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Esprits, génies, anges et démons de l'ancienne Mésopotamie
Au-dessous des grands dieux qui personnifient les forces de l'univers et forment la cour suprême du panthéon, l'imagination des Assyro-Babyloniens avait conçu l'existence de divinités inférieures qui se comptent par milliers, si bien que leur hiérarchie et leurs attributs demeurent, la plupart du temps, dans une inextricable confusion. Chaque ville avait sa divinité préférée et tutélaire, dont le renom de puissance était plus ou moins répandu, selon que la cité elle-même étendait son action plus ou moins loin en dehors de ses murailles. Nous connaissons, par exemple, le dieu Sita qui avait son culte dans la ville de Bit-Adar, voisine d'Arbèles, et dont le nom paraît se rapprocher de celui de Seth, le patriarche biblique.
Ailleurs, on adore particulièrement le dieu Serpent (Serah) dont l'image figure sur le caillou Michaux et sur de nombreux cylindres; il est parfois représenté avec une tête humaine comme l'Asclépios Glycon de la mythologie hellénique.
Son culte très répandu, a sans doute donné naissance à l'anecdote du dragon racontée dans la Bible à la suite du Livre de Daniel. Le dieu Serpent rappelle le reptile tentateur de la Genèse; souvenons-nous aussi du Serpent d'airain qui, à Jérusalem, au temps du roi Ézéchias, était l'objet d'un culte idolâtrique. Un bas-relief de Koyoundjik représente un sacrifice offert dans le camp de Sennachérib à des dieux Serpents. Les deux reptiles ont des têtes de quadrupèdes et ils sont fixés par le cou a une barre transversale qui les tient suspendus; devant eux est un trépied sur lequel brûlent des parfums; plus loin, un vase posé sur un piédestal, contient l'eau du sacrifice, et deux pontifes, en adoration, récitent les prières préparatoires, tandis que le victimaire amène le bouc qui doit être immolé.
On cite un dieu Sarru-idku, en suméro-akkadien Lugal-turda, qui se métamorphose en « oiseau de la tempête », sorte d'oiseau gigantesque et fabuleux comme le rokh des contes arabes. On nous raconte comment cet oiseau déroba un des principaux talismans de la puissance des dieux; comment Anu et Bel-Marduk ordonnèrent à Raman et à Nabu de le tuer; comment ceux-ci conseillèrent de le chasser seulement de la présence des dieux; comment enfin, à leur place, Marduk se chargea de l'œuvre de destruction qui est retracée sur plusieurs cylindres. Citons encore, entre autres, Nirba, le dieu des moissons et de la fertilité des champs; Dibbara, le dieu de la peste ou du choléra, proche parent, sans doute, du génie Namtar.
Isdubar, le héros de l'épopée mésopotamienne du déluge, est formellement donné comme un dieu dans certains textes; c'est un personnage de l'Olympe assyrien et il n'est autre que le dieu Feu (is-bar) des textes suméro-akkadiens, dont le culte paraît avoir eu beaucoup d'importance aux époques primitives;
ce nom de dieu du feu qui lui est donné, explique les mythes judéo-musulmans relatifs à la fournaise de Nemrod, puisque Nemrod est assimilable à Isdubar. C'est lui qu'on invoque dans l'hymne suivant qui fait partie du grand recueil magique copié par ordre d'Assurbanipal :
Ô Feu, seigneur suprême, qui t'élèves dans le pays;
héros, fils de l'Océan, qui t'élèves dans le pays.
Feu, par ta flamme éclatante,
tu fais la lumière dans la demeure des ténèbres;
tu établis la destinée pour tout ce qui porte un nom.
Celui qui mêle le cuivre et l'étain, c'est toi; celui qui purifie l'argent et l'or, c'est toi;
le compagnon de la dame à la face cornue, c'est toi
celui qui bouleverse d'effroi la poitrine du méchant dans la nuit, c'est toi.
L'homme, fils de son dieu, que ses œuvres étincellent de pureté!
Qu'il brille comme le ciel!
Qu'il soit pur comme la terre !
Qu'il étincelle comme le milieu du ciel!Le fleuve qui répandait la fertilité dans le pays par ses inondations périodiques, ne manqua pas, comme le Nil en Égypte, d'être divinisé et mis au nombre des esprits bienfaisants.
