sur l'Eglise anglicane, le pouvoir de juridiction de la papauté. Le pape, pas plus qu'un évêque étranger, ne pourra plus intervenir dans les affaires de l'Eglise d'Angleterre.

    D'une certaine façon, le schisme était consommé ; mais Henri VIII voulait maintenir chez ses sujets la foi catholique. C'est son fils, Edouard VI, sous l'influence de ses protecteurs, qui va entraîner l'Angleterre dans l'hérésie : il faut dire que le jeune Edouard n'a que neuf ans quand il monte sur le trône et qu'il n'atteindra pas sa dix-septième année. L'évêque de Canterbury, gagné aux idées de la Réforme, sera l'instigateur de l'anglicanisme.

    Le message chrétien proclamé dans le Protestantisme
    La Réforme est née du souci de ramener l'Eglise à la pureté de ses origines. Les premiers réformateurs visaient une réévaluation de la dogmatique en face des abus d'une certaine philosophie dans le cadre de la connaissance de Dieu. Le seul trésor de l'Eglise, c'est l'Evangile. qui lui donne la révélation parfaite de Dieu en Jésus-Christ. préparée par les révélations parcellaires de l'Ancien Testament.

    Le protestantisme se fonde sur la Parole de Dieu, connue par l'Ecriture. La Réforme n'a qu'un souci : assurer les fondations de l'Eglise sur le roc de l'Ecriture, en tant que Parole de Dieu audible par les hommes de tous les temps.

    L'islam
    Initiation aux religions - Page 2 01muhammadReligion révélée, venant après le judaïsme et le christianisme, l'islam semble pouvoir se caractériser par son universalisme. C'est un ensemble organisé qui règle la vie de chaque fidèle, ou musulman, dans ses moindres détails. Cette religion se réclame du même fondateur de la religion, Abraham. Après avoir chassé son premier fils, Ismaël, qui allait devenir le père du peuple arabe, Abraham n'hésita pas quand son Dieu lui demanda de sacrifier son fils, Isaac, sur le mont Moriah. Au moment où il s'apprêtait à l'immoler, un ange lui retint la main et lui désigna un bélier qu'il put alors offrir. Cette acceptation de la volonté de Dieu, sans résistance, fait d'Abraham le premier des musulmans car il n'a pas craint de se soumettre entièrement, au point de sacrifier son propre fils. Le terme "islam" signifie soumission à la volonté de Dieu, abandon à Dieu ; et le musulman est celui qui adopte cette ligne de conduite.

    Rassemblant les données fondamentales des deux autres religions monothéistes, l'islam va les organiser dans une unité de foi, basée sur des dogmes simples, intelligibles à tous les hommes, du plus lettré à l'analphabète le plus complet.

    Mahomet
    La Mekke était une cité caravanière sans richesse extérieure, située dans une zone absolument aride, mais connue par un sanctuaire, petit temple à forme cubique, d'où son nom : la Kaaba (cube), d'environ 15 mètres d'arête. D'après la tradition arabe, son origine est très ancienne, puisque ce sanctuaire aurait été édifié par Adam, détruit par le déluge, reconstruit par Abraham et Ismaël. C'est là qu'on adorait le Dieu unique, mais les pèlerins avaient fini par associer au culte d'Allah celui de nombreuses idoles, faisant de ce temple un panthéon de 360 divinités païennes.

    Initiation aux religions - Page 2 10mekkeOrphelin dès son plus jeune âge, Mahomet devient l'homme de confiance d'une riche veuve, Khadija : après lui avoir fait garder ses troupeaux, après l'avoir chargé de diriger une de ses caravanes jusqu'en Syrie, elle lui proposa le mariage. A La Mekke résidait en petit nombre des chrétiens pauvres et peu instruits, ainsi que des juifs riches et savants ; c'est auprès d'eux que Mahomet prit connaissance des inspirations et des dogmes des deux grandes religions inspirées par Dieu à ses prophètes.

    A l'instar des grands prophètes de l'Ancien Testament et de Jésus de Nazareth, Mahomet entreprit de faire des retraites dans le désert : c'est au cours de l'une d'elles que, le coeur purifié, il eut la révélation d'être envoyé par le Dieu unique pour annoncer les paroles mêmes d'Allah.

    Autour de lui, s'organisa une petite secte soucieuse de piété et du culte de l'Unique, dans le refus des idoles ; il ne devait pas tarder à rencontrer l'hostilité, lorsqu'il voulut restaurer le culte de l'Unique par l'abolition et la destruction de tous les faux dieux de la cité, rassemblés dans le panthéon de la Kaaba. Une véritable persécution s'ensuivit ; les plus faibles en pâtirent plus que les notables respectés par leur situation sociale.

    Alors que la persécution continuait dans sa ville, le Prophète chercha un refuge ; il le trouva à Médine, ville disputée entre des clans rivaux, où il pourrait rétablir la paix, en jouant le rôle de l'arbitre envoyé par Dieu. Précédé de quelques fidèles, environ soixante-dix hommes et femmes, il partit vers Médine, oasis située à 350 kilomètres au nord-ouest de La Mekke. C'était l'année dite de l'Hégire, c'est-à-dire de l'émigration, dont les musulmans ont fait le point de départ de leur ère : elle correspond à l'année 622 de l'ère chrétienne.

    Initiation aux religions - Page 2 13madina2A Médine, il avait pensé rallier à sa foi les juifs, mais ceux-ci lui reprochèrent sa méconnaissance de l'Ecriture et les anachronismes du Coran par comparaison à la révélation de Moïse, dont il avait déformé la portée.

    Son prestige politique apportait une sorte de preuve de sa mission prophétique, et il sut exploiter les victoires de ses troupes : il devint ainsi un véritable chef d'Etat, dont l'ambition était de reconquérir sa ville, la ville sainte de la Kaaba. En mars 628, il se présenta devant La Mekke avec une troupe de fidèles non armés pour y faire un pèlerinage au sanctuaire ; il ne fut pas admis, mais il réussit à imposer une trêve de dix ans et à remettre cet acte de piété à l'année suivante. Cependant, en janvier 630, les armées musulmanes occupèrent la ville de La Mekke, sans y rencontrer la moindre opposition : tous ses adversaires s'étaient ralliés en échange de quelques récompenses.

    Mahomet mourut après une courte maladie qui l'avait profondément affaibli, en janvier 632 ; ses proches surent prendre immédiatement en main la situation pour éviter la faillite de l'islam : la nomination d'un calife, c'est-à-dire d'un successeur, permit à cette religion de survivre à la mort de son fondateur.

    Le Coran, livre par excellence
    Initiation aux religions - Page 2 Coran02La mort de l'Envoyé d'Allah nécessitait la mise par écrit de son message, de son enseignement. Ainsi est né le Coran, le Livre sacré par excellence. A1 Qorân est le nom arabe de ce Livre. Ce livre rassemble les notions de transmission orale, de communication ou de prédication et surtout de récitation, le tout manifestant la révélation même de Dieu, transmise au premier chef à son Envoyé, Mahomet.

    Considéré non pas comme une Ecriture inspirée, comme c'est le cas de la Bible pour les juifs ou de l'Evangile pour les chrétiens, mais comme un message reçu immédiatement de la bouche d'Allah, le Coran a marqué l'organisation de la cité musulmane des origines jusqu'à nos jours encore.

    La simplicité des dogmes
    Le premier de ces dogmes est l'unicité absolue de Dieu : "J'atteste qu'il n'y a pas d'autre dieu qu'Allah. Allah est grand et il n'y a pas d'autre dieu que lui". Cependant, l'unicité absolue de Dieu n'interdit pas le fait qu'il puisse se présenter sous des facettes différentes auprès de ceux qui le craignent. C'est ainsi que la tradition, issue du Coran, aime à rappeler les 99 "noms" de Dieu qui manifestent les moyens dont Allah se sert pour se révéler. Le centième est resté caché, non manifesté aux hommes, mais révélé à celui à qui Dieu a bien voulu le dire.

    Initiation aux religions - Page 2 AllahLe second dogme est relatif aux envoyés de Dieu ; il y en a eu beaucoup depuis les origines jusqu'à Mahomet, d'Adam jusqu'à Jésus ; et chacun d'eux a prêché le monothéisme dans un cadre défini de l'histoire et de l'espace : ils ont été envoyés au peuple d'Israël uniquement, alors que Mahomet, le dernier des envoyés d'Allah, a reçu une mission universelle. C'est pourquoi la shahada se poursuit en ces termes : "J'atteste que Mahomet est l'Envoyé de Dieu". Tous les autres prophètes ont eu besoin de montrer les preuves de l'authenticité de leur mission : seul, le dernier Envoyé de Dieu n'a pas eu besoin de preuve : le don du Coran, parole même d'Allah, a été sa preuve, il n'a pas eu besoin de faire des miracles pour le confirmer.

    Le troisième dogme est celui des livres saints, que ce soit la Torah donnée par Moïse au peuple juif, l'Evangile donné par Jésus aux chrétiens, ou le recueil du Coran donné par Mahomet aux musulmans. Chacun de ces livres est directement envoyé par Dieu aux hommes, sans que les prophètes aient pu exercer une influence quelconque sur eux. Pourtant, seul le Coran n'a subi aucune transformation de la part des hommes, seul il présente un texte sûr de la Parole de Dieu.
    Les rites principaux
    [quote]


    L'obligation de la prière
    Initiation aux religions - Page 2 IslampriereA partir de la puberté, le musulman est tenu de prier au moins cinq fois par jour, en réponse à l'appel du muezzin qui, du haut du minaret, appelle tous les fidèles à la prière : à l'aube, à midi, au milieu de l'après-midi, juste après le coucher du soleil, et dans la nuit noire.

    Une fois par semaine, le vendredi, tous les hommes, mais les hommes uniquement se rassemblent à la Mosquée pour la prière de midi ; c'est pratiquement la seule forme communautaire de liturgie, et elle ne manque pas de se souligner par une grande forme de pression sociale.

    Deux grandes fêtes rythment l'année : la fête de la fin du jeûne de Ramadan et la fête du Sacrifice, en souvenir du sacrifice d'Abraham, le père des musulmans.
    L'obligation du jeûne annuel : le Ramadan

    Dans toutes les religions, le jeûne constitue une sorte de purification nécessaire à l'entretien de la spiritualité. Mahomet avait coutume de jeûner trois jours par mois quand il reçut cette révélation, rapportée par le Coran : "Le mois de Ramadan, pendant lequel le Coran est venu du ciel, est le temps de l'abstinence".
    L'obligation de l'aumône

    Pour marquer la fin du jeûne de Ramadan, le Prophète avait institué l'obligation pour les plus riches de faire l'aumône à ceux qui étaient les moins fortunés afin que ceux-ci puissent également fêter la rupture du jeûne.Initiation aux religions - Page 2 Pelemekke1

    Le pèlerinage à La Mekke
    Le véritable croyant, après avoir accompli toutes les formes explicites de sa foi (attestation de l'unicité de Dieu, prière légale, jeûne du ramadan, aumône) se voit invité à accomplir une cinquième et dernière démarche de foi : le pèlerinage à La Mekke, au moins une fois dans son existence, là où fut édifié le premier Temple pour les hommes, la Kaaba sainte.
     

    Etre croyant aujourd'hui
    Actualité de la foi
    Dans le contexte présent que traversent les Eglises, il est possible de se demander si la foi, si toute foi n'est pas en état de perdition. La parole de Jésus, rapportée par les évangiles : "Le Fils de l'homme, quand il reviendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?" n'est-elle pas une prophétie en marche vers sa réalisation ? Certes, le problème que rencontrent les Eglises, mais aussi toutes les religions, est celui du changement, et d'un changement rapide, qui se manifeste dans la vie courante, et par voie de conséquence dans le domaine de la vie religieuse. Alors, la question qui se pose, presque nécessairement, n'est autre que celle de savoir si la foi elle-même est susceptible d'un changement, d'une transformation.

    Dans la mentalité occidentale, la foi (du latin fides) se rattache immédiatement à la notion de fidélité (fidelitas). La foi serait alors une sorte de fidélité à un passé originel qui aurait une valeur encore aujourd'hui. Mais la foi est en même temps une aspiration vers un avenir. La foi est fidélité au passé, mais aussi tension et attente de l'avenir : elle ne peut être un carcan qui emprisonne, elle est puissance de libération pour un avenir meilleur.

    La foi authentique doit se situer dans la dialectique entre deux tentations. La première est celle du statisme, voire de l'immobilisme : sous prétexte de fidélité et d'intégrité vis-à-vis du dépôt de la foi des ancêtres, on s'enferme dans une systématisation de tout donné révélé précédemment ou dans une dogmatisation des enseignements antérieurs. La seconde tentation, au contraire, est celle du dynamisme, voire du progressisme excessif : sous prétexte du changement évident dans le contexte socioculturel, on se laisse emporter, au gré des fantaisies les plus diverses, et les plus contradictoires.

    La foi est, en effet, composée d'un élément éminemment subjectif, celui de la relation de l'homme à celui qu'il nomme Dieu, et d'un élément particulièrement objectif, celui de la médiation par une communauté d'hommes de ladite relation. Il importe à chacun de dire sa relation à Dieu dans le cadre même de cette médiation : l'homme n'est pas seul, il ne saurait être enfermé à l'intérieur de lui-même pour résoudre l'énigme du Dieu qui traverse son existence.

    Dans le christianisme, comme dans le judaïsme, comme en islam, le rôle de la communauté des croyants est précisément d'actualiser la foi de chacun des fidèles aux réalités de ce monde présent.

    Faut-il croire à l'Eglise ?
    Le terme d'Eglise est un mot emprunté au vocabulaire grec profane pour , exprimer un terme hébreu (kahal) signifiant la convocation. Ekklesia avait donc deux sens : d'abord. rassemblement d'hommes sur convocation personnelle, et, ensuite, peuple rassemblé et organisé par cette démarche.

    Le chrétien est celui qui répond à une invitation, à un appel de Dieu et se retrouve ainsi en Eglise. En ce sens, on ne se rallie pas à l'Eglise comme on se rallie à un parti politique, mais on se rallie à Dieu, en réponse à son appel, par la médiation de l'institution. L'Eglise n'a pas besoin de faire de la propagande et du recrutement pour accroître sa puissance ; elle est un moyen qui permet aux hommes d'exprimer leur relation à Dieu de manière visible.

    Quand le chrétien proclame qu'il croit à l'Eglise, il ne fait rien d'autre que de reconnaître cette dimension sociale et donc visible du rassemblement proposé par le Dieu invisible. Mais il sait que cette réalité n'a pas sa propre fin en elle-même : l'Eglise n'est pas un but, elle est appelée à disparaître, à la fin des temps, lorsque prendra corps ce que le chrétien appelle le Royaume de Dieu, qui a été promis par le Christ.
    Le christianisme se caractérise par une grande liberté : le chrétien est un homme libre, un homme qui ne peut se laisser enfermer dans une structure aliénante. Cependant, cette dimension de liberté n'est pas spécifique à la foi chrétienne : toute religion a une visée certaine : libérer l'homme des contingences qui sont les siennes dans le moment présent.
    La foi est-elle un opium ?
    La religion est l'affaire de l'homme. Seul, parmi toutes les autres créatures de l'univers, l'homme est capable de penser un être plus grand que lui, si grand même qu'il lui est, selon le mot fameux de saint Anselme de Canterbury, "impossible d'en penser un plus grand". Cet être, l'homme l'appelle Dieu.

    Même s'il est légitime de constater que les religions ont pu, au cours de l'histoire, exercer une puissance contraignante sur leurs fidèles, notamment dans le domaine de la moralité, il faut remarquer qu'elles ont aussi très souvent exalté la valeur de la liberté humaine, de la responsabilité individuelle en face des régimes socio-politiques les plus tyranniques. Pour ces religions, il n'était guère question de subjuguer la volonté personnelle, au risque de la violer, mais plutôt de mener l'homme jusqu'à la pleine réalisation de lui-même, dans l'usage de sa propre liberté, considérée comme sa perfection ultime.

    Les religions révélées apportent une réponse qui leur est spécifique : être libre, c'est faire la volonté de Dieu. C'est ce que présentait Gamaliel, un rabbin du judaïsme : "Accomplis SA volonté (celle de Dieu), comme si c'était ta volonté, afin qu'IL accomplisse ta volonté comme si c'était la SIENNE, Réduis à néant ta volonté devant SA volonté afin qu'il réduise à néant la volonté des autres devant la tienne". La liberté des fidèles du Dieu, quel que soit le nom que ces croyants attribuent à ce Dieu, c'est de se soumettre, en esprit et en vérité, à la décision divine pour eux : "Seigneur, que ta volonté soit faite". En ce sens, l'islam manifeste un grand bon sens quand il présente le croyant comme un "muslim", un "soumis" au Dieu unique, selon le modèle d'Abraham, le père de tous les croyants, qui n'hésita pas lorsque le Seigneur, son Dieu, lui demanda de sacrifier son fils unique.

    La soumission à Dieu n'est pas un esclavage, comme on pourrait le penser trop facilement : seule, une religion mal comprise pourrait être, selon le mot de Karl Marx, un "opium pour le peuple". La soumission à la volonté divine est une invitation à marcher de l'avant, un appel à progresser sans cesse vers l'avenir. Il est alors permis de penser et de dire que cette soumission est une voie de libération, un chemin de liberté. La foi est une recherche sans cesse renouvelée de Dieu, à travers toutes les vicissitudes et les contingences de la temporalité humaine. C'est dans la pesanteur de cette réalité de l'homme que Dieu se fraye un chemin pour venir à la rencontre du croyant.

    Dieu et l'homme se rencontrent sur les chemins de la liberté ; et pourtant, au coeur même de cette rencontre, Dieu ne cesse de rester une question pour l'homme : qui donc est-il ce Dieu qui ne fait que rechercher l'amour de l'homme ? qui donc est-il pour se mettre en quête de l'homme ?

    Croire, est-ce si facile ?
    La foi n'a jamais été facile, pas même pour ceux qui ont pu bénéficier d'expériences spirituelles de la présence de Dieu au coeur de leur existence. Il faut du courage pour croire, il faut du courage pour risquer son existence sur ce que, depuis Pascal, il est convenu d'appeler un "pari".

    Une atmosphère d'athéisme se répand partout : il n'y a pas un refus de l'idée de Dieu. On ne le combat pas directement pas plus d'ailleurs que l'on ne combat les croyants et les formes de religion ; on laisse simplement Dieu en dehors de tout circuit, en dehors du champ de la pensée et de la vie. On pourrait caractériser la place de Dieu dans le monde par la marque de l'absence. Autrefois, il n'était pas davantage perceptible immédiatement, mais les hommes ressentaient une présence. A l'heure actuelle, le souci des hommes est cantonné dans des réalités perceptibles : Dieu est situé en dehors de ce qui relève de l'intérêt immédiat. Nous vivons sous un régime d'athéisme pragmatique, dans lequel il est bien difficile d'exprimer la foi.
     
    Le courage de la foi, c'est le courage du croyant qui accepte de se soumettre non pas comme un esclave, mais comme un homme libre face à Celui qui lui permet d'être et de devenir chaque jour un peu plus homme. Le courage du croyant, c'est un renoncement à ce qui pourrait être considéré, comme un refuge dans un ciel paradisiaque, pour travailler à l'établissement d'un monde où règne plus de justice, plus de solidarité. Dire sa foi aujourd'hui, c'est se mettre au travail pour faire advenir la justice et la solidarité. Ainsi, croire n'est plus admettre une idéologie, mais fonder son existence sur une action positive commandée par le souci des hommes.


    _________________________________________________________________________________________________________
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:19

    L’animisme : La mythologie Dogon
    Initiation aux religions - Page 2 Ginna-Grand-Hogon_bd_FGU0314047-Copier



              Le tissage des causes et des effets crée un ensemble de relations un ensemble de mythes, de modèles, qui constituent une mythologie. Celle des Dogon, du Nord du Mali, nous est la plus connue, grâce à Marcel Griaule qui y vécut durant vingt-huit ans et qui y fut initié successivement à de nombreux degrés de la connaissance.

    Amma s’accouple avec la Terre une première fois et engendre le chacal, ou le renard pâle, qui apportera l’intelligence aux être humains. Un deuxième accouplement produira le Grand Non géré par le chiffre 8 et symbole de la perfection. Celui-ci, pour voiler la nudité de la Terre, sa mère, crée un voile de parole : la jupe, jupe est la seule parole dont dispose le chacal, en partage avec mère. Il pourra ainsi inspirer l’être humain mais ne pourra lui parler. Il voudra voler la jupe-parole et violera sa mère. Le saignement teint la jupe en rouge. La Terre est souillée par l’inceste et Am ne veut plus s’y accoupler. Il se reproduira seul et créera deux être un homme et une femme.

    Le Grand Nomo fera descendre huit petits Nomos sur la terre Le septième a la parole, le huitième crache les fils et les hommes reçoivent ainsi la deuxième parole : le tissage qui leur permet fabriquer des vêtements et de construire des maisons fermées a des portes. En même temps, le forgeron vole le système du moi et descend sur la Terre, par un fil. Ce système est représenté par le panier retourné (et aussi par le métier à tisser) : le fond carré, haut, indique les quatre points cardinaux avec les différentes étoiles et planètes, le bord du panier, en bas, dessine le chemin du soleil Quand le panier arrive sur la Terre, l’ancêtre forgeron, qui é tout mou, se casse en articulations : coudes, poignets, genoux et devient propre au travail. Il se dispute avec le septième petit Nomo et le tue. Celui-ci se répand dans la terre avec la parole qu’il portait. C’est la troisième parole qui rend la Terre propre à être labourée. Le septième petit Nomo se réveille de sa mort et aval huitième puis le recrache sous forme d’eau impure (les rivières de cailloux (le système social).

    Ces deux Nomos se fondront en une nouvelle unité : le Lébé. sous forme de serpent humide, celui-ci distribue chaque nuit l’humidité pour le lendemain. Il vient lécher le Hogon, le prêtre, dans son sommeil et l’enduit d’une humidité énergétique. Le lendemain Hogon distribue cette humidité, cette énergie à la société, pour la journée. Le Hogon ne doit pas transpirer car ce serait l’évapora brutale de la parole du Lébé. Donc le Hogon ne doit pas bouger Il doit rester couché toute la journée à l’ombre. Malgré cela, lagoutte qu’il transpire de temps en temps explique un accident, un désordre qui a lieu dans les heures qui suivent.

    Le tissu mythologique, destiné à couvrir et à cacher le chaos, est ici clairement exposé. Il est parole, donc invention, discours de l’homme et se déroule en trois nappes. Tout d’abord, la jupe cache la nudité de la terre-mère. Ensuite, le tissage permet de recouvrir les corps par les vêtements et de couvrir la terre de maisons fermées, bien fermées par des portes contre les puissances de la nature ; au même moment naît un système du monde parfaitement structuré. Enfin, l’étoffe-modèle pénètre la terre dans sa substance même, la rendant apte à être cultivée, c’est-à-dire à porter les marques de l’homme, sa culture, dans tous les sens du terme. Dans la foulée, se créeront les rivières, sans lesquelles une civilisation ne saurait exister, et les cailloux qui représentent le système social.

