Le code d'Hammourabi vs la Bible
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Le code d'Hammourabi vs la Bible
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Hammourabi - Œil pour œil et dent pour dent
Code de Hammourabi roi de Babylone - 1760 av. J.C.
§ 1. Si un homme a incriminé un autre homme, et a jeté sur lui un maléfice, et ne l’a pas convaincu de tort, celui qui l’a incriminé est passible de mort.
§ 2. Si un homme a jeté un sort sur un autre homme, et ne l’a pas convaincu de tort, celui sur qui a été jeté le sort ira au fleuve, et se plongera dans le fleuve ; si le fleuve s'empare de lui, celui qui l’a incriminé prendra sa maison; si le fleuve l’innocente et le garde sauf, celui qui a jeté le sort sur lui est passible de mort; celui qui s'est plongé dans le fleuve prendra la maison de celui qui l'avait incriminé.
§ 3. Si un homme, dans un procès, s'est levé pour un témoignage à charge, et s'il n'a pas justifié le propos qu'il a tenu, si cette cause est une cause de vie (ou de mort), cet homme est passible de mort.
§ 4. S'il s’est levé pour un (tel) témoignage (en matière de) blé ou d'argent, il portera la peine de ce procès.
§ 5. Si un juge a rendu une sentence, formulé une décision, libellé une tablette, si ensuite il a annulé cette sentence, on fera comparaître ce juge pour l'annulation de la sentence qu'il avait rendue, et la revendication de ce procès, il l'acquittera douze fois, et publiquement on l'expulsera de son siège de justice, il n'y retournera plus, et ne siégera plus avec des juges dans un procès.
§ 6. Si un homme a volé le trésor[1] du dieu ou du palais, cet homme est passible de mort, et celui qui aurait reçu de sa main l'objet volé est passible de mort.
§ 7. Si un homme a acheté ou reçu en dépôt, sans témoins ni contrat, de l’or, de l’argent, esclave mâle ou femelle, bœuf ou mouton, âne ou quoi que ce soit, des mains d'un fils d'autrui ou d'un esclave d'autrui, cet homme est assimilable à un voleur et passible de mort.
§ 8. Si un homme a volé un bœuf, mouton, âne, porc ou une barque, si c’est au dieu ou au palais, il rendra au trentuple; si c'est à un mouchkînou. Il compensera au décuple. Si le voleur n'a pas de quoi rendre, il est passible de mort.
§ 9. Si un homme ayant perdu un objet le retrouve entre les mains d'un autre, si celui chez qui l'objet perdu est trouvé dit : Un vendeur me l’a vendu et je l'ai acheté devant témoins; et si le maître de l’objet perdu dit : J'amènerai des témoins qui reconnaîtront mon objet perdu, — l'acheteur amènera le vendeur qui lui a transmis l'objet, et les témoins en présence de qui il a acheté; — le propriétaire de l'objet perdu amènera les témoins connaissant son objet perdu; le juge examinera leurs dires. Les témoins devant qui l'achat a été fait, les témoins connaissant l'objet perdu diront devant Dieu ce qu'ils savent. Le vendeur sera assimilé à un voleur et passible de mort. Le propriétaire de l'objet perdu reprendra son objet perdu; l'acheteur reprendra l'argent qu'il avait payé, sur la maison du vendeur.
§ 10. Si l'acheteur n'a pas amené le vendeur qui lui a livré, et les témoins devant qui il a acheté, alors que le propriétaire de l'objet perdu a amené les témoins connaissant son objet perdu, l'acheteur est assimilé au voleur et passible de mort. Le propriétaire de l'objet perdu reprendra son objet perdu.
§ 11. Si c'est le propriétaire (prétendu) de l'objet perdu qui n'a pas amené les témoins connaissant son objet perdu, il est de mauvaise foi, a suscité la calomnie et est passible de mort.
§ 12. Si le vendeur est mort, l'acheteur prendra au quintuple sur la maison du vendeur, ce qu'il a le droit de réclamer dans ce procès.
§ 13. Si les témoins de cet homme ne sont pas à proximité, le juge fixera un délai jusqu'au sixième mois. Si pour le sixième mois, il n'a pas amené ses témoins, cet homme est de mauvaise foi, et portera la peine de ce procès.
§ 14. Si un homme s'est emparé par vol du fils d'un homme, en bas âge, il est passible de mort.
§ 15. Si un homme a fait sortir des portes un esclave ou une esclave du palais, un esclave ou une esclave d'un mouchkînou,[2] il est passible de mort.
§ 16. Si un homme a abrité chez lui un esclave ou une esclave en fuite du palais ou de chez un mouchkînou, et si, sur la voix du majordome, il ne le fait pas sortir, le maître de maison est passible de mort.
§ 17. Si un homme s'est emparé dans les champs d'un esclave ou d'une esclave en fuite, et l'a ramené à son maître, celui-ci lui donnera deux sicles d'argent.
§ 18. Si cet esclave refuse de nommer son maître, il devra l'amener au palais, son secret (y) sera pénétré, et à son maître on le rendra.
§ 19. S'il a gardé cet esclave dans sa maison, et si par la suite, l'esclave est surpris chez lui, cet homme est passible de mort.
§ 20. Si l’esclave périt chez celui qui l’a attrapé, cet homme en jurera par le nom de Dieu au propriétaire de l’esclave, et il sera quitte.
§ 21. Si un homme a perforé une maison, on le tuera et enterrera en face de cette brèche.
§ 22. Si un homme a exercé le brigandage, et a été pris, cet homme est passible de mort.
§ 23. Si le brigand n'a pas été pris, l’homme dépouillé poursuivra devant Dieu ce qu'il a perdu, et la ville et le cheikh sur le territoire et les limites desquels le brigandage fut commis, lui restitueront tout ce qu'il a perdu.
§ 24. S'il s'agit de personnes, la ville et le cheikh payeront une mine d'argent pour ses gens.
§ 25. Si le feu a éclaté dans la maison d'un homme et si quelqu'un y est allé pour éteindre, et si, levant les yeux sur le bien du maître de la maison, il a pris le bien du maître de la maison, celui-là sera jeté dans le même feu.
§ 26. Si un officier ou un homme d'armes ayant reçu ordre de marcher dans une expédition royale, n'a pas marché, lors même qu'il aurait engagé un mercenaire et que son remplaçant y serait allé, cet officier ou cet homme d’armes est passible de mort, son remplaçant prendra sa maison.
§ 27, Si d'un officier ou homme d'armes qui est rappelé dans les forteresses royales, on a donné, après lui, ses champ et jardin à un autre qui en exerce la gestion, — lorsqu’il reviendra et aura regagné sa ville, on lui rendra ses champ et jardin, et lui-même en exercera la gestion.
§ 28. Si d'un officier ou homme d'armes qui est rappelé dans les forteresses royales, un fils peut exercer la gestion, on donnera à celui-ci champ et jardin, et il exercera la gestion pour son père,
§ 29. Si son fils est en bas âge, et s'il ne peut gérer pour son père, il sera donné un tiers des champ et jardin à sa mère, et sa mère l’élèvera.
§ 30. Si l’officier ou l’homme d'armes, dès l'origine de sa gestion^ a négligé et abandonné ses champ, jardin et maison^ et si un autre, après lui, a soigné ses champ, jardin et maison, et durant trois ans a exercé sa gestion, lorsqu'il reviendra et demandera ses champ, jardin, maison, l’autre ne les lui cédera pas; celui qui les a soignés et a exercé sa gestion, celui-là continuera à exploiter.
§ 31. Si, pendant un an seulement, il a laissé inexploité, et s'il revient, l'autre lui rendra ses champ, verger, maison, et lui-même reprendra la gestion.
§ 32. Si un officier ou homme d'armes ayant été rappelé. au service, dans une entreprise du roi, un négociant a payé sa rançon et lui a fait regagner sa ville ; s'il a dans sa maison de quoi fournir la rançon, il se libérera lui-même (près du négociant); si chez lui il n'y a pas de quoi se libérer, il sera libéré dans le temple de sa ville ; et si dans le temple de sa ville il n'y a pas de quoi le libérer, le palais le libérera ; ni son champ, ni son jardin, ni sa maison ne peuvent être cédés pour sa rançon.
§ 33. Si, soit un gouverneur, soit un préfet a possédé des troupes... (?) et si dans le service du roi il a accepté et envoyé un mercenaire substitué, ce gouverneur ou ce préfet est passible de mort.
§ 34. Si, soit un gouverneur, soit un préfet, s'est emparé du bien d’un officier, a causé du dommage à un officier, a prêté en location un officier, a livré au tribunal un officier entre les mains d'un (plus) puissant, a ravi le cadeau que le roi a donné à l’officier, ce gouverneur et ce préfet sont passibles de mort.
§ 35. Si un homme a acheté dés mains de l'officier bœufs ou moutons que le roi a donnés à l’officier, il est frustré de son argent.
§ 36. Champ, jardin, maison d’un officier, homme d'armes, ou fieffé à tribut, ne peuvent être vendus.
§ 37. Si un homme a acheté champ, jardin, maison d'un officier, homme d'armes ou fieffé à tribut, sa tablette sera brisée, et il sera frustré de son argent; champ, jardin, maison retournera à son propriétaire.
§ 38. Officier, homme d'armes et fieffé à tribut ne peut rien transmettre par écrit à sa femme ou à sa fille, des champ, jardin, maison de sa gestion, ni donner contre une dette.
§ 39. D'un champ, jardin, maison qu'il a acheté et qu'il possède (en propre), il peut transmettre par écrit, à sa femme, à sa fille, et donner contre une dette.
§ 40. Pour (la garantie d’)un négociant ou une obligation étrangère, il peut vendre ses (propres) champ, jardin, maison ; l'acheteur peut exploiter les champ, jardin, maison qu'il a achetés.
§ 41. Si un homme a enclos les champ, jardin, maison d'un officier, homme d'armes ou fieffé à tribut, et a fourni les piquets, l’officier, homme d'armes, fieffé à tribut rentreront dans leur champ, jardin, maison, et payeront (?) les piquets à eux fournis.
§ 42. Si un homme a pris à ferme un champ pour le cultiver, et si dans ce champ, il n'a pas fait pousser de blé, on le convaincra de n'avoir pas travaillé la champ, et il donnera au propriétaire du champ, selon le rendement du voisin.
§ 43. S'il n'a pas cultivé le champ et l’a laissé en friche, il donnera du blé au propriétaire selon le rendement du voisin, et le champ qu’il a laissé en friche, il le rompra en terre cultivée, l'ensemencera et le rendra au propriétaire.
§ 44. Si un homme a pris à ferme pour trois ans une terre inculte pour l'ouvrir, s'il s'est reposé et n'a pas ouvert la terre ; — la quatrième année il devra la rompre en champ labouré, louer et ensemencer et rendre au propriétaire, et lui mesurer 10 gour de blé par 10 gan de superficie.
§ 45. Si un homme a affermé son champ à un laboureur pour un revenu, et s'il a déjà reçu ce revenu, quand ensuite un orage inonde le champ et emporte la moisson, le dommage est pour le laboureur.
§ 46. S'il n'a pas reçu le revenu de son champ, et s'il avait affermé pour moitié ou tiers, propriétaire et laboureur partageront proportionnellement le blé qui se trouvera dans le champ.
§ 47. Si le laboureur, parce que dans la première année sa ferme n'est pas encore montée, a chargé un autre de labourer le champ, le propriétaire ne molestera pas (pour cela) son laboureur ; son champ a été labouré, et, lors de la moisson, il prendra du blé, selon ses conventions.
§ 48. Si un homme a été tenu par une obligation productive d'intérêt, et si Forage a inondé son champ et emporté la moisson, ou si faute d'eau, le blé n'a pas poussé dans le champ — dans cette année, il ne rendra pas de blé au créancier, trempera dans l'eau sa tablette, et ne donnera pas l'intérêt de cette année.
§ 49. Si un homme a emprunté de l'argent d'un négociant, et a donné au négociant un champ cultivable en blé ou sésame en disant : cultive le champ, récolte et prends blé ou sésame qui s'y trouveront! quand le cultivateur aura fait venir blé ou sésame dans le champ, lors de la moisson, le propriétaire du champ prendra blé ou sésame qui s'y trouveront, et donnera au négociant du blé pour l'argent avec les intérêts qu'il a pris du négociant, et la ferme de culture.
§ 50. S'il s'agit d'un champ de blé cultivé ou d'un champ de sésame cultivé qu'il a donné au négociant, le maître du champ prendra le blé ou sésame qui se trouve dans le champ, et rendra argent avec intérêts au négociant.
§ 51. S'il n'a pas d'argent pour restituer, il donnera au négociant du sésame, selon le tarif du roi, pour la valeur de son argent avec intérêts, emprunté au négociant.
§ 52. Si le cultivateur n'a pas fait venir dans le champ blé ou sésame, il (l'emprunteur) n'annule pas (pour cela) ses obligations.
§ 53. Si un homme, négligeant à fortifier sa digue, n'a pas fortifié sa digue, et si une brèche s'est produite dans sa digue, et si le canton a été inondé d'eau, l'homme sur la digue de qui une brèche s'est ouverte, restituera le blé qu'il a détruit.
§ 54. S'il ne peul restituer du blé, on vendra sa personne et son avoir pour de l'argent, et les gens des cantons dont l’eau a emporté le blé se partageront.
§ 55. Si un homme a ouvert sa rigole pour irriguer, puis a été négligent, si le champ limitrophe est inondé d'eau, il mesurera du blé selon le rendement du voisin.
§ 56. Si un homme a ouvert la voie d'eau, et si la plantation du champ voisin est inondée, il mesurera 10 gour de blé, par 10 gan de superficie.
§ 57. Si un berger ne s'est pas entendu avec le propriétaire d'un champ, pour y faire paître l'herbe à ses moutons, et à l’insu du propriétaire a fait paitre le champ à ses moutons, le propriétaire fera la moisson de ses champs, et le berger qui à l'insu du propriétaire a fait paître le champ à ses moutons, donnera en surplus au propriétaire, 20 gour de blé par 10 gan de superficie.