On l'invoquait pour repousser le mauvais sort, et nous possédons un hymne, assez obscur d'ailleurs, qui lui est consacré : Dieu Fleuve, qui pousse en avant,
qui chasse devant lui le mauvais sort pareil à un fauve redoutable,
Le mauvais sort a obscurci tous les pays comme le crépuscule du soir quand il s'élève;
Que le soleil, à son lever, dissipe l'obscurité que celui-ci a répandue, et il ne restera pas dans la maison.
Que le mauvais sort s'en aille dans le désert, le lieu éclatant de lumière!Si, remontant maintenant dans les régions supra-terrestres, nous envisageons le côté sidérique de la religion assyro-babylonienne, nous constaterons que ce sont non seulement les grands dieux qui s'incarnent dans les astres, mais que chaque étoile, chaque constellation a son génie propre, veillant du haut du ciel sur l'humanité et pour lequel rien de ce qui se passe sur la terre n'est indifférent. Toutes les étoiles sont des divinités d'un ordre inférieur, les unes considérées comme fastes, ce sont les anges; les autres, comme néfastes, ce sont les démons. Elles sont groupées entre elles suivant des lois rigoureuses et savantes, dictées par les scrutations astronomiques : on leur donne des noms divins au même titre que nos astronomes modernes désignent par des lettres grecques les différentes étoiles d'une même constellation.
Il y avait les lu-lim, expression suméro-akkadienne qui signifie « le bélier de tête »; c'étaient les étoiles considérées comme les plus importantes d'un groupe déterminé. L'imagination d'une société en grande partie adonné à la vie pastorale, se représentait les astres qui peuplent le firmament, comme un immense troupeau dispersé dans les espaces célestes, et chaque étoile qui paraissait conduire la marche d'un groupe d'autres, à travers le désert sans limites, était un lu-lim, un bélier de tête, ou un chef, et cette expression empruntée à la vie pastorale, devint à la longue une manière poétique de désigner, parmi les humains, un chef ou un roi.
Autour du dieu Anu, il y avait les igighs, au nombre de sept, qui habitaient dans le ciel, et dont nous avons la représentation symbolique sous la forme de sept globules, sur un grand nombre de monuments; sous les ordres de ce même dieu, étaient des esprits terrestres appelés les anunnaks (annunaku / anunnaki): « Tu n'as qu'à parler, dit un texte, et dans le ciel les Igighs se prosternent; tu n'as qu'à parler, et, sur la terre, les Anunnaks embrassent le sol. » Un passage de Diodore de Sicile vient fort à propos nous faire connaître ce qu'étaient au juste ces Igighs et ces anunnaks et le rôle à eux assigné dans l'astronomie assyro-babylonienne : c'étaient les dieux subordonnés aux grandes divinités zodiacales, et appelés les juges de l'univers.
« Les douze signes du zodiaque, dit Diodore, était divisés en trente-six parties, présidées à leur tour par autant d'étoiles subordonnées aux grandes divinités zodiacales et nommées dieux conseillers. De ces dieux secondaires, la moitié habite au-dessus, l'autre moitié au-dessous de la terre pour la surveiller; et tous les dix jours, l'un d'eux est envoyé en qualité de messager, de la région supérieure à l'inférieure; un autre passe de celle-ci dans celle-là, par un invariable échange. Ces trente-six dieux étaient les décans, ainsi appelés parce que chacun d'eux régnait pendant dix jours sur un tiers de signe. Et comme, chaque dixième jour, le tiers d'un signe ou la trente-sixième partie du zodiaque monte au soir sur l'horizon, tandis qu'une autre descend au-dessous, on voit que l'échange signalé n'était autre chose que le fait astronomique résultant du mouvement propre du soleil. Partageant ensuite la sphère céleste entière en dehors du zodiaque, comme ils avaient partagé le zodiaque lui-même, les Chaldéens, pour achever leur construction à la fois scientifique et religieuse, distinguaient douze étoiles ou constellations dans la partie boréale du ciel, et douze autres dans la partie australe, disant que celles-là, qui se voient, sont préposées aux vivants, et que celles-ci, invisibles, sont assignées aux morts : toutes ensemble étaient alors les juges de l'univers. »Aux archanges qui habitent les étoiles, à ces Igighs et à ces anunnaks, il faut rapporter les représentations symboliques des astres qu'on voit sur les monuments qui figurent le monde supra-sensible.