    Cette belle construction qu’est la mythologie des Dogon, cette parole totale, d’un ordre très serré, recouvre sans défaut le chaos des puissances naturelles. Dans ce – très bref — résumé, on rencontre déjà un grand nombre d’éléments de la vie de tous les jours : la terre, le chacal, le chiffre 8, la jupe, le tissage, la maison, le forgeron, le panier, le terrain cultivé, la rivière, les cailloux, le serpent, l’humidité, la transpiration, l’accident. Griaule en expose un nombre beaucoup plus grand et nous donne pour chacun les significations. Il serait évidemment trop long de les présenter toutes ici. Ce qu’il faut en retenir est que, comme au Zaïre, l’accident qui aura lieu quelque part recevra une explication : la transpiration du Hogon, inévitable dans ce climat tropical, justifie a priori toutes les anomalies de la journée. Sur l’insupportable chaos, l’homme plaque l’or d’un système explicatif où tous les éléments du monde connu, absolument tous, sont reliés. C’est le système mythologique. Rien ne reste inexpliqué, rien ne reste isolé, par peur du grand désordre. Ainsi la terre est recouverte de sentiers, de labours, de cultures, ainsi le corps est tracé de scarifications, de maquillages, de bijoux, ainsi la nature est recouverte d’une culture.

    Il est normal qu’avec une telle mentalité, tout changement soit vu comme un danger. Et que le mot développement, inexistant dans certaines langues africaines, se traduise alors par chaos !
    Vidéo : L’animisme : La mythologie Dogon


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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:25

    Le bouddhisme et le développement

    Initiation aux religions - Page 2 Z

    http://religions.savoir.fr/wp-content/uploads/sites/14/2012/04/bouddha_1.jpgLa pagode de Shwe Dagon à Rangoon, capitale de la Birmanie, st revêtue de l’or offert par les fidèles, ils acquièrent ainsi le mérite qui  leur promet une réincarnation meilleure. La construction des temples et l’entretien des communautés religieuses, très nombreuses, représentent un coût élevé pour une société agricole. Le fait est cité pour le Tibet par Tséwang Pemba (1975). Les cérémonies d’initiation des jeunes gens sont extrêmement coûteuses en cadeaux, en vêtements, en repas et demandent de longs mois, voire es années d’économie aux familles modestes.



    Pour le développement, une démographie galopante est un poids difficile à tirer. Or le bouddhisme a plutôt tendance à contrer les facteurs qui abaisse la natalité. Ceux-ci sont bien connus, ce mt le progrès économique, l’éducation des filles, les pratiques contraceptives et la baisse de la mortalité infantile (qui entraîne une »compensation). Si le bouddhisme propose aux filles une éducation comparable à celle des garçons (quoique Bouddha lui-même était pas très favorable à l’entrée des femmes en religion) et si le célibat des nombreux moines et nonnes est positif sous ce point de e, l’éloignement du matérialisme, l’indifférence au planning familial dans un contexte où l’individu est dépassé par l’univers, la condamnation de l’avortement et le manque d’intérêt pour les soins de santé primaires encouragent finalement la croissance démographique. En comparant les différents pays bouddhistes on constate que la fécondité est élevée, sauf pour les plus riches d’entre eux : la Thaïlande et le Sri Lanka ; ils présentent en effet des indices de fécondité très bas : 2,1 et 2,5, qui correspondent à un sin renouvellement de leur population. Les autres doivent subir valeurs dramatiques : de 3,9 à 6,7 naissances par femme !



    L’acceptation de la souffrance, de la vieillesse, de la maladie de la mort est radicalement opposée à la tradition européenne L’homme y refuse ces contraintes et aménage son milieu pour réduire au maximum. C’est son objectif permanent. L’occidental transforme le monde plus qu’il ne travaille sur lui-même et appelle « développement » cette transformation. En général, l’activisme sociopolitique est contraire au bouddhisme, centré sur l’acceptation d’un monde de souffrance et sur son dépassement par sa se spiritualité. Les actions sont citées comme des exceptions : manifestation des moines tibétains contre l’annexion de leur pays par la Chine, fondations d’écoles, d’hospices et d’hôpitaux au japon Effectivement la doctrine du Bouddha ne semble pas incite l’action, à la possession, au développement : elle affirme que 1’origine de la souffrance provient du désir, de tous les désirs qui peuvent jamais être satisfaits que momentanément et qui ont pi origine la conviction d’une existence personnelle, du moi. Dès 1 la solution s’impose : supprimer les désirs pour se libérer du karma et finalement atteindre le nirvana. La seule action utile porte sur même et vise à dissoudre le moi.



    Comme on l’a vu dans l’exemple thaïlandais, la liberté, la tolérance, l’ouverture, la paix qui résulte de l’esprit bouddhiste sont des éléments positifs pour le développement, dans le sens où nous l’entendons. Par contre, le manque de modèle de hiérarchie l’absence d’esprit économique porterait les fidèles aux antipodes de la croissance matérielle.



    Il faut faire ici la distinction entre la hiérarchie fonctionnelle« d’une entreprise et la hiérarchie religieuse qui pèse sur la culture sur les esprits, sur les mentalités. Si le bouddhisme ne propose de modèle de hiérarchie fonctionnelle, il ne présente non p aucune hiérarchie contraignante, aucun pape, aucun clergé i émettrait des lois et en surveillerait l’exécution, au moyen de cours de justice, de sacrement de confession ou de complexe culpabilité. Il apparaît donc que cette religion ne soutient pas développement dans le sens où elle ne lui apporte pas de structure sociale mais qu’elle ne l’empêche pas non plus par des freins dictatoriaux. De ce point de vue, le bouddhisme se tient en dehors de la production.



    Enfin, l’opposition à la marchandise est totale. En renonçant au signe, cette religion dit non aux plaisirs culturalisés, donc à la consommation. En anéantissant le moi et l’image narcissique, elle refuse les objets dans lesquels l’homme occidental se retrouve, miroirs par lesquels il constitue son moi.



    Par ailleurs, un certain immobilisme est aujourd’hui constaté dans ces pays : le message de l’éveil ou « principe de conscience » de Bouddha est oublié de nos jours. « Nous sommes pris dans un système compliqué de rites et de rituels, d’idoles et de dieux, de traditions et de dogmes », constate Tséwang Pemba au Tibet. Ces populations s’éloignent du bouddhisme des origines, au profit d’us et de coutumes qui perdent progressivement leur sens. D’autres éléments, principalement asiatiques, s’affirment comme moteurs de l’action. C’est grâce à ces derniers et à l’effilochement du marxisme que les pays bouddhistes connaissent aujourd’hui l’amorce d’un développement.



    En conclusion, on peut dire que, si le bouddhisme contient peu de facteurs bloquant le développement ou s’y opposant, il ne le stimule certainement pas. L’argument initial de l’opposition de cette religion à la consommation, donc à la production, peut être retenu. Les éléments de la croissance dans les pays bouddhiques proviennent dans leur grande majorité d’autres domaines, asiatiques ou occidentaux.

    Vidéo : Le bouddhisme et le développement


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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:30

    La religion bahaï

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    Rigine et définition de la religion Bahaï :

    Initiation aux religions - Page 2 Bahai-progressive-revelation Initiation aux religions - Page 2 Images?q=tbn:ANd9GcRoiZ_Wsry32NlCh4QeuHElL8Nv4VZDa7y8esNcFcAvldK8zIJpCPaU8BMs6YnyZ16ViZY&usqp=CAU
    Initiation aux religions - Page 2 Image

    Une des plus récentes des religions révélées, le bahaïsme, comme son appellation laisse entendre, est fondée en 1963 par Baha’allah, un perse dont le nom signifie en arabe « splendeur de Dieu » et qui se dit porteur d’un message divin portant sur l’unité et l’union de la race humaine.


    Cette religion commence à prendre de l’ampleur et à avoir une grande influence ces dernières années. Nous comptons plus que 7 millions de croyants répartis dans plus de 189 pays en 2011 et leurs publications existent en 800 langues. Les disciples bahaïs s’organisent autour de 10 000 centres dont le centre mondial est situé à Haïfa, en Israël. Ce sont les méandres de l’histoire des religions qui justifient la présence du centre mondial bahaï en terre sainte .Le but premier de cette religion est d’unir l’humanité en une société mondiale, où la justice, l’équilibre et le bonheur règnent.


    Afin de parvenir à atteindre ce but, la religion Bahaï a favorisé certains préceptes. Citons par exemple l’égalité des droits de l’homme et de la femme, l’abolition de toute sorte de préjugés, de religion soit-il, de race ou de nationalité, le rejet des extrêmes qui concernent la richesse et la pauvreté, trouver un rapport harmonieux entre la science, la religion, la raison et la spiritualité, de rendre l’éducation universelle…


    Les écrits bahaïs ont traité plusieurs sujets et ont abordé des questions existentialistes d’une manière idéaliste et peu semblable aux autres grandes religions, en l’occurrence le judaïsme, le christianisme et l’islam.


    Les bahaïs et Dieu :
    Comme toutes les autres religions, la religion bahaïe croit en un seul Dieu, surhumain et surnaturel, qui a créé l’univers et ses créatures. Dieu est omnipotent et omniscient, c’est-à-dire qu’il a le pouvoir et le contrôle absolu ainsi que la connaissance parfaite des créatures et de ce qui se passe dans l’univers. Dans ce contexte, Baha’allah a dit :


    « Louange à l’unité de Dieu, et honneur à l’incomparable et très glorieux Seigneur souverain de l’univers qui, du néant le plus complet, a créé la réalité de toutes choses ; qui, de rien, a extrait les éléments les plus raffinés et les plus subtils de sa création et qui, délivrant ses créatures de l’abaissement où les tenait l’éloignement de sa présence, et les sauvant des périls de l’extinction finale, les a reçues dans son royaume d’incorruptible gloire !… » (Extraits des écrits de Baha’allah, Bruxelles, Maison d’éditions Baha’ies, Edition 1990.


    Baha’allah a, en outre, enseigné que nul esprit ne peut comprendre ou représenter Dieu correctement. Ainsi, la connaissance de Dieu ne peut parvenir à connaitre son essence mais plutôt à connaitre ses attributs et ses qualités.


    Les bahaïs et le corps humains :
    Le bahaïsme admet que le corps humain est le véhicule de l’âme et donc déconseille vivement toute forme d’ascétisme et d’abnégation extrême. Delà, la religion bahaï appelle à un nombre de lois qui font un mode de vie afin d’entretenir et soigner le corps humain : une hygiène quotidienne, une alimentation saine, une utilisation modérée de certaines pratiques… Par conséquent, une préservation du corps et une attention particulière à lui pour le préserver favorise une croissance spirituelle et un développement humain.


    Néanmoins, le bahaïsme admet qu’il y a des situations incontrôlables et des facteurs physiques que nous ne pouvons pas changé tels que le handicap ou la faiblesse génétique. Cependant, ceci ne doit en aucun cas influencer sur la croissance spirituelle et émotionnelle de l’individu.


    Les bahaïs et la dichotomie bien / mal :
    La religion bahaïe ne croit pas au péché originel et à la doctrine qui considère que l’être humain possède de mauvais éléments dans sa nature. En effet, les facultés inhérentes et les forces donnés par Dieu sont forcément bonnes et bénéfiques à la croissance spirituelle selon un libre-arbitre.


    Suivant la logique de l’absence (le noir est l’absence de lumière, le froid est l’absence de la chaleur…), le bahaïsme nie toute existence du diable, de Satan. Ainsi, le mal est expliqué par l’absence du bien. Selon les écrits de Baha’allah, la figure de Satan dans les précédentes religions n’est que symbolique. Ce n’est que la nature inférieure de l’individu qui l’empêche de s’harmoniser avec sa nature spirituelle.


    Dans la même interprétation, l’éden et l’enfer ne sont pas des lieux réels, mais des états spirituels et psychologiques du rapprochement ou de l’éloignement de Dieu.Le bien et le mal deviennent alors le vrai ou le faux, ou plus exactement ce qui aide à la croissance spirituelle et ce qui nuit à cette croissance.A partir de là, la raison pour laquelle l’être humain ne retrouve pas un épanouissement et une croissance spirituelle est qu’il s’est détourné de la vrai religion et des facultés données par Dieu.


    Les bahaïs et l’égalité des sexes :
    Le bahaïsme est la première religion a proclamé l’égalité entre l’homme et la femme. Elle indique aussi que toute inégalité apparente entre les capacités des deux sexes est due à un manque de possibilité.


    Les bahaïs et l’équilibre entre progrès social et spiritualité :
    Convaincus que le bonheur et le bien-être social dépondent du respect des lois et des préceptes cités par le fondateur de la religion, les bahaïs louent ainsi certaines règles de conduite morales, sociales et religieuses. Comme les dix commandements, ils interdisent le mensonge, le meurtre, le vol, , la colère et la haine, le blasphème et le faux serment… De plus, ils interdisent les jeux de hasard, la consommation de l’alcool et de la drogue, l’adultère…En parallèle, ils prônent la modération, l’honnêteté et la confiance, le dévouement, la pureté, la générosité, l’unité, la tolérance, le travail…


    Vidéo : La religion bahaï


    _________________________________________________________________________________________________________
    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:32

    Hindouisme et développement
    Initiation aux religions - Page 2 Hindouisme-religion-ou-philosophie



     Les dépenses qui soustraient des ressources importantes au développement ne manquent pas. A de nombreuses occasions, des sacrifices coûteux garantissent un sort meilleur. Les fêtes religieuses, et surtout les mariages, entraînent des endettements pour des années, quelquefois pour la vie : les intérêts de la dette étouffent l’économie ménagère. Les mariages précoces et la purification, qui remplace l’hygiène, accroissent la natalité. Par ailleurs, l’immense cheptel indien ne peut être exploité. Des hôpitaux sont même construits et entretenus pour les animaux. Enfin la corruption gangrène tous les échelons de l’administration.


    Les facteurs négatifs pour la santé et l’éducation ne manquent pas non plus. Le féodalisme maintient les pauvres dans la misère e empêche la consommation. Il fige la structure des productions agricole et artisanale et empêche leur croissance ; il ne laisse pas d’ouverture à l’avènement de l’industrie, du moins dans les campagnes: D’autre part les fêtes sont nombreuses, elles durent plusieurs jour: jusqu’à dix-huit, et diminuent le temps de travail. Travailler consiste d’ailleurs à répéter les gestes attachés à la profession de sa caste  non à atteindre un rendement, une efficacité, une production. E conséquence, la qualité des produits industriels est lamentable.


    L’hindouisme oriente l’intellect et l’inconscient dans le sens d sous-développement. L’individu n’est pas responsabilisé, ni vis-à-vis de lui-même dans sa vie actuelle, ni vis-à-vis des autres, ce qui r favorise ni le travail personnel, ni le travail en groupe, comme 2 Japon par exemple, ni la vie en société urbaine. Les droits c l’homme sont bafoués par le castéisme. Le statut dévalorisant de femme prive l’Inde d’un facteur familial positif, notamment par le fait qi l’éducation, dans une société qui était privée d’écoles, se faisait p les femmes. De plus, il anéantit le contrôle des naissances.


    Le système des castes relève d’une colonisation indigène. Il t totalement intériorisé. Les gens préfèrent y rester car ils s’identifient à leur caste et donc s’y conforment spontanément. Ils sont conditionnés par les devoirs de leur groupe et conséquemment les acceptent sans réserve et sans réflexion. S’ils ne sont pas poussés p la nécessité, il exécutent le travail de leur caste par la répétition gestes automatiques, dans le sentiment du devoir accompli, sa aucun soucis d’efficacité. La motivation profonde est minée p l’impression de défaite due à la nostalgie d’une Inde perdue, due l’impossibilité d’améliorer sa vie, inhérente au cycle des réincarnations dons. La psychologie de la misère est axée sur la dépression : l’image de soi est rendue négative par le mépris des castes supérieures.

    La représentation du monde est magique et donc les relations de cause à effet ne sont pas scientifiques, confirmées par l’expérience, ne sont pas rationalisées. Elles sont répétitives de la tradition et par conséquent opposées à la définition du développement, nouveauté est refusée, donc l’invention. Enfin, l’écriture favoris« répétition aveugle, elle cadastre la société et la hiérarchise sel une échelle de pouvoir et de richesse, elle fige le système par le texte, par la lettre.

     
    Vidéo : Hindouisme et développement


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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:35

    L’animisme ou la peur du chaos

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    Il semble que l’animisme soit le fondement spirituel de l’humanité. Le chamanisme, issu du nord de l’Asie, voyagea avec les Mongoloïdes à travers la Chine, le Japon et l’Asie du Sud-est d’une p Vers l’Ouest, il franchit le détroit de Béring et couvrit l’Amérique du Nord et du Sud jusqu’à la Terre de Feu. L’Europe archaïque aussi vécut ses « religions naturelles » et l’Afrique ne s’en est jamais vraiment défaite.


    L’orage, la pluie, le soleil, la naissance d’un enfant, la maladie, la  mort surgissent n’importe quand, sans cause apparente. L’homme s’interroge. Face au grand désordre, au chaos qui le terrifie invente des raisons, il fabrique des relations, des lois « naturelle Ces explications vont le rassurer. Et elles le rassureront d’autant p qu’il aura réussi à tout expliquer. Rien ne sera laissé au hasard, chaque effet trouvera une justification. Le chaos général sera recouvert d’un tissu de relations de cause à effet, sera revêtu d’un ordre impeccable. Quoi de plus tranquillisant qu’un monde bien rangé ?




    Si une branche tombe sur un habitant de la forêt du Mayumbe, dans le Bas-Congo, et le tue, tout le village se réunit et recherche la cause, la raison qui a fait tomber la branche. Elle n’est certainement pas tombée par hasard (ce serait beaucoup trop inquiétant car alors cela pourrait arriver à tout le monde), c’est que quelqu’un l’a fait tomber, c’est que quelqu’un a jeté un sort au malheureux ! A force de chercher qui aurait bien pu en vouloir à la vie de la victime, un jeune garçon en l’occurrence, des convictions finissent par se dégager : 

    ce pourrait être la mère par exemple. En effet, on se rappelle que la dot qu’elle avait reçue lors de son mariage était plutôt pauvre et qu’elle se sentait une épouse au rabais. La preuve en était qu’elle n’avait eu que des filles coup sur coup et que ce n’était qu’au neuvième enfant qu’elle avait eu un garçon, justement celui qui venait de mourir. Cela aurait été pour elle une belle vengeance d’éliminer le seul guerrier de son mari ! Un moyen de le faire souffrir au plus profond de son orgueil de mâle ! Mais, à la réflexion, on se dit que cette mère n’ayant finalement plus de fils pourrait bien être répudiée, et que ce ne serait pas pour elle un grand avantage car une fois « en chômage de mari », une femme qui ne fait que des filles, ou presque, n’a aucune chance de refaire sa vie. Le village cherche donc un autre assassin… et le trouve ! La mère de l’épouse avait été véritablement humiliée par cette dot ridicule, elle avait vraiment une raison d’en vouloir au mari. Cependant elle ne pouvait rien contre lui, n’étant pas située dans sa ligne maternelle à lui. 

    Elle ne pouvait donc que s’en prendre à son petit-fils et atteindre par là son gendre dans son trésor le plus cher. C’est certainement elle qui aura ordonné à la branche de tomber ! Les discussions se poursuivent tard sous l’arbre à palabres. Elles peuvent même durer plusieurs jours. Mais à la fin, la belle-mère finit par considérer elle-même, ainsi qu’on le lui suggère aimablement, qu’elle avait de bonnes raisons pour souhaiter la disparition. En y réfléchissant bien, aidée par le vin de palme et par les paroles sages et persuasives des anciens, elle finit par avouer que, effectivement, elle avait souhaité à plusieurs reprises la disparition du fils de l’indélicat et qu’elle avait, en quelque sorte, appelé sa mort ! La société conclut qu’elle lui avait jeté un sort, qu’elle était très forte et qu’il valait donc mieux la craindre et lui vouer un respect, voire une admiration, à la hauteur de son pouvoir. Enfin, le village est soulagé ! L’accident a reçu son explication ! Et c’est dans le sentiment d’avoir de justesse échappé aux terribles forces de la nature, une fois encore, que les fêtes de l’inhumation peuvent commencer !


    _________________________________________________________________________________________________________
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:37

    Caractéristiques clés des religions Initiation aux religions - Page 2 Bible

    La religion est un ensemble de croyances et de pratiques basées sur un récit expliquant la relation de l'homme avec l'univers. Deux caractéristiques semblent universelles : la présence d'une cosmogonie et le caractère transcendant de l'homme. 

            Elle répond aux questions d'où viens-je et où vais-je ? Il s'en suit qu'une religion est une sorte de "philosophie suprême" qui va guider l'homme au cours de son existence en répondant à sa question de chaque instant : que dois-je faire ?

    Le classement des religions est très difficile au vu de leur complexité et de leur élaboration par ajouts successifs et assimilations qui s'est déroulée sur plusieurs siècles voire millénaires. En voici quand même un qui est forcément très réducteur. Pour plus de détails, voir les explications ci-dessous.


    [th][/th][th]Judaïsme[/th][th]Christ.[/th][th]Islam[/th][th]Boudd.[/th][th]Hind.[/th][th]Taoïsme[/th][th]Zen[/th][th]Âge en années[/th][th]Pratiquants en millions en 2005[/th][th]Principe supérieur[/th][th]Finalité de l'humain[/th][th]Finalité du monde[/th][th]Exclusivité[/th][th]Application[/th]

    3000

    2000

    1500

    2500

    4500-3500

    2200

    1500

    14

    2100

    1300

    376

    900

    inconnu

    inconnu

    monothéiste

    monothéiste

    monothéiste

    polythéiste

    mono, poly, mon, ath

    moniste, panthéiste

    polythéiste

    au-delà éternel

    au-delà éternel

    au-delà éternel

    réincarnation puis libération

    réincarnation puis libération

    immortalité

    réincarnation puis libération

    fin du monde terrestre

    fin du monde terrestre

    fin du monde terrestre

    cycle destruction création

    cycle destruction création

    cycle destruction création

    cycle destruction création

    exclusif

    exclusif

    exclusif

    non exclusif

    non exclusif

    non exclusif

    non exclusif

    Société

    Société

    Société

    Individu

    Individu

    Individu

    Individu
    Monothéisme (un seul Dieu distinct du monde), polythéisme (plusieurs Dieux) et panthéisme (identification de Dieu avec le monde).


    Naissance et état actuel 
    Évolution historique
    Oeuvres et maitres 
    Règles et rituels
    Type du principe supérieur 
    Manifestations
    Origine du monde 
    Fin du monde
     
    Naissance et état actuel de la religion

    Judaïsme - Le judaïsme actuel est né après le retour de l'exil de Babylone (586 av. J. C.) et c'est constitué durant les premiers siècles de notre ère. 
    Depuis le milieu du XXe siècle, le nouvel État d'Israël, recouvrant en partie la région de Palestine, regroupe les communautés judaïques. Ces dernières comptent 14 millions de fidèles.

    Christianisme - Résurrection de Jésus (Pâques) et don de l'esprit saint (vers 30 ap.. J. C.). 
    Comporte trois grands courants : catholicisme, orthodoxie et protestantisme. Avec 1,75 milliards de baptisés, il est la première religion mondiale. Son implantation se déplace de l'Europe et les États Unis vers l'Amérique du Sud et l'Afrique.