§ 58. Si après que les moutons sont sortis du canton, et que le bétail en entier s'est remisé sous les portes, un berger a conduit ses moutons sur un champ, et a fait paître le champ à ses moutons, le berger gardera le champ qu'il a fourragé, et lors de la moisson, il mesurera au propriétaire 60 gour de blé par 10 gan.
§ 59. Si un homme, à l'insu du maître d'un verger, a coupé un arbre dans le jardin d'un autre, il payera une demi-mine d'argent.
§ 60. Si un homme a donné à un jardinier un champ pour être aménagé en verger, si le jardinier plante le verger, et le soigne pendant quatre ans — la cinquième année, propriétaire du verger et jardinier partageront à parts égales ; le maître du verger déterminera la part qu'il prendra.
§ 61. Si un jardinier, dans la plantation d'un champ ou verger, n’a pas tout planté, mais a laissé une partie inculte, on la lui mettra dans sa portion.
§ 62. S'il n'a pas planté en verger le champ qui lui avait été confié (pour cela), et s'il s'agit d'un champ à céréales, le jardinier mesurera au propriétaire du champ, selon le rendement du voisin, le rapport du champ pour les années où il a été négligé ; puis il façonnera le champ à travailler, et le restituera au propriétaire.
§ 63. S'il s'agit d'une terre inculte, il façonnera le champ à travailler, et le rendra au propriétaire. Pour chaque année, il mesurera 10 gour de blé pour 10 gan de superficie.
§ 64. Si un homme a donné son verger à exploiter à un jardinier, pendant que celui-ci soigne le verger, il donnera au propriétaire deux tiers du rapport du verger, et prendra lui-même un tiers.
§ 65. Si le jardinier n'a pas exploité le verger, et a causé une diminution de rapport, le jardinier mesurera au propriétaire, selon le rendement du voisin.
§ a. Si un homme a emprunté de l'argent d'un négociant, et a donné au négociant son jardin de dattiers en disant : prends pour ton argent, les dattes qui se trouvent dans mon jardin! si ce négociant n'est pas consentant, le propriétaire du jardin prendra les dattes qui se trouvent dans le verger, et, selon la teneur de sa tablette, payera au négociant argent et intérêts. Le surplus des dattes qui se trouvent dans le jardin, le propriétaire les prendra.
§ b. ... Si un locataire de maison a payé au propriétaire l’argent du loyer complet de l’année, et si le propriétaire avant la fin du terme ordonne de sortir au locataire, parce que le locataire est sorti de la maison, avant que les jours du bail fussent terminés, le propriétaire lui rendra … sur l'argent que le locataire lui avait donné.
§ c. Si un homme s'est engagé à payer en blé ou en argent, et si pour s'acquitter, il n'a ni blé ni argent, mais d'autre bien, il donnera devant témoins au négociant quoi qu'il possède, selon ce qu'il doit fournir, et le négociant ne chicanera pas, mais acceptera.
§ 100. ... Le commis marquera les intérêts de l'argent autant qu'il en a emporté, et il comptera ses jours, et payera le négociant.
§ 101. Si là où il est allé, il n'a pas trouvé de profit, il doublera l'argent qu'il a pris, et le commis le rendra au négociant.
§ 102. Si un négociant a donné de l'argent à un commis à titre gracieux, et si celui-ci, dans l’endroit où il est allé, a éprouvé du détriment, il rendra le capital de l'argent au négociant.
§ 103. Si en route, pendant son excursion, l'ennemi lui a fait perdre ce qu'il portait, le commis en jurera par le nom de Dieu, et il sera quitte.
§ 104. Si un négociant a confié à un commis blé, laine, huile, ou tout autre denrée, pour le trafic, le commis inscrira l’argent et le rendra au négociant. Le commis prendra un signé (ou reconnaissance) de l'argent qu'il a donné au négociant.
§ 105. Si le commis a fait erreur et n'a pas pris un signé {ou reconnaissance) de l'argent qu'il a donné au négociant, l'argent non signé (sans reconnaissance) ne peut être porté à l'actif.
§ 106. Si un commis, ayant pris de l'argent d'un négociant, conteste avec le négociant, celui-ci fera comparaître le commis devant Dieu et témoins, pour l'argent qu'il a pris, et le commis payera au triple tout l'argent qu'il en a pris.
§ 107. Si le négociant a fait tort au commis, si celui-ci avait rendu à son négociant ce que le négociant lui avait donné, si le négociant donc conteste au sujet de ce que le commis lui a donné, ce commis fera comparaître le négociant devant Dieu et témoins, et pour avoir contesté avec son commis, il donnera au commis, au sextuple, tout ce qu'il avait pris.
§ 108. Si une marchande de vin n'a pas accepté du blé comme prix de boisson, mais a reçu de l'argent à gros poids, et a baissé le prix de la boisson au-dessous du prix du blé, on fera comparaître cette marchande de vin, et on la jettera dans l’eau.
§ 109. Si une marchande de vin, quand des rebelles se réunissent dans sa maison, n'a pas saisi et conduit au palais ces rebelles, cette marchande de vin est passible de mort.
§ 110. Si une prêtresse qui ne demeure pas dans le cloître a ouvert une taverne, ou est entrée dans la taverne pour boire, on brûlera cette femme.
§ 111. Si une marchande de vin a donné 60 qa de boisson ousakani, pour la canicule (?), elle prendra, lors de la moisson, 50 qa de blé.
§ 112. Si un homme se trouve en voyage et a remis à un autre argent, or, pierre, ou autres objets de main pour les lui faire transporter; si celui-ci n'a pas livré au lieu où il doit transporter ce qu'il doit y transporter, mais l’a emporté (pour lui) — le propriétaire de l’objet à transporter fera comparaître cet individu, pour n'avoir pas livré ce qu'il avait à transporter, et cet individu donnera, au quintuple, au maître de l'envoi tout ce qui lui avait été confié.
§ 113. Si un homme a une créance de blé ou d'argent sur un autre, et si à l'insu du maître du blé, dans le grenier ou dans le dépôt il a pris du blé, on fera comparaître cet homme pour avoir pris du blé, à l’insu du maître du blé, dans le grenier ou dans le dépôt; il rendra tout le blé qu'il a pris, et de quoi que ce soit de tout ce qu'il avait prêté, il est frustré.
§ 114. Si un homme n'a pas eu une créance de blé ou d'argent sur un autre, et néanmoins a exercé contrainte contre lui, pour chaque contrainte, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 115. Si un homme a eu une créance de blé ou d'argent sur un autre, et a exercé contrainte contre lui, si le contraint meurt de mort naturelle dans la maison du contraignant, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 116. Si dans la maison de son contraignant, le contraint meurt par suite de coups ou de misère, le maître du contraint fera comparaître son négociant, et si le mort était fils d'homme libre, on tuera son fils, et si le mort était esclave d'homme libre, il payera un tiers de mine d'argent, et de quoi que ce soit de tout ce qu'il avait prêté, il est frustré,
§ 117. Si une dette a contracté (sic !) un homme, et s'il a donné pour de l'argent ses femmes, fils, fille et les a livrés à la sujétion, durant trois ans ils serviront dans la maison de leur acheteur et coacteur, dans la quatrième année, il les remettra en liberté.
§ 118. S'il a livré à la sujétion un esclave ou une esclave, et si le négociant les fait passer ailleurs en les vendant, il n'y a pas de réclamation possible.
§ 119. Si une dette a contracté {sic!) un homme, et s'il a vendu une de ses esclaves qui lui a donné des enfants, le maître de l'esclave payera au négociant l'argent que celui-ci a payé, et il rachètera son esclave.
§ 120. Si un homme a versé, pour emmagasinement, son blé dans la maison d'un autre, et si dans le grenier, un déchet s'est produit, soit que le maître de la maison ait ouvert le magasin et ait pris du blé, ou soit qu'il conteste sur la quantité totale du blé qui a été versée chez lui, le propriétaire du blé poursuivra son blé devant Dieu, et le maître de la maison qui a pris du blé le doublera et le rendra au propriétaire du blé.
§ 121. Si un homme a versé du blé dans la maison d'un autre, il donnera par an, comme loyer de magasin, 5 qa de blé par gour.
§ 122. Si un homme donne en dépôt à un autre, de l'argent, or, ou tout autre chose, il fera connaître à des témoins ce qu'il donne, il statuera les obligations et donnera en dépôt.
§ 123. Si, sans témoins ni obligations (statuées), il a donné en dépôt, et si là où il a donné on lui conteste, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 124. Si un homme a donné en dépôt devant témoins, à un autre, argent, or, ou toute autre chose, et si celui-ci lui conteste, on fera comparaître cet individu, et il doublera et donnera tout ce qu'il a contesté.
§ 125. Si un homme a donné une chose en dépôt, et si là où il a donné, soit par effraction soit par escalade, sa chose avec celle du maître de la maison a disparu, le maître de la maison, qui est en faute remplacera tout ce qu'en dépôt on lui avait remis et qu'il a perdu, et dédommagera intégralement le maître des biens. Le maître de la maison recherchera son avoir perdu, et le reprendra sur son voleur.
§ 126. Si un homme dont la chose n'est pas perdue prétend qu'elle est perdue, exagère son détriment; s’il poursuit devant Dieu (la réparation de) son détriment, bien que sa chose ne soit pas perdue, — lui-même (le réclamant sans droit), tout ce qu'il a réclamé doublera, et à son propre détriment donnera.[3]
§ 127. Si un homme a fait lever le doigt contre une prêtresse ou la femme d'un autre, sans la convaincre de tort, on jettera cet homme devant le juge, et on marquera son front.
§ 128. Si un homme a épousé une femme et n'a pas fixé les obligations de cette femme, cette femme n'est pas épouse.
§ 129. Si la femme d'un homme a été prise au lit avec un autre mâle, on les liera et jettera dans l’eau, à moins que le mari ne laisse vivre sa femme, et que le roi ne laisse vivre son serviteur.
§ 130. Si un homme a violenté la femme d'un homme qui n'a pas encore connu le mâle et demeure encore dans la maison paternelle, s'il a dormi dans son sein, et si on le surprend, cet homme est passible de mort, et cette femme sera relâchée.
§ 131. Si le mari d'une femme l’a incriminée, et si elle n'a pas été surprise dans la couche avec un autre mâle, elle jurera par le nom de Dieu, et elle retournera à sa maison.
§ 132. Si à propos d'un autre mâle, le doigt s'est levé contre la femme d'un homme, et si elle n'a pas été surprise avec un autre mâle dans la couche, à cause de son mari, elle se plongera dans le fleuve.
§ 133. Si un homme a été fait captif, et s'il y a de quoi manger dans sa maison, et si sa femme est sortie de la maison de son époux, est entrée dans une autre maison; parce que cette femme n'a pas gardé son corps, et est entrée dans une autre maison, on la fera comparaître, et on la jettera dans l’eau.
§ 134. Si un homme a été fait captif, et s'il n’y a pas de quoi manger dans sa maison, et si sa femme est entrée dans une autre maison, cette femme est sans faute.
§ 135. Si un homme a été fait captif, et s'il n'y a pas dans sa maison de quoi manger, à sa disposition, si sa femme est entrée dans une autre maison, y a enfanté des enfants, et si ensuite son mari est revenu et a regagné sa ville, cette femme retournera avec son époux, les fils suivront leur père (respectif).
§ 136. Si un homme a abandonné sa ville, s'est enfui, et si, après lui, sa femme est entrée dans une autre maison, si cet homme revient et veut reprendre sa femme, parce qu'il a dédaigné sa ville et s'est enfui, la femme du fugitif ne retournera pas avec son mari.
§ 137. Si un homme s'est disposé à répudier une concubine qui lui a procréé des enfants ou bien une épouse qui lui a procréé des enfants, il rendra à cette femme sa cheriqtou,[4] et on lui donnera l’usufruit des champ, verger et autre bien, et elle élèvera ses enfants. Après qu'elle aura élevé ses enfants, on lui donnera une part d'enfant de tout ce qui sera donné aux enfants, et elle épousera l'époux de son choix.
§ 138. Si un homme veut répudier son épouse qui ne lui a pas donné d'enfants, il lui donnera (tout l'argent) de sa tirhatou, et lui restituera intégralement la cheriqtou qu'elle a apportée de chez son père, et il la répudiera.
§ 139. S'il n'y a pas de tirhatou, il lui donnera une mine d'argent pour la répudiation.
§ 140. Si c'est un mouchkînou, il lui donnera un tiers de mine d'argent.
§ 141. Si l'épouse d'un homme qui demeure chez cet homme, était disposée à sortir, a provoqué la division, a dilapidé sa maison, négligé son mari, on la fera comparaître et si son mari dit: Je la répudie, il la laissera aller son chemin, et ne lui donnera aucun prix de répudiation. Si son mari dit : Je ne la répudie pas, son mari peut épouser une autre femme, et cette première femme demeurera dans la maison de son mari, comme esclave.
§ 142. Si une femme a dédaigné son mari et lui a dit : Tu ne me posséderas pas, son secret sur le tort qu'elle subit sera examiné, et si elle est ménagère, sans reproche, et si son mari sort et la néglige beaucoup, cette femme est sans faute; elle peut prendre sa cheriqtou et s'en aller dans la maison de son père.
§ 143. Si elle n'est pas ménagère, mais coureuse, si elle dilapide la maison, néglige son mari, on jettera cette femme dans l'eau.
§ 144. Si un homme a épousé une femme, et si cette femme a donné à son mari une esclave qui a procréé des enfants, si cet homme se dispose à prendre une concubine, on n'(y) autorisera pas cet homme, et il ne prendra pas une concubine.
§ 145. Si un homme a pris une épouse et si elle ne lui a pas donné d'enfants, et s'il se dispose à prendre une concubine, il peut prendre une concubine, et l'introduire dans sa maison. Il ne rendra pas cette concubine l'égale de l’épouse.