Ce sont, outre le grand croissant lunaire, le disque solaire et l'étoile d'Ishtar (Vénus), les sept globules planétaires et des tiges ou hampes verticales, parfois à plusieurs branches et à têtes d'animaux, qui sont l'image d'êtres divins dont nous ne connaissons pas les noms. On a conjecturé que les Succoth-Benoth des émigrés de Babylone sur la terre d'lsraël, dont il est question dans la Bible, sont peut-être les Pléïades. Il est impossible de rien affirmer de précis à ce sujet.
Les grands dieux, les personnifications sidérales, les génies des planètes, de l'atmosphère et de l'Océan se présentent non seulement avec des noms étranges en suméro-akkadien, mais avec un rôle et des attributs tout à fait différents de ceux qui leur sont donnés dans la religion publique et officielle. Ainsi, à la fin d'une invocation contre Namtar, le démon de la peste, les dieux sont invoqués sous les noms liturgiques qu'on leur donne dans les opérations théurgiques.
Bêl prend le nom de Mul-gec; Belit, celui de Nin-gelal; Adar s'appelle Nin-dar; Nabu s'appelle Paku; Sin, Enzuna; Ishtar, Tishu; Raman, Im; Shamash, Ud. D'après ce que nous venons de dire, il y avait pour ainsi dire, deux religions en présence : la religion publique et officielle dont les divinités essentielles sont les grands dieux; la religion cachée, mystérieuse, de la magie et de la sorcellerie, dont les divinités et les rites nous sont révélés par les documents appelés religieux par les assyriologues. On pourrait aussi nommer cette dernière, la religion des esprits, car ce sont eux qu'on invoque toujours, et dont on provoque l'intervention dans les affaires humaines.
Démons à têtes de lion et à griffes d'aigle du palais d'Assurbanipal à Koyoundjik (British Museum).
Les textes religieux dont nous parlons, auxquels il faut joindre les nombreuses inscriptions talismaniques gravées sur les cylindres et les amulettes, attestent chez les Mésopotamiens de l'existence, au-dessous des dieux, d'une démonologie extrêmement riche.
Il y a lié un monde complet d'esprits bienfaisants et d'esprits malfaisants, dont les personnalités étaient soigneusement distinguées dans l'enseignement théologique, les attributions déterminées avec précision, la hiérarchie savamment classée, comme les anges et les archanges de la théologie chrétienne.
Génie mésopotamien à tête de lion.
Génie à tête de lion chargé d'écarter
les démons des maladies.
Au sommet de l'échelle, on place deux classes d'êtres qui tiennent de plus près que les autres à la nature divine;
ce sont des génies ou des demi-dieux, presque des dieux inférieurs. Les uns reçoivent le nom suméro-akkadien de mas « soldat, combattant », auquel on substitue en assyrien celui de
sed « génie »; les autres, le nom suméro-akkadien de lamma « colosse », traduit en assyrien par lamas. Ces noms sont appliqués fréquemment à des génies favorables et protecteurs, sous l'égide desquels on se place. D'autres fois, ces appellations désignent des génies méchants et nuisibles dont il faut conjurer la puissance. Les Mésopotamiens avaient, ce semble, imaginé des chœurs opposés de mas ou alap bons et mauvais, de lammas méchants et favorables; souvent même ces génies avaient une double face et pouvaient, suivant les circonstances, se manifester tour à tour comme bienfaisants et funestes, protecteurs et ennemis.
Les lions ailés, sentinelles vigilantes à la porte des palais, sont des nirgalli, et leur chef de file est le grand dieu Nergal. Les taureaux ailés à têtes humaines sont appelés, tantôt
sedi « génies », d'après la nature de leur essence, tantôt alpi « taureaux », d'après leur figure. On leur donnait aussi parfois le nom de kirubi. La description des kerubim dans la Bible, a des rapports frappants avec la représentation des taureaux assyriens (Chérubins).
Taureau ailé à tête humaine, génie tutélaire qui gardait
l'entrée du palais de sargon, à Khorsabad. (VIIe s. av. J.-C.; Louvre).