    Islam - Émigration de Mahomet le prophète (570-632), en 622 ap. J. C., de la Mekke à Médine et naissance du premier État islamique. 
    Les deux principaux courants sont les sunnites et les chiites, c'est la deuxième religion de la planète avec 1,1 milliards de croyants. Son implantation géographique se déplace du Proche-Orient vers l'Asie du Sud-Est.

    Bouddhisme - Religion de l'éveillé fondée aux VIe et Ve siècles av. J. C. par le Bouddha historique Shâkyamuni en réponse à la question philosophique du cycle des renaissances (Samsâra). Le Bouddha considère que la vie est éphémère, impersonnelle et donc douloureuse. 
    La quatrième religion mondiale avec 350 millions de pratiquants dont 98% en Asie.

    Hindouisme - Religion d'origine mythologique, l'hindouisme ne connaît ni fondateur, ni canon fixe. Ce mot recouvre les structures et institutions religieuses et sociales traditionnelles de l'Inde ; en Inde il est appelé Sanâtana-Dharma, la " Religion éternelle ". 
    C'est la troisième religion du monde avec 800 millions de fidèles dont 95% vivent en Inde.

    Taoïsme - On range sous le terme générique de Tao-chiao toutes les écoles et les branches du taoïsme religieux en Chine ayant pour objet la quête de l'immortalité. 
    Les fondements sont ceux du taoïsme philosophique ainsi que la préexistence de plusieurs écoles qui recherchaient déjà l'immortalité. 
    La synthèse entre ces différents courants s'opéra approximativement entre 220 et 120 avant J. C., à l'instigation des mages taoïstes.

    Zen - mot japonais, Chan en chinois et Dhyâna en sanskrit, désigne une école du bouddhisme Mahâyâna qui se développa aux VIe et VIIe ap. J. C. siècles grâce à la fusion du bouddhisme Dhyâna importé en Chine par Bodhidharma et du taoïsme.

    Autres religions - religion syncrétique chinoise (180 millions), animistes et religions tribales (80 millions), sikhs, chamanistes, confucéens, baha'is, jaïnistes, shintoïstes... 
    On n'oubliera pas aussi qu'il y a environ 900 millions de personnes sans religion, 250 millions d'athées et 100 millions d'adeptes des nouvelles religions.
     
    Évolution historique de la religion

    Judaïsme - 200 av. J. C. à 100 ap. J. C., le Tanakh dont la Torah est constitué. 
    200 ap. J. C., standardisation des lois orales dans la Mishnah. 
    450 et 550 ap. J. C., rédaction des Talmud de Jérusalem et de Babylone qui commentent les textes précédents et apportent de nouvelles lois. 
    1250-1300 ap. J. C., publication de la Zohar qui a commencé la Kabbale, interprétation ésotérique de la Torah. 
    1488-1575 ap. J. C., écriture du Shulhhan Arukh, le code des lois juives. 
    1700-1760, fondation du mouvement Hassidisme en réaction à l'académisme régnant dans le judaïsme. 
    1820-1860, développement du judaïsme orthodoxe opposé à la modernisation. 
    Milieu 1800, début du judaïsme libéral ou réformé.

    Christianisme - 70(+/-10) évangile selon Marc, écrit à Rome. 
    80(+/-20) évangile selon Matthieu, basé sur Marc et Q, le plus populaire au début du christianisme. 
    80(+/-20) évangile selon Luc, basé sur Marc et Q, les Actes des Apotres de Luc. 
    95(+/-30) évangile de Jean, Épîtres de Jean et l'Apocalypse de Jean. 
    XIe siècle, Grand schisme d'Orient entre l'église. de Rome (catholicisme) et celle de Constantinople (orthodoxie). 
    XVIe siècle, Réforme. Naissance du protestantisme.

    Islam - 610, première révélation du Coran à Mahomet dans la grotte de Hira qui durera pendant 23 ans jusqu'à sa mort. Mahomet était illettré, son entourage a donc retranscrit, souvent après mémorisation, ces révélations sur différents supports. 
    vers 650, le calife Uthman, standardisa le Coran, fit détruire les anciennes versions et envoya des copies dans tout l'empire islamique. 
    632, à la mort de Mahomet la question de sa succession fut à l'origine du premier grand schisme de l'islam. Les musulmans sunnites reconnaissent le califat et les musulmans chiites reconnaissent la succession du prophète par Ali, le cousin et beau-fils de Mahomet. Ali fut assasiné par un kharijite en 661 qui appartient à la troisième principale branche de l'Islam plus démocratique. 
    656, première guerre interne de l'Islam (Fitna) suite à l'assassinat du calife Uthman et à la Batille du Chameau. 
    683, seconde Fitna lors du conflit entre les Omeyyades. 
    Du VIIIe siècle au XIVe siècle, âge d'or de la science arabe. 
    XVIII et XIXème siècle, les régions islamiques tombent sous l'influence des puissances impériales européennes.

    Bouddhisme - mi-VIe à mi-Ve av. J. C., bouddhisme primitif enseigné par Bouddha 
    à partir de mi-IVe av. J. C. éclatement en différentes écoles suivant leur interprétation de la doctrine 
    A partir du Ier ap. J. C., apparition du Mahâyâna avec ses 2 grands courants : le Mâdhyamaka et le Yogâchâra. 
    Après le VIIe, avènement du bouddhisme tantrique et après le XIIIe le bouddhisme s'éteint presque totalement de son pays d'origine, l'Inde, mais s'expatrie et s'adapte aux croyances locales de chaque pays d'accueil.

    Hindouisme - Jamais la Loi éternelle ne s'est fermée aux nouvelles idées, ni aux nouvelles sagesses ; c'est pourquoi elle a réussi à survivre sans interruption jusqu'à nos jours. 
    Le Tantrisme, qui traite principalement de l'énergie divine, a influencé l'hindouisme. 
    L'influence du bouddhisme, de l'islam, du christianisme, des jaïna et des parsis contribua également à l'évolution historique et religieuse du Sanâtana-Dharma 
    Les principaux mouvements religieux actuels en Inde sont le vaishnavisme, le shaivisme et le shaktisme. Certaines doctrines sont hétérodoxes car elles refusent l'autorité des Védas.

    Taoïsme - Parallèlement à l'intégration et l'unification de multiples courants, on vit tour à tour l'obédience aux textes de Lao-Tzu, l'approche alchimiste et le retour à une morale stricte. 
    Au VIe siècle, les alchimistes se détournèrent de la recherche d'un Élixir externe pour orienter leur quête vers l'Élixir interne. 
    Au VIIe siècle, le taoïsme devint officiellement religion d'État. Plus tard, un canon taoïste (Taotsang) fut constitué par compilation, puis imprimé pour la première fois ; grâce à la faveur impériale, le taoïsme connut alors une grande prospérité. 

    Les différentes écoles s'unifièrent de nouveau au XIIe siècle allant jusqu'à assimiler des éléments du Confucianisme et de bouddhisme zen.
    Zen - La légende raconte que le Dharma du Bouddha se serait transmis sans aucun mot jusqu'à Bodhidharma, vingt-huitième patriarche indien. Ce dernier importa la religion en Chine au début du VIe siècle. En deux siècles se constitua la religion Chan avec notamment la fusion avec le Tao du taoïsme. 
    La grande époque du Chan en Chine aura lieu au cours de la dynastie T'ang et au début de la dynastie Sung. Puis son déclin arrivera et le Chan s'exportera au Japon au XVIIe siècle. 
    Au XVIIIe siècle le rinzai-zen (seule école à avoir survécu des sept chinoises) déclinant fut réformé ce qui lui donna un nouvel élan. 
    Aujourd'hui, le zen semble intéresser de plus en plus d'occidentaux, dont certains le pratique complètement, ce qui pourrait annoncer un nouveau déplacement géographique de la religion.
     
    Oeuvres sacrées et maitres à penser

    Judaïsme - La Torah (5 premiers livres de la bible) rédigée par Moïse au XIIIème siècle avant notre ère, puis de -II à +II la Michna, de +II à V la Guemara qui forment le Talmud (interprétations de la Torah). Le reste de la bible est reconnu mais ignoré.

    Christianisme - La Bible ("les livres", depuis -VI jusqu'au +IV) : écritures juives + 4 évangiles (Matthieu, Marc, Luc, Jean vers 70-80 et 100 pour Jean) ...

    Islam - Le Coran est la parole de Dieu recueilli par Mahomet le prophète, il n'a été complètement écrit qu'environ un demi-siècle après la mort du prophète. Le musulman reconnait la Torah et l'Évangile mais les considère falsifiés tandis que les Psaumes ne fournissent aucune loi nouvelle.

    Bouddhisme - Deux textes sont fondateurs : les Quatre Nobles Vérités et le Noble Sentier octuple qui permettent d'atteindre le Nirvâna.

    Hindouisme - Dès l'arrivée des peuples indo-européens en Inde ; laquelle marqua le début de l'ère védique, les prophètes, les saints et les Avatâra rassemblèrent dans les Shruti (la Révélation) les connaissances et les vérités spirituelles, les Védas (à partir de 1500 av. J. C.) et les Upanishad en font partie. Puis vint les Itihâsa, à caractère historique, contenant notamment deux grands poèmes épiques du Râmâyana et du Mahâbhârata. Enfin, les Purâna expliquèrent à l'aide de légendes et de récits concrets les Shruti dont le sens populaire devenait obscur.
    Taoïsme - Les philosophies de Lao-tzu, Chuang-tzu et Lieh-tzu (350-250 avant J.-C.) constituèrent la base du taoïsme philosophique d'où dérive celui religieux. 
    Le livre Tao (voie) Te (vertu ou force) King (classique), composé vers le IVe ou IIIe siècle av. J. C., comporte 5 000 caractères et fonde le concept du Tao. 
    Le livre de Chuang-Tzu reprend les thèmes du Tao-Te King et comporte 33 chapitres. Pour l'auteur, les plus grands biens de l'homme sont l'harmonie et la liberté.

    Zen - La transmission de l'enseignement du zen se fait en dehors des écritures et ne dépend pas des mots, donc il n'y a pas d'ouvrages fondateurs. 

    Bodhidharma vingt-huitième patriarche indien est aussi le premier patriarche chinois ; Huineng participa à la fusion d'avec le Tao avec l'école chinoise du Sud qui mit l'accent sur l'illumination soudaine ; Hakuin Zenji donna au XVIIIe siècle un nouvel élan au zen au Japon.
     
    Règles de conduite et rituels

    Judaïsme - La loi (Décalogue, étude, circoncision, alimentation, prière).
    Résumé du Décalogue : Tu n'auras pas d'autres dieux en dehors de moi. Tu ne te feras pas d'image, ni leur culte, de ce qui est dans le ciel, sur la terre ou sous les eaux. Tu ne prendras pas en vain le nom de Yahweh. Pendant six jours tu travailleras et le septième, qui est un sabbat, tu te reposeras. Honore ton père et ta mère. Tu ne tueras point. Tu ne commettras point d'adultère. tu ne voleras pas. Tu ne déposeras pas comme témoin mensonger contre ton prochain. Tu ne convoiteras pas les biens de ton prochain.

    Christianisme - Alimentation, prière. Le Décalogue est maintenu mais d'autres préceptes de l'ancien testament sont amendés, notamment "oeil pour oeil, dent pour dent" qui devient "si quelqu'un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l'autre", et "Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi" devient "Tu aimeras ton prochain ainsi que ton ennemi".

    Islam - Le musulman ("soumis à Dieu") ne se sent chez lui que dans sa communauté qui est fondamentalement unitaire. La communauté lui permet de remplir ses obligations personnelles. Mais Dieu vient toujours avant la communauté. Le Coran lui enseigne de "Commander le bien et d'interdire le mal." Les rituels sont la confession de la foi, les prières quotidiennes, le jeûne de Ramadân, l'aumône légale et le pèlerinage à la Mekke.

    Bouddhisme - Les Quatre Nobles Vérités sont : Tout est souffrance ; le désir matériel en est la cause ; le renoncement permet son extinction ; la voie pour y arriver est le Noble Sentier octuple, à savoir : compréhension parfaite, pensée parfaite, parole parfaite, action parfaite, moyens d'existence parfaits, effort parfait, attention parfaite, concentration parfaite.

    Hindouisme - Le point commun de tous les hindous, c'est la foi dans la loi du Karma. 
    Les six systèmes philosophiques baptisés Darshana ne furent mis par écrit que relativement tard dans le Vedânta qui est considéré comme le sommet de la philosophie indienne.

    Taoïsme - Les méthodes préconisées pour parvenir à l'immortalité vont de la méditation aux pratiques alchimistes, en passant par les exercices de gymnastique, les exercices respiratoires, les talismans et les techniques sexuelles. 
    Les principales cérémonies sont les jeûnes (Chai), les confessions collectives et les sacrifices rituels en l'honneur des divinités. 
    Le Tao enseigne le principe de non-action qui prendra aussi une dimension politique.

    Zen - Plus que toute autre école du bouddhisme, le Chan donne la priorité à l'expérience de l'Illumination et insiste sur l'inutilité des rites religieux et de la confrontation intellectuelle avec la Doctrine pour parvenir à la délivrance (ou Illumination). 
    Le chemin le plus court, mais aussi le plus dur pour parvenir à l'éveil est la pratique du Zazen ou "recueillement assis".
     
    Type du principe supérieur

    Judaïsme - Yahvé, sauveur d'Israël, l'unique, hors du monde, intangible.

    Christianisme - C'est en Dieu même que se réalise une filiation. Dieu est l'amour même qu'il nous manifeste. La sainte trinité, père, fils et saint esprit est contenue dans Dieu et évoque trois personnes qui ont des relations spécifiques entre elles et avec le monde. L'homme est à l'image de Dieu, Dieu s'est fait homme.

    Islam - "Il n'y a de dieu qu'Allah et Mahomet est son prophète." "Le secours ne me vient que de Dieu." Le musulman refuse d'interroger Dieu sur son identité ou de lui associer quoi que ce soit. "Rien n'est à sa ressemblance."

    Bouddhisme - Le bouddhisme est une philosophie autant qu'une religion et ne possède pas de Dieu unique mais plusieurs ayant chacun une fonction différente. Bouddha nie l'existence d'un dieu créateur omnipotent.

    Hindouisme - Suivant les systèmes de pensées, tous les types de principes supérieurs sont possibles même l'absence d'un Dieu. Brahman est le principal principe supérieur et lui sont associés d'autres principes comme Vishnu, Shiva et Shakti. En tant qu'être suprême, Dieu est appelé Ishvara, Bhagavan ou Parameshwara.

    Taoïsme - Les principales idées du Tao-chiao reposent sur la conception d'un Tao à la fois vide et source de toute existence. L'être est la fonction du Tao ; le non-être est son essence.

    Zen - La réalité, au sens le plus authentique du terme, est "ce qui agit" ; c'est la "vérité vivante" qui n'a rien de commun avec la "réalité morte" des données objectives. 
    Le concept philosophique du zen est la racine indéfinissable et incommunicable, que l'on ne peut expérimenter que par soi-même. Dénuée de tout nom, de tout qualificatif et de tout concept, elle est la source de toutes les religions qui sont autant de formes d'expression de cette même expérience.
     
    Manifestations du principe supérieur

    Judaïsme - Dieu est est quasiment contenu dans la Torah. Jésus n'est qu'un maître religieux qui a fondé une école.

    Christianisme - Homme, Jésus (présence de Dieu) est en même temps vrai Dieu. Par lui, le Père a envoyé aux hommes son Esprit (force de Dieu), il est venu lui-même vers les hommes. C'est justement quand il est révélé que Dieu apparaît dans tout son mystère.

    Islam - Dieu a dicté le Coran à Mahomet. Seuls les mystiques ont pu avoir des visions et "s'approcher" de Dieu, ce que les orthodoxes condamnent. La grandeur de Dieu nait dans sa solitude absolue ce qui rend impossible toute communication, en dehors du Coran, entre Dieu et les hommes.

    Bouddhisme - Bouddha donne des exemples d'humains qui sont devenus des dieux et inversement. Il n'y a pas de transcendance dans les dieux du bouddhisme, pas de séparation complète entre le terrestre et le spirituel.

    Hindouisme - Dieu peut s'incarner sur Terre sous forme de nombreux avatars tels des animaux ou des humains afin d'aider les humains. Notamment Krishna, Bouddha et Kalki qui viendra à la fin de cet ère.

    Taoïsme - Le cosmos, les Cinq Éléments, le YinYang, les Dix Mille Êtres (Wan-wu), tout est issu du Tao. Toutes les choses retournent au Tao.

    Zen - L'"Illumination soudaine" (Tongo) joue un rôle de tout premier ordre dans le Chan, également appelé "école de l'Esprit du Bouddha". 
    Le zen désigne la concentration de l'esprit et le recueillement, état dans lequel s'abolissent toutes les distinctions entre Je et Tu, sujet et objet, vrai et faux.
     
    Origine du monde et explication des modalités d'existence

    Judaïsme - Dieu, l'infini, s'est contracté en lui-même pour faire une place à notre monde fini. Le Tzimtzum est le mot hébreu utilisé pour définir cette création. C'est par le texte que Dieu créa le monde.

    Christianisme - Dieu éternellement préexistait au monde. Toutes choses ont été faite par lui. Dieu a crée le monde, la Terre, les êtres vivants en 6 jours. L'homme a été crée à l'image de Dieu. Au commencement, Adam, le premier homme habitait le paradis mais Eve, la première femme, les firent goûter un des fruits de l'arbre de la connaissance du bien et du mal et ils durent vivre sur Terre, travailler, souffrir et mourir.

    Islam - Dieu est le créateur et le connaisseur de toutes choses. Le Coran ne décrit pas la Genèse d'une façon aussi précise que la Bible et laisse donc une plus grande place à l'interprétation.

    Bouddhisme - La chaîne de la Production conditionnée (Pratîtya-Samutpâda) explique l'enchaînement des êtres vivants au cycle des renaissances. Mais celle ci est sans commencement défini. Le Bouddha ne se lança jamais dans des spéculations relatives à l'origine du Samsâra car il estimait que celles-ci n'étaient d'aucune utilité pour obtenir le salut.

    Hindouisme - Le temps est vu de manière cyclique ; il existe donc un cycle de créations et destructions. Lorsque Brahma se réveille et qu'il ouvre les yeux, l'univers et tout ce qu'il contient se crée, lorsqu'il s'endort, tout se détruit. Vishnou protège l'univers. Shiva le détruit et donc mène à sa renaissance. L'univers connait donc une suite de naissances et de destructions.

    Taoïsme - Il est le vide sans nom, donne éternellement sans jamais être épuisé, reçoit éternellement sans jamais être rempli, il contient tout, existe avant même le ciel et la terre, il est sans forme, changeant, mère de toute choses, sans nom réel nous l'appelons le Tao, la Voie.

    Zen - Le Tout et le Rien sont interconnectés, inséparables, un tout. Le zen dénie que la Personne soit la première cause. Il dit que le fondement de l'être est la première cause. Le Zen est dérivé du bouddhisme donc il reprend une bonne part.
     
    Fin du monde et finalité de la religion

    Judaïsme - Le peuple juif cherche une terre, son autonomie politique et un chef appelé le roi messie. La religion juive est universelle inclusive (les juifs ont pour mission d'inclure tous les hommes dans leur mode de vie pour qu'ils s'épanouissent).

    Christianisme - A la fin des temps, du monde, le Seigneur reviendra juger les vivants et les morts et rassembler l'immense peuple de Dieu dans son éternité bienheureuse. Les chrétiens morts ressusciteront.

    Islam - L'islam se présente comme religion et État, culture et civilisation, il cherche à réaliser la cité musulmane parfaite. L'histoire s'achèvera un jour et aura alors lieu la résurrection, le jugement et l'ultime vie (paradis ou enfer). L'âme humaine est considérée comme éternelle.

    Bouddhisme - La fin du Samsâra (atteint après s'être débarrassé de la haine, du désir et de l'ignorance) correspond à la réalisation du Nirvâna. Le temps et l'espace n'ont alors plus lieu d'être. Le Mahâyâna rajoute en plus une fusion avec l'absolu et il existe encore beaucoup d'autres variantes.

    Hindouisme - La mentalité des Indiens étant dès le départ tournée vers l'éternité. 
    Nirvâna (extinction), dissolution du Moi individuel et éphémère dans le Braman. Ce qui libère l'homme de toutes les formes d'enchainement terrestre. Le Brahman est l'Absolu immuable et éternel, la seule réalité, l'être absolu et exclu toute dualité ou existence d'un Dieu personnel. 
    Les Yugas sont des cycles qui durent environ 4.5 milliards d'années. À la fin du cycle le monde est détruit puis recrée.

    Taoïsme - Le but de la quête des adeptes du taoïsme religieux, l'immortalité, est conçu dans son sens physique.

    Zen - Le but est de mener à la vision de notre propre nature et à l'éveil parfait (Illumination).


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    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:38

    Toutes les religions ne se valent-elles pas?

    Le spectacle des Hindous qui prient sur les bords du Gange à Bénarès ou des Musulmans du Maghreb qui arrêtent tout travail et se prosternent en pleine rue à l'appel du muezzin pose toujours à l'homme de culture occidentale une question fondamentale. Le Christianisme est-il vraiment une voie privilégiée pour aller à Dieu ? Les autres religions ne sont-elles pas également bonnes ? Le choix d'une religion n'est-il pas question de tempérament, de civilisation et donc simplement de naissance ? Pour essayer de répondre à ces questions, nous examinerons successivement :

    I - L'attitude de l'homme en quête d'une religion.
    Il - Le tableau des divers types de religions entre lesquelles le choix est possible.
    III - Quelques suggestions pratiques pour guider la recherche.