§ 146. Si un homme a pris une épouse, et si celle-ci a donné à son mari une esclave qui lui procrée des enfants; si ensuite cette esclave rivalise avec sa maîtresse, parce qu'elle a donné des enfants, sa maîtresse ne peut plus la vendre; elle lui fera une marque et la comptera parmi les esclaves.
§ 147. Si elle n’a pas enfanté d'enfants, sa maîtresse peut la vendre.
§ 148. Si un homme a pris une épouse et si une maladie (?) l'a contractée, et s'il se dispose à en prendre une autre, il peut la prendre, mais il ne répudiera pas son épouse que la maladie (?) a contractée; elle demeurera à domicile, et aussi longtemps qu'elle vivra, il la sustentera.
§ 149. S'il ne plaît pas à cette femme de résider dans la maison de son mari, il lui restituera intégralement la cheriqtou qu'elle a apportée de chez son père, et elle s'en ira.
§ 150. Si un homme a donné en noudounnou à son épouse champ, verger, maison, et lui a laissé une tablette; après la mort de son mari, ses enfants ne lui contesteront rien ; la mère après sa mort le donnera à l'un des enfants qu'elle préfère, mais elle ne le donnera pas à un frère.
§ 151. Si une femme qui demeure dans la maison d'un homme, s'est fait promettre par son mari qu'elle ne serait pas saisie par ses créanciers, et s'est fait délivrer une tablette, si cet homme, dès avant d'épouser cette femme, est chargé de dettes, le créancier de la dette ne saisira pas son épouse ; et si cette femme, dès avant d'entrer chez cet homme, est chargée de dettes, le créancier de la dette ne saisira pas son mari.
§ 152. Si, depuis que cette femme est entrée dans la maison de l'homme, une dette les obère, ils payeront le négociant tous deux.
§ 153. Si l'épouse d'un homme, en vue d'un autre mâle, a fait tuer son mari, on mettra cette femme à la potence.
§ 154. Si un homme a eu commerce avec sa fille, on chassera cet homme du lieu.
§ 155. Si un homme a choisi une fiancée pour son fils, et si celui-ci l’a connue, si le père lui-même ensuite est surpris à coucher dans son sein, on liera cet homme et on la jettera dans l’eau.
§ 156. Si un homme a choisi une fiancée pour son fils, et si son fils ne l'a pas encore connue, et si lui-même a dormi dans son sein, il lui payera une demi-mine d'argent, et lui rendra intégralement tout ce qu'elle a apporté de chez son père, et elle épousera qui elle voudra.
§ 157. Si un homme a dormi, après son père, dans le sein de sa mère, on les brûlera tous deux.
§ 158. Si un homme, à la suite de son père, est surpris dans le sein de celle qui l'a élevé, et qui a eu des enfants (de ce père), cet homme sera arraché de la maison paternelle.
§ 159. Si un homme a fait apporter du biblou dans la maison de son beau-père, a donné la tirhatou, s'il tourne les yeux vers une autre femme, et dit à son beau-père : je n'épouserai pas ta fille, le père de la fille gardera tout ce qui lui a été apporté.
§ 160. Si un homme a fait porter du biblou dans la maison de son beau-père, a donné la tirhatou, et si le père de la fille dit : je ne te donnerai pas ma fille, il doublera et rendra tout ce qui lui a été apporté.
§ 161. Si un homme a fait porter du biblou chez son beau-père, a donné la tirhatou, et si un sien ami le calomniant, le beau-père dit au mari : « tu n'épouseras pas ma fille » ; il doublera et rendra tout ce qui lui a été apporté ; et cet ami (du mari) ne pourra prendre son épouse.
§ 162. Si un homme a pris une épouse, et si elle lui a donné des enfants, si cette femme meurt, son père ne réclamera rien de sa cheriqtou : la cheriqtou de réponse est à ses enfants.
§ 163. : Si un homme a pris une épouse et si elle ne lui a pas donné d'enfants, si cette femme meurt, si le beau-père a rendu la tirhatou que cet homme a apportée chez son beau-père, son mari ne réclamera rien de la cheriqtou de cette femme; sa cheriqtou est à la maison paternelle.
§ 164. Si son beau-père ne lui a pas rendu la tirhatou, il déduira toute la tirhatou de la femme de sur sa cheriqtou, et il rendra (ensuite) la cheriqtou à la maison du père de la femme.
§ 165. Si un homme a donné en cadeau à l’un de ses fils,[5] le premier de son regard, champ, verger, maison, et lui a donné une tablette, si ensuite le père meurt, quand les frères partageront, ce fils gardera le cadeau que le père lui a donné, et de plus, pour la fortune mobilière on partagera à parts égales.
§ 166. Si un homme a pris épouse pour les fils qu'il a, à l’exception de l’un d'eux en bas âge, quand le père mourra, et que les frères partageront la fortune mobilière de la maison paternelle, ils donneront à leur frère en bas âge qui n'a pas encore pris une épouse, en outre de sa portion, de l'argent pour une tirhatou, et ils lui feront prendre une épouse.
§ 167. Si un homme a pris une épouse, et si elle lui a donné des enfants, quand cette femme mourra, si, après elle, il prend une autre épousé qui lui donne aussi des enfants; quand le père mourra, les enfants ne partageront pas selon les mères (en deux) : ils prendront la cheriqtou de leur mère (chaque groupe celui de la sienne) ; mais ils (tous) partageront à parts égales la fortune mobilière de la maison paternelle.
§ 168. Si un homme s'est proposé de renier [litt. arracher) son enfant et a dit au juge : je renie mou enfant, le juge examinera le fond de son affaire et si l’enfant n'a pas à charge un crime grave passible d'être privé de la filiation, le père ne peut l'arracher de la filiation.
§ 169. S'il a à charge un crime grave contre son père, passible de cette privation, pour une fois, celui-ci détournera la face ; si c'est pour la seconde fois qu'il a à charge un crime grave, le père peut arracher son enfant de la filiation.
§ 170. Si une épouse a donné des enfants à un homme et si une esclave de cet homme lui a aussi donné des enfants, si, de son vivant, le père a dit aux enfants que l'esclave lui a donnés : « vous êtes mes enfants », et les a comptés parmi les enfants de l’épouse, si ensuite le père meurt, les enfants de l'épouse et les enfants de l'esclave partageront à paris égales la fortune mobilière de la maison paternelle : les enfants qui sont les enfants de l'épouse choisiront dans le partage et prendront.
§ 171. Si le père de son vivant n'a pas dit aux enfants que l'esclave lui a enfantés : « vous êtes mes enfants », quand le père mourra, les enfants de l’esclave ne partageront pas la fortune mobilière de la maison paternelle avec les enfants de l’épouse.
II effectue l'affranchissement de l'esclave et de ses enfants; les enfants de l'épouse ne peuvent revendiquer pour la servitude les enfants de l'esclave; quant à l’épouse, elle prendra sa cheriqtou et le noudounnou que son mari lui a donnés et lui a marqués sur tablette, et elle restera dans la maison de son mari; tant qu'elle vivra, elle en jouira, mais ne pourra les aliéner pour argent; après elle, ils sont à ses enfants.
§ 172. Si son mari ne lui a pas donné un noudounnou, on lui rendra intégralement sa cheriqtou, et elle prendra sur la fortune mobilière de la maison du mari, une part d'enfant. Si ses enfants la forcent à sortir de la maison, le juge examinera ses raisons, et si la faute est sur les enfants, cette femme ne s'en ira pas de la maison de son mari. Si cette femme est disposée à s'en aller, elle laissera à ses enfants le don que son mari lui a donné, elle prendra la cheriqtou qui vient de la maison de son père, et épousera qui elle voudra.
§ 173. Si cette femme, là où elle est entrée, donne des enfants à son deuxième mari, et si ensuite elle meurt, les enfants antérieurs et postérieurs se partageront sa cheriqtou.
§ 174. Si elle n'a pas donné d'enfants au deuxième mari, les enfants du premier époux prendront sa cheriqtou.
§ 175. Si un esclave du palais ou un esclave de mouchkînou a épousé une fille d'homme libre et a procréé des enfants, le propriétaire de l’esclave ne peut élever de revendication sur les enfants d'une fille d'homme libre, pour la servitude.
§ 176. Et si l’esclave du palais ou l'esclave d'un mouchkînou a épousé une fille d’homme libre, et si elle est entrée dans la maison de l’esclave du palais ou de l’esclave d'un mouchkînou, avec une cheriqtou venant de la maison de son père, et si depuis qu'ils sont ensemble, ils se sont établis, ont acquis de l'avoir, — si ensuite l'esclave du noble ou l'esclave du mouchkînou meurt, la fille d'homme libre prendra sa cheriqtou, et de tout ce que son mari et elle, depuis qu'ils étaient ensemble, ont acquis, on fera deux parts. Le propriétaire de l'esclave prendra une moitié, la fille d'homme libre prendra l'autre moitié pour ses enfants. Si la fille d'homme libre n'avait pas de cheriqtou, on partagera en deux parts ce que son mari et elle ont acquis, depuis qu'ils étaient ensemble, et le propriétaire de l'esclave prendra une moitié, la fille d'homme libre prendra l'autre moitié, pour ses enfants.
§ 177. Si une veuve dont les enfants sont en bas âge, se propose d'entrer dans une autre maison, elle n'entrera pas sans le juge; quand elle entrera dans une autre maison le juge recherchera ce qui reste de la maison du premier mari, et on confiera à son second mari et à cette femme, la maison de son premier mari, et on leur fera délivrer une tablette; ils garderont la maison et élèveront les petits et ne vendront aucun ustensile. L'acheteur qui acquerrait un ustensile d'enfants de veuve sera frustré de son argent. L'objet retourne à son maître.
§ 178. Si son père a donné à une prêtresse ou à une femme publique une cheriqtou, et gravé une tablette, si sur la tablette qu'il lui a gravée, il n'y a pas gravé qu'elle pourrait donner à qui bon lui semble ce qu'elle laisserait après elle, ni ne l’a laissée suivre le vœu de son cœur, quand ensuite le père mourra, les frères (de la femme) prendront les champ et verger, et selon la valeur de sa portion, lui donneront blé, huile, laine, et contenteront son cœur; si ses frères ne lui donnent pas blé, huile, laine selon la valeur de sa portion, et ne contentent pas son cœur, elle donnera ses champ et jardin à un fermier qui lui plaira, et son fermier la sustentera : elle jouira de tout ce que son père lui avait donné, tant qu'elle vivra; mais ne peut le vendre ni payer un autre par ce moyen; sa part d'enfant appartient à ses frères.
§ 179. Si son père a donné à une prêtresse ou une femme publique une cheriqtou, et gravé une tablette et si sur cette tablette qu'il lui a gravée, il a gravé, qu'elle donnerait à qui elle voudrait, ce qu'elle laisserait après elle, et l’a laissé suivre le vœu de son cœur, quand ensuite le père mourra, elle donnera à qui lui plaira ce qu'elle laissera ; ses frères ne lui contesteront rien.
§ 180. Si son père n'a pas donné de cheriqtou à une fille recluse ou femme publique, quand ensuite le père mourra, elle participera une part d'enfant sur la fortune mobilière de la maison paternelle et en jouira tant qu'elle vivra; après elle, cela revient à ses frères.
§ 181. Si un père a voué à Dieu une hiérodule ou une vierge (?) et ne lui a pas donné de cheriqtou, quand ensuite le père mourra, elle participera un tiers de part d'enfant sur la fortune mobilière de la maison paternelle, et elle en jouira tant qu'elle vivra; après elle, cela revient à ses frères.
§ 182. Si son père n'a pas donné de cheriqtou à une fille, prêtresse de Marduk à Babylone, ni lui a gravé une tablette, quand ensuite le père sera mort, elle participera, avec ses frères, un tiers de part d'enfant, sur la fortune mobilière de la maison paternelle; elle ne gérera pas de gestion (personnellement), et après elle, la prêtresse de Marduk le donnera à qui lui plaira.
§ 183. Si un père a offert une cheriqtou à sa fille (de) concubine, et l’a donnée à un mari, lui a gravé une tablette, quand ensuite le père mourra, elle ne participera pas à la fortune mobilière de la maison paternelle.
§ 184. Si un homme n'a pas offert de cheriqtou à sa fille (de) concubine ni ne l’a donnée à un mari, quand ensuite le père mourra, ses frères lui offriront une cheriqtou, selon la fortune de la maison paternelle, et la donneront à un mari.
§ 185. Si un homme a pris un petit en adoption d'enfant, avec son propre nom (?) et l'a élevé, cet élève ne peut être réclamé.
§ 186. Si un homme a adopté en filiation un petit, et si quand il l’a pris, celui-ci a violenté (?) ses père et mère, cet élève retournera chez son père.
§ 187. L’enfant d'un favori, familier du palais, ou celui d'une femme publique ne peut être réclamé.
§ 188. Si un artisan a pris un enfant pour l'élever et lui a appris son métier, il ne peut être réclamé.,
§ 189. S'il ne lui a pas appris son métier, cet élève peut retourner chez son père.
§ 190. Si un homme qui a pris un petit en adoption et l’a élevé, ne l'a pas compté avec ses propres enfants, cet élève retournera chez son père.
§ 191. Si un homme qui a pris un petit en adoption et l'a élevé, fonde une famille et ensuite a des enfants, et s'il se dispose à renier (arracher) l'adopté, cet enfant n'ira pas son chemin ; le père qui l'a élevé lui donnera un tiers de part d'enfant sur sa fortune mobilière, et alors il s'en ira. Des champ, verger et maison, il ne lui donnera rien.
§ 192. Si un enfant de favori ou un enfant de femme publique dit à son père qui l'a élevé ou à sa mère qui l'a élevé : « tu n'es pas mon père, tu n'es pas ma mère », on lui coupera la langue.
§ 193. Si l'enfant d'un favori ou celui d'une femme publique a connu la maison de son père, et a dédaigné le père qui l'a élevé et la mère qui l’a élevé, et s'en est allé à la maison de son père, on lui arrachera les yeux.