Les prières des fiers monarques d'Assur s'adressent fréquemment aux êtres surnaturels qui, par suite d'une opération magique, sont censés habiter dans les corps de pierre des kirubi. Assarhaddon dit à la fin de l'inscription d'un cylindre de terre cuite déposé dans les fondations de son palais : « Dans ce palais, que le génie propice, le colosse propice, gardien des pas de ma royauté, qui réjouit ma majesté, perpétue sa présence à toujours, et jamais ses bras (de la majesté du roi) ne perdront leur force. » Et un peu auparavant, quand il parle des travaux du palais : «Les portes de bois de sapin aux panneaux solides, je les ai bandées de zones d'argent et d'airain, et j'en ai garni les baies de génies, de colosses de pierre, qui, comme les êtres qu'ils représentent, bouleversent (d'effroi) la poitrine du méchant, protégeant les pas, conduisant à leur accomplissement les démarches du roi qui les a formés; à droite et à gauche, j'ai fait exécuter leurs verrous. »Les deux taureaux de la porte du temple de la fameuse ziggurat de Babylone (L'architecture en Mésopotamie), sont enregistrés dans les listes divines parmi les personnages secondaires composent la cour de Marduk, le dieu de ce temple, avec ses « deux portiers et les quatre chiens du dieu. Les mêmes listes donnent les noms des « deux taureaux de la porte de la déesse Damkîna », son épouse, comme des «-six taureaux » des trois portes « du Soleil ».
Les nombreuses images de taureaux et de lions ailés que les fouilles modernes ont mises au jour, achèvent de nous édifier sur le rôle et les formes peu variées de ces êtres fantastiques. Les uns, à tête humaine et à griffes de lion, ont des bras. Voyez ceux dont Botta enrichit en son temps le musée du Louvre. Il en est qui ont cinq pattes, ou plutôt l'une des quatre pattes est figurée deux fois, afin que le spectateur en voie toujours quatre, de quelque côté qu'il envisage le monstre. Les ailes déployées partent des épaules et s'élèvent en arrière au-dessus de la croupe; la tête est coiffée d'une tiare cylindrique ornée de plumes et de rosaces, et ceinte, à sa partie inférieure, de la double rangées de cornes, emblème de la force matérielle. Ces taureaux ont à peu près deux fois la hauteur d'un homme de grande taille.
Tête de démon assyrien.
Un petit bas-relief conservé aussi à Paris, représente un quadrupède ailé, se rapprochant des grands taureaux dont nous venons de nous entretenir, mais avec des attributs tout spéciaux. Le monstre a le corps et les pattes de devant d'un lion; les pattes de derrière, armées de serres puissantes sont celles de l'aigle; il a des oreilles de bœuf, des cornes d'aegagre; l'œil, la face et le bec entrouverts ressemblent à ceux du perroquet ou du faucon. Une crinière hérissée orne son cou fièrement cambré comme celui du cheval, et s'étend tout le long de l'épine dorsale jusqu'à la croupe; la queue, pareille à celle du lion, se redresse et se termine en trois touffes épaisses; enfin, de grandes ailes, à plumes imbriquées, qui prennent naissance au-dessus des pattes de devant, se développent en éventail. Tel est le bizarre assemblage dont on a formé un animal symbolique participant â la fois du griffon, de la chimère et du sphinx, tels que les Grecs ont figuré ces êtres fabuleux.
Les schedi et les lamassi à deux pieds sont plus fréquents encore que les quadrupèdes. Au British Museum, on en voit deux qui tiennent un bouquetin et un cerf et sont vêtus d'une sorte de chape qui descend jusqu'aux talons : sauf les ailes, ils sont entièrement humains. D'autres ont des becs d'aigle comme le dieu Nisruk, leur chef suprême. En voici un qui tient par la crinière deux chevaux ailés - comme le Pégase de la mythologie hellénique; un autre est en adoration devant l'arbre de vie; un troisième à quatre ailes, saisit par les pattes de derrière deux lions ailés à tête humaine. Le plus souvent, ils tiennent de la main droite élevée la pomme de pin, et de la gauche abaissée le panier mystique qui figure toujours, dans les scènes religieuses, à la main d'un des officiants. Qu'on prenne la peine, en un mot, de jeter un coup d'oeil sur les représentations qui décorent les cylindres en pierre dure, et l'on sera surpris de la variété infinie des scènes où figurent ces génies, et de la bizarre fécondité de l'esprit assyrien qui les a inventés; on comprendra aussi, en même temps, les difficultés qu'éprouve aujourd'hui l'archéologue pour retrouver l'idée qui a présidé à une conception de ce genre et la signification originaire de pareils symboles.
Au-dessous de ces schedi, de ces lamassi, de ces kirubi qui sont les grands lions ailés, les grands taureaux ailés et les êtres fantastiques du cycle de Nergal et de Nisruk, les textes religieux mentionnent d'autres esprits moins puissants, d'un ordre inférieur, mais essentiellement mauvais, les génies du mal ou démons proprement dits. Il y eu a d'innombrables légions.