    A LA RECHERCHE D'UNE RELIGION
    On peut se poser la question de la pluralité des religions simplement par curiosité ; mais une telle attitude d'esprit ne permet qu'un regard superficiel sur le fait religieux. Il n'en est pas de même quand l'homme, qui s'interroge à ce propos, est déjà à la recherche de Dieu. En effet, il a alors découvert que l'Absolu était une personne parfaitement libre et souveraine. Il désire Le rencontrer mais il sait que Dieu ne peut être rejoint en dehors d'un rendez-vous concret qu'Il a Lui-même révélé à l'homme. Celui-ci doit donc interroger ceux qui se disent envoyés par Dieu pour savoir si leur mission est effectivement vraie. Cependant, face à la multiplicité de témoignages qui s'offrent à lui, il est dérouté.
    a) Des éléments communs dans des perspectives contradictoires
    Une première solution semble toute simple. Dans toutes les religions, on trouve des rites semblables (repas, purification), des prières de même type (adoration, demande, action de grâces), des images apparentées (création, catastrophe initiale, fin du monde, royauté divine), des institutions comparables (sacerdoce, enseignement, consécration à Dieu). Mais en même temps on observe des options religieuses contradictoires. N'est-ce pas le signe du mal qui ronge le cœur des hommes ? Ne faudrait-il pas réduire toutes les religions à leur commun dénominateur pour y découvrir la trace de Dieu ? Mais, faire cela serait appauvrir effroyablement le message de chacune d'elles. Cela équivaudrait à établir le portrait robot d'un homme qui ressemblerait à une centaine d'individus pris au hasard.

    b) La personnalité de chaque religion

    Au contraire, il faut se rappeler que dans une religion c'est l'homme qui cherche a exprimer son contact avec Dieu grâce à des manières de faire humaines. Celles-ci sont comme une langue dont le vocabulaire n'est pas infini. Il est tout normal que, pour exprimer une purification, on se serve spontanément du symbole du bain, que l'autorisé prenne les traits d'un roi et que la création apparaisse comme une fabrication du monde par un Dieu artisan. Ce qui compte alors ce ne sont pas les images utilisées, mais leur sens synthétique, la relation à Dieu qu'elles incarnent. Chaque religion a sa personnalité, son originalité. C'est dans ses profondeurs qu'il faut chercher l'écho de Dieu. Seulement, si Dieu est unique, il n'apparaît pas possible qu'Il se révèle aux hommes de façon contradictoire. Dans la mesure où elles s'opposent, les religions ne peuvent donc être toutes révélées de façon équivalente. Comment alors concilier cela avec le fait qu'un Dieu unique est le Dieu de tous les hommes ? N'est-il pas scandaleux qu'Il se révèle à quelques privilégiés? Mais derrière la question se cache un présupposé. Chaque homme souhaite, plus ou moins consciemment, que la révélation divine se présente à lui sans intermédiaire, à la manière d'un Q  Chemin de Damas f qui l'obligerait à croire. Mais, forcer Dieu à intervenir dans le monde de cette façon uniforme, c'est limiter sa liberté et sa puissance. Il apparaît au contraire beaucoup plus conforme à la Sagesse divine que Dieu respecte les libertés qu'il a créées en les chargeant de transmettre une révélation confiée à quelques-uns. Aussi, à l'action proprement divine, il faut ajouter les contre-courants créés par la paresse, l'égoïsme, l'ignorance, la faiblesse et le péché des hommes qui en sont les échos. Il y a là de quoi expliquer la multiplicité des religions.

    c) Découvrir un ordre de valeurs

    En poussant à la limite les explications précédentes, on sera tenté d'affirmer que toutes les religions se valent, qu'elles sont comme des voies, toutes imparfaites, qui convergent à l'unique sommet de la montagne. C'est évidemment une hypothèse qu'il est possible d'émettre mais, à nouveau, elle réduit l'acte de révélation à une action unique de la liberté divine, répercutée de diverses façons, toutes équivalentes. Or, on peut également supposer que Dieu, avec une pédagogie consommée ne se révèle pas tout entier du premier coup mais agit avec mesure, préparant peu à peu l'humanité à la Révélation définitive. Seule une telle hypothèse rend parfaitement compte du fait religieux judéo-chrétien. Elle suppose que les religions n'ont pas la même valeur. Chacune présente une attitude face à l'Absolu divin plus ou moins parfaite ; et, en même temps, annonce et promet un dépassement de sa figure historique limitée.
    Appartenir à une religion donnée, y adhérer de toutes ses forces, c'est donc être animé d'un mouvement divin qui pousse à la recherche. Supposons un Hindou qui vient en pèlerinage à Bénarès. Il fait ainsi un acte authentique d'adhésion à Dieu mais, pour être véritablement religieux, il faut qu'il découvre que ce n'est pas un geste magique ou superstitieux qui lui achèterait le salut. Il faut qu'il attende une grâce divine qui dépasse ce qu'il en expérimente dans les rites qu'il effectue. Dans certaines circonstances, l'individu ira jusqu'à percevoir des raisons suffisantes pour quitter la religion dans laquelle il est né et pour en adopter une autre qu'il découvrira meilleure. Dans d'autres cas, de telles raisons ne peuvent être découvertes que par un observateur d'une religion plus haute. C'est ainsi que les Juifs et les Musulmans comprennent mieux les insuffisances du fétichisme que les païens vivant dans la terreur de leur sorcier.
    Dans les pages qui suivent c'est un chrétien qui examine les diverses attitudes religieuses pour essayer de trouver la vérité qui est en chacune d'elles ainsi que l'élan de recherche de Dieu qui les anime et dont il trouve le courant principal dans l'Histoire Sainte judéo-chrétienne.

    LES TYPES RELIGIEUX FONDAMENTAUX
    L'étude des diverses religions permet de classer en deux types fondamentaux les attitudes de l'homme face à l'Absolu.
    Dans les religions naturelles, l'homme découvre Dieu comme créateur à partir de ses traces dans l'univers. Il répond à cette connaissance par une réaction spontanée. Mais, à cette occasion, il prend conscience de ses diverses aspirations insatisfaites et se pose le problème du mal et de la souffrance. L'ébauche de solution qui y est apportée s'avère inadéquate et oblige à une nouvelle recherche.
    Les religions issues de l'Ancien Testament reconnaissent Dieu à partir de son intervention dans l'histoire où Il se choisit un peuple, le guide et le sauve. Le judaïsme et l'islam recueillent le sens de cette histoire, Q  La Parole de Dieu ", sous la forme d'un Livre. Le Christianisme croit que cette Parole divine est totalement réalisée dans l'Homme-Dieu : Jésus-Christ.
     
    A - LES RELIGIONS NATURELLES
    Les comportements de l'homme face à la divinité dans les religions naturelles se distinguent selon l'importance qu'elles accordent, comme source de la connaissance de Dieu, au message des forces de vie, à celui de la conscience humaine ou encore à la constitution sociale de l'humanité.
    1) Les religions primitives
    Dans les religions dites Primitives, Dieu est découvert comme l'auteur de la vie. Il est, par le fait même, maître de la mort. Pour se sauver du malheur, il faut communier à la puissance divine et pénétrer ses secrets.
    a) Chez les peuplades au stade de la cueillette, la divinité est sentie comme une Providence qui assure à l'homme sa pitance quotidienne grâce aux fruits qu'il trouve dans la forêt.
    b) Chez les peuples chasseurs, la divinité se rencontre dans le combat à mort avec des bêtes ou des hommes. Elle est la puissance invincible qui réclame soumission à ses serviteurs, mais se communique à eux.
    c) Chez les peuplades à civilisation agraire, Dieu est représenté par les forces de fécondité et d'ordre de l'univers qui assurent à l'homme la nourriture. la santé, la sécurité. La mort n'est qu'un hiver auquel succède le printemps de nouvelles naissances. L'homme est appelé à collaborer spontanément à ce cycle de morts et de renaissances qu'il observe dans ses champs et dans son bétail. Par le sacrifice, il réalise un merveilleux échange en offrant à la divinité les prémices de ses possessions et en recevant en retour toute sorte de bénédictions. Mais ce sacrifice prend toute sa valeur grâce à la prière qui l'accompagne. On peut donc en déduire qu'il y a au fond du cœur de l'homme une lumière qui lui permet d'être en contact avec le ciel. Rechercher cette lumière et la favoriser, c'est le but que se proposent les religions mystiques.[/quote]

    2) Les religions mystiques

    Dans ces religions et l'exemple le plus connu en est donné par les religions de l'Inde, ou les philosophies religieuses de l'antiquité gréco-romaine, l'homme découvre l'Absolu dans le mystère qu'il perçoit au fond de son propre cœur. En effet, dès qu'il réfléchit sur sa propre vie, l'homme y discerne des profondeurs infinies et des possibilités de domination de tout l'univers. Mais, paradoxalement, alors même qu'il se sent capable de tout comprendre, il est faible, ballotté par les forces de la nature. Le mal et la souffrance viennent de là. Ils ont pour origine l'illusion (maya), le mensonge par lequel l'homme qui porte l'Absolu au-dedans de lui, s'attache aux choses particulières, extérieures et qui passent pour atteindre à la libération (moksha) qui est vie dans l'Absolu, il faut donc se détacher de tous désirs qui lient l'homme aux choses mortelles. Ce détachement ne saurait être purement négatif comme celui de l'ascète, du yogin. En effet, c'est en donnant positivement tout ce que l'on possède et jusqu'à sa propre vie, pour réellement ne rien s'approprier que l'on découvre un jour son véritable Soi qui est l'Absolu.
    Le Boudhisme a poussé jusqu'à la limite ce don de soi. La libération elle-même, découverte du mystère divin du Nirvana, doit être communiquée. Le mystique se transforme alors en prédicateur. La mission bouddhique sort de l'Inde pour rayonner dans le reste de l'Asie et jusqu'aux confins de l'Europe. L'Absolu apparaît maintenant comme se manifestant à travers l'influence. historique de ses fidèles. C'est ce qui nous amène à considérer un nouveau type de religions les religions d'Empire.

    3) Les religions d'Empire

    Lorsqu'une société politique adopte une attitude religieuse qu'elle perçoit comme universelle, elle trouve dans cette expérience un élan qui la pousse à propager dans le monde qui l'entoure l'adhésion au même idéal. La perception de l'Absolu et la perception des forces d'expansion de la société s'identifient en quelque sorte. C'est ce que l'on trouve dans les religions aussi bien égyptienne qu'assyro-babylonienne, romaine ou perse. De nos jours, quelque chose d'analogue s'observe quand l'Occident déchristianisé identifie son expansion coloniale à la croisade pour le Progrès et la Liberté. Tout ce qui s'oppose au rayonnement de l'Empire est considéré comme force du mal. Suivant le cas, on représente le combat terrestre comme parallèle à un combat céleste du principe du Bien contre le principe du Mal (cf. la religion perse antique), ou au contraire, on divinise rois, empereurs et cités. Le culte de la personnalité du Chef, la fidélité patriotique, l'espérance invincible dans la victoire constituent la véritable religion du peuple.
    Cependant, à plus ou moins brève échéance, l'Empire est détruit sous le coup des forces adverses extérieures ou intérieures. L'Absolu, perçu dans les forces politiques, doit alors être cherché ailleurs. Celui qui ne veut pas revenir en arrière vers l'âge d'or des religions de la nature ou s'évader du monde dans un contemplation philosophique est amené à chercher une histoire sainte dans laquelle il puisse s'intégrer et qui ne soit pas sujette aux fluorations des civilisations. Une telle figure historique unique à travers laquelle Dieu se révèle et entre en dialogue avec l'homme se présente dans les religions issues de l'Ancien Testament.

    B - L'ANCIEN TESTAMENT ET SES CONTINUATIONS
    Lorsqu'on aborde la lignée religieuse judéo-chrétienne, on est frappé par un double phénomène. D'une part, ces religions annoncent une intervention de Dieu dans l'histoire ; d'autre part, elles insistent sur l'acte libre de foi par lequel l'homme adhère à la Parole de Dieu. On le verra successivement dans l'Ancien Testament et dans ses interprétations symétriques par le Judaïsme et l'islam.

    a) L'Ancien Testament

    Vers l'an 2000 avant notre ère, en réponse à un appel de Dieu, un nomade, Abraham, quitte la Mésopotamie pour s'installer en Palestine. Un peuple se constitue à partir de ses descendants. Dieu se révèle alors comme partenaire de ce peuple dans un dialogue qui se continue tout au long de 2 000 ans d'histoire. Il se manifeste comme une personne agissante, aimante et en même temps découvre l'homme à lui-même dans ses aspirations infinies, mais aussi dans les ingratitudes, les haines, les égoïsmes de son cœur. Les voies de Dieu ne sont pas les voies de l'homme. Mais, malgré la distance insondable qu'il y a entre le Créateur et sa créature pécheresse, Dieu promet aux siens qu'un jour ils goûteront l'unité avec Lui, unité réalisée dans l'Amour. Cela se fera-t-il par une intervention directe de Dieu ou, au contraire, par l'envoi d'un homme capable de vivre dans l'intimité de Dieu et d'y entraîner ses frères ? L'Ancien Testament ne tranche pas la question.

    b) Le Judaïsme

          
    Parmi les héritiers de l'Ancien Testament, le Judaïsme est celui qui refuse tout complément à la révélation consignée dans la Loi, les Prophètes, les Ecrits des Sages et que les Chrétiens appellent l'Ancien Testament. Cependant, l'attitude religieuse juive n'est pas identique à celle du peuple hébreu d'antan. La religion juive est essentiellement une religion du Livre. C'est dans la méditation de celui-ci et celle de ses commentaires aussi bien que dans l'obéissance minutieuse à la Loi qu'on réalise l'union avec Dieu. La promesse d'unité entre l'homme et Dieu semble ainsi déboucher sur une attitude qui, malgré sa grandeur, choque par les limites de son particularisme racial et de son légalisme littéral. Est-ce l'unique participation possible à la Tradition religieuse de l'Ancien Testament ?
    c) L'islam
    L'islam refuse les limitations du Judaïsme. Il y a un au-delà de l'Ancien Testament qui tranche les questions restées en suspens. Mahomet est le dernier des prophètes. Avec lui, la révélation est close. Il n'y a plus qu'à attendre le jugement dernier où Dieu, transcendant et miséricordieux, accueillera au Paradis ceux qui auront professé qu'il est le seul Dieu et reconnu la mission de Mahomet. Cette attente n'est pas passive ; au contraire, il' faut mettre toutes ses forces (guerre comprise) au service de la communauté islamique.
    Tout homme doit sinon croire, du moins reconnaître l'autorité de Dieu à travers la puissance politique musulmane. Cependant, la révélation faite à Mahomet reste consignée dans un livre : le Coran. Celui-ci n'indique pas clairement l'organisme capable de le commenter de façon vivante. Quel est le sens de ce livre pour l'homme d'aujourd'hui ? C'est ce que l'islam ne sait pas définir de façon suffisamment précise. Il s'enferme ainsi irrémédiablement dans le passé. C'est ce qui fait sa difficulté. Comment alors peut-il être porteur d'une Parole divine toujours actuelle ?
     
    C - LE CHRISTIANISME
    Face aux impasses rencontrées par le Judaïsme et l'islam, le Christianisme apporte une réponse paradoxale. Le dialogue entre Dieu et l'homme, annoncé dans l'histoire du peuple hébreu, a été parfaitement achevé. La venue de Dieu sur terre et l'Elévation totale d'un homme dans l'intimité divine sont un seul et même événement.
    Le Verbe, Parole de Dieu, s'est fait chair et Il a habité parmi nous, se faisant cet homme : Jésus de Nazareth, Fils de Dieu.
    La révélation personnelle de Dieu aux hommes et la réponse parfaite de l'homme à Dieu s'unifient parfaitement dans l'obéissance du Christ jusqu'à la mort et sa manifestation glorieuse dans la résurrection. Dieu respecte jusqu'au bout, jusqu'à la mort de son Fils, la liberté pécheresse de l'homme qui se coupe de la vraie vie et met le Christ en croix mais, en même temps, Il est victorieux de tout mal.
    C'est désormais la foi, c'est-à-dire la relation personnelle de l'homme avec Jésus-Christ qui est le centre de la démarche religieuse. Celui qui s'unit au Christ actuellement vivant car ressuscité, n'a plus à craindre ni le jugement de Dieu sur le péché, ni la souffrance, ni la mort. Il est déjà en un certain sens ressuscité, plus que cela, il est lui-même divinisé, habité par l'Esprit Saint, rendu Fils adoptif de Dieu.
    Cela est encore caché car nous ne sommes pas pleinement morts avec le Christ, mais nous attendons son retour où apparaîtront clairement au monde entier les dimensions du Ressuscité. L'Eglise est le lieu vivant de rendez-vous où le croyant peut rencontrer le Seigneur. Les sacrements quelle propose sont le prolongement des gestes mêmes du Christ en même temps qu'ils communiquent à l'homme la grâce d'une réponse personnelle et communautaire.
    Le Christianisme intègre ainsi les richesses des religions naturelles, mystiques et sociales, tout en achevant le mouvement de révélation de l'Ancien Testament. Le Christianisme se présente de la sorte comme une religion parfaite, dernier pas de l'homme en attendant la manifestation pleine et totale de Dieu dans la vie éternelle promise au croyant.
    Une difficulté surgit cependant devant cette totalité de la Révélation : les Chrétiens ne sont pas d'accord entre eux :
    Les Protestants mettent l'accent sur la manière dont on peut rejoindre le Christ de façon personnelle. Ils insistent sur le fait que le contact s'établit lorsque la Parole de Dieu, transmise par l'Ecriture, est rendue vivante dans la communauté croyante grâce à la prédication. Les structures sacramentelles et institutionnelles de l'Eglise servent avant tout à aider celle-ci. Mais, peut-on être réellement uni au Christ dans l'Amour sans sa présence corporelle, sans une obéissance concrète à ses ordres ? Aussi, les Catholiques insistent-ils sur la nécessité d'une Eglise dont l'autorité soit indiscutable en ce qui concerne la foi et qui trouve dans le sacrement de l'Eucharistie le centre d'où la présence corporelle du Christ, mort et ressuscité, rayonne son action aujourd'hui.
    Les Orthodoxes sont d'accord avec ce point de vue. Ils posent le problème au niveau de l'organisation de l'autorité ecclésiale. Ils insistent sur le fait que l'unité de l'Eglise se fait dans la charité. Pour cela, il suffit, d'après eux, de chercher l'accord, l'harmonie du corps des évêques sans avoir à recourir aux mesures coercitives d'une autorité romaine... Mais, n'est-ce pas oublier le péché qui persiste et qui provoque des conflits, même à l'intérieur de l'Eglise ? N'est-ce pas négliger l'intention du Christ de fonder le collège des apôtres lui-même comme une institution hiérarchisée, ayant Pierre pour porte-parole? Pour éviter cette difficulté, les Catholiques soulignent la nécessité d'un Pape, successeur de Pierre. Celui-ci, comme serviteur spécial de l'Unité, a le pouvoir d'arbitrage ultime quand les Chrétiens risquent de se diviser sur des questions de foi et de comportement ecclésial. Ils manifestent ainsi que le Christ a fait à son Eglise un don total de ses privilèges. L'Eglise n'est pas une foule qui trouverait son unité en dehors d'elle, immédiatement dans la personne du Christ. Cette unité, leChrist la lui a donnée effectivement avec les moyens de l'assurer à toute heure de l'histoire. L'institution de la papauté en est, grâce à l'action de l'Esprit-Saint, un instrument et un témoignage.
     
    QUEL COMPORTEMENT ADOPTER ?
    Vous vous êtes posé la question de la diversité des religions, c'est que peut-être vous désirez revivifier vos propres relations avec Dieu. Pour cela, l'analyse nécessairement rapide et sommaire qui vient d'être faite ne saurait suffire. Chercher Dieu, c'est l'engagement de toute une vie, ce qui suppose en particulier trois types essentiels d'efforts qui se conditionnent mutuellement.

    a) La prière
    En premier lieu, on ne peut se mettre en quête de Dieu sans un effort de prière. Si Dieu est Dieu, Lui seul a l'initiative et l'homme doit s'y accorder par sa disponibilité et sa soumission. Il ne suffit pas d'en accepter le principe, il faut encore essayer d'y mettre toutes ses forces affectives et morales. Pour cela, il est indispensable de prendre le temps de prier. Au départ, ce peut être simplement l'invocation hypothétique Q  Dieu que l'on dit Amour, si tu existes éclaire-moi f , mais au cours de laquelle on essaie de réaliser au plus profond de soi l'ouverture de lumière aussi exigeante qu'elle puisse être. Si, au contraire, on a déjà des connaissances religieuses, il faut se servir de ce qu'on sait déjà de Dieu pour invoquer sa venue.

    b) L'action
    La seconde démarche est celle d'un effort moral, en direction des autres. Toute religion exige une démarche de cet ordre comme application concrète de la découverte de Dieu. Refuser une religion parce qu'elle est trop exigeante serait une malhonnêteté où des raisons théoriques ne feraient que cacher un égoïsme fondamental. C'est au contraire, en faisant l'expérience d'une authentique disponibilité à l'égard des frères que l'on apprend un peu ce que peut être la disponibilité à l'égard de Dieu.

    c) L'étude
    Mais, dès que l'on essaie loyalement ce double effort d'amour, on s'aperçoit de sa faiblesse, de son péché. Seule une révélation concrète de Dieu peut les bousculer et soutenir la bonne volonté vacillante. Pour cela, et c'est la troisième démarche, il faut s'attacher à pénétrer le sens profond de telle ou telle religion concrète. Il faut commencer par reprendre sur de nouvelles bases la religion de son enfance ou celle du milieu culturel dans lequel on vit. Si cette religion est autre que la religion chrétienne, il serait nécessaire de la comparer à la foi au Christ. Si, au contraire, on a été élevé dans le Christianisme une lumière supplémentaire peut venir de la considération parallèle de telle ou telle attitude religieuse actuelle (par exemple, l'islam ou une religion de l'Inde). A ce propos deux remarques sont à faire. En premier lieu, il faut prendre une religion comme elle est, sans en extraire les éléments qui nous plaisent pour en rejeter les autres. Si Dieu se révèle dans tel ou tel cadre, c'est un fait dont il faut respecter les éléments ; sinon, on se prend soi-même pour un fondateur de religion sans en avoir reçu mission. En deuxième lieu, il ne faut pas chercher à examiner toutes les religions pour prendre sa décision, comme il n'est pas nécessaire de connaître toutes les filles du monde avant de choisir celle que l'on aime. Il existe un critère interne qui permet d'apprécier rapidement la valeur d'une religion. Rencontrer Dieu, c'est rencontrer la personnalité la plus extraordinaire qui soit. Or, toute rencontre suppose que l'on se comprenne avec son interlocuteur, qu'on soit compris de lui et qu'on trouve ainsi dans la rencontre son propre épanouissement. Mais, également, tout dialogue est un contact avec quelqu'un d'autre qui nous bouscule et qui dérange nos habitudes de pensée et d'action. Quand il s'agit de rencontrer Dieu qui est l'Autre par excellence, l'infini, mais aussi le Créateur, la Sagesse même, le dérangement et l'arrangement doivent être maxima. La religion vraie répond parfaitement aux aspirations de l'homme en même temps qu'elle bouleverse infiniment son confort égoïste.
    Mais comment savoir qu'on est dans la bonne voie ? Lorsqu'on est devant une porte fermée avec un trousseau de clefs et que l'une d'entre elles ouvre la serrure, il n'est pas nécessaire de chercher une autre clef. Lorsqu'une démarche religieuse ouvre véritablement le cœur de l'homme à l'irruption de Dieu, il ne faut pas s'évader dans des études infinies. Il faut essayer effectivement de marcher dans la voie proposée. Une telle décision se prend en général progressivement. A force de chercher loyalement et concrètement, un jour, on s'aperçoit que la recherche continue, mais qu'il n'y a plus à revenir en arrière.
     
    CONCLUSION
    Le Chrétien qui vient de faire ces réflexions témoigne que dans le combat avec le Christ mort et ressuscité, homme et Dieu, il a trouvé la possibilité d'une amitié divine merveilleuse, victorieuse du mal, de la souffrance, du péché, mais aussi une exigence toujours renouvelée de don de soi, d'amour. La Parole du Christ lui a donné la réponse à tous les grands problèmes de la vie, mais u même coup, elle a suscité de nouvelles recherches. Arrangement et dérangement suscités par la découverte de la personne du Christ se sont révélés pour lui d'une ampleur maximum que l'étude de quelques-unes des grandes religions de l'humanité n'a fait qu'accentuer. Mais, ce témoignage est avant tout un appel au dialogue. Celui-ci vient à peine d'être ébauché par ces lignes, il faut maintenant le continuer de vive voix. Il n'y a pas de marche solitaire vers Dieu, parce que Dieu ne se trouve que dans un dialogue : l'important est de l'engager. Mais, cela suppose une décision que personne ne peut prendre à la place de l'intéressé. Cependant, quelle que soit sa réponse à cette invitation, le lecteur peut être sûr que la prière fraternelle des chrétiens l'accompagnera dans sa recherche pour l'aider et le soutenir.