§ 194. Si un homme a donné son enfanta une nourrice» et si cet enfant est mort entre les mains de cette nourrice, si la nourrice nourrit un autre enfant, sans (la permission de) ses père et mère, on la fera comparaître, et pour avoir nourri un autre enfant, sans (la permission de) ses père et mère, on lui coupera les seins.
§ 195, Si un enfant a frappé son père, on lui coupera les mains.
§ 196. Si un homme a crevé l’œil d'un homme libre, on lui crèvera un œil.
§ 197. S'il a brisé un membre d'un homme libre, on lui brisera un membre.
§ 198. S'il a crevé l’œil d'un mouchkînou, ou brisé un membre d'un mouchkînou, il paiera une mine d'argent.
§ 199. S'il a crevé l'œil d'un esclave d'homme libre ou brisé un membre d'un esclave d'homme libre, il payera la moitié de son prix.
§ 200. Si un homme a fait tomber les dents d'un homme de même condition que lui, on fera tomber ses dents.
§ 201. S’il a fait tomber les dents d'un mouchkînou, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 202. Si un homme a frappé le cerveau d'un homme de condition supérieure à lui, il sera frappé en public de 60 coups de nerf de bœuf.
§ 203. Si un homme a frappé le cerveau d'un homme de même condition, il payera une mine d'argent.
§ 204. S'il a frappé le cerveau d'un mouchkînou, il payera dix sicles d'argent.
§ 205. S'il a frappé le cerveau d'un esclave d'homme libre, on lui coupera l'oreille.
§ 206. Si un homme a frappé un autre homme dans une dispute, et lui a causé une plaie, cet homme jurera : « je ne l'ai pas fait sciemment », et il payera le médecin.
§ 207. Si l’autre meurt de ses coups, il jurera encore, et s'il s'agit d'un fils d'homme libre, il payera une demi-mine d'argent.
§ 208. Et s'il s’agit d'un fils de mouchkînou, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 209. Si un homme a frappé une fille d'homme libre et a fait tomber son intérieur (avorter), il payera, pour son fruit, dix sicles d'argent,
§ 210. Si cette femme meurt, on tuera la fille (de l’agresseur).
§ 211. S'il s'agit d'une fille de mouchkînou dont il a fait tomber par ses coups l'intérieur, il payera cinq sicles d'argent.
§ 212. Si cette femme meurt, il payera une demi-mine d'argent.
§ 213. S'il a frappé une esclave d'un homme libre et a fait tomber son intérieur, il payera deux sicles d'argent.
§ 214. Si cette esclave meurt, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 215. Si un médecin a traité un homme d'une plaie grave avec le poinçon de bronze, et guéri l’homme, s'il a ouvert la taie d'un homme avec le poinçon de bronze, et a guéri l'œil de l'homme, il recevra dix sicles d'argent.
§ 216. S'il s'agit d'un mouchkînou, il recevra cinq sicles d'argent.
§ 217. S'il s'agit d'un esclave d'homme libre, le maître de l'esclave donnera au médecin deux sicles d'argent.
§ 218. Si un médecin a traité un homme libre d'une plaie grave, avec le poinçon de bronze, et a fait mourir l'homme, s'il a ouvert la taie de l'homme avec le poinçon de bronze, et a crevé l'œil de l'homme, on coupera ses mains.
§ 219. Si un médecin a traité d'une plaie grave l'esclave d'un mouchkînou, avec le poinçon de bronze, et l’a tué, il rendra esclave pour esclave.
§ 220. S'il a ouvert la taie avec le poinçon de bronze, et a crevé l'œil, il payera en argent la moitié de son prix.
§ 221. Si un médecin a guéri un membre brisé d'un homme libre, et a fait revivre un viscère malade, le patient donnera au médecin cinq sicles d'argent.
§ 222. Si c'est un fils de mouchkînou, il donnera trois sicles d'argent.
§ 223. S'il s'agit d'un esclave d'homme libre, le maître de l'esclave donnera au médecin deux sicles d'argent.
§ 224. Si le médecin des bœufs ou des ânes a traité d'une plaie grave un bœuf ou un âne, et l'a guéri, le maître du bœuf ou de l'âne donnera au médecin, pour son salaire, un sixième (de sicle?) d'argent.
§ 225. S'il a traité un bœuf ou un âne d'une plaie grave et causé sa mort, il donnera le quart de son prix au maître du bœuf ou de l'âne.
§ 226. Si un chirurgien, à l’insu du maître de l'esclave, a imprimé une marque d'esclave inaliénable, on coupera les mains à ce chirurgien.
§ 227. Si un homme a trompé un chirurgien, et si celui-ci a imprimé une marque d'esclave inaliénable, on tuera l'autre et on l’enterrera dans sa maison; le chirurgien jurera : «je ne l’ai pas marqué sciemment », et il sera quitte.
§ 228. Si un architecte a construit une maison pour un autre, et l’a menée à bonne fin, il lui donnera pour son cadeau deux sicles d'argent, par sar de superficie.
§ 229. Si un architecte a construit pour un autre une maison, et n'a pas rendu solide son œuvre, si la maison construite s'est écroulée, et a tué le maître de la maison, cet architecte est passible de mort.
§ 230. Si c'est l'enfant du maître de la maison qu'il a tué, on tuera l'enfant de cet architecte.
§ 231. Si c'est l'esclave du maître de la maison qu'il a tué, il donnera esclave pour esclave au maître de la maison.
§ 232. Si c'est la fortune mobilière qu'il a détruite, il restituera tout ce qu'il a détruit, et parce qu'il n'a rendu solide la construction, et qu'elle s'est effondrée, il restaurera la maison ruinée, à ses propres frais.
§ 233. Si un architecte a construit une maison pour quelqu'un, et n'a pas solidement basé son œuvre, si un mur tombe, cet architecte affermira ce mur, à ses propres frais.
§ 234. Si un batelier a calfaté un vaisseau de 60 gour pour quelqu'un, il lui donnera deux sicles d'argent pour sa récompense.
§ 235. Si un batelier a calfaté pour quelqu'un un vaisseau, et n'a pas rendu solide son travail, si cette même année il met en route ce vaisseau, et s'il éprouve une avarie, le batelier changera le vaisseau, le réparera à ses propres frais, et rendra le vaisseau réparé au maître du vaisseau.
§ 236. Si un homme a donné en location son vaisseau à un batelier, et si le batelier conduit mal, et si le vaisseau coule, et s'il le perd, le batelier restituera un vaisseau au maître du vaisseau.
§ 237. Si un homme a pris en location un batelier, et un vaisseau et l’a frété de blé, laine, huile, datte ou toute autre denrée de fret, si ce batelier a conduit mal, et a fait sombrer le vaisseau, a perdu ce qui s'y trouvait, il restituera le vaisseau qu'il a fait sombrer, et tout le contenu qu'il a perdu.
§ 238. Si un batelier a coulé le vaisseau de quelqu'un et l’a renfloué, il payera la moitié de son prix en argent.
§ 239. Si un homme a loué un batelier, il lui donnera par an, 6 gour de blé.
§ 240. Si un bateau de course a abordé un bac de passeur, et l'a coulé, le maître du bateau coulé poursuivra devant Dieu tout ce qu'il a perdu sur le bateau, et celui du bateau de course qui a coulé le bac, restituera le bateau et tout ce qui y a péri.
§ 241. Si un homme a contraint le bœuf (d'un autre) au travail forcé, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 242. Si un homme (le) prend à bail pour un an; prix de location du bœuf de labour : quatre gour de blé ;
§ 243. prix de location du bœuf de somme (?) : il donnera trois gour de blé au propriétaire.
§ 244. Si un homme a loué un bœuf ou un âne, et si dans les champs, un lion l’a tué, c'est pour son maître (qu'il est tué).
§ 245. Si un homme a loué un bœuf, et si par de mauvais soins ou par des coups, il l’a fait mourir, il rendra bœuf pour bœuf au maître du bœuf.
§ 246. Si un homme a loué un bœuf, a brisé son pied, ou bien a coupé sa nuque, il rendra bœuf pour bœuf au maître du bœuf.
§ 247. Si un homme a loué un bœuf et a crevé son œil, il donnera au maître du bœuf, la moitié de sa valeur en argent.
§ 248. Si un homme a loué un bœuf, a brisé sa corne, coupé sa queue, ou a tranché le dessus du museau, il donnera le quart de sa valeur en argent.
§ 249. Si un homme a loué un bœuf, et si Dieu (un accident) l’a frappé et s'il est mort, celui qui l'a pris en location en jurera par le nom de Dieu, et il sera quitte.
§ 250. Si un bœuf furieux dans sa course a poussé (des cornes) un homme et l’a tué, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 251. Si le bœuf d'un homme, a frappé (souvent) de la corne, lui a fait connaître son vice et s'il n’a pas rogné ses cornes ni entravé son bœuf, si ce bœuf a poussé de la corne un fils d'homme libre et Fa tué, il payera une demi-mine d'argent.
§ 252. Si c'est un esclave d'homme libre, il donnera un tiers de mine d'argent.
§ 253. Si un homme a loué un autre pour demeurer sur son champ et lui a, lui a confié les bœufs et l’a engagé pour labourer le champ; si cet homme a volé du grain ou des plants, et si cela est pris entre ses mains, on lui coupera les mains.
§ 254. S'il a pris le..., a épuisé les bœufs, il restituera la quantité de blé qu'il a ensemencé.
§ 255. S'il a donné en location le bœuf d'autrui, et a volé de la graine, et n'a pas fait produire le champ, on fera comparaître cet homme, et par 100 gan (?) il mesurera 60 gour de blé.
§ 256. Si son district (?) ne veut pas faire la restitution, on le laissera sur le champ, parmi le bétail.
§ 257. Si un homme a loué un travailleur des champs (?), il lui donnera par an 8 gour de blé.
§ 258. Si un homme a loué un bouvier, il lui donnera 6 gour de blé par an.
§ 259. Si un homme a volé une roue d'arrosage dans les champs, il donnera cinq sicles d’argent au maître de la machine.
§ 260. S'il a volé une chadouf,[6] ou une charrue, il donnera trois sicles d'argent.
§ 261. Si un homme a loué un pâtre pour bœufs et moutons, il lui donnera, par an, 8 gour de blé.
§ 262. Si un homme… a un bœuf ou mouton, pour…….
§ 263. S'il a perdu bœuf ou mouton qui lui sont confiés il rendra à leur propriétaire bœuf pour bœuf, mouton pour mouton.
§ 264. Si le pâtre à qui ont été confiés bœufs et moutons à paître, a reçu tout son salaire convenu, et si son cœur est content, s'il a fait diminuer les bœufs et s'il a fait décroître le nombre des moutons, et restreint la reproduction, il livrera petits et revenus, selon les conventions.
§ 265. Si le pâtre à qui ont été confiés bœufs et moutons, à paître, a prévariqué, a falsifié l’état (du troupeau) et a vendu, on le citera en justice et il restituera au propriétaire dix fois ce qu'il a volé de bœufs et moutons.
§ 266. S’il s’est produit un dégât dans l’étable, par un accident, ou si le lion a tué, le berger se disculpera devant Dieu, et le maître de l'étable supportera la ruine de l'étable.
§ 267. Si le pâtre est en faute, et si dans l’étable il a causé une brèche, le pâtre remettra en bon état et rendra à leur propriétaire le trou de la brèche (réparé), bœufs et moutons.
§ 268. Si un homme a loué un bœuf pour fouler, son prix de location est de 20 qa de blé.
§ 269. S'il a loué un âne pour fouler, son prix de location est de 10 qa de blé.
§ 270. S'il a loué un ânon ou bouvillon, son prix de location est de 1 qa de blé.
§ 271. Si un homme a loué des bœufs, le chariot et le conducteur, il donnera, par jour, 180 qa de blé.
§ 272. Si un homme a loué le chariot seul, il donnera, par jour, 40 qa de blé.
§ 273. Si un homme a loué un journalier, il donnera par jour six chè d'argent depuis le commencement de l’année jusqu'au cinquième mois; depuis le sixième mois jusqu'à la fin de l’année, il donnera cinq chè d'argent par jour.
§ 274. Si quelqu'un a loué un artisan :
le salaire du … est de cinq chè d'argent,
le salaire du briquetier (?) est de cinq chè d'argent,
le salaire du tailleur d'habits (?) est de cinq chè d'argent,
le salaire du tailleur de pierres (?) est de … d'argent,
le salaire du … est de … d'argent,
le salaire du … est de … d'argent,
le salaire du charpentier est de quatre chè d'argent,
le salaire du … est de quatre chè d'argent,
le salaire du … est de … chè d'argent,
le salaire du maçon est de … d'argent,
par jour il donnera.
§ 275. Si un homme a loué (un bac), son prix de location est de trois chè d'argent par jour.
§ 276. Si c'est un bateau de course, il donnera par jour, deux chè et demi d'argent, pour la location.
§ 277. Si un homme a loué un bateau de 60 gour, il donnera, pour la location, un sixième de sicle par jour.
§ 278. Si un homme a acheté un esclave mâle ou femelle, et si avant d'achever un mois, une infirmité (paralysie) l'afflige, il le rendra à son vendeur, et l’acheteur reprendra l'argent qu'il a payé.
§ 279. Si un homme a acheté un esclave mâle ou femelle, et s'il y a réclamation, son vendeur fera droit à la réclamation.
§ 280. Si un homme a acheté en pays étranger l'esclave mâle ou femelle de quelqu'un, s'il vient dans le pays (propre), et si le maître de l’esclave mâle ou femelle reconnaît son esclave mâle ou femelle, si ces esclaves mâle ou femelle sont des indigènes, sans argent il leur accordera l'élargissement.
§ 281. S'ils sont étrangers, l'acheteur jurera devant Dieu qu'il les a payés, le maître de l'esclave mâle ou femelle rendra au négociant l'argent qu'il a versé, et recouvrera son esclave mâle ou femelle.
§ 282. Si un esclave dit à son maître : tu n'es pas mon maître, il le convaincra en justice comme étant son esclave, et son maître lui coupera l'oreille.