Dans chaque groupe, ces êtres sont au nombre de sept; ils vont sept par sept, revêtant les formes les plus grotesques et les déguisements les plus propres à tromper l'homme à la perte duquel ils s'acharnent. Les plus puissants et les plus redoutables sont ceux qui ont un caractère cosmique, dont l'action s'exerce sur l'ordre général de la nature et qui peuvent le troubler par leur méchanceté.
Dans une formule, on place dans le ciel sept mauvais esprits, « sept fantômes de flammes », sept démons, « des sphères ignées », qui forment exactement la contre-partie des sept dieux des planètes, investis du gouvernement de l'univers.
Une autre formule mentionne les sept esprits de l'abîme : ce sont certainement les sept maskin ou « tendeurs de pièges », démons qui résident au fond de l'Océan et qui dépassent tous les autres en puissance et en terreur.
Ils sont sept; ils sont sept.
Au plus profond de l'Océan, ils sont sept; perturbateurs du ciel, ils sont sept.
Au plus profond de l'Océan, dans la retraite secrète, ils grandissent.
Ils ne sont ni mâles ni femelles;
eux, en chaîne ils s'étendent;
ils n'ont pas d'épouse, ils ne produisent pas d'enfant.
Ils ne connaissent ni le bon ordre, ni la générosité bienfaisante; ils n'écoutent ni prière ni supplication.
Vermine qui grandit dans la montagne, ils sont les ennemis d'Êa;
ils sont les agents de destruction des dieux.
Renversant la selle du cavalier, ils s'établissent sur les routes.
Ils sont ennemis; ils sont ennemis.
Ils sont sept, ils sont sept, ils sont sept (bis).Ces monstres font leur demeure habituelle dans les lieux incultes, malsains et sauvages; c'est de là qu'ils viennent rôder dans les endroits habités pour tourmenter les humains. Issus de l'aral, l'empire ténébreux de Mul-ge, les diables affectionnent particulièrement les ténèbres, et c'est pendant la nuit, surtout, qu'ils attaquent l'humain et rôdent autour des habitations pour y semer l'épouvante.
Dieu à tête d'aigle, découvert à Nimrud
On nous dit que « l'utuq habite le désert, le mas se tient sur les sommets, le gigim erre dans le désert, le telal se glisse dans les villes. Mais c'est surtout le désert qui est leur réceptacle. A chaque instant, dans les textes magiques, il est question des démons qui guettent l'homme du fond du désert; les exorcismes, nous l'avons vu, ont pour objet de les repousser dans ces solitudes privées de vie. L'habitation des démons dans le désert était, du reste, une croyance générale en Syrie aussi bien qu'en Mésopotamie, et les prophètes d'Israël eux-mêmes ont adopté cette opinion populaire.
Quand Isaïe décrit la dévastation d'Edom, il dit : « Les épines croîtront dans ses palais, les ronces et les chardons dans ses forteresses; ce sera la demeure des chacals, le repaire des autruches.
Les animaux du désert, y rencontreront les chiens sauvages, et les démons s'appelleront les uns les autres; là seulement Lilith fera sa demeure et trouvera son lieu de repos. »A la suite de ces démons actifs, à la puissance desquels on attribue tout mal, prennent rang ceux qui, sans avoir une action aussi directe, se manifestent par des apparitions effrayantes et sont dans un étroit rapport avec les ombres des morts enfermées sous la terre, dans les sombres demeures du pays immuable, qui correspond exactement au schéol des anciens Hébreux.
Tels sont « le innin et l'uruku énormes », sortes de lémures et de larves.
Mais les trois principaux êtres de cette classe sont le fantôme (labartu), le spectre (labassu) et le vampire (ahharu). Les deux premiers épouvantent seulement par leur aspect le vampire « attaque l'homme. »
Un des démons femelles les plus importants et les plus dangereux est Lilith qui a persisté dans la démonologie rabbinique et même arabe. On la trouve, mentionnée dans la prophétie contre Édom. Chez les rabbins des bas temps du judaïsme, la Lilith est une strige, une sorte de lamie ou d'empuse qui enlève les petits enfants pour les mettre à mort; dans les livres des Mendaïtes, elle est, de même, censée s'introduire auprès du lit des femmes en couches pour tuer les nouveau-nés. Dans les mêmes écrits comme dans la littérature magique des assyro-babyloniens, Lilith est un démon d'impureté dont les criminels amusements donnent naissance à des démons lascifs, les hengê et les séirim : ce sont les faunes et les satyres de la mythologie assyrienne.
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