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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:39

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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:40

    L’origine de la religion
    Le Correspondant (Paris, 10 avril 1915)

    Initiation aux religions - Page 2 Img-1-small480


    • 1 [Cf., plus spécifiquement, à propos des tribus australiennes, Armand de Quatrefage de Bréau, Membre (...)

    • 2 [Cf. Voltaire, Les œuvres complètes de Voltaire, 20B, Le fanatisme, ou Mahomet le prophète ; De l’A (...)


    La religion est un fait universel. Chez tous les peuples il y a des cérémonies, des rites, un culte, des choses, des êtres, des lieux sacrés. Si bien que le naturaliste Quatrefages définissait l’homme « un animal religieux ». Il semble que l’on puisse dire : Partout où il y a des hommes il y a aussi un Dieu ou des dieux. À mesure que le monde est mieux connu, on se rend compte de l’importance du fait. Puisqu’il est universel, on ne peut plus l’expliquer par des causes accidentelles, par la fantaisie de quelques imaginations, par l’imposture de quelques volontés. Un fait qui se retrouve partout doit avoir une cause qui s’étende à tout. L’hallucination d’un poète ou l’imposture d’un tyran pourraient, ici ou là, avoir réussi à séduire les esprits des hommes ou à s’imposer à eux, elles n’auraient pas réussi partout. De là le discrédit où sont tombées les explications qu’on donnait jadis des origines de la religion. À la fin du moyen âge, on écrivait un libelle où Moïse, Jésus et Mahomet étaient appelés « les trois imposteurs ». Voltaire symbolise en son Mahomet tous les fondateurs de religion, il donne pour sous-titre à sa tragédie : l’Imposteur, et il dit expressément :
    Nos prêtres ne sont pas ce qu’un vain peuple pense,
    Notre crédulité fait toute leur science.
    • 3 [Charles-François Dupuis, Origine de tous les cultes, ou Religion universelle, Paris, H. Agasse, an (...)

    • 4 1 vol. in-8°, Alcan, 1912.

    • L’histoire de la religion et les catholiques, par Mgr Batiffol. Correspondant du 25 août 1912. – L’ (...)

    • 6 [Société française de Philosophie, « Le problème religieux et la dualité de la nature humaine », Bu (...)


    Dupuis, enfin, a écrit tout un gros ouvrage pour montrer dans l’imposture l’Origine de tous les cultes.Cette hypothèse simpliste a vécu. Le problème de l’existence de la religion attend encore une solution. La plus récente a été proposée en France par M. Durkheim dans les Formes élémentaires de la vie religieuseOn a, ici même, et par deux fois5, appelé en excellents termes [122] l’attention critique du public sur les théories soutenues dans cet ouvrage, mais depuis il a donné lieu à d’importantes discussions et ses conclusions ont été examinées dans une séance de la Société de philosophie qui, si elle n’a pas eu d’autre résultat, a eu du moins pour effet de fournir à l’auteur l’occasion de formuler sa pensée avec une extrême précision. M. Durkheim est d’ailleurs regardé comme un chef par toute une école de jeunes sociologues. Le moment semble donc venu d’exposer sa doctrine et de l’examiner en entrant dans quelques détails.
    Mais tout d’abord une remarque s’impose. C’est que les faits religieux ne ressemblent pas à tous les autres. Ils appartiennent à un ordre tel que, avant même de les étudier et par cela seul que pour les étudier on adopte telle méthode ou telle autre, on a déjà en quelque façon pris parti.
    De deux choses l’une en effet : ou c’est un croyant qui aborde le problème des origines religieuses, ou bien c’est un incroyant. Mais le croyant, et spécialement le chrétien, par cela même qu’il est chrétien et entend bien le rester, ne peut que regarder la religion comme révélée et dès lors il lui assigne d’emblée une origine surnaturelle. D’où il résulte nécessairement qu’à ses yeux il doit y avoir une religion vraie et il ne peut y en avoir qu’une ; toutes celles qui n’ont pas été révélées ont été le produit d’une élaboration humaine et par conséquent sont fausses.
    D’autre part, pour l’incroyant, la religion est un produit de la nature, elle doit pouvoir s’expliquer par des causes d’ordre naturel, ses origines ressortissent donc à la science et toutes les religions, même les plus nobles et les plus pures, ne peuvent être que des illusions. Entre ces deux attitudes, il n’y a pas de milieu. C’est ce que l’on commence à reconnaître expressément.

    • Une théorie nouvelle de la religion, R. P., avril 1913, p. 330. [Gustave Belot, « Une Théorie nouve(...)


    Ayant à examiner dans la Revue philosophique le livre de M. Durkheim, M. Gustave Belot écrivait : « Par cela seul que le philosophe ou le sociologue libres viennent à la religion du dehors pour l’étudier comme un objet étranger…, par cela même que le libre chercheur aborde la religion de l’extérieur, sans y avoir engagé sa conscience, il prouve, in actu, qu’il ne lui attribue pas la valeur absolue que le fidèle requiert pour elle. Mais inversement, par cela seul qu’il accepte d’abord la religion, avant d’essayer de la penser, le croyant, si hardie que puisse être sa critique, paraîtra toujours au pur philosophe manquer de l’indépendance d’esprit nécessaire à la recherche scientifique ; des conclusions préétablies n’auront jamais, en dépit de toutes les [123] justifications imaginées après coup, le crédit d’une vérité méthodiquement découverte, et l’intérêt avec lequel la volonté s’y est d’avance attachée compromet forcément l’autorité que l’intelligence essaye de mériter7. »

    M. Belot paraît donc admettre que le croyant et l’incroyant peuvent, malgré la différence de leurs attitudes, aborder l’un et l’autre le problème religieux. Il s’efforce de tenir entre eux la balance égale. Il marque cependant quelque partialité. Car, quel que soit l’intérêt que ma volonté attache à une démonstration, ma démonstration n’en saurait valoir ni plus ni moins. Elle est vraie ou elle est fausse, logique ou illogique, et c’est faire au penseur un procès injustifié de tendance que de mesurer à ses intentions la valeur de ses raisonnements et de toute sa pensée. En dehors de toute intention et de toute idée de derrière la tête, la pensée vaut ce qu’elle vaut : les principes d’où elle part sont vrais ou faux, contestables ou incontestables ; les faits qu’elle invoque sont exacts ou ne le sont pas ; ses raisonnements enfin sont corrects ou paralogiques. Que la considération des intentions ou des désirs de la volonté excite la critique à être plus minutieuse et plus attentive, on y consent volontiers, mais la critique ne doit pas moins rester objective et ne peut porter que sur la pensée même telle qu’elle est exprimée ou formulée.

    • Op. cit. Conclusion, p. 614 [« Conclusion », Durkheim 1912, p.614]


    M. Durkheim va beaucoup plus loin. Il déclare nettement le chrétien forclos. Il refuse de discuter avec ceux qui croient qu’on a besoin de sortir de la nature pour expliquer ce que l’on trouve dans la nature, il soutient que la méthode scientifique proscrit l’hypothèse même du surnaturel. « La religion, dit-il expressément, ne se connaît pas elle-même. Elle ne sait ni de quoi elle est faite ni à quels besoins elle répond. Elle est elle-même objet de science ; tant s’en faut qu’elle puisse faire la loi à la science !8 »

    • 9 Bulletin de la Société française de philosophie. Séance du 4 février 1913, p. 95. [Orig.] « M. Le R (...)

    • 10 Op. cit., p. 495, note. [Orig.] « La notion d’esprit et de dieux », Durkheim 1912, livre 2, chap.9, (...)

    • 11 Op. cit., p. 98 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. 1 – L’animisme », Durkhe (...)

    • 12 [Orig.] « […] toute science qui se fonde postule la rationalité des choses qu’elle entreprend d’étu (...)

    • 13 Bulletin de la Société française de philosophie, mars 1913, [séance du 4 février,] p. 68


    Si, dans une discussion, il se trouve avoir affaire à quelque adversaire dont il connaît par avance les convictions religieuses, bien que cet adversaire n’ait fait appel dans toute son argumentation qu’à la logique et à la raison, il se plaint volontiers en quelque brusque boutade qu’on lui oppose un acte de foi9. Dans un livre, s’il trouve trace d’idées qui relèvent du « spiritualisme chrétien », il lui paraît inutile de discuter une opinion si contraire aux [124] principes de la méthode historique10. Et la raison en est simple : « Ce doit être pour la science des religions un principe que la religion n’exprime rien qui ne soit dans la nature ; car il n’y a science que de phénomènes naturels11. » Il ajoute ailleurs : « Toute science se fonde sur la rationalité des choses12 qu’elle entreprend d’étudier. Il est donc légitime que la science des religions s’accorde ce même postulat, qui est la condition de son existence. Avec ceux qui le nient, la discussion est inutile, toute entente étant impossible13 ».
    • 14 Op. cit., 1, II, ch. VII, p. 304 [Orig.] « Tout aussi bien que des hommes [des grands hommes, des h (...)

    • 15 [À ce point, la notion de « dogme » est absente du texte original de Durkheim. G. Fonsegrive pointe (...)


    M. Durkheim se trompe : l’entente n’est impossible qu’entre ceux qui se déclarent d’avance résolus à ne pas se servir de leur intelligence et la discussion est toujours utile entre gens capables de constater des faits et de juger de la valeur des raisons. En s’accordant le postulat qu’il réclame, il reste d’accord avec ce qu’il dit ailleurs : « Le dogme du libre examen, le dogme de la science maîtresse et reine de tous les domaines réels del’esprit est à ses yeux un dogme sacré14. » Mais il va aussi bien au-delà des exigences légitimes de la raison. Car c’est la raison qui montre que la religion ne peut venir que de la nature ou d’une source supérieure à la nature, c’est-à-dire de l’homme ou de Dieu. En éliminant d’emblée et de parti pris au nom d’un « dogme sacré »15, en refusant même d’examiner l’une des deux seules hypothèses qui puissent fournir une réponse au problème des origines de la religion, M. Durkheim parait bien adopter une attitude qu’il n’a certainement pas le droit de regarder comme supérieure. Et le plus grave, c’est que de ce premier parti pris préalable les conséquences pratiquement les plus importantes doivent résulter immédiatement. Car si nous admettons sans discussion que la religion doit pouvoir s’expliquer par des causes toutes naturelles, nous admettons par là même que la religion est une production naturelle du génie humain ; dans ce cas, ce n’est plus Dieu qui a fait l’homme, c’est l’homme qui a fait ses dieux, toutes les religions sont fausses, toutes reposent sur des illusions, peut-être sur des impostures, on ne peut marquer entre elles d’autres différences de valeur que celles qui naissent de leur fécondité morale… Mais, quels que soient les bienfaits qui résultent de l’illusion religieuse, l’humanité atteindra certainement un palier supérieur de vie lorsqu’elle sera affranchie de cette illusion, lorsqu’elle n’aura plus [125] besoin d’aucun mensonge pour vivre, lorsqu’elle vivra en conformité avec la vérité vraie, lorsqu’elle aura exorcisé les fantômes des dieux. Elle n’aura jamais été plus divine que lorsqu’elle sera devenue athée.

    Il semble pourtant qu’il serait possible, sans demander ni au croyant ni à l’incroyant le sacrifice préalable de leur conviction, de trouver un terrain commun de discussion et finalement d’entente. L’incroyant est-il nécessairement forcé d’admettre, pour user de sa raison, pour travailler à faire la science, que la raison peut tout connaître et tout expliquer, que le domaine de la science s’étend à tout ce qui est ? Ne lui suffit-il pas d’essayer de rendre raison du plus grand nombre de choses possible, de reculer le plus qu’il pourra les frontières de la science ? Le savant doit étudier tous les phénomènes comme s’ils ressortissaient tous à la science, mais rien ne l’oblige à regarder comme acquis ce qui n’est qu’un point de départ et un procédé méthodique. L’explication scientifique universelle est, si l’on veut, un postulat, ou bien mieux une hypothèse : on a le droit de partir de cette hypothèse, d’essayer de l’appliquer à tout et partout, mais serait-il sage de fermer derrière soi toutes les issues et d’affirmer par avance que la tentative réussira et que l’hypothèse sera toujours vérifiée ? La science existe, elle a le droit d’exister. Tout le donné naturel, tout le donné humain relèvent-ils d’elle seule ? C’est une question qu’on n’a pas le droit de préjuger. Alléguer qu’en dehors de ce préjugé, il ne serait pas possible de faire une science des religions, c’est commettre le plus piteux des paralogismes, la pétition de principe. Car la question étant précisément de savoir si la religion est un fait semblable aux autres, dire que, pour résoudre cette question, il faut commencer par proclamer que la religion est en effet un fait tout semblable aux autres, c’est évidemment regarder comme accordé cela même qui est contesté. L’incroyant n’a pas le droit d’avancer sous prétexte de postulat un tel préjugé. Il lui suffit pour faire œuvre rationnelle et scientifique de traiter cette proposition comme une hypothèse qu’il s’agit de vérifier. On ne prouve pas qu’il y a une science des religions en affirmant sans preuve que cette science doit exister, on prouve qu’elle existe en la créant. Le croyant, de son côté, quelle que soit la force de sa conviction, ne peut discuter avec l’incroyant qu’à la condition de n’employer dans la discussion que des arguments empruntés à l’expérience ou à la raison.

    La discussion n’est et ne doit être qu’expérimentale et rationnelle. C’est seulement après cette discussion qu’il apparaîtra de façon rationnelle si, pour expliquer les faits religieux, il est nécessaire [126] de faire appel à quelque chose que la raison exige et qui cependant dépasse à la fois la nature et l’homme.
    M. Durkheim soutient expressément en plus d’un endroit les prétentions du « scientisme ». Il semble, à l’entendre, que quiconque n’admet pas la domination absolue et universelle de la science doive être exclu du domaine de la pensée. Il ne faut, en face des hardiesses et de l’énergie de ces affirmations, ni s’émouvoir, ni s’intimider. Le « scientisme » est une métaphysique. Que tout le livre de M. Durkheim, comme toute sa pensée, en soit imprégné, c’est trop évident. Mais il ne s’agit pas ici de la valeur du « scientisme », ni même des droits de la science, mais simplement de la valeur scientifique d’une théorie. Ce n’est pas la même chose.
    M. Durkheim a écrit son livre pour montrer que la religion est une production naturelle de la société et pour aboutir à ce résultat il donne d’abord une certaine définition de la religion en général, puis il s’attache à montrer que la religion, telle qu’il l’entend, est tout entière en germe dans une certaine religion qu’il considère comme la plus primitive de toutes. Il semble, en effet, que si l’on pouvait arriver à découvrir les formes primitives, élémentaires, comme s’exprime M. Durkheim, de la vie religieuse, on pourrait saisir, comme sur le fait, la manière dont se sont constitués les cultes et les croyances, on verrait agir à nu les causes qui ont suggéré celles-ci et ont ordonné ceux-là. Si donc, au cours d’une vaste enquête à travers le monde, on découvrait quelque part un peuple qui pût légitimement être regardé comme primitif, on devrait pouvoir, en étudiant sa vie religieuse, découvrir chez lui les premiers germes, les premiers éléments de cette vie. Mais où devrons-nous chercher ? Il est inutile de consulter les historiens : l’histoire ne commence qu’au moment où des écrits, où des monuments peuvent conserver la mémoire des institutions, des événements. Or la civilisation qui est capable de porter témoignage sur elle-même, de se raconter est déjà une civilisation fort avancée, ce n’est plus une civilisation primitive. Un peuple qui écrit, un peuple qui bâtit est très loin d’être primitif. L’écriture et l’architecture supposent avant elles toute une longue et complexe évolution.
    • 16 [L’auteur fait allusion aux travaux de Frédéric Bouvier, « Le totémisme est-il une religion ? », Re (...)


    On n’aura chance de retrouver l’état primitif de l’humanité que dans les peuplades chez lesquelles l’évolution civilisatrice n’a pas encore produit ses effets, qui, malgré leur survivance, en sont restées au stade préhistorique. C’est pour cela que depuis Tylor [127] et John Lubbeek [i.e. J. Lubbock] les ethnographes ont prétendu ne trouver que chez les sauvages les représentants des états primitifs de l’humanité. Il fut un temps où tout ce qui était sauvage était regardé aussi bien comme primitif. On en a rabattu depuis. On a reconnu qu’il y a sauvage et sauvage, comme il y a fagot et fagot. Il y a des sauvages qui le sont devenus et ne sont par suite que des dégénérés et il y a des sauvages qui le sont restés. Ce sont ceux-ci, et eux seuls, les vrais primitifs. Des auteurs d’opinions très différentes, tels que en France Mgr Le Roy ; en Autriche, le P. Schmidt ; en Belgique, le P. Bouvier, d’un côté [16] ; et, de l’autre, en Angleterre, Frazer, Lang, Spencer et Gillen ; en France, Salomon Reinach et Durkheim s’accordent pour reconnaître à certaines peuplades ou tribus sauvages – il est vrai que ce n’est pas toujours aux mêmes – les caractères du primitif. Ces tribus restées à l’écart des influences étrangères, chez lesquelles les germes civilisateurs n’auraient pas levé, pourraient donc nous représenter l’état le plus élémentaire de l’humanité et, sinon absolument le plus ancien, du moins le plus ancien de ceux qu’il nous est permis d’atteindre.
    • 17 Op. cit., p. 135 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode po (...)


    Or M. Durkheim nous affirme qu’il existe encore de telles tribus, que les récits des voyageurs nous permettent de bien les connaître et que nous avons là, par conséquent, toute la collection de faits nécessaire pour établir une théorie et même pour l’établir scientifiquement. Car M. Durkheim ne présente pas ses conceptions comme des hypothèses ou des conjectures qui n’auraient reçu qu’un commencement de preuve. Il n’avance pas timidement avec toutes ces lenteurs et ces précautions auxquelles s’astreignent en des matières délicates et complexes des esprits de moindre envergure, il procède avec l’assurance et la force du génie. Exultavit ut gigas ad currendam viam [PS. (18, 6)].Il affirme donc que les tribus du centre australien sont des tribus véritablement primitives, qu’elles offrent à l’observateur le cas privilégié où le savant peut lire les lois essentielles des phénomènes comme on peut lire sur l’album l’édit du préteur. « Un fait unique peut mettre une loi en lumière, alors qu’une multitude d’observations imprécisesetvagues ne peut produire que confusion17. »
    • 18 [Orig.] Les « sociétés australiennes » et non pas « les tribus ».

    • 19 Ibid., p. 135 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode pour (...)

    • 20 Op. cit., p. 136 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode po (...)

    • 21 Durkheim, la Division du travail social, p. 189 et suiv. In-8°, Alcan, 1893. [Orig.] « Si l’on essa (...)


    Pourquoi les tribus australiennes sont-elles regardées comme primitives ? « Parce qu’elles [18]sont aussi rapprochées que possible des origines de l’évolution19. » Elles n’ont en effet ni la maison, ni même la hutte ; leur technique est rudimentaire, surtout leur organisation sociale est la plus simple qui soit connue, celle que M. Durkheim [128] appelle organisation à base de clans20. D’après M. Durkheim, en effet, les sociétés humaines ont commencé par être des hordes, c’est-à-dire des rassemblements d’êtres humains, sortes de troupeaux d’individus semblables, à peu près égaux entre eux, et tout de suite après serait venue l’organisation par clans, chaque horde étant désignée par un nom commun, semblable à un nom de famille, avec un ou plusieurs chefs, et faisant partie d’un ensemble plus vaste, la tribu21. Les membres du clan ne sont pas nécessairement parents par le sang, bien qu’ils le soient le plus souvent, ils n’habitent pas toujours ensemble, ils n’ont de commun que le nom. C’est dans ces tribus, dans ces clans australiens que, à la suite de Spencer et Gillen, et du missionnaire allemand Strehlow, M. Durkheim va découvrir ce qu’il appelle « les formes élémentaires de la vie religieuse ».

    Quelle est donc la religion de ces tribus ? En quoi consistent leurs croyances, leurs rites, leurs cérémonies ?
    Sur l’authenticité et la vérité de tout ce que nous racontent les récits des voyageurs et même des missionnaires, il y aurait beaucoup à dire. Le jour où on appliquera à tous ces récits les règles rigoureuses de la critique historique, on verra ce qui restera. Car celui qui sait combien il est difficile de se faire indiquer par un de nos paysans ses pratiques superstitieuses, de connaître l’intime de ses croyances sera persuadé malaisément qu’un voyageur puisse en quelques semaines ou en quelques mois pénétrer jusqu’au cœur des croyances des non-civilisés. Révéler le secret de ces croyances leur est généralement interdit : quelle confiance peut-on avoir en un homme qui doit ne rien révéler et qui, s’il révèle les choses sacrées, ne le fait qu’en se parjurant ? Mais ne soulevons pas ces difficultés. Tenons-nous-en au livre de M. Durkheim lui-même. Je me permets seulement de suivre un ordre très différent de celui qu’il a suivi. Au lieu de nous représenter d’ensemble toute la vie religieuse des tribus australiennes, M. Durkheim ne nous la présente que morcelée et fragmentée. Je voudrais au contraire tâcher d’en montrer la complexité. Je sais bien qu’il a pour but surtout d’en étudier les éléments ou, comme il dit, les formes élémentaires. Cependant, pour que l’on puisse juger de la valeur de l’analyse, il semble bien qu’il faille d’abord que nous connaissions l’ensemble concret et que nous ayons le tout avant de pouvoir étudier ses éléments.

    [129] Suppléant donc à ce qui paraît être une lacune, voici la vue d’ensemble de la religion des tribus australiennes que l’on peut tirer du livre de M. Durkheim. Cet ensemble comprend : le totem, les churinga, le mana, les esprits des ancêtres et le Dieu suprême. Chaque clan est désigné par un nom commun à tous ses membres ; ce nom est ordinairement celui d’un animal, d’une plante, rarement d’un phénomène de la nature : il y a ainsi le clan du kangourou, le clan du corbeau, du cacatoès blanc, le clan du prunier, le clan de la pluie. L’animal, la plante dont le clan porte le nom est le totem du clan. Le nom chez les primitifs n’est pas une simple désignation, il exprime une essence : par le fait seul que les hommes du clan du Kangourou s’appellent des Kangourous, ils sont des Kangourous. De là l’idée totémique : l’homme a la même nature que son totem. Le totem est comme un parent, un ami, un frère. Il n’est pas supérieur à l’homme. Parfois il lui est inférieur. Ordinairement ils sont égaux. Cependant le totem est sacré pour l’homme, c’est-à-dire que, ordinairement, l’homme ne doit ni tuer ni chasser son totem, il lui doit certains égards, il doit veiller à sa conservation et même à la reproduction de l’espèce totémique. Il y a, chaque année, des cérémonies qui ont pour but d’assurer la reproduction de cette espèce. Cependant on ne prie point le totem, on ne l’invoque pas. S’il est comestible, on ne le mange d’ordinaire que dans des cérémonies solennelles. Le clan a ainsi un totem commun, un nom commun, ce totem lui sert d’emblème, de blason. Comme au nom de famille on a ajouté un prénom, ainsi les individus, en outre du totem commun, ont un totem individuel. Ce totem n’est plus l’espèce tout entière, mais un individu de l’espèce, tel corbeau ou tel émou et non pas le corbeau ou l’émou en général.