Décrets d'équité, que Hammourabi, le roi puissant, a statués !
http://remacle.org/bloodwolf/erudits/amourabi/code.htm
Code de Hammourabi roi de Babylone - 1760 av. J.C.
LA LOI DE HAMMOURABI
ROI DE BABYLONE (VERS 2000 AVANT J.-C.)
(traduction littérale)
ROI DE BABYLONE (VERS 2000 AVANT J.-C.)
(traduction littérale)
§ 1. Si un homme a incriminé un autre homme, et a jeté sur lui un maléfice, et ne l’a pas convaincu de tort, celui qui l’a incriminé est passible de mort.
§ 2. Si un homme a jeté un sort sur un autre homme, et ne l’a pas convaincu de tort, celui sur qui a été jeté le sort ira au fleuve, et se plongera dans le fleuve ; si le fleuve s'empare de lui, celui qui l’a incriminé prendra sa maison; si le fleuve l’innocente et le garde sauf, celui qui a jeté le sort sur lui est passible de mort; celui qui s'est plongé dans le fleuve prendra la maison de celui qui l'avait incriminé.
§ 3. Si un homme, dans un procès, s'est levé pour un témoignage à charge, et s'il n'a pas justifié le propos qu'il a tenu, si cette cause est une cause de vie (ou de mort), cet homme est passible de mort.
§ 4. S'il s’est levé pour un (tel) témoignage (en matière de) blé ou d'argent, il portera la peine de ce procès.
§ 5. Si un juge a rendu une sentence, formulé une décision, libellé une tablette, si ensuite il a annulé cette sentence, on fera comparaître ce juge pour l'annulation de la sentence qu'il avait rendue, et la revendication de ce procès, il l'acquittera douze fois, et publiquement on l'expulsera de son siège de justice, il n'y retournera plus, et ne siégera plus avec des juges dans un procès.
§ 6. Si un homme a volé le trésor[1] du dieu ou du palais, cet homme est passible de mort, et celui qui aurait reçu de sa main l'objet volé est passible de mort.
§ 7. Si un homme a acheté ou reçu en dépôt, sans témoins ni contrat, de l’or, de l’argent, esclave mâle ou femelle, bœuf ou mouton, âne ou quoi que ce soit, des mains d'un fils d'autrui ou d'un esclave d'autrui, cet homme est assimilable à un voleur et passible de mort.
§ 8. Si un homme a volé un bœuf, mouton, âne, porc ou une barque, si c’est au dieu ou au palais, il rendra au trentuple; si c'est à un mouchkînou. Il compensera au décuple. Si le voleur n'a pas de quoi rendre, il est passible de mort.
§ 9. Si un homme ayant perdu un objet le retrouve entre les mains d'un autre, si celui chez qui l'objet perdu est trouvé dit : Un vendeur me l’a vendu et je l'ai acheté devant témoins; et si le maître de l’objet perdu dit : J'amènerai des témoins qui reconnaîtront mon objet perdu, — l'acheteur amènera le vendeur qui lui a transmis l'objet, et les témoins en présence de qui il a acheté; — le propriétaire de l'objet perdu amènera les témoins connaissant son objet perdu; le juge examinera leurs dires. Les témoins devant qui l'achat a été fait, les témoins connaissant l'objet perdu diront devant Dieu ce qu'ils savent. Le vendeur sera assimilé à un voleur et passible de mort. Le propriétaire de l'objet perdu reprendra son objet perdu; l'acheteur reprendra l'argent qu'il avait payé, sur la maison du vendeur.
§ 10. Si l'acheteur n'a pas amené le vendeur qui lui a livré, et les témoins devant qui il a acheté, alors que le propriétaire de l'objet perdu a amené les témoins connaissant son objet perdu, l'acheteur est assimilé au voleur et passible de mort. Le propriétaire de l'objet perdu reprendra son objet perdu.
§ 11. Si c'est le propriétaire (prétendu) de l'objet perdu qui n'a pas amené les témoins connaissant son objet perdu, il est de mauvaise foi, a suscité la calomnie et est passible de mort.
§ 12. Si le vendeur est mort, l'acheteur prendra au quintuple sur la maison du vendeur, ce qu'il a le droit de réclamer dans ce procès.
§ 13. Si les témoins de cet homme ne sont pas à proximité, le juge fixera un délai jusqu'au sixième mois. Si pour le sixième mois, il n'a pas amené ses témoins, cet homme est de mauvaise foi, et portera la peine de ce procès.
§ 14. Si un homme s'est emparé par vol du fils d'un homme, en bas âge, il est passible de mort.
§ 15. Si un homme a fait sortir des portes un esclave ou une esclave du palais, un esclave ou une esclave d'un mouchkînou,[2] il est passible de mort.
§ 16. Si un homme a abrité chez lui un esclave ou une esclave en fuite du palais ou de chez un mouchkînou, et si, sur la voix du majordome, il ne le fait pas sortir, le maître de maison est passible de mort.
§ 17. Si un homme s'est emparé dans les champs d'un esclave ou d'une esclave en fuite, et l'a ramené à son maître, celui-ci lui donnera deux sicles d'argent.
§ 18. Si cet esclave refuse de nommer son maître, il devra l'amener au palais, son secret (y) sera pénétré, et à son maître on le rendra.
§ 19. S'il a gardé cet esclave dans sa maison, et si par la suite, l'esclave est surpris chez lui, cet homme est passible de mort.
§ 20. Si l’esclave périt chez celui qui l’a attrapé, cet homme en jurera par le nom de Dieu au propriétaire de l’esclave, et il sera quitte.
§ 21. Si un homme a perforé une maison, on le tuera et enterrera en face de cette brèche.
§ 22. Si un homme a exercé le brigandage, et a été pris, cet homme est passible de mort.
§ 23. Si le brigand n'a pas été pris, l’homme dépouillé poursuivra devant Dieu ce qu'il a perdu, et la ville et le cheikh sur le territoire et les limites desquels le brigandage fut commis, lui restitueront tout ce qu'il a perdu.
§ 24. S'il s'agit de personnes, la ville et le cheikh payeront une mine d'argent pour ses gens.
§ 25. Si le feu a éclaté dans la maison d'un homme et si quelqu'un y est allé pour éteindre, et si, levant les yeux sur le bien du maître de la maison, il a pris le bien du maître de la maison, celui-là sera jeté dans le même feu.
§ 26. Si un officier ou un homme d'armes ayant reçu ordre de marcher dans une expédition royale, n'a pas marché, lors même qu'il aurait engagé un mercenaire et que son remplaçant y serait allé, cet officier ou cet homme d’armes est passible de mort, son remplaçant prendra sa maison.
§ 27, Si d'un officier ou homme d'armes qui est rappelé dans les forteresses royales, on a donné, après lui, ses champ et jardin à un autre qui en exerce la gestion, — lorsqu’il reviendra et aura regagné sa ville, on lui rendra ses champ et jardin, et lui-même en exercera la gestion.
§ 28. Si d'un officier ou homme d'armes qui est rappelé dans les forteresses royales, un fils peut exercer la gestion, on donnera à celui-ci champ et jardin, et il exercera la gestion pour son père,
§ 29. Si son fils est en bas âge, et s'il ne peut gérer pour son père, il sera donné un tiers des champ et jardin à sa mère, et sa mère l’élèvera.
§ 30. Si l’officier ou l’homme d'armes, dès l'origine de sa gestion^ a négligé et abandonné ses champ, jardin et maison^ et si un autre, après lui, a soigné ses champ, jardin et maison, et durant trois ans a exercé sa gestion, lorsqu'il reviendra et demandera ses champ, jardin, maison, l’autre ne les lui cédera pas; celui qui les a soignés et a exercé sa gestion, celui-là continuera à exploiter.
§ 31. Si, pendant un an seulement, il a laissé inexploité, et s'il revient, l'autre lui rendra ses champ, verger, maison, et lui-même reprendra la gestion.
§ 32. Si un officier ou homme d'armes ayant été rappelé. au service, dans une entreprise du roi, un négociant a payé sa rançon et lui a fait regagner sa ville ; s'il a dans sa maison de quoi fournir la rançon, il se libérera lui-même (près du négociant); si chez lui il n'y a pas de quoi se libérer, il sera libéré dans le temple de sa ville ; et si dans le temple de sa ville il n'y a pas de quoi le libérer, le palais le libérera ; ni son champ, ni son jardin, ni sa maison ne peuvent être cédés pour sa rançon.
§ 33. Si, soit un gouverneur, soit un préfet a possédé des troupes... (?) et si dans le service du roi il a accepté et envoyé un mercenaire substitué, ce gouverneur ou ce préfet est passible de mort.
§ 34. Si, soit un gouverneur, soit un préfet, s'est emparé du bien d’un officier, a causé du dommage à un officier, a prêté en location un officier, a livré au tribunal un officier entre les mains d'un (plus) puissant, a ravi le cadeau que le roi a donné à l’officier, ce gouverneur et ce préfet sont passibles de mort.
§ 35. Si un homme a acheté dés mains de l'officier bœufs ou moutons que le roi a donnés à l’officier, il est frustré de son argent.
§ 36. Champ, jardin, maison d’un officier, homme d'armes, ou fieffé à tribut, ne peuvent être vendus.
§ 37. Si un homme a acheté champ, jardin, maison d'un officier, homme d'armes ou fieffé à tribut, sa tablette sera brisée, et il sera frustré de son argent; champ, jardin, maison retournera à son propriétaire.
§ 38. Officier, homme d'armes et fieffé à tribut ne peut rien transmettre par écrit à sa femme ou à sa fille, des champ, jardin, maison de sa gestion, ni donner contre une dette.
§ 39. D'un champ, jardin, maison qu'il a acheté et qu'il possède (en propre), il peut transmettre par écrit, à sa femme, à sa fille, et donner contre une dette.
§ 40. Pour (la garantie d’)un négociant ou une obligation étrangère, il peut vendre ses (propres) champ, jardin, maison ; l'acheteur peut exploiter les champ, jardin, maison qu'il a achetés.
§ 41. Si un homme a enclos les champ, jardin, maison d'un officier, homme d'armes ou fieffé à tribut, et a fourni les piquets, l’officier, homme d'armes, fieffé à tribut rentreront dans leur champ, jardin, maison, et payeront (?) les piquets à eux fournis.
§ 42. Si un homme a pris à ferme un champ pour le cultiver, et si dans ce champ, il n'a pas fait pousser de blé, on le convaincra de n'avoir pas travaillé la champ, et il donnera au propriétaire du champ, selon le rendement du voisin.
§ 43. S'il n'a pas cultivé le champ et l’a laissé en friche, il donnera du blé au propriétaire selon le rendement du voisin, et le champ qu’il a laissé en friche, il le rompra en terre cultivée, l'ensemencera et le rendra au propriétaire.
§ 44. Si un homme a pris à ferme pour trois ans une terre inculte pour l'ouvrir, s'il s'est reposé et n'a pas ouvert la terre ; — la quatrième année il devra la rompre en champ labouré, louer et ensemencer et rendre au propriétaire, et lui mesurer 10 gour de blé par 10 gan de superficie.
§ 45. Si un homme a affermé son champ à un laboureur pour un revenu, et s'il a déjà reçu ce revenu, quand ensuite un orage inonde le champ et emporte la moisson, le dommage est pour le laboureur.
§ 46. S'il n'a pas reçu le revenu de son champ, et s'il avait affermé pour moitié ou tiers, propriétaire et laboureur partageront proportionnellement le blé qui se trouvera dans le champ.
§ 47. Si le laboureur, parce que dans la première année sa ferme n'est pas encore montée, a chargé un autre de labourer le champ, le propriétaire ne molestera pas (pour cela) son laboureur ; son champ a été labouré, et, lors de la moisson, il prendra du blé, selon ses conventions.
§ 48. Si un homme a été tenu par une obligation productive d'intérêt, et si Forage a inondé son champ et emporté la moisson, ou si faute d'eau, le blé n'a pas poussé dans le champ — dans cette année, il ne rendra pas de blé au créancier, trempera dans l'eau sa tablette, et ne donnera pas l'intérêt de cette année.
§ 49. Si un homme a emprunté de l'argent d'un négociant, et a donné au négociant un champ cultivable en blé ou sésame en disant : cultive le champ, récolte et prends blé ou sésame qui s'y trouveront! quand le cultivateur aura fait venir blé ou sésame dans le champ, lors de la moisson, le propriétaire du champ prendra blé ou sésame qui s'y trouveront, et donnera au négociant du blé pour l'argent avec les intérêts qu'il a pris du négociant, et la ferme de culture.
§ 50. S'il s'agit d'un champ de blé cultivé ou d'un champ de sésame cultivé qu'il a donné au négociant, le maître du champ prendra le blé ou sésame qui se trouve dans le champ, et rendra argent avec intérêts au négociant.
§ 51. S'il n'a pas d'argent pour restituer, il donnera au négociant du sésame, selon le tarif du roi, pour la valeur de son argent avec intérêts, emprunté au négociant.
§ 52. Si le cultivateur n'a pas fait venir dans le champ blé ou sésame, il (l'emprunteur) n'annule pas (pour cela) ses obligations.
§ 53. Si un homme, négligeant à fortifier sa digue, n'a pas fortifié sa digue, et si une brèche s'est produite dans sa digue, et si le canton a été inondé d'eau, l'homme sur la digue de qui une brèche s'est ouverte, restituera le blé qu'il a détruit.
§ 54. S'il ne peul restituer du blé, on vendra sa personne et son avoir pour de l'argent, et les gens des cantons dont l’eau a emporté le blé se partageront.
§ 55. Si un homme a ouvert sa rigole pour irriguer, puis a été négligent, si le champ limitrophe est inondé d'eau, il mesurera du blé selon le rendement du voisin.
§ 56. Si un homme a ouvert la voie d'eau, et si la plantation du champ voisin est inondée, il mesurera 10 gour de blé, par 10 gan de superficie.