    Les churinga sont des pièces de bois ou des morceaux de pierre polie, de formes très variées, mais généralement ovales ou allongés. Quelques-uns sont percés, à l’une de leurs extrémités, d’un trou par lequel passe un fil fait de cheveux humains ou de poils d’opossum. Par ce fil, dans les cérémonies importantes, on imprime au churinga un mouvement de rotation rapide qui produit une sorte de ronflement. Ce ronflement a une signification religieuse. Chaque groupe totémique possède une collection plus ou moins riche de ces churinga. Cette collection comprend d’abord tous les churinga que le clan a hérités des générations antérieures, puis ceux qu’on y ajoute à la naissance des nouveaux [130] membres du clan. Quand l’enfant naît, on cherche près de l’endroit où l’âme d’un ancêtre s’est réincarnée dans l’enfant futur le churinga que l’ancêtre a dû laisser. Si on ne le trouve pas, un ancien en fabrique un de toutes pièces. C’est ce qui explique que les churinga appartiennent à la fois à tout le clan et à chaque membre du clan. Sur chacun d’eux se trouve gravé un dessin qui représente le totem du même groupe. Cependant, quelques-uns ne portent aucun dessin, mais tous sont regardés comme des objets sacrés. On les dérobe aux yeux profanes. Les femmes, les jeunes gens non encore initiés n’ont pas le droit de les toucher, tout au plus leur est-il permis parfois de les regarder de loin. Les churinga sont conservés pieusement dans un lieu secret, cavité naturelle ou souterrain creusé dans ce but. Ils constituent le trésor religieux du clan et leur caractère sacré se communique au lieu où ils sont déposés. Le churinga a toutes sortes de vertus magiques : il guérit les blessures et les maladies, fait pousser la barbe, donne de la force, du courage. Il semble que ces objets portent en eux un réservoir inépuisable d’énergie, de bienfaits, de fécondité. Aussi leur perte est-elle regardée comme un désastre public. Ils sont comme le palladium du groupe. Le même caractère sacré se retrouve en d’autres objets tels que ceux que les Arunta du Nord appellent nurunja et que les Arunta du Sud nomment waninga. Ces derniers objets de formes diverses ne sont pas conservés, on les fabrique en vue d’une cérémonie spéciale et on les détruit après. Leur caractère vénérable ne dure donc que le temps de cette cérémonie. Ils ont tous ceci de commun que les dispositions de leurs lignes et de leurs parties sont destinées à figurer le totem.

    En dehors de ces objets, les Australiens regardent aussi le sang humain, les cheveux comme des choses sacrées. Certains rochers sont comme consacrés par des [e]ffusions de sang humain ; on y dessine l’emblème totémique. Ces rochers, certains arbres, des trous d’eau sont regardés comme sacrés parce qu’ils sont censés hantés par les âmes des ancêtres dont la première existence s’est achevée tout près d’eux.
    Les Australiens croient donc aux esprits, aux âmes. Mais tout d’abord ils croient à ce à quoi les ethnologues ont convenu d’appliquer le nom de mana. Le mana, c’est la force impersonnelle non spécialisée, indépendante à la fois de tous les sujets qui peuvent la posséder et de tous les effets qu’elle peut produire. Elle peut émaner de n’importe qui, de n’importe quoi et peut aussi bien produire n’importe quoi. Elle est l’énergie, la puissance, sans plus. Tout ce qui est produit a besoin de mana pour se produire. [131] Tout ce en quoi se manifeste un pouvoir quelconque a du mana par cela même. Le totem, symbole du clan, est comme le dépositaire au moins symbolique de tout le mana du clan. Le nom contenant toutes les vertus de la chose, le nom du totem contient donc aussi en lui le mana du clan. Ce qui fait la valeur des churinga c’est le mana qu’ils contiennent. C’est par leur mana qu’ils guérissent, qu’ils font pousser la barbe, qu’ils communiquent la vigueur et le courage.
    Les âmes des ancêtres possèdent aussi du mana, car elles sont puissantes pour le bien et pour le mal. Ce sont elles qui assurent la perpétuité du clan, car c’est leur émanation qui rend les mères fécondes. Les actes des vivants ne servent de rien ; ils restent souvent sans effet et quand ils sont suivis d’effet la femme ne s’en aperçoit que longtemps après. C’est le jour où, pour la première fois, la mère a senti l’enfant tressaillir en elle que l’enfant a été conçu ; ce jour-là, elle a passé près de quelque rocher, de quelque arbre, de quelque trou d’eau, résidence d’une âme d’ancêtre. C’est donc cet ancêtre qui a animé dans son sein la nouvelle vie. Le clan est ainsi la perpétuelle survivance, la réincarnation des aïeux. On s’est demandé parfois comment l’ancêtre pouvait ainsi se survivre et perpétuellement se réincarner. La question pourrait troubler un spiritualiste moderne, elle ne peut embarrasser un primitif. Est-ce que les plantes, tout en survivant, ne jettent pas au vent leurs graines ? Est-ce que l’homme ne projette pas son souffle qui, sans cesse, communique son mouvement aux objets divers qui l’entourent ? La vie ne paraît-elle pas un réservoir inépuisable d’animation ?

    L’histoire des mânes constitue une partie importante des croyances australiennes comme les rites funéraires constituent une partie importante de leurs cérémonies religieuses. Quand un homme meurt, tout un ensemble de rites accompagnent et suivent cette mort, constituant les cérémonies du deuil. On fait entendre des plaintes, des gémissements, des lamentations ; les hommes se coupent la barbe, et les femmes, les cheveux ; les têtes se couvrent de cendres, parfois même d’excréments, les corps s’enduisent de terre blanche, les joues saignent sous les blessures volontaires. Ces cérémonies se renouvellent durant plusieurs jours. On dirait que le défunt ait besoin des souffrances de ses proches ou qu’il y trouve plaisir. Ces rites supposent une croyance à la survivance. Or ce qui survit ce ne peut être le corps, c’est donc autre chose, ce que l’on appelle âme ou esprit. Quand tous les rites funéraires sont accomplis, l’âme, au sein de sa vie invisible et nouvelle, ne cesse pas de s’intéresser à la vie des [132] siens. Elle en est l’amie et leur reste protectrice. Elle habite probablement sous la terre un monde plus beau, plus tranquille, plus lumineux que celui qu’elle a quitté. Les chasseurs ont de magnifiques pays de chasse, et les pêcheurs de grands lacs où la pêche est abondante. On croit parfois que les méchants sont livrés à des bêtes qui les dévorent et les anéantissent. Mais les âmes qui survivent peuvent revivre et se réincarner. Ainsi les grands ancêtres, fondateurs du clan, se réincarnent incessamment de façon à entretenir toujours la vie, les vertus du clan. On rend à ces âmes des honneurs et une sorte de culte. Les lieux par où elles ont pénétré dans leur domaine souterrain et qu’elles hantent encore sont des lieux sacrés.
    • 22 [Orig.] « un véritable ‘bon dieu’« . Durkheim cite Carl Friedrich Theodor Strehlow, Die Aranda- und (...)


    Mais au-dessus des forces impersonnelles qui constituent le mana partout répandu, au-dessus des totems et des churinga qui en sont comme les dépositaires, au-dessus des âmes personnelles des ancêtres et des génies protecteurs, la plupart des tribus australiennes reconnaissant l’existence d’un dieu suprême que Strehlow a cru même pouvoir appeler un « véritable bon Dieu »[22]. Sous des noms divers : Baiame, Bunjil, Daramulum, Altjira, avec des légendes assez différentes, ces tribus croient à l’existence d’un être supérieur aux ancêtres, qui lui-même n’a pas eu d’ancêtre, créateur ou fabricateur des hommes, dont l’autorité s’étend à plusieurs tribus, qui est le maître des puissances naturelles, car il lance la foudre et répand la pluie, qui même connaît les actions des hommes, apprécie leur valeur et juge les morts, les punit et les récompense.
    Les cérémonies religieuses des tribus australiennes peuvent se ramener à quatre grandes classes : celles qui accompagnent l’initiation du jeune homme et lui donnent le droit de participer à la vie intégrale du clan ; celles qui ont pour but la conservation et la reproduction de l’espèce totémique ; celles qui accompagnent la réunion des clans pour les assises de la tribu ; celles enfin auxquelles donnent lieu un deuil ou une calamité publique. Nous avons indiqué plus haut quelques traits des cérémonies funéraires ; celles qui ont pour but de faire cesser une calamité, comme la sécheresse ou la pluie, présentent des caractères à peu près semblables. Voici les éléments principaux des autres.

    Quand l’adolescent atteint l’âge de la puberté, il se retire dans un endroit écarté, par exemple dans une forêt. Là, durant une période de temps qui varie de quelques jours à plusieurs années, il se soumet à toutes sortes d’exercices épuisants et contre nature, il jeûne, il [133] se mortifie, il s’inflige diverses mutilations. Par les jeûnes et aussi par l’absorption de drogues excitantes, il se met dans un état voisin du délire. Des vieillards, des anciens le surveillent et parfois le frappent durement. Puis on le soumet à de véritables mutilations, on lui arrache une dent, on lui fait des subincisions délicates et très douloureuses. Au cours de ces cérémonies, il découvre ou on découvre pour lui quel doit être son totem individuel. Le dieu suprême est toujours représenté dans toutes ces cérémonies, il en est le centre, on le prie, on révèle à l’initié son nom secret, on lui raconte son histoire. Il protège le néophyte et veille à la bonne observation des rites. Après avoir passé par cette sorte de noviciat, subi toutes ces épreuves, le jeune homme devient un membre actif du clan ; comme par son totem il a un nom propre, il devient aussi dans le clan une personnalité distincte.
    L’espèce totémique étant la protectrice et aussi la condition de l’existence du clan, puisqu’elle constitue comme le réservoir du mana collectif indispensable à la vie du clan, il est donc de la première importance pour les hommes que cette espèce, animale ou autre, soit conservée, se reproduise de façon normale. Plus elle se reproduira avec abondance, plus elle contiendra de mana et par suite plus le clan lui-même possédera de vitalité, de puissance, d’énergie. Chaque année donc, au moment où se reproduisent les êtres de l’espèce totémique, le clan s’assemble et procède à des cérémonies que M. Durkheim appelle des Intichiuma. Ces cérémonies, durant lesquelles des jeûnes rigoureux doivent être observés, consistent essentiellement à répandre à travers l’espace des germes chargés de mana, en accompagnant ces gestes de chants ou d’invocations destinés à assurer la fécondité des germes. Ces germes sont ordinairement empruntés aux rochers sacrés hantés par les âmes ancestrales : ces rochers sont comme les corps nouveaux de ces âmes ; ils sont donc chargés du mana ancestral, et comme les ancêtres, par leur assimilation au totem, ont le mana même de ce totem, il s’ensuit que les grains de poussière qu’on soulèvera en frappant le rocher ancestral seront autant de germes capables de produire des individus de l’espèce totémique.

    En vue de ces Intichiuma ou pour un motif quelconque d’entente commune, le clan se réunit de temps en temps tout entier. On tient alors ce que les ethnographes appellent un corrobori. Ces assemblées n’occupent parfois que quelques jours, mais elles peuvent aussi bien durer des mois. Pendant ce temps, l’activité est concentrée sur le but même de la réunion. Et on peut assister alors à des cérémonies spéciales qui, sous des formes et par des moyens divers, produisent chez tous les membres du clan [134] une excitation collective qui va jusqu’aux actes les plus violents. Ces cérémonies n’ont lieu que la nuit, à la lueur des torches. Ce sont d’abord des danses, des chants, des cris, des bruits produits par les boomerangs et les ronflements des churinga, des combats qui, bien que simulés, peuvent être dangereux ; puis des scènes que nous appellerions des scènes de débauche : les règles ordinaires sont abolies, les femmes s’échangent, des incestes s’accomplissent, la promiscuité est presque complète. Enfin viennent des mouvements violents et rythmés de tous les corps, des cris inarticulés qui finissent en hurlements. On dirait une foule de déments ou de forcenés. Le tumulte finit quand la fatigue les couche, épuisés.
    L’ouvrage de M. Durkheim a pour but de nous expliquer ces faits et d’en tirer toute une théorie de la religion. Cette théorie se ramène à quelques propositions : la religion est essentiellement constituée dès qu’il y a séparation du sacré et du profane ; le totémisme établissant une séparation entre le sacré et le profane est dès lors une religion, une religion sans divinité, car le totem n’est pas un dieu. Ce n’est que plus tard que l’homme a imaginé des êtres transcendants auxquels il a rendu un culte. Le culte des ancêtres, le culte de la nature, l’animisme et le naturisme ne sont pas les formes primitives de la religion. Ce ne sont pas des états psychologiques individuels qui poussent l’homme à imaginer des dieux.

    L’homme est religieux parce qu’il est social. C’est la vie en société qui impose à l’homme certaines interdictions sans but immédiat, c’est dans les circonstances où le groupe social se rassemble, communie en des gestes, en des rites, en des sentiments collectifs que l’individu se sent exalté et transporté. Il se sent élevé au-dessus de lui-même par une force supérieure, il éprouve l’influence roborative de la société, et comme il ne se rend pas compte que cette force lui vient du groupe, du rassemblement, de la communion avec ses pareils et ses congénères, il l’attribue à des êtres surnaturels. Les dieux ne sont ainsi que la société hypostasiée, divinisée et le dieu suprême et unique n’est que l’universelle société humaine, pareillement hypostasiée et divinisée. C’est par là que M. Durkheim va rejoindre Auguste Comte par la valeur qu’il attribue à l’humanité.
    M. Durkheim commence donc par voir dans le totémisme une religion. Sur ce point il se sépare de la plupart des ethnographes et de ceux-là mêmes qui lui ont fourni les faits qu’il veut expliquer [135]. Il a en effet besoin d’une définition particulière de la religion. À l’encontre de presque tous les auteurs compétents, d’accord cependant avec M. Salomon Reinach, il soutient qu’il y a religion toutes les fois qu’il y a une distinction entre le profane et le sacré. Qu’est-ce donc que le sacré ? – Toutes les fois qu’il existe des institutions qui mettent nettement à part certains êtres, certains actes, certaines formules, certains lieux… et en interdisent l’usage ou l’accès, on peut dire que tout ce qui est réservé par l’interdit est sacré et tout le reste est profane. Les ethnologues se servent ordinairement du mot tabou pour désigner le sacré. M. Salomon Reinach ne voit dans la religion qu’un système de défenses ou d’interdictions. M. Durkheim y voit encore autre chose : pour lui le sacré n’est pas seulement tabou, interdit, il est encore conçu comme un réservoir de forces. Il ne sert pas seulement de barrière à la force profane, il peut aussi servir à l’exciter et à l’augmenter. Les institutions religieuses ne sont pas seulement un système de contraintes et de restrictions, elles sont aussi des créatrices d’énergie, des systèmes de propulsion. Aussi bien que de frein elles servent de moteur.
    • 23 In-8°, Alcan, 1913 [James Henry Leuba, La psychologie des phénomènes religieux, trad. de l’américai (...)

    • 24 Ibid., ch. II, p. 57



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    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:42

    Donc, par cela seul que le totem est regardé comme sacré, que, d’une part, il est ordinairement interdit de le tuer et de le manger, et que, d’autre part, à sa conservation, à son abondante reproduction est liée la puissance même du clan, M. Durkheim doit regarder le totémisme comme une religion. Il y aurait donc religion alors même qu’il n’y aurait aucune croyance en un ou plusieurs dieux et le concept de religion serait indépendant de celui de divinité. Il est évident que rien n’est plus arbitraire. M. James Leuba, dans un livre sur la Psychologie des phénomènes religieux23, l’a fait remarquer à M. Durkheim avec une insistance à laquelle il est difficile de rien ajouter. Il objecte en particulier que la seule origine que M. Durkheim puisse assigner à la division du profane et du sacré est la tradition : or, si le sacré venait de la tradition, il faudrait que la tradition elle-même fût regardée comme sacrée, mais cela n’est pas, car il y a des usages traditionnels, reconnus pour tels et qui n’inspirent aucun respect, parce qu’on les juge insignifiants. « Par conséquent, une tradition n’est pas sacrée en tant que tradition. Le caractère sacré ne lui appartient qu’en tant que le traditionnel lui apparaît comme l’expression d’une force supérieure à l’individu, tenant en réserve du bien et du mal et sur laquelle la conduite humaine peut influer24. » Et en appendice M. Leuba nous rappelle quarante-huit [136] définitions de la religion, toutes empruntées à des auteurs estimés par les savants. Aucune de ces définitions ne sépare de l’idée de religion l’idée de divinité. La définition de M. Durkheim ne présente donc aucun caractère d’autorité scientifique, puisqu’elle est rejetée par presque tous les spécialistes compétents.


    Mais il y a, en outre, des raisons internes qui empêchent d’accepter cette conception de la religion. Car la définition de M. Durkheim peut aussi bien s’appliquer à des préceptes que personne n’a jamais regardés comme religieux, elle ne s’applique donc pas au seul défini, – et en même temps elle ne convient pas à tout un ordre spirituel que tout le monde regarde comme religieux, elle ne convient donc pas à tout le défini. Ce qui veut dire qu’elle est doublement fautive.


    Elle s’applique à des objets que personne ne regarde comme religieux. Car si les interdits sociaux suffisaient pour donner à un objet le caractère sacré, on pourrait dire que, dans une usine électrique, la salle des commutateurs, qu’une poudrerie ou une poudrière devraient être regardés comme des endroits sacrés. Personne évidemment n’y songe, et les sentiments de crainte qu’inspirent ces lieux n’ont rien de commun avec des sentiments religieux.

    M. Durkheim a senti la difficulté et s’est efforcé de la prévenir. Il distingue, en effet, deux espèces d’interdits : ceux qui ont pour but une utilité immédiate, individuelle ou collective, tels seraient ceux qui interdisent le libre accès d’une poudrière ou d’une salle de commutateurs, et ceux qui n’auraient rien de religieux ; ceux qui n’ont pas une fin utilitaire, ce seraient seulement ces derniers qui seraient sacrés et proprement religieux. Mais la difficulté n’est que reculée. Il n’est pas vrai que les interdits religieux n’aient pas une utilité. Il est interdit à l’Australien de chasser, de tuer et de manger son totem, parce qu’il adviendrait du mal aux individus et à tout le clan si cet interdit n’était pas observé. Il serait aussi dangereux de le transgresser qu’il peut être dangereux d’entrer librement dans une poudrière. Ce n’est donc pas en cela que se trouve la différence. Dira-t-on que ce qui caractérise l’interdit sacré c’est d’être sans but ? Il faudrait donc rayer de la liste des tabous sacrés tous ceux dont la non-observation entraîne des malheurs ou des punitions. Il faudrait regarder le respect inspiré par le sacré comme essentiellement irrationnel, autant dire [137] mystérieux. Sa valeur viendrait donc de son irrationalité, du mystère qui le couvre, de l’Impossibilité où l’on est d’en rendre raison. M. Durkheim veut prouver que le caractère sacré a son origine dans la pression qu’exerce sur l’individu le groupe social, mais cette pression s’exerce de deux manières : par la police et la religion. La police, en effet, impose des interdits tout comme la religion ; les interdits de la police sont profanes, parce qu’ils sont utiles, explicables, rationnels ; si les autres sont sacrés, c’est sans doute parce qu’ils sont inutiles, inexplicables, irrationnels, mystérieux. Ainsi donc, de deux choses l’une : ou M. Durkheim veut donner pour origine au sacré uniquement la pression sociale, et alors il ne peut plus distinguer l’interdiction de police de l’interdiction religieuse ; ou il veut maintenir la distinction entre la police et la religion, et il faut alors reconnaître que ce qui caractérise le religieux est une considération d’un ordre tout à fait particulier qui consacre la pression sociale. Ce n’est donc pas cette pression qui se consacre elle-même.

    Mais ce n’est pas tout. La définition de M. Durkheim qui ne convient pas, nous venons de le voir, au seul défini et s’appliquerait aussi bien aux ordres de la police qu’aux prescriptions religieuses, ne convient pas non plus à tout le défini. Il y a, en effet, au moins une religion à laquelle elle ne peut essentiellement convenir. On s’étonnera peut-être et l’on se demandera où est cette religion dans laquelle on ne trouve pas cette distinction radicale des êtres et des choses en profanes et en sacrés. Les religions des sauvages, celles du Japon, de l’Inde, de la Chine, tout comme les religions antiques, reconnaissent des êtres et des lieux sacrés, des gestes, des rites, des cérémonies religieuses qui s’opposent aux cérémonies profanes. Toutes les religions reconnaissent l’existence des fonctions sacerdotales ; le prêtre, au moins durant le temps qu’il exerce sa fonction, a un caractère sacré. Chez les Juifs, une tribu détenait le monopole du sacerdoce. Dans le catholicisme, le prêtre est spécialement consacré, c’est lui qui confère les sacrements ; il y a, en outre, des vases sacrés ; les églises, les cloches, tous les objets du culte sont consacrés. Dans le protestantisme, même dans les Églises les moins pastorales et les moins ritualistes, la Bible demeure un livre sacré, le pasteur, l’orateur, celui qui parle ou qui prie au nom de tous, accomplit une fonction que tous regardent comme sacrée. Et, enfin, partout et dans toutes les religions, l’activité religieuse, le culte, la prière succède à l’activité profane et ne peut se confondre avec elle, comme le repos du dimanche ou du sabbat succède dans la semaine aux six jours de labeur.

    [138] En dépit de tous ces faits, si on va au fond des choses, on peut voir qu’il y a une religion, une seule sans doute, mais cela même est bien remarquable, à laquelle ne convient pas la définition de M. Durkheim. Et cette religion est tout simplement le christianisme. Si en effet on veut pénétrer jusqu’à l’essence du christianisme, voit-on qu’il repose sur la distinction du sacré et du profane ? Je ne le crois pas. Et la raison est très simple. C’est que le christianisme a précisément pour but, en divinisant l’homme tout entier, de supprimer le profane et de le remplacer partout par le sacré et par le divin. « Il n’y a plus ni juif, ni gentil, ni esclave, ni homme libre, dit saint Paul, tous ne font qu’un dans le Christ. » [Ga 3/28] Tout homme est sacré pour l’homme. Car toute âme chrétienne est surnaturalisée par la Rédemption, arrosée du sang d’un Dieu, greffée par la grâce sur le cep divin. Pour le vrai chrétien il n’y a pas d’action profane : « Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, faites tout pour la gloire de Dieu », dit encore saint Paul [1 Corinthiens 10:31]. Si on s’abstient à certains jours de certaines occupations ou de certains aliments, ce n’est pas à cause du caractère impur ou profane de ces aliments ou de ces occupations, c’est pour obéir à un ordre, à une discipline commune, ordre et discipline basés sur des lois émanées de Dieu ou constatées dans la nature de l’homme. Les sacrements ne sont que les moyens qui sanctifient l’homme ; le sanctifiant tout entier, ils ne laissent plus en lui aucune place au profane. Le sacerdoce lui-même n’a d’autre but que la sanctification des fidèles. Le laïque fidèle n’est pas plus profane que le prêtre : si celui-ci a reçu une consécration spéciale, cela ne veut nullement dire qu’il s’oppose au fidèle comme le profane au sacré : le laïque et le prêtre sont également sacrés, les consécrations particulières qui confèrent au prêtre l’autorité, les pouvoirs sacerdotaux ne font que lui fournir les moyens pour son service. Prêtres et laïques, s’ils sont fidèles, disent également l’un et l’autre : « Mihi vivere Christus est. Le Christ est ma vie. » Et encore : « Vivo, jam non ego, vivit vero in me Christus. Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. » Ils sont donc l’un et l’autre essentiellement sacrés, tout au moins ils doivent l’être pour être vraiment chrétiens. Et ce que nous disons du catholicisme doit aussi se dire de toutes les confessions hérétiques ou schismatiques qui prétendent garder encore l’idée mère du christianisme.

    Ne convenant ni au seul défini ni à tout le défini, la définition proposée par M. Durkheim ne peut donc être acceptée. Et il suit de là que le totémisme en lui-même ne constitue pas une religion. Il ne suffit pas de constater des interdits pour que ces interdits [139] apparaissent comme sacrés. C’est l’idée religieuse qui rend les êtres sacrés et ce n’est pas l’idée du sacré qui a créé l’idée religieuse.


    Nous pourrions nous arrêter là et constater que, la base même de la théorie se trouvant ruinée, la théorie ne peut s’édifier, mais on peut pousser plus loin. Quand même le totémisme serait une religion, une religion sans divinité, il n’en faudrait pas moins expliquer comment l’homme a imaginé ses dieux. Les ethnologues et les philologues du dix-neuvième siècle ont proposé deux explications qui ont fait une assez belle fortune : l’animisme et le naturisme. Ce n’est qu’après avoir écarté ces explications que le champ sera laissé libre à l’explication sociologique.
    M. Durkheim se trouve amené à critiquer l’animisme de Lubbock et de Tylor aussi bien que le naturisme de Max Müller et de Bréal. On sait en quoi consistent ces explications. Pour les animistes, les dieux ne seraient que des âmes humaines érigées en divinités ou les forces de la nature, conçues sur le type des âmes humaines. Ils voient dans ce culte des morts, dans la religion des ancêtres, la religion primitive, et ils pensent que l’idée de l’âme est contemporaine des origines de l’humanité. Par le fait seul que l’homme a des rêves où il se voit être loin du lieu où il dort, il est incité à croire que quelque chose de lui s’est transporté ailleurs pendant que son corps gisait immobile. Dans ses rêves encore l’homme voit ou entend des gens qui sont morts : quelque chose d’eux est donc revenu et a subsisté. Ce quelque chose, cette espèce de double de l’homme, peut être assimilé tantôt à son ombre, tantôt à son souffle, tantôt à la chaleur qu’il répand autour de lui. Ainsi le phénomène du rêve induirait l’homme à penser qu’il y a en lui un ou plusieurs êtres différents du corps et qui peuvent sans doute lui survivre. Ces êtres sont des âmes, souffles, principes de mouvement et de vie, liés encore à quelque forme corporelle. Puis ces âmes sont conçues comme dégagées de toute espèce de corps et constituent les esprits. Ces âmes, ces esprits restent en communication avec les hommes, en particulier avec leurs descendants. Ils en exigent un culte. Ils sont, selon le culte qui leur est rendu, bienfaisants ou malfaisants. Les ancêtres, mânes, lares ou pénates, sont les dieux du foyer, de la famille. Il y a de même les dieux de la cité. À côté de ce culte, suggéré par lui, un autre a pu et dû se former, le culte des forces de la nature. Comme l’enfant prête une volonté aux choses, de même les anciens hommes placèrent derrière les phénomènes de la [140] nature, derrière le ciel, le soleil, la lune, la terre, la mer, le vent et la foudre, des âmes semblables aux âmes humaines. Ils inventèrent des mythes et des légendes et ainsi, par exemple, le paganisme hellénique se constitua comme une sorte de corollaire ou d’excroissance du culte des mânes. 

    L’animisme s’achève ainsi en naturalisme.
    Le naturisme de Müller est assez différent. Au lieu de reposer avant tout sur des considérations d’ordre psychologique, il ne s’appuie que sur la philologie. Ayant remarqué que dans les anciennes mythologies les noms propres qui désignent des dieux sont philologiquement très proches des noms communs qui signifient les forces de la nature, quand ce ne sont pas ces noms mêmes, Müller et ses disciples ont imaginé que les dieux n’étaient que les forces de la nature substantifiées. On a eu un nom pour désigner le vent, et ce nom commun a été regardé comme le nom propre d’un être, d’un être réel, personnel, analogue à un homme. Ainsi les noms seraient devenus des dieux : Nomina numina. Et les légendes divines ne seraient que la personnification anthropomorphique de l’histoire des phénomènes de la nature. Les métaphores des poètes auraient créé la mythologie. C’est ainsi que Poséidon est doté d’un char et de chevaux à crinière blanche ; ce n’est là que l’expression figurée des bonds écumants des vagues. Quant au culte des ancêtres, il serait un dérivé du culte des dieux.

    M. Durkheim critique avec rigueur ces deux théories. Il n’a pas de peine à montrer tout ce qu’il y a d’arbitraire dans le naturisme philologique. Les philologues ne peuvent remonter au-delà des documents écrits qu’ils étudient et qu’ils interprètent. Orces documents, si anciens qu’on les suppose, sont bien postérieurs aux origines premières de l’humanité. Alors même qu’ils fourniraient une base solide à l’explication naturiste de la religion, ils n’expliqueraient que des formes religieuses postérieures à l’écriture, non les formes antérieures, Or c’est de celles-ci et de celles-ci seules qu’il est question lorsqu’on cherche les origines de la religion.
    L’animisme offre plus de résistance et M. Durkheim lui est même reconnaissant d’avoir travaillé à élucider la genèse de la notion d’âme. Il ne croit cependant pas que l’animisme puisse expliquer les formes primitives de la religion. Car d’abord rien ne prouve que le primitif ait besoin d’inventer l’âme pour expliquer ses songes. Il est vrai que les sauvages contemporains donnent encore des leurs une explication toute semblable à celle que supposent les animistes, mais ce fait ne paraît avoir aucune importance pour M. Durkheim. Il se demande comment l’âme des [141] parents a pu devenir un dieu, comment un semblable a pu devenir un supérieur et il s’efforce ensuite de faire voir que le culte des ancêtres n’est pas primitif. Le culte des morts, nous dit-il, n’existe pas en dehors des rites funéraires chez les tribus totémisantes de l’Australie. Enfin et surtout, il ne peut comprendre comment du culte des mânes on a pu passer au culte des forces de la nature. Pour attribuer une âme aux forces qui produisent les phénomènes naturels, il faudrait que ces phénomènes eussent quelque chose de semblable aux volontés humaines, en particulier qu’ils fussent changeants comme elles ; or le cours de la nature est essentiellement uniforme et régulier.

    M. Durkheim adresse enfin au naturisme et à l’animisme la même critique qui, à ses yeux, doit être regardée comme décisive, c’est que ces deux théories, sous prétexte d’expliquer le fait religieux, le détruisent, car elles ramènent toutes les croyances religieuses à n’être que des illusions, elles font de la religion le produit d’une sorte de délire : délire verbal dans la théorie naturiste, délire imaginatif dans la théorie animiste. La religion n’a plus ainsi aucun fondement, elle ne repose sur rien, elle n’est et ne peut être qu’une erreur. Or M. Durkheim professe que la mission du savant consiste d’abord à respecter le fait qu’il veut expliquer et, pour cela, il est nécessaire que l’explication qu’il propose ne supprime pas, ne fasse pas évanouir le fait lui-même. Les faits religieux existent, ce n’est pas les expliquer que de les réduire à des erreurs, à des songes, que de les assimiler au délire.

    • 25 [« Les rites piaculaires et l’ambiguïté de la notion de sacré », Durkheim 1912, livre 3, chap. 5, p(...)




    M. Durkheim insiste avec force pour montrer que, l’animisme et le naturisme une fois rejetés, il ne reste plus qu’une explication possible, celle-là même qu’il va proposer. Il faut donc, avant tout, voir ce que vaut cette critique. Il semble bien qu’on doive reconnaître que l’explication par le rêve de la genèse de la notion d’âme qui est ce que M. Durkheim admire le plus dans la théorie animiste est aussi ce qu’il y a de plus conjectural, de moins clair dans la théorie. Si cependant, ainsi que le reconnaît M. Durkheim, les Australiens rendent eux-mêmes compte de leurs croyances par des considérations analogues, on ne voit pas trop pourquoi on n’admettrait pas leur explication. Ils savent sans doute mieux que nous ce qu’ils pensent et les liens qui unissent entre elles leurs pensées. La notion d’âme une fois formée, il ne paraît pas très difficile de concevoir comment l’âme du père a dû être honorée par un culte. Le père était supérieur aux enfants durant sa vie, le [142] changement d’état que dénotent l’inanimation [sic], le refroidissement, puis l’odeur et la corruption du cadavre n’enlève rien à sa supériorité, il la rend seulement plus mystérieuse, plus redoutable : par la croyance à l’âme les liens subsistent, avec les liens les devoirs. On est forcé de se débarrasser du cadavre, de l’enfouir ou de le manger, de le donner en pâture aux oiseaux, ou de le brûler, on n’en est que plus tenu à continuer vis-à-vis de l’âme invisible les rites de la soumission et du respect. M. Durkheim soutient que chez les tribus australiennes on ne trouve pas trace du culte des mânes en dehors des rites funéraires. C’est, ce semble, dépasser ce que montre l’observation exacte des faits. Car les rites funéraires eux-mêmes, avec les signes de deuil qu’ils comportent, les blessures volontaires qui les accompagnent, paraissent bien des cérémonies cultuelles. C’est bien pour le mort, pour l’honorer, pour de quelque façon se le rendre propice qu’on crie, qu’on pleure, qu’on se couvre de cendres ou d’excréments, qu’on se frappe et qu’on se déchire le visage. Sans cela tous ces rites n’auraient aucun sens et M. Durkheim les appelle lui-même des « rites piaculaires »[25]. On a vu d’ailleurs le rôle important que jouent les âmes des ancêtres dans la conception. Ces âmes sans cesse réincarnées assurent la durée du clan. Ce sont elles qui, à chaque conception, laissent après elles un churinga qui est comme la marque de leur opération. Ces churinga prennent place dans le trésor sacré du clan ; à ce titre, ils ont part à toutes les cérémonies. Comment peut-on dire, dans ces conditions, qu’il n’y a dans ces tribus aucune cérémonie du culte ancestral ? Il semble au contraire qu’il faille dire que les ancêtres sont présents à toutes les cérémonies.
    • 26 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. II. Le naturisme », Durkheim 1912, livre (...)


    • 27 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. II. Le naturisme », Durkheim 1912, livre (...)


    • 28 [Orig.] « Sur plus de 500 noms totémiques relevés par Howitt parmi les tribus du sud-est australien (...)




    Mais, de toutes les critiques adressées par M. Durkheim à l’animisme, la plus faible est certainement celle par laquelle il croit établir l’invraisemblance de l’hypothèse en vertu de laquelle les primitifs avaient, comme les enfants, placé des âmes et des volontés derrière les forces de la nature et inventé ainsi les dieux de la nature. La page 119 des Formes élémentaires de la vie religieuse mérite d’être lue avec la plus grande attention[26]. On y voit à quel point un esprit qui, pourtant, n’est pas médiocre peut être hypnotisé par sa propre pensée. M. Durkheim soutient que, la nature étant uniforme, les primitifs n’ont pu voir derrière elle des volontés. Et il ajoute : « Sans doute ici et là quelque événement inattendu se produit, c’est le soleil qui s’éclipse, c’est la lune qui disparaît derrière les nuages, c’est le fleuve qui déborde, etc. Mais ces perturbations passagères ne peuvent jamais donner naissance qu’à des émotions également passagères dont le souvenir [143] s’efface au bout d’un temps. »[27] M. Durkheim ne cite que trois phénomènes inattendus, il oublie donc tous les autres, tous les imprévus, les imprévisibles : la gelée, la pluie, la grêle, la sécheresse, le vent, la tempête, le tonnerre, la foudre et s’il pense que ces imprévus ne doivent pas laisser de trace dans le souvenir c’est parce qu’il ne connaît guère sans doute ni les marins, ni les laboureurs. M. Leuba lui a reproché de ne pas assez tenir compte des données psychologiques, on ne peut que donner raison à M. Leuba. Cet oubli est d’autant plus étonnant qu’à la page 145 (26 pages plus loin), énumérant les divers totems australiens empruntés en dehors des animaux aux forces de la nature, M. Durkheim cite expressément « les neiges, la pluie, la grêle, la gelée, la lune, le soleil, le vent, l’automne, l’été, l’hiver, certaines étoiles, le tonnerre, le feu, lafumée,l’eau, l’ocre rouge, la mer »[28], et cette liste même établit contre sa thèse que ces objets naturels sont regardés par les Australiens comme des êtres animés précisément parce qu’ils sont des totems.
    • 29 Dans son texte, M. Durkheim dit : « Tous », mais sa loyauté l’oblige à ajouter en note (p. 168, not (...)




    Nous voici maintenant arrivés à l’explication que M. Durkheim nous propose pour son compte. Selon lui, le totem n’est pas un dieu, il est un parent de l’homme ; l’homme ne le regarde pas comme une puissance dont il dépendrait et à ce titre il ne lui rend aucun culte. Le totem cependant étant l’objet d’interdits est un être sacré et les rapports que l’homme entretient avec lui doivent être considérés, s’il faut en croire M. Durkheim, comme d’ordre religieux. Cependant M. Durkheim reconnaît qu’il y a des interdits civils qui ne consacrent pas leur objet. Les interdits qui protègent le totem ne sont-ils pas de ce genre ? M. Durkheim n’apporte d’autre preuve en faveur du caractère sacré uniquement religieux qu’il attribue au totem que les rapports qui existent entre les churinga et le totem. Les churinga sont incontestablement des objets sacrés. Or, dit M. Durkheim, ils portent à peu près tous29 la marque du totem, c’est donc cette marque qui les consacre et comment cette marque totémique pourrait-elle rendre ces objets sacrés si elle-même et par suite l’être qu’elle représente n’avaient pas déjà le caractère sacré ? La faiblesse du raisonnement saute aux yeux, car si c’était la marque totémique qui sacrait les churinga, elle ne manquerait à aucun. Puisqu’il y a quelques churinga qui ne portent pas cette marque et comme ils ne sont [144] pas moins sacrés que les autres, il s’ensuit évidemment que ce n’est pas la marque, ni par suite le totem qui rendent l’objet sacré. Le totem, par la vertu magique du nom, ainsi que nous l’avons expliqué, est devenu un parent, un consanguin, vis-à-vis duquel le clan a certaines obligations, qui est protégé par des interdits, mais sans que ces interdits donnent naissance à un caractère religieux. Les churinga, au contraire, sont étroitement liés aux âmes des ancêtres. Il paraît bien plus vraisemblable de faire dériver leur caractère sacré de leurs rapports avec ces âmes.
    Rien cependant ne nous explique encore comment le primitif est arrivé du totem qui est son égal à la conception de puissances redoutables et imprévues qui peuvent lui faire du mal ou du bien, sur lesquelles il peut s’appuyer, en lesquelles il peut mettre sa confiance ou son espoir. On dit que l’homme, poussé par quelque hasard ou par quelque instinct, ayant prononcé certaines formules, certaines imprécations ou implorations, ayant accompli certains rites et ayant constaté, ensuite, la production d’événements conformes à ses désirs : pluie, guérison, heureuse chasse ou tout autre, a dû croire à l’efficacité de ces gestes ou de ces formules et qu’il a dû ainsi être amené à croire qu’il y avait quelque puissance cachée que ces rites pouvaient lui concilier. M. Durkheim objecte que l’expérience même aurait dû suffire pour détruire cette croyance, car les rites ne réussissent pas toujours, les vœux ne sont pas toujours exaucés et il suffit que l’expérience du croyant se trouve une fois trompée pour qu’il s’aperçoive de l’inefficacité du rite. Ici encore, je le crains, M. Durkheim néglige un peu trop la psychologie, car l’insuccès d’une recette ne prouve contre la recette que pour un esprit qui raisonne scientifiquement. Une cause qui manque une seule fois de produire l’effet attendu n’est pas une véritable cause. Mais le primitif, comme tous les esprits simples, qui sont en même temps assez compliqués, ne perd pas, pour un insuccès, la foi en une recette qu’il croit avoir réussi jadis. Il suffit, pour s’en convaincre, de voir la confiance qu’on garde dans les campagnes, en dépit de tous les insuccès, aux remèdes de bonne femme comme aux pratiques superstitieuses. Quoi qu’il en soit, M. Durkheim veut que la croyance aux dieux ait une tout autre origine. Quelle sera donc cette origine ?

    • 30 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, li (...)




    Jusqu’ici le primitif obéit à des interdits, respecte les objets qu’il regarde comme sacrés, observe traditionnellement certains rites. Membre d’un groupe social, il suit la discipline du groupe, il socialise ses propres gestes en mimant les gestes des autres ; mais que vienne une assemblée générale du clan, que se tienne [145] un corrobori, et l’individu, au milieu de l’exaltation générale, sentira son être comme transposé sur un autre plan, il éprouvera, comme on dit, des transports : les sentiments des autres se répercuteront en lui, exalteront sa vie tout entière ; il sentira des désirs qu’il ne se connaissait pas, il sautera par-dessus les ordinaires barrières morales, ses propres impressions seront agrandies, exhaussées, multipliées par les sentiments de tous. La société réunie sécrétera comme une sorte d’ivresse qui se répandra à travers tous ses membres. Et c’est autour des choses sacrées, en maniant les objets sacrés, que cette ivresse se produira. Aussi, lorsqu’après cette exaltation sacrée, revenu à la vie de tous les jours, à la vie profane, comme dit M. Durkheim, le primitif se souvient de la force qu’il avait et qu’il n’a plus, des élans qui le transportaient et dont il se sent alors incapable, il attribue aux objets sacrés, aux êtres qu’ils symbolisent ou que les croyances leur rattachent, le surcroît de forces qu’il a expérimentées. Cette « influence roborative »[30] est une réalité. Le primitif ne peut la nier. Il l’a éprouvée en soi. Il l’attribue tout naturellement aux objets sacrés, aux êtres sacrés.
    • 31 [Orig.] « Ce n’est pas M. É. Durkheim qui soutiendrait que l’homme naît bon et que la société le dé (...)



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    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions
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    Message  Arlitto Jeu 15 Fév 2024 - 7:43

    C’est pour cela qu’il leur attribue cette puissance générale que nous avons appelée mana. Mais il rapporte aussi naturellement cette puissance aux êtres qui sont en communication avec lui. Il a le souvenir de ses ancêtres et il leur attribue l’origine de ce mana. Peu à peu il se crée des dieux. Ce faisant, il se trompe sans doute, mais il ne se trompe qu’à moitié, car il y a bien en effet une influence roborative, une source réelle de force, extérieure à l’individu, distincte de lui. Cette force c’est la société même. Ainsi les dieux ne sont que la société déifiée et hypostasiée. Sous le nom des dieux c’est la société que les hommes adorent et ont toujours adorée. C’est la société qui fait de l’homme un être religieux, civilisé, raisonnable même. Selon un mot très juste de M. Loisy, aux yeux de M. Durkheim, « l’homme est né animal, la société le fait homme »[31].
    • 32 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, li (...)




    Telle est l’explication sociologique de la religion. Cette explication n’est d’ailleurs qu’un fragment de l’explication totale de l’homme. Pour M. Durkheim, la société doit expliquer également la science et la raison même. Nous n’avons pas à discuter ces deux derniers points, que M. Durkheim indique sans y insister. Mais a-t-il établi « scientifiquement » cette origine sociologique de la religion ? Est-ce bien la société que l’homme adore sous le nom de Dieu ? Le livre de M. Durkheim nous montre surabondamment [146] que M. Durkheim le croit, mais quelle preuve nous en donne-t-il ? On est bien forcé de dire qu’il n’en fournit d’autre que ses personnelles conjectures. Toute son argumentation peut en effet se ramener à ces termes : la religion est un fait, ce fait repose sur l’expérience que l’individu humain a faite d’une force distincte de lui, force où il trouve un appui, un réconfort, force capable de l’élever au-dessus de lui-même. Cette force, l’homme l’attribue à des êtres surnaturels, à des dieux. L’explication animiste comme l’explication naturiste de la religion réduisent l’expérience « roborative »[32], fondement de la religion, à n’être qu’un délire ou une illusion. Ces deux explications sont donc fausses, car l’expérience religieuse étant un fait ne peut être illusoire. Il faut donc ou adopter l’explication surnaturelle de l’expérience religieuse, reconnaître que c’est la divinité même qui donne à l’homme cet appui, cette force, ce réconfort, ou chercher dans la nature et hors de l’individu humain la source de cette force. Un rationaliste n’hésite pas, il n’examine même pas l’hypothèse de l’existence du surnaturel, il la déclare d’emblée irrecevable. Admettre le surnaturel, même à titre d’hypothèse à discuter, serait reconnaître que la raison humaine a ses bornes, et qu’il peut y avoir dans ce monde des phénomènes dont la science est impuissante à fournir une explication complète. Or ce sont là des propositions que « rationalisme » et « scientisme » ne peuvent souffrir. Ils les rejettent donc par un coup d’autorité. Et par là même ils s’engagent à nous apporter des explications complètes qu’ils déclarent possibles partout. M. Durkheim nous doit donc une explication naturelle du fait religieux, explication qui ne sera empruntée ni aux rêves de l’animisme, ni au délire verbal du naturisme, et qui nous montrera la source d’énergie que la religion fournit à l’homme. Or, en dehors de l’homme individuel, il n’y a que la société, le groupe social qui puisse créer ainsi dans l’individu des forces nouvelles. Ce sera donc la société qui sera la cause de cette surélévation de l’homme, comme elle l’est de ses transports. La religion n’est ainsi qu’un fait social interprété de façon théologique.