§ 57. Si un berger ne s'est pas entendu avec le propriétaire d'un champ, pour y faire paître l'herbe à ses moutons, et à l’insu du propriétaire a fait paitre le champ à ses moutons, le propriétaire fera la moisson de ses champs, et le berger qui à l'insu du propriétaire a fait paître le champ à ses moutons, donnera en surplus au propriétaire, 20 gour de blé par 10 gan de superficie.
§ 58. Si après que les moutons sont sortis du canton, et que le bétail en entier s'est remisé sous les portes, un berger a conduit ses moutons sur un champ, et a fait paître le champ à ses moutons, le berger gardera le champ qu'il a fourragé, et lors de la moisson, il mesurera au propriétaire 60 gour de blé par 10 gan.
§ 59. Si un homme, à l'insu du maître d'un verger, a coupé un arbre dans le jardin d'un autre, il payera une demi-mine d'argent.
§ 60. Si un homme a donné à un jardinier un champ pour être aménagé en verger, si le jardinier plante le verger, et le soigne pendant quatre ans — la cinquième année, propriétaire du verger et jardinier partageront à parts égales ; le maître du verger déterminera la part qu'il prendra.
§ 61. Si un jardinier, dans la plantation d'un champ ou verger, n’a pas tout planté, mais a laissé une partie inculte, on la lui mettra dans sa portion.
§ 62. S'il n'a pas planté en verger le champ qui lui avait été confié (pour cela), et s'il s'agit d'un champ à céréales, le jardinier mesurera au propriétaire du champ, selon le rendement du voisin, le rapport du champ pour les années où il a été négligé ; puis il façonnera le champ à travailler, et le restituera au propriétaire.
§ 63. S'il s'agit d'une terre inculte, il façonnera le champ à travailler, et le rendra au propriétaire. Pour chaque année, il mesurera 10 gour de blé pour 10 gan de superficie.
§ 64. Si un homme a donné son verger à exploiter à un jardinier, pendant que celui-ci soigne le verger, il donnera au propriétaire deux tiers du rapport du verger, et prendra lui-même un tiers.
§ 65. Si le jardinier n'a pas exploité le verger, et a causé une diminution de rapport, le jardinier mesurera au propriétaire, selon le rendement du voisin.
§ a. Si un homme a emprunté de l'argent d'un négociant, et a donné au négociant son jardin de dattiers en disant : prends pour ton argent, les dattes qui se trouvent dans mon jardin! si ce négociant n'est pas consentant, le propriétaire du jardin prendra les dattes qui se trouvent dans le verger, et, selon la teneur de sa tablette, payera au négociant argent et intérêts. Le surplus des dattes qui se trouvent dans le jardin, le propriétaire les prendra.
§ b. ... Si un locataire de maison a payé au propriétaire l’argent du loyer complet de l’année, et si le propriétaire avant la fin du terme ordonne de sortir au locataire, parce que le locataire est sorti de la maison, avant que les jours du bail fussent terminés, le propriétaire lui rendra … sur l'argent que le locataire lui avait donné.
§ c. Si un homme s'est engagé à payer en blé ou en argent, et si pour s'acquitter, il n'a ni blé ni argent, mais d'autre bien, il donnera devant témoins au négociant quoi qu'il possède, selon ce qu'il doit fournir, et le négociant ne chicanera pas, mais acceptera.
§ 100. ... Le commis marquera les intérêts de l'argent autant qu'il en a emporté, et il comptera ses jours, et payera le négociant.
§ 101. Si là où il est allé, il n'a pas trouvé de profit, il doublera l'argent qu'il a pris, et le commis le rendra au négociant.
§ 102. Si un négociant a donné de l'argent à un commis à titre gracieux, et si celui-ci, dans l’endroit où il est allé, a éprouvé du détriment, il rendra le capital de l'argent au négociant.
§ 103. Si en route, pendant son excursion, l'ennemi lui a fait perdre ce qu'il portait, le commis en jurera par le nom de Dieu, et il sera quitte.
§ 104. Si un négociant a confié à un commis blé, laine, huile, ou tout autre denrée, pour le trafic, le commis inscrira l’argent et le rendra au négociant. Le commis prendra un signé (ou reconnaissance) de l'argent qu'il a donné au négociant.
§ 105. Si le commis a fait erreur et n'a pas pris un signé {ou reconnaissance) de l'argent qu'il a donné au négociant, l'argent non signé (sans reconnaissance) ne peut être porté à l'actif.
§ 106. Si un commis, ayant pris de l'argent d'un négociant, conteste avec le négociant, celui-ci fera comparaître le commis devant Dieu et témoins, pour l'argent qu'il a pris, et le commis payera au triple tout l'argent qu'il en a pris.
§ 107. Si le négociant a fait tort au commis, si celui-ci avait rendu à son négociant ce que le négociant lui avait donné, si le négociant donc conteste au sujet de ce que le commis lui a donné, ce commis fera comparaître le négociant devant Dieu et témoins, et pour avoir contesté avec son commis, il donnera au commis, au sextuple, tout ce qu'il avait pris.
§ 108. Si une marchande de vin n'a pas accepté du blé comme prix de boisson, mais a reçu de l'argent à gros poids, et a baissé le prix de la boisson au-dessous du prix du blé, on fera comparaître cette marchande de vin, et on la jettera dans l’eau.
§ 109. Si une marchande de vin, quand des rebelles se réunissent dans sa maison, n'a pas saisi et conduit au palais ces rebelles, cette marchande de vin est passible de mort.
§ 110. Si une prêtresse qui ne demeure pas dans le cloître a ouvert une taverne, ou est entrée dans la taverne pour boire, on brûlera cette femme.
§ 111. Si une marchande de vin a donné 60 qa de boisson ousakani, pour la canicule (?), elle prendra, lors de la moisson, 50 qa de blé.
§ 112. Si un homme se trouve en voyage et a remis à un autre argent, or, pierre, ou autres objets de main pour les lui faire transporter; si celui-ci n'a pas livré au lieu où il doit transporter ce qu'il doit y transporter, mais l’a emporté (pour lui) — le propriétaire de l’objet à transporter fera comparaître cet individu, pour n'avoir pas livré ce qu'il avait à transporter, et cet individu donnera, au quintuple, au maître de l'envoi tout ce qui lui avait été confié.
§ 113. Si un homme a une créance de blé ou d'argent sur un autre, et si à l'insu du maître du blé, dans le grenier ou dans le dépôt il a pris du blé, on fera comparaître cet homme pour avoir pris du blé, à l’insu du maître du blé, dans le grenier ou dans le dépôt; il rendra tout le blé qu'il a pris, et de quoi que ce soit de tout ce qu'il avait prêté, il est frustré.
§ 114. Si un homme n'a pas eu une créance de blé ou d'argent sur un autre, et néanmoins a exercé contrainte contre lui, pour chaque contrainte, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 115. Si un homme a eu une créance de blé ou d'argent sur un autre, et a exercé contrainte contre lui, si le contraint meurt de mort naturelle dans la maison du contraignant, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 116. Si dans la maison de son contraignant, le contraint meurt par suite de coups ou de misère, le maître du contraint fera comparaître son négociant, et si le mort était fils d'homme libre, on tuera son fils, et si le mort était esclave d'homme libre, il payera un tiers de mine d'argent, et de quoi que ce soit de tout ce qu'il avait prêté, il est frustré,
§ 117. Si une dette a contracté (sic !) un homme, et s'il a donné pour de l'argent ses femmes, fils, fille et les a livrés à la sujétion, durant trois ans ils serviront dans la maison de leur acheteur et coacteur, dans la quatrième année, il les remettra en liberté.
§ 118. S'il a livré à la sujétion un esclave ou une esclave, et si le négociant les fait passer ailleurs en les vendant, il n'y a pas de réclamation possible.
§ 119. Si une dette a contracté {sic!) un homme, et s'il a vendu une de ses esclaves qui lui a donné des enfants, le maître de l'esclave payera au négociant l'argent que celui-ci a payé, et il rachètera son esclave.
§ 120. Si un homme a versé, pour emmagasinement, son blé dans la maison d'un autre, et si dans le grenier, un déchet s'est produit, soit que le maître de la maison ait ouvert le magasin et ait pris du blé, ou soit qu'il conteste sur la quantité totale du blé qui a été versée chez lui, le propriétaire du blé poursuivra son blé devant Dieu, et le maître de la maison qui a pris du blé le doublera et le rendra au propriétaire du blé.
§ 121. Si un homme a versé du blé dans la maison d'un autre, il donnera par an, comme loyer de magasin, 5 qa de blé par gour.
§ 122. Si un homme donne en dépôt à un autre, de l'argent, or, ou tout autre chose, il fera connaître à des témoins ce qu'il donne, il statuera les obligations et donnera en dépôt.
§ 123. Si, sans témoins ni obligations (statuées), il a donné en dépôt, et si là où il a donné on lui conteste, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 124. Si un homme a donné en dépôt devant témoins, à un autre, argent, or, ou toute autre chose, et si celui-ci lui conteste, on fera comparaître cet individu, et il doublera et donnera tout ce qu'il a contesté.
§ 125. Si un homme a donné une chose en dépôt, et si là où il a donné, soit par effraction soit par escalade, sa chose avec celle du maître de la maison a disparu, le maître de la maison, qui est en faute remplacera tout ce qu'en dépôt on lui avait remis et qu'il a perdu, et dédommagera intégralement le maître des biens. Le maître de la maison recherchera son avoir perdu, et le reprendra sur son voleur.
§ 126. Si un homme dont la chose n'est pas perdue prétend qu'elle est perdue, exagère son détriment; s’il poursuit devant Dieu (la réparation de) son détriment, bien que sa chose ne soit pas perdue, — lui-même (le réclamant sans droit), tout ce qu'il a réclamé doublera, et à son propre détriment donnera.[3]
§ 127. Si un homme a fait lever le doigt contre une prêtresse ou la femme d'un autre, sans la convaincre de tort, on jettera cet homme devant le juge, et on marquera son front.
§ 128. Si un homme a épousé une femme et n'a pas fixé les obligations de cette femme, cette femme n'est pas épouse.
§ 129. Si la femme d'un homme a été prise au lit avec un autre mâle, on les liera et jettera dans l’eau, à moins que le mari ne laisse vivre sa femme, et que le roi ne laisse vivre son serviteur.
§ 130. Si un homme a violenté la femme d'un homme qui n'a pas encore connu le mâle et demeure encore dans la maison paternelle, s'il a dormi dans son sein, et si on le surprend, cet homme est passible de mort, et cette femme sera relâchée.
§ 131. Si le mari d'une femme l’a incriminée, et si elle n'a pas été surprise dans la couche avec un autre mâle, elle jurera par le nom de Dieu, et elle retournera à sa maison.
§ 132. Si à propos d'un autre mâle, le doigt s'est levé contre la femme d'un homme, et si elle n'a pas été surprise avec un autre mâle dans la couche, à cause de son mari, elle se plongera dans le fleuve.
§ 133. Si un homme a été fait captif, et s'il y a de quoi manger dans sa maison, et si sa femme est sortie de la maison de son époux, est entrée dans une autre maison; parce que cette femme n'a pas gardé son corps, et est entrée dans une autre maison, on la fera comparaître, et on la jettera dans l’eau.
§ 134. Si un homme a été fait captif, et s'il n’y a pas de quoi manger dans sa maison, et si sa femme est entrée dans une autre maison, cette femme est sans faute.
§ 135. Si un homme a été fait captif, et s'il n'y a pas dans sa maison de quoi manger, à sa disposition, si sa femme est entrée dans une autre maison, y a enfanté des enfants, et si ensuite son mari est revenu et a regagné sa ville, cette femme retournera avec son époux, les fils suivront leur père (respectif).
§ 136. Si un homme a abandonné sa ville, s'est enfui, et si, après lui, sa femme est entrée dans une autre maison, si cet homme revient et veut reprendre sa femme, parce qu'il a dédaigné sa ville et s'est enfui, la femme du fugitif ne retournera pas avec son mari.
§ 137. Si un homme s'est disposé à répudier une concubine qui lui a procréé des enfants ou bien une épouse qui lui a procréé des enfants, il rendra à cette femme sa cheriqtou,[4] et on lui donnera l’usufruit des champ, verger et autre bien, et elle élèvera ses enfants. Après qu'elle aura élevé ses enfants, on lui donnera une part d'enfant de tout ce qui sera donné aux enfants, et elle épousera l'époux de son choix.
§ 138. Si un homme veut répudier son épouse qui ne lui a pas donné d'enfants, il lui donnera (tout l'argent) de sa tirhatou, et lui restituera intégralement la cheriqtou qu'elle a apportée de chez son père, et il la répudiera.
§ 139. S'il n'y a pas de tirhatou, il lui donnera une mine d'argent pour la répudiation.
§ 140. Si c'est un mouchkînou, il lui donnera un tiers de mine d'argent.
§ 141. Si l'épouse d'un homme qui demeure chez cet homme, était disposée à sortir, a provoqué la division, a dilapidé sa maison, négligé son mari, on la fera comparaître et si son mari dit: Je la répudie, il la laissera aller son chemin, et ne lui donnera aucun prix de répudiation. Si son mari dit : Je ne la répudie pas, son mari peut épouser une autre femme, et cette première femme demeurera dans la maison de son mari, comme esclave.
§ 142. Si une femme a dédaigné son mari et lui a dit : Tu ne me posséderas pas, son secret sur le tort qu'elle subit sera examiné, et si elle est ménagère, sans reproche, et si son mari sort et la néglige beaucoup, cette femme est sans faute; elle peut prendre sa cheriqtou et s'en aller dans la maison de son père.
§ 143. Si elle n'est pas ménagère, mais coureuse, si elle dilapide la maison, néglige son mari, on jettera cette femme dans l'eau.
§ 144. Si un homme a épousé une femme, et si cette femme a donné à son mari une esclave qui a procréé des enfants, si cet homme se dispose à prendre une concubine, on n'(y) autorisera pas cet homme, et il ne prendra pas une concubine.
§ 145. Si un homme a pris une épouse et si elle ne lui a pas donné d'enfants, et s'il se dispose à prendre une concubine, il peut prendre une concubine, et l'introduire dans sa maison. Il ne rendra pas cette concubine l'égale de l’épouse.
§ 146. Si un homme a pris une épouse, et si celle-ci a donné à son mari une esclave qui lui procrée des enfants; si ensuite cette esclave rivalise avec sa maîtresse, parce qu'elle a donné des enfants, sa maîtresse ne peut plus la vendre; elle lui fera une marque et la comptera parmi les esclaves.
§ 147. Si elle n’a pas enfanté d'enfants, sa maîtresse peut la vendre.
§ 148. Si un homme a pris une épouse et si une maladie (?) l'a contractée, et s'il se dispose à en prendre une autre, il peut la prendre, mais il ne répudiera pas son épouse que la maladie (?) a contractée; elle demeurera à domicile, et aussi longtemps qu'elle vivra, il la sustentera.
§ 149. S'il ne plaît pas à cette femme de résider dans la maison de son mari, il lui restituera intégralement la cheriqtou qu'elle a apportée de chez son père, et elle s'en ira.
§ 150. Si un homme a donné en noudounnou à son épouse champ, verger, maison, et lui a laissé une tablette; après la mort de son mari, ses enfants ne lui contesteront rien ; la mère après sa mort le donnera à l'un des enfants qu'elle préfère, mais elle ne le donnera pas à un frère.
§ 151. Si une femme qui demeure dans la maison d'un homme, s'est fait promettre par son mari qu'elle ne serait pas saisie par ses créanciers, et s'est fait délivrer une tablette, si cet homme, dès avant d'épouser cette femme, est chargé de dettes, le créancier de la dette ne saisira pas son épouse ; et si cette femme, dès avant d'entrer chez cet homme, est chargée de dettes, le créancier de la dette ne saisira pas son mari.
§ 152. Si, depuis que cette femme est entrée dans la maison de l'homme, une dette les obère, ils payeront le négociant tous deux.
§ 153. Si l'épouse d'un homme, en vue d'un autre mâle, a fait tuer son mari, on mettra cette femme à la potence.
§ 154. Si un homme a eu commerce avec sa fille, on chassera cet homme du lieu.
§ 155. Si un homme a choisi une fiancée pour son fils, et si celui-ci l’a connue, si le père lui-même ensuite est surpris à coucher dans son sein, on liera cet homme et on la jettera dans l’eau.
§ 156. Si un homme a choisi une fiancée pour son fils, et si son fils ne l'a pas encore connue, et si lui-même a dormi dans son sein, il lui payera une demi-mine d'argent, et lui rendra intégralement tout ce qu'elle a apporté de chez son père, et elle épousera qui elle voudra.
§ 157. Si un homme a dormi, après son père, dans le sein de sa mère, on les brûlera tous deux.
§ 158. Si un homme, à la suite de son père, est surpris dans le sein de celle qui l'a élevé, et qui a eu des enfants (de ce père), cet homme sera arraché de la maison paternelle.
§ 159. Si un homme a fait apporter du biblou dans la maison de son beau-père, a donné la tirhatou, s'il tourne les yeux vers une autre femme, et dit à son beau-père : je n'épouserai pas ta fille, le père de la fille gardera tout ce qui lui a été apporté.
§ 160. Si un homme a fait porter du biblou dans la maison de son beau-père, a donné la tirhatou, et si le père de la fille dit : je ne te donnerai pas ma fille, il doublera et rendra tout ce qui lui a été apporté.
§ 161. Si un homme a fait porter du biblou chez son beau-père, a donné la tirhatou, et si un sien ami le calomniant, le beau-père dit au mari : « tu n'épouseras pas ma fille » ; il doublera et rendra tout ce qui lui a été apporté ; et cet ami (du mari) ne pourra prendre son épouse.
§ 162. Si un homme a pris une épouse, et si elle lui a donné des enfants, si cette femme meurt, son père ne réclamera rien de sa cheriqtou : la cheriqtou de réponse est à ses enfants.
§ 163. : Si un homme a pris une épouse et si elle ne lui a pas donné d'enfants, si cette femme meurt, si le beau-père a rendu la tirhatou que cet homme a apportée chez son beau-père, son mari ne réclamera rien de la cheriqtou de cette femme; sa cheriqtou est à la maison paternelle.
§ 164. Si son beau-père ne lui a pas rendu la tirhatou, il déduira toute la tirhatou de la femme de sur sa cheriqtou, et il rendra (ensuite) la cheriqtou à la maison du père de la femme.
§ 165. Si un homme a donné en cadeau à l’un de ses fils,[5] le premier de son regard, champ, verger, maison, et lui a donné une tablette, si ensuite le père meurt, quand les frères partageront, ce fils gardera le cadeau que le père lui a donné, et de plus, pour la fortune mobilière on partagera à parts égales.
§ 166. Si un homme a pris épouse pour les fils qu'il a, à l’exception de l’un d'eux en bas âge, quand le père mourra, et que les frères partageront la fortune mobilière de la maison paternelle, ils donneront à leur frère en bas âge qui n'a pas encore pris une épouse, en outre de sa portion, de l'argent pour une tirhatou, et ils lui feront prendre une épouse.
§ 167. Si un homme a pris une épouse, et si elle lui a donné des enfants, quand cette femme mourra, si, après elle, il prend une autre épousé qui lui donne aussi des enfants; quand le père mourra, les enfants ne partageront pas selon les mères (en deux) : ils prendront la cheriqtou de leur mère (chaque groupe celui de la sienne) ; mais ils (tous) partageront à parts égales la fortune mobilière de la maison paternelle.
§ 168. Si un homme s'est proposé de renier [litt. arracher) son enfant et a dit au juge : je renie mou enfant, le juge examinera le fond de son affaire et si l’enfant n'a pas à charge un crime grave passible d'être privé de la filiation, le père ne peut l'arracher de la filiation.
§ 169. S'il a à charge un crime grave contre son père, passible de cette privation, pour une fois, celui-ci détournera la face ; si c'est pour la seconde fois qu'il a à charge un crime grave, le père peut arracher son enfant de la filiation.
§ 170. Si une épouse a donné des enfants à un homme et si une esclave de cet homme lui a aussi donné des enfants, si, de son vivant, le père a dit aux enfants que l'esclave lui a donnés : « vous êtes mes enfants », et les a comptés parmi les enfants de l’épouse, si ensuite le père meurt, les enfants de l'épouse et les enfants de l'esclave partageront à paris égales la fortune mobilière de la maison paternelle : les enfants qui sont les enfants de l'épouse choisiront dans le partage et prendront.
§ 171. Si le père de son vivant n'a pas dit aux enfants que l'esclave lui a enfantés : « vous êtes mes enfants », quand le père mourra, les enfants de l’esclave ne partageront pas la fortune mobilière de la maison paternelle avec les enfants de l’épouse.
II effectue l'affranchissement de l'esclave et de ses enfants; les enfants de l'épouse ne peuvent revendiquer pour la servitude les enfants de l'esclave; quant à l’épouse, elle prendra sa cheriqtou et le noudounnou que son mari lui a donnés et lui a marqués sur tablette, et elle restera dans la maison de son mari; tant qu'elle vivra, elle en jouira, mais ne pourra les aliéner pour argent; après elle, ils sont à ses enfants.
§ 172. Si son mari ne lui a pas donné un noudounnou, on lui rendra intégralement sa cheriqtou, et elle prendra sur la fortune mobilière de la maison du mari, une part d'enfant. Si ses enfants la forcent à sortir de la maison, le juge examinera ses raisons, et si la faute est sur les enfants, cette femme ne s'en ira pas de la maison de son mari. Si cette femme est disposée à s'en aller, elle laissera à ses enfants le don que son mari lui a donné, elle prendra la cheriqtou qui vient de la maison de son père, et épousera qui elle voudra.
§ 173. Si cette femme, là où elle est entrée, donne des enfants à son deuxième mari, et si ensuite elle meurt, les enfants antérieurs et postérieurs se partageront sa cheriqtou.
§ 174. Si elle n'a pas donné d'enfants au deuxième mari, les enfants du premier époux prendront sa cheriqtou.
§ 175. Si un esclave du palais ou un esclave de mouchkînou a épousé une fille d'homme libre et a procréé des enfants, le propriétaire de l’esclave ne peut élever de revendication sur les enfants d'une fille d'homme libre, pour la servitude.
§ 176. Et si l’esclave du palais ou l'esclave d'un mouchkînou a épousé une fille d’homme libre, et si elle est entrée dans la maison de l’esclave du palais ou de l’esclave d'un mouchkînou, avec une cheriqtou venant de la maison de son père, et si depuis qu'ils sont ensemble, ils se sont établis, ont acquis de l'avoir, — si ensuite l'esclave du noble ou l'esclave du mouchkînou meurt, la fille d'homme libre prendra sa cheriqtou, et de tout ce que son mari et elle, depuis qu'ils étaient ensemble, ont acquis, on fera deux parts. Le propriétaire de l'esclave prendra une moitié, la fille d'homme libre prendra l'autre moitié pour ses enfants. Si la fille d'homme libre n'avait pas de cheriqtou, on partagera en deux parts ce que son mari et elle ont acquis, depuis qu'ils étaient ensemble, et le propriétaire de l'esclave prendra une moitié, la fille d'homme libre prendra l'autre moitié, pour ses enfants.
§ 177. Si une veuve dont les enfants sont en bas âge, se propose d'entrer dans une autre maison, elle n'entrera pas sans le juge; quand elle entrera dans une autre maison le juge recherchera ce qui reste de la maison du premier mari, et on confiera à son second mari et à cette femme, la maison de son premier mari, et on leur fera délivrer une tablette; ils garderont la maison et élèveront les petits et ne vendront aucun ustensile. L'acheteur qui acquerrait un ustensile d'enfants de veuve sera frustré de son argent. L'objet retourne à son maître.
§ 178. Si son père a donné à une prêtresse ou à une femme publique une cheriqtou, et gravé une tablette, si sur la tablette qu'il lui a gravée, il n'y a pas gravé qu'elle pourrait donner à qui bon lui semble ce qu'elle laisserait après elle, ni ne l’a laissée suivre le vœu de son cœur, quand ensuite le père mourra, les frères (de la femme) prendront les champ et verger, et selon la valeur de sa portion, lui donneront blé, huile, laine, et contenteront son cœur; si ses frères ne lui donnent pas blé, huile, laine selon la valeur de sa portion, et ne contentent pas son cœur, elle donnera ses champ et jardin à un fermier qui lui plaira, et son fermier la sustentera : elle jouira de tout ce que son père lui avait donné, tant qu'elle vivra; mais ne peut le vendre ni payer un autre par ce moyen; sa part d'enfant appartient à ses frères.
§ 179. Si son père a donné à une prêtresse ou une femme publique une cheriqtou, et gravé une tablette et si sur cette tablette qu'il lui a gravée, il a gravé, qu'elle donnerait à qui elle voudrait, ce qu'elle laisserait après elle, et l’a laissé suivre le vœu de son cœur, quand ensuite le père mourra, elle donnera à qui lui plaira ce qu'elle laissera ; ses frères ne lui contesteront rien.
§ 180. Si son père n'a pas donné de cheriqtou à une fille recluse ou femme publique, quand ensuite le père mourra, elle participera une part d'enfant sur la fortune mobilière de la maison paternelle et en jouira tant qu'elle vivra; après elle, cela revient à ses frères.
§ 181. Si un père a voué à Dieu une hiérodule ou une vierge (?) et ne lui a pas donné de cheriqtou, quand ensuite le père mourra, elle participera un tiers de part d'enfant sur la fortune mobilière de la maison paternelle, et elle en jouira tant qu'elle vivra; après elle, cela revient à ses frères.
§ 182. Si son père n'a pas donné de cheriqtou à une fille, prêtresse de Marduk à Babylone, ni lui a gravé une tablette, quand ensuite le père sera mort, elle participera, avec ses frères, un tiers de part d'enfant, sur la fortune mobilière de la maison paternelle; elle ne gérera pas de gestion (personnellement), et après elle, la prêtresse de Marduk le donnera à qui lui plaira.
§ 183. Si un père a offert une cheriqtou à sa fille (de) concubine, et l’a donnée à un mari, lui a gravé une tablette, quand ensuite le père mourra, elle ne participera pas à la fortune mobilière de la maison paternelle.
§ 184. Si un homme n'a pas offert de cheriqtou à sa fille (de) concubine ni ne l’a donnée à un mari, quand ensuite le père mourra, ses frères lui offriront une cheriqtou, selon la fortune de la maison paternelle, et la donneront à un mari.
§ 185. Si un homme a pris un petit en adoption d'enfant, avec son propre nom (?) et l'a élevé, cet élève ne peut être réclamé.
§ 186. Si un homme a adopté en filiation un petit, et si quand il l’a pris, celui-ci a violenté (?) ses père et mère, cet élève retournera chez son père.
§ 187. L’enfant d'un favori, familier du palais, ou celui d'une femme publique ne peut être réclamé.
§ 188. Si un artisan a pris un enfant pour l'élever et lui a appris son métier, il ne peut être réclamé.,
§ 189. S'il ne lui a pas appris son métier, cet élève peut retourner chez son père.
§ 190. Si un homme qui a pris un petit en adoption et l’a élevé, ne l'a pas compté avec ses propres enfants, cet élève retournera chez son père.
§ 191. Si un homme qui a pris un petit en adoption et l'a élevé, fonde une famille et ensuite a des enfants, et s'il se dispose à renier (arracher) l'adopté, cet enfant n'ira pas son chemin ; le père qui l'a élevé lui donnera un tiers de part d'enfant sur sa fortune mobilière, et alors il s'en ira. Des champ, verger et maison, il ne lui donnera rien.
§ 192. Si un enfant de favori ou un enfant de femme publique dit à son père qui l'a élevé ou à sa mère qui l'a élevé : « tu n'es pas mon père, tu n'es pas ma mère », on lui coupera la langue.
§ 193. Si l'enfant d'un favori ou celui d'une femme publique a connu la maison de son père, et a dédaigné le père qui l'a élevé et la mère qui l’a élevé, et s'en est allé à la maison de son père, on lui arrachera les yeux.
§ 194. Si un homme a donné son enfanta une nourrice» et si cet enfant est mort entre les mains de cette nourrice, si la nourrice nourrit un autre enfant, sans (la permission de) ses père et mère, on la fera comparaître, et pour avoir nourri un autre enfant, sans (la permission de) ses père et mère, on lui coupera les seins.
§ 195, Si un enfant a frappé son père, on lui coupera les mains.
§ 196. Si un homme a crevé l’œil d'un homme libre, on lui crèvera un œil.
§ 197. S'il a brisé un membre d'un homme libre, on lui brisera un membre.
§ 198. S'il a crevé l’œil d'un mouchkînou, ou brisé un membre d'un mouchkînou, il paiera une mine d'argent.
§ 199. S'il a crevé l'œil d'un esclave d'homme libre ou brisé un membre d'un esclave d'homme libre, il payera la moitié de son prix.
§ 200. Si un homme a fait tomber les dents d'un homme de même condition que lui, on fera tomber ses dents.
§ 201. S’il a fait tomber les dents d'un mouchkînou, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 202. Si un homme a frappé le cerveau d'un homme de condition supérieure à lui, il sera frappé en public de 60 coups de nerf de bœuf.
§ 203. Si un homme a frappé le cerveau d'un homme de même condition, il payera une mine d'argent.
§ 204. S'il a frappé le cerveau d'un mouchkînou, il payera dix sicles d'argent.
§ 205. S'il a frappé le cerveau d'un esclave d'homme libre, on lui coupera l'oreille.
§ 206. Si un homme a frappé un autre homme dans une dispute, et lui a causé une plaie, cet homme jurera : « je ne l'ai pas fait sciemment », et il payera le médecin.
§ 207. Si l’autre meurt de ses coups, il jurera encore, et s'il s'agit d'un fils d'homme libre, il payera une demi-mine d'argent.
§ 208. Et s'il s’agit d'un fils de mouchkînou, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 209. Si un homme a frappé une fille d'homme libre et a fait tomber son intérieur (avorter), il payera, pour son fruit, dix sicles d'argent,
§ 210. Si cette femme meurt, on tuera la fille (de l’agresseur).
§ 211. S'il s'agit d'une fille de mouchkînou dont il a fait tomber par ses coups l'intérieur, il payera cinq sicles d'argent.
§ 212. Si cette femme meurt, il payera une demi-mine d'argent.
§ 213. S'il a frappé une esclave d'un homme libre et a fait tomber son intérieur, il payera deux sicles d'argent.
§ 214. Si cette esclave meurt, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 215. Si un médecin a traité un homme d'une plaie grave avec le poinçon de bronze, et guéri l’homme, s'il a ouvert la taie d'un homme avec le poinçon de bronze, et a guéri l'œil de l'homme, il recevra dix sicles d'argent.
§ 216. S'il s'agit d'un mouchkînou, il recevra cinq sicles d'argent.
§ 217. S'il s'agit d'un esclave d'homme libre, le maître de l'esclave donnera au médecin deux sicles d'argent.
§ 218. Si un médecin a traité un homme libre d'une plaie grave, avec le poinçon de bronze, et a fait mourir l'homme, s'il a ouvert la taie de l'homme avec le poinçon de bronze, et a crevé l'œil de l'homme, on coupera ses mains.
§ 219. Si un médecin a traité d'une plaie grave l'esclave d'un mouchkînou, avec le poinçon de bronze, et l’a tué, il rendra esclave pour esclave.
§ 220. S'il a ouvert la taie avec le poinçon de bronze, et a crevé l'œil, il payera en argent la moitié de son prix.
§ 221. Si un médecin a guéri un membre brisé d'un homme libre, et a fait revivre un viscère malade, le patient donnera au médecin cinq sicles d'argent.
§ 222. Si c'est un fils de mouchkînou, il donnera trois sicles d'argent.
§ 223. S'il s'agit d'un esclave d'homme libre, le maître de l'esclave donnera au médecin deux sicles d'argent.
§ 224. Si le médecin des bœufs ou des ânes a traité d'une plaie grave un bœuf ou un âne, et l'a guéri, le maître du bœuf ou de l'âne donnera au médecin, pour son salaire, un sixième (de sicle?) d'argent.
§ 225. S'il a traité un bœuf ou un âne d'une plaie grave et causé sa mort, il donnera le quart de son prix au maître du bœuf ou de l'âne.
§ 226. Si un chirurgien, à l’insu du maître de l'esclave, a imprimé une marque d'esclave inaliénable, on coupera les mains à ce chirurgien.
§ 227. Si un homme a trompé un chirurgien, et si celui-ci a imprimé une marque d'esclave inaliénable, on tuera l'autre et on l’enterrera dans sa maison; le chirurgien jurera : «je ne l’ai pas marqué sciemment », et il sera quitte.
§ 228. Si un architecte a construit une maison pour un autre, et l’a menée à bonne fin, il lui donnera pour son cadeau deux sicles d'argent, par sar de superficie.
§ 229. Si un architecte a construit pour un autre une maison, et n'a pas rendu solide son œuvre, si la maison construite s'est écroulée, et a tué le maître de la maison, cet architecte est passible de mort.
§ 230. Si c'est l'enfant du maître de la maison qu'il a tué, on tuera l'enfant de cet architecte.
§ 231. Si c'est l'esclave du maître de la maison qu'il a tué, il donnera esclave pour esclave au maître de la maison.
§ 232. Si c'est la fortune mobilière qu'il a détruite, il restituera tout ce qu'il a détruit, et parce qu'il n'a rendu solide la construction, et qu'elle s'est effondrée, il restaurera la maison ruinée, à ses propres frais.
§ 233. Si un architecte a construit une maison pour quelqu'un, et n'a pas solidement basé son œuvre, si un mur tombe, cet architecte affermira ce mur, à ses propres frais.
§ 234. Si un batelier a calfaté un vaisseau de 60 gour pour quelqu'un, il lui donnera deux sicles d'argent pour sa récompense.
§ 235. Si un batelier a calfaté pour quelqu'un un vaisseau, et n'a pas rendu solide son travail, si cette même année il met en route ce vaisseau, et s'il éprouve une avarie, le batelier changera le vaisseau, le réparera à ses propres frais, et rendra le vaisseau réparé au maître du vaisseau.
§ 236. Si un homme a donné en location son vaisseau à un batelier, et si le batelier conduit mal, et si le vaisseau coule, et s'il le perd, le batelier restituera un vaisseau au maître du vaisseau.
§ 237. Si un homme a pris en location un batelier, et un vaisseau et l’a frété de blé, laine, huile, datte ou toute autre denrée de fret, si ce batelier a conduit mal, et a fait sombrer le vaisseau, a perdu ce qui s'y trouvait, il restituera le vaisseau qu'il a fait sombrer, et tout le contenu qu'il a perdu.
§ 238. Si un batelier a coulé le vaisseau de quelqu'un et l’a renfloué, il payera la moitié de son prix en argent.
§ 239. Si un homme a loué un batelier, il lui donnera par an, 6 gour de blé.
§ 240. Si un bateau de course a abordé un bac de passeur, et l'a coulé, le maître du bateau coulé poursuivra devant Dieu tout ce qu'il a perdu sur le bateau, et celui du bateau de course qui a coulé le bac, restituera le bateau et tout ce qui y a péri.
§ 241. Si un homme a contraint le bœuf (d'un autre) au travail forcé, il payera un tiers de mine d'argent.
§ 242. Si un homme (le) prend à bail pour un an; prix de location du bœuf de labour : quatre gour de blé ;
§ 243. prix de location du bœuf de somme (?) : il donnera trois gour de blé au propriétaire.
§ 244. Si un homme a loué un bœuf ou un âne, et si dans les champs, un lion l’a tué, c'est pour son maître (qu'il est tué).
§ 245. Si un homme a loué un bœuf, et si par de mauvais soins ou par des coups, il l’a fait mourir, il rendra bœuf pour bœuf au maître du bœuf.
§ 246. Si un homme a loué un bœuf, a brisé son pied, ou bien a coupé sa nuque, il rendra bœuf pour bœuf au maître du bœuf.
§ 247. Si un homme a loué un bœuf et a crevé son œil, il donnera au maître du bœuf, la moitié de sa valeur en argent.
§ 248. Si un homme a loué un bœuf, a brisé sa corne, coupé sa queue, ou a tranché le dessus du museau, il donnera le quart de sa valeur en argent.
§ 249. Si un homme a loué un bœuf, et si Dieu (un accident) l’a frappé et s'il est mort, celui qui l'a pris en location en jurera par le nom de Dieu, et il sera quitte.
§ 250. Si un bœuf furieux dans sa course a poussé (des cornes) un homme et l’a tué, cette cause ne comporte pas de réclamation.
§ 251. Si le bœuf d'un homme, a frappé (souvent) de la corne, lui a fait connaître son vice et s'il n’a pas rogné ses cornes ni entravé son bœuf, si ce bœuf a poussé de la corne un fils d'homme libre et Fa tué, il payera une demi-mine d'argent.
§ 252. Si c'est un esclave d'homme libre, il donnera un tiers de mine d'argent.
§ 253. Si un homme a loué un autre pour demeurer sur son champ et lui a, lui a confié les bœufs et l’a engagé pour labourer le champ; si cet homme a volé du grain ou des plants, et si cela est pris entre ses mains, on lui coupera les mains.
§ 254. S'il a pris le..., a épuisé les bœufs, il restituera la quantité de blé qu'il a ensemencé.
§ 255. S'il a donné en location le bœuf d'autrui, et a volé de la graine, et n'a pas fait produire le champ, on fera comparaître cet homme, et par 100 gan (?) il mesurera 60 gour de blé.
§ 256. Si son district (?) ne veut pas faire la restitution, on le laissera sur le champ, parmi le bétail.
§ 257. Si un homme a loué un travailleur des champs (?), il lui donnera par an 8 gour de blé.
§ 258. Si un homme a loué un bouvier, il lui donnera 6 gour de blé par an.
§ 259. Si un homme a volé une roue d'arrosage dans les champs, il donnera cinq sicles d’argent au maître de la machine.
§ 260. S'il a volé une chadouf,[6] ou une charrue, il donnera trois sicles d'argent.
§ 261. Si un homme a loué un pâtre pour bœufs et moutons, il lui donnera, par an, 8 gour de blé.
§ 262. Si un homme… a un bœuf ou mouton, pour…….
§ 263. S'il a perdu bœuf ou mouton qui lui sont confiés il rendra à leur propriétaire bœuf pour bœuf, mouton pour mouton.
§ 264. Si le pâtre à qui ont été confiés bœufs et moutons à paître, a reçu tout son salaire convenu, et si son cœur est content, s'il a fait diminuer les bœufs et s'il a fait décroître le nombre des moutons, et restreint la reproduction, il livrera petits et revenus, selon les conventions.
§ 265. Si le pâtre à qui ont été confiés bœufs et moutons, à paître, a prévariqué, a falsifié l’état (du troupeau) et a vendu, on le citera en justice et il restituera au propriétaire dix fois ce qu'il a volé de bœufs et moutons.
§ 266. S’il s’est produit un dégât dans l’étable, par un accident, ou si le lion a tué, le berger se disculpera devant Dieu, et le maître de l'étable supportera la ruine de l'étable.
§ 267. Si le pâtre est en faute, et si dans l’étable il a causé une brèche, le pâtre remettra en bon état et rendra à leur propriétaire le trou de la brèche (réparé), bœufs et moutons.
§ 268. Si un homme a loué un bœuf pour fouler, son prix de location est de 20 qa de blé.
§ 269. S'il a loué un âne pour fouler, son prix de location est de 10 qa de blé.
§ 270. S'il a loué un ânon ou bouvillon, son prix de location est de 1 qa de blé.
§ 271. Si un homme a loué des bœufs, le chariot et le conducteur, il donnera, par jour, 180 qa de blé.
§ 272. Si un homme a loué le chariot seul, il donnera, par jour, 40 qa de blé.
§ 273. Si un homme a loué un journalier, il donnera par jour six chè d'argent depuis le commencement de l’année jusqu'au cinquième mois; depuis le sixième mois jusqu'à la fin de l’année, il donnera cinq chè d'argent par jour.
§ 274. Si quelqu'un a loué un artisan :
le salaire du … est de cinq chè d'argent,
le salaire du briquetier (?) est de cinq chè d'argent,
le salaire du tailleur d'habits (?) est de cinq chè d'argent,
le salaire du tailleur de pierres (?) est de … d'argent,
le salaire du … est de … d'argent,
le salaire du … est de … d'argent,
le salaire du charpentier est de quatre chè d'argent,
le salaire du … est de quatre chè d'argent,
le salaire du … est de … chè d'argent,
le salaire du maçon est de … d'argent,
par jour il donnera.
§ 275. Si un homme a loué (un bac), son prix de location est de trois chè d'argent par jour.
§ 276. Si c'est un bateau de course, il donnera par jour, deux chè et demi d'argent, pour la location.
§ 277. Si un homme a loué un bateau de 60 gour, il donnera, pour la location, un sixième de sicle par jour.
§ 278. Si un homme a acheté un esclave mâle ou femelle, et si avant d'achever un mois, une infirmité (paralysie) l'afflige, il le rendra à son vendeur, et l’acheteur reprendra l'argent qu'il a payé.
§ 279. Si un homme a acheté un esclave mâle ou femelle, et s'il y a réclamation, son vendeur fera droit à la réclamation.
§ 280. Si un homme a acheté en pays étranger l'esclave mâle ou femelle de quelqu'un, s'il vient dans le pays (propre), et si le maître de l’esclave mâle ou femelle reconnaît son esclave mâle ou femelle, si ces esclaves mâle ou femelle sont des indigènes, sans argent il leur accordera l'élargissement.
§ 281. S'ils sont étrangers, l'acheteur jurera devant Dieu qu'il les a payés, le maître de l'esclave mâle ou femelle rendra