    Pour que cette explication fût plausible, il faudrait nécessairement qu’il y ait eu une période où le sacré aurait existé indépendamment de toute idée de divinité. C’est aussi bien ce que statue M. Durkheim. Il nous parle longuement des totems et des churinga comme de choses sacrées avant de nous parler des dieux des Australiens. Et entre les deux il place le corrobori et les inductions qu’il en tire. Mais cette séparation, ces divisions sont l’œuvre propre de M. Durkheim. Les tribus dont il nous rapporte [147] les coutumes et les croyances croient aux âmes des ancêtres, aux dieux protecteurs et même à un dieu suprême en même temps qu’elles regardent les churinga comme des objets sacrés, en même temps qu’elles respectent les interdits qui protègent le totem. Le totémisme initial séparé des autres croyances ne se trouve nulle part. Or la première règle de la science doit être de respecter les faits et de ne point les altérer. Les ivresses du corrobori ne peuvent pas avoir donné naissance à la croyance aux mânes ou aux dieux, puisque ceux qui tiennent le corrobori professent déjà cette croyance. Et cette simple constatation suffit à faire tomber toute la construction si ingénieusement échafaudée. Car toute cette théorie n’est qu’une construction, et non pas une induction tirée des faits, mais une exposition des faits d’après une doctrine tout entière préconçue. Tout l’appareil scientifique ne va qu’à établir la doctrine créée par un esprit fécond, fertile en ressources et ayant à son service avec une rare puissance logique une énergie imposante d’affirmation. L’édifice offre aux yeux un si robuste appareil qu’il inspire immédiatement confiance en sa solidité.
    • 33 Histoire des religions et méthode comparative, ch. III, in 8°, Alphonse Picard, 1912




    Les objections n’en sont pas moins venues en foule et, en dehors des quelques disciples qui suivent sa bannière et son étoile, M. Durkheim n’a guère rencontré que des contradicteurs ; en Angleterre, les auteurs mêmes qui lui fournissent ses renseignements, tels que Frazer et Lang ; en Amérique, Leuba ; en France, George Foucart et Alfred Loisy. Si la science a pour caractère extérieur évident d’imposer ses résultats à l’assentiment social, on peut bien dire que les résultats auxquels M. Durkheim est arrivé sont loin d’être scientifiques. Parfois même ses théories sont en opposition avec les faits scientifiques les mieux constatés. C’est ainsi qu’il soutient avec quelques ethnologues totémisants que l’évolution du totem s’est faite du général au singulier, c’est-à-dire qu’il y aurait eu d’abord un totem pour tout le groupe et que ce totem était non pas tel individu de l’espèce totémique, mais l’espèce tout entière ; ce ne serait que plus tard que chaque individu aurait eu son totem individuel. Or M. George Foucart33 a très bien montré qu’en Égypte les documents permettent de suivre, à travers l’histoire, l’évolution des parentés humano-animales et ces documents nous montrent que l’homme a d’abord, à titre d’individu, une parenté avec tel individu de l’espèce animale ; le roi [148] régnant est, par exemple, apparenté d’abord non pas à l’espèce de l’épervier, mais à tel épervier qui se trouve à tel endroit, – et que ce n’est que plus tard que les Pharaons sont apparentés à toute l’espèce épervier, que tout Pharaon est un épervier. L’observation des non-civilisés ne nous donne qu’un bref espace très ramassé et confus où se mêlent plusieurs couches de croyances et d’institutions ; l’ethnologue doit à chaque instant, selon ses idées, ses doctrines propres ou d’après des indices très peu apparents, regarder telles institutions ou telles croyances comme antérieures, telles autres comme postérieures et dérivées. L’histoire, au contraire, quand elle est documentée comme est celle des institutions égyptiennes, permet de fixer de façon certaine l’ordre de succession des institutions et des croyances et par là de découvrir l’ordre même de leur évolution.
    • 34 [Orig.] « Assurément, dans les cas signalés par M. Durkheim, les individus sont « hors d’eux-mêmes  (...)




    On a fait encore beaucoup d’autres objections et M. Laberthonnière, par exemple, à la Société française de philosophie, s’étonna avec raison que l’on pût vouloir faire des excitations, des ivresses du corrobori les équivalents d’une expérience vraiment religieuse. Il dit justement : « Bien loin de s’élever au-dessus d’eux-mêmes, ils (les sauvages de M. Durkheim) sont tombés au-dessous. »[34] Ces sauvages se sentent avoir été autres, mais non pas certainement supérieurs à ce qu’ils sont dans leur état profane ordinaire. Comment cette altération, qui doit bien leur sembler plutôt une infériorité qu’une supériorité, les conduit-elle à imaginer des êtres supérieurs à eux ? Croit-on qu’une ducasse artésienne ou une kermesse flamande inciteraient les individus à croire qu’ils ont été durant l’excitation de la fête en la possession d’un être plus grand et meilleur qu’eux-mêmes ?

    Ainsi donc la théorie de M. Durkheim ne résulte pas des faits ; il est obligé de solliciter les faits, de les morceler pour essayer de les faire cadrer avec la théorie qui a séduit son esprit. Même après qu’il les a ainsi morcelés, ils ne remplissent pas le cadre assigné par la théorie.
    M. Durkheim encourt, en outre, le reproche même qu’il adressait au naturisme et à l’animisme. Naturisme et animisme se rencontrent pour réduire toute religion à un système illusoire et à lui donner pour unique origine une sorte de délire. Ce faisant, les deux théories détruisent le fait qu’elles voulaient expliquer. Mais, en vérité, M. Durkheim fait-il autre chose ? Et même toute théorie qui voudra fournir une explication rationaliste du fait religieux peut-elle faire autre chose ?
    • 35 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, li (...)


    • 36 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, li (...)


    • 37 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, li (...)




    Car M. Durkheim nous montre ses Australiens attribuant à des dieux imaginaires la force qui leur vient de la société. Toutes leurs [149] croyances sont donc fausses et leur religion n’est qu’un système illusoire. M. Durkheim reconnaît même que ces croyances se forment à la suite d’un délire. Mais, dit-il, ce délire est « bien fondé »[35], car il repose sur un fait réel, l’« influence roborative »[36] du groupement social. Mais les rêves qu’interprète l’animisme ne sont pas moins réels que les extravagances des corrobori, et la tendance à personnifier sur quoi se fonde le naturisme est aussi réelle. Il n’y a qu’une manière de ne pas faire évanouir le fait religieux, c’est de ne pas ramener à un délire l’origine de la croyance – tout délire est fondé, aucun ne peut être « bien fondé »[37], car, autrement, ce ne serait pas un délire – et, par suite, de ne pas voir dans la religion un système d’illusions. Mais alors il faut renoncer à vouloir expliquer tous les faits religieux par des causes naturelles. Toute religion qui peut s’expliquer par des causes naturelles ne peut être qu’illusoire, fausse, et, par suite, tous les faits religieux qui s’y rencontrent doivent se ramener à des faits d’ordre psychologique, philologique ou social, comme on le préférera, mais toujours à des faits qui ne seront pas spécifiquement religieux. On n’explique complètement, rationnellement une religion qu’en la détruisant. M. Durkheim n’échappe pas plus que les autres à cette loi générale.

    Et nous voilà ramenés au point de départ de tout ce travail. Parti de l’idée préconçue que le fait religieux était, comme tous les autres, intégralement justiciable de la science et de la raison, M. Durkheim assimilait le fait religieux à l’ensemble des autres faits. Il ne doit pas nous paraître très étonnant qu’il n’ait pas réussi à en donner l’explication qu’il cherchait. Car il avait d’avance tranché la question qu’il semblait vouloir résoudre. En soutenant que la religion n’est que l’adoration de la société sous le nom de divinité, M. Durkheim fait, en réalité, évanouir l’objet même de la religion. Ou s’il attribue encore à la vie religieuse quelque valeur ; s’il estime, ainsi qu’il le semble bien, que l’humanité a besoin de la religion, et que les formes religieuses ont quelque chose à la fois de bienfaisant et d’inimitable, n’est-ce pas parce qu’il fait lui-même ce qu’il affirme que font les Australiens, je veux dire qu’il hypostasie la société, qu’il la divinise, qu’il en fait la source de toute valeur humaine, de la science aussi bien que de la morale et, par suite, qu’il voit en elle, en même temps que la seule dispensatrice de toute force et de toute grâce, le seul objet qui soit digne d’adoration ?

    Bibliographie
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    Bouvier (Frédéric), « Le totémisme est-il une religion ? », Revue de philosophie (Paris), 23 (5), novembre 1913, p. 341-371
    Christus. Manuel d’histoire des religions, par Joseph Huby, professeur au scolasticat d’Ore Place (Hastings), avec la collaboration de Mgr A. Le Roy et de MM. L. de Grandmaison, Wieger, Dahlmann, Carnoy, de la Vallée-Poussin, Martindale, Mac Neill, Bominghaus, Mallon, A. de Condamin, Power, Nikel, Brou et Rousselot, Paris, Beauchesne, 1912, xx-1036 p.
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    Loisy (Alfred), « Sociologie et religion », Revue d’histoire et de littérature religieuses (Paris), 4 (1), janvier-février 1913, p. 45-76
    Où en est l’histoire des religions ? par Joseph Bricout, directeur de la « Revue du clergé français », avec la collaboration de MM. Bros, Capart, Dhorme, Labourt, de la Vallée Poussin, Cordier, Habert, And. Baudrillart, Carra de Vaux, Touzard, Venard, P. Batiffol, Bousquet, Vagandard, Hemmer, 2 tomes, Paris, Letouzé et Ané, 1911-1912, 457 et 589 p.
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    Voltaire, Les œuvres complètes de Voltaire, 20B, Le fanatisme, ou Mahomet le prophète ; De l’Alcoran et de Mahomet, édité par Christopher Todd et Ahmad Gunny, Oxford, Voltaire Foundation, 2002, xxv + 353 p.

    Notes
    1 [Cf., plus spécifiquement, à propos des tribus australiennes, Armand de Quatrefage de Bréau, Membre de l’Institut (Académie des Sciences), Professeur d’Anthropologie au Muséum d’histoire naturelle de Paris, L’espèce humaine, Paris, Librairie Germer Baillière et Cie, « Bibliothèque scientifique internationale », 1877, p. 359 : « L’idée de la création par la parole et le souffle d’un être puissant est incontestablement une conception des plus élevées, et elle apparaît nettement chez quelques tribus ; l’offrande et la prière ont été constatées chez d’autres. Chez toutes se montre en germe cette croyance au dualisme, à cet antagonisme de puissances surhumaines bienveillantes et malfaisantes qui se retrouve dans les plus grandes religions et qui est à la racine du christianisme lui-même. Quant à la foi en une autre vie, personne dans ces derniers temps ne l’a, je crois, refusée aux Australiens ».]
    2 [Cf. Voltaire, Les œuvres complètes de Voltaire, 20B, Le fanatisme, ou Mahomet le prophète ; De l’Alcoran et de Mahomet, édité par Christopher Todd et Ahmad Gunny, Oxford, Voltaire Foundation, 2002, xxv+353 p.]
    3 [Charles-François Dupuis, Origine de tous les cultes, ou Religion universelle, Paris, H. Agasse, an III, 7 tomes en 12 vol. et atlas]
    4 1 vol. in-8°, Alcan, 1912.
    5 L’histoire de la religion et les catholiques, par Mgr Batiffol. Correspondant du 25 août 1912. – L’origine de la pensée religieuse, par M. C. Piat. Correspondant du 10 septembre 1912. [L’article de Pierre Batiffol est un long compte-rendu des deux sommes apologétiques Où en est l’histoire des religions ? par Joseph Bricout, directeur de la « Revue du clergé français », avec la collaboration de MM. Bros, Capart, Dhorme, Labourt, de la Vallée Poussin, Cordier, Habert, And. Baudrillart, Carra de Vaux, Touzard, Venard, P. Batiffol, Bousquet, Vagandard, Hemmer, 2 tomes, Paris, Letouzé et Ané, 1911-1912, 457 et 589 p. et Christus. Manuel d’histoire des religions, par Joseph Huby, professeur au scolasticat d’Ore Place (Hastings), avec la collaboration de Mgr. A. Le Roy et de MM. L. de Grandmaison, Wieger, Dahlmann, Carnoy, de la Vallée-Poussin, Martindale, Mac Neill, Bominghaus, Mallon, A. de Condamin, Power, Nikel, Brou et Rousselot, Paris, Beauchesne, 1912, xx-1036 p.]
    6 [Société française de Philosophie, « Le problème religieux et la dualité de la nature humaine », Bulletin de la Société française de Philosophie, 13, séance du 4 février 1913, p. 63-113.]
    7 Une théorie nouvelle de la religion, R. P., avril 1913, p. 330. [Gustave Belot, « Une Théorie nouvelle de la religion », Revue Philosophique de la France et de l’étranger (Paris), 75 (4), avril 1913, p. 329-379]
    8 Op. cit. Conclusion, p. 614 [« Conclusion », Durkheim 1912, p.614]
    9 Bulletin de la Société française de philosophie. Séance du 4 février 1913, p. 95. [Orig.] « M. Le Roy déclare que, à son avis, la vraie vie religieuse est ailleurs ; mais il ne dit pas en quoi elle consiste et par quoi se justifie son sentiment. Je suis donc bien embarrassé pour lui répondre. Une fois de plus, je fais remarquer que, dans ce débat, au lieu de prendre corps à corps les faits et les arguments par lesquels j’ai essayé de démontrer ma thèse, on m’oppose trop souvent des impressions, des sentiments personnels, des habitudes mentales, c’est-à-dire des préjugés, et même des actes de foi qui se prêtent difficilement à la discussion. » Durkheim répondait à Édouard Le Roy : « Une dernière question, qui ne veut être qu’une question. Le croyant, selon vous, est en contact et en communication avec des réalités véritables. De ces réalités, il se fait certaines idées et, à votre tour, vous proposez certaines explications. Vous dites que votre hypothèse sociologique ne détruit pas les réalités qu’elle étudie, laisse même subsister la possibilité d’une vie religieuse. Cependant, vous reconnaissez qu’elle attribue un caractère illusoire à certaines représentations du croyant. Il est bien clair qu’une explication quelconque en sera toujours là. Mais n’arrive-t-il pas que la vôtre attribue le caractère illusoire justement à ce qui fait que la réalité en question pouvait être dite religieuse et que la vie correspondante était vie religieuse ? À mon sens, l’erreur du croyant, s’il y en a une, c’est-à-dire si l’on juge les choses du point de vue de votre théorie, constitue précisément l’essence même de la religion. »]
    10 Op. cit., p. 495, note. [Orig.] « La notion d’esprit et de dieux », Durkheim 1912, livre 2, chap.9, p. 414-415 note 4. L’auteur en question est le père Wilhem Schmidt : le différent porte sur la manière d’interpréter, ou plutôt de traduire, au sens anthropologique, les adjectifs « éternels », « créateurs », « tout puissant », « omniscients » et « gardiens de l’ordre moral » par lesquels sont généralement qualifiés les High Gods australiens. Pour Durkheim, il convient de leur donner un « sens relatif, en harmonie avec la mentalité australienne »
    11 Op. cit., p. 98 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. 1 – L’animisme », Durkheim 1912, livre 1, chap. 2, p. 98]
    12 [Orig.] « […] toute science qui se fonde postule la rationalité des choses qu’elle entreprend d’étudier. ». Émile Durkheim, « Le problème religieux et la dualité de la nature humaine », Bulletin de la Société française de Philosophie, 13, séance du 4 février 1913, p. 68 
    13 Bulletin de la Société française de philosophie, mars 1913, [séance du 4 février,] p. 68
    14 Op. cit., 1, II, ch. VII, p. 304 [Orig.] « Tout aussi bien que des hommes [des grands hommes, des hommes influents], la société consacre des choses, notamment des idées. Qu’une croyance soit unanimement partagée par un peuple, et, pour des raisons que nous avons exposées plus haut, il est interdit d’y toucher, c’est-à-dire de la nier ou de la contester. Or l’interdit de la critique est un interdit comme les autres et prouve que l’on est en face de quelque chose de sacré. Même aujourd’hui, si grande que soit la liberté que nous nous accordons les uns aux autres, un homme qui nierait totalement le progrès, qui bafouerait l’idéal humain auquel les sociétés modernes sont attachées, ferait l’effet d’un sacrilège. Il y a, tout au moins, un principe que les peuples les plus épris de libre examen tendent à mettre au-dessus de la discussion et à regarder comme intangible, c’est-à-dire comme sacré : c’est le principe même du libre examen. » Cf. « Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap. 7, p. 305
    15 [À ce point, la notion de « dogme » est absente du texte original de Durkheim. G. Fonsegrive pointe en réalité « le principe même du libre examen » qui, selon Durkheim, dans les « sociétés modernes » est regardé « comme sacré », op. cit. p. 305]
    16 [L’auteur fait allusion aux travaux de Frédéric Bouvier, « Le totémisme est-il une religion ? », Revue de philosophie, 23 (5), novembre 1913, p. 341-371, Alexandre Le Roy, La Religion des primitifs, Paris, P. Beauchesne, « Études sur l’histoire des religions » - 1, 1909, vii-518 p. et Wilhelm Schmidt, L’origine de l’idée de Dieu. Étude historico-critique et positive. 1re partie : Historico-critique, Paris, Librairie Alphonse Picard & fils, 1910, xiii-316p. et « Totémisme (Généralités et Origines) », in Semaine d’ethnologie religieuse, Compte-rendu analytique de la Ire session tenue à Louvain (27 Août - 4 Septembre 1912), Paris / Bruxelles, Gabriel Beauchesne / Albert Dewit, avril 1913, p. 254-273]
    17 Op. cit., p. 135 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode pour la traiter », Durkheim 1912, livre 1, chap. 4, p. 135]
    18 [Orig.] Les « sociétés australiennes » et non pas « les tribus ».
    19 Ibid., p. 135 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode pour la traiter », Durkheim 1912, livre 1, chap. 4, p. 135]
    20 Op. cit., p. 136 [« Le totémisme comme religion élémentaire. Historique de la question – Méthode pour la traiter », Durkheim 1912, livre 1, chap. 4, p. 136]
    21 Durkheim, la Division du travail social, p. 189 et suiv. In-8°, Alcan, 1893. [Orig.] « Si l’on essaie de constituer par la pensée le type idéal d’une société dont la cohésion résulterait exclusivement des ressemblances, on devra la concevoir comme une masse absolument homogène dont les parties ne se distingueraient pas les une des autres et, par conséquent, ne seraient pas arrangées entre elles, qui, en un mot, serait dépourvue et de toute forme définie et de toute organisation. Ce serait le vrai protoplasme social, le germe d’où seraient sortis tous les types sociaux. Nous proposons d’appeler Horde l’agrégat ainsi caractérisé » et, poursuivant la définition des éléments constitutifs de la solidarité mécanique, « Nous donnons le nom de Clan à la Horde qui a cessé d’être indépendante pour devenir l’élément d’un groupe plus étendu, et celui de sociétés segmentaires à base de clans aux peuples qui sont constitués par une association de clans. Nous disons de ces sociétés qu’elles sont segmentaires, pour indiquer qu’elles sont formées par la répétition d’agrégats semblables entre eux, analogues aux anneaux de l’annelé ; et de cet agrégat élémentaire qu’il est un clan, parce que ce mot en exprime bien la nature mixte, à la fois familiale et politique. » Émile Durkheim, « Prépondérance progressive de la solidarité organique et ses conséquences », De la division du travail social. Thèse présentée à la Faculté des Lettres de Paris, Paris, Félix Alcan, 1893, chap. 6, p. 189]
    22 [Orig.] « un véritable ‘bon dieu’« . Durkheim cite Carl Friedrich Theodor Strehlow, Die Aranda- und Loritja-Stämme in Zentral-Australien, Frankfurt am Main, Josef Baer & Co, 1907-1911. Cf. « La notion d’esprit et de dieux », Durkheim 1912, livre 2, chap.9, p. 410
    23 In-8°, Alcan, 1913 [James Henry Leuba, La psychologie des phénomènes religieux, trad. de l’américain par Louis Cons, Paris, F. Alcan, « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1914 [1912], iv-444 p.]
    24 Ibid., ch. II, p. 57
    25 [« Les rites piaculaires et l’ambiguïté de la notion de sacré », Durkheim 1912, livre 3, chap. 5, p. 556-592]
    26 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. II. Le naturisme », Durkheim 1912, livre 1, chap.3, p. 119]
    27 [« Les principales conceptions de la religion élémentaire. II. Le naturisme », Durkheim 1912, livre 1, chap.3, p. 119]
    28 [Orig.] « Sur plus de 500 noms totémiques relevés par Howitt parmi les tribus du sud-est australien, il n’y en a guère qu’une quarantaine qui ne soient pas des noms de plantes ou d’animaux : ce sont les nuages, la pluie, la grêle, la gelée, la lune, le soleil, le vent, l’automne, l’été, l’hiver, certaines étoiles, le tonnerre, le feu, la fumée, l’eau, l’ocre rouge, la mer. On remarquera la place très restreinte faite aux corps célestes et même, plus généralement, aux grands phénomènes cosmiques qui, pourtant, étaient destinés à une si grande fortune dans la suite du développement religieux. Parmi tous les clans dont nous parle Howitt, il n’y en a que deux qui aient pour totem la lune, deux le soleil, trois une étoile, trois le tonnerre, deux l’éclair. La pluie seule fait exception ; elle est au contraire très fréquente. », « Les croyances proprement totémiques. Le Totem comme nom et comme emblème », Durkheim 1912, livre 2, chap. 1, p. 145]
    29 Dans son texte, M. Durkheim dit : « Tous », mais sa loyauté l’oblige à ajouter en note (p. 168, note 3) : « Il y en a quelques-uns, mais en petit nombre, qui ne portent aucun dessin apparent. » [« Les croyances proprement totémiques. Le Totem comme nom et comme emblème », Durkheim 1912, livre 2, chap. 1, p. 168]
    30 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap.7, p. 301]
    31 [Orig.] « Ce n’est pas M. É. Durkheim qui soutiendrait que l’homme naît bon et que la société le déprave. Son avis est que l’homme naît bête et que la société le fait homme. », Alfred Loisy, « Sociologie et religion », Revue d’histoire et de littérature religieuses (Paris), 4 (1), janvier-février 1913, p. 45
    32 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap. 7, p. 301]
    33 Histoire des religions et méthode comparative, ch. III, in 8°, Alphonse Picard, 1912
    34 [Orig.] « Assurément, dans les cas signalés par M. Durkheim, les individus sont « hors d’eux-mêmes » ; ils y sont mêmes tellement qu’ils ne savent plus ce qu’ils font. Seulement il faut bien remarquer qu’en cela ils ressemblent, trait pour trait, aux fumeurs d’opium et aux buveurs d’absinthe. Pour s’être enivrés par un autre procédé ils n’en sont pas moins ivres. Et, bien loin par conséquent de s’être élevés au-dessus d’eux-mêmes, ils sont tombés au-dessous. Sans doute les actes qu’ils accomplissent, c’est socialement qu’ils les accomplissent : je veux dire par la société, puisque c’est en vertu d’un délire obtenu par excitation réciproque. Mais c’est si peu pour la société que, outre qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, ils ne vont à rien moins qu’à la détruire, en se tournant finalement, dans leur délire, les uns contre les autres. », Lucien Laberthonnière, « Lettre de M. l’abbé Laberthonnière », in Société française de Philosophie, « Le problème religieux et la dualité de la nature humaine », Bulletin de la Société française de Philosophie, 13, séance du 4 février 1913, p. 106
    35 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap.7, p. 324]
    36 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap.7, p. 301]
    37 [« Origine de ces croyances. Genèse de la notion de principe ou mana totémique », Durkheim 1912, livre 2, chap. 7, p. 324]


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    Psaumes 33:13 Du haut des cieux Yahweh regarde, il voit tous les enfants des hommes ; 14 du lieu de sa demeure, il observe tous les habitants de la terre, 15 lui qui forme leur coeur à tous, qui est attentif à toutes leurs actions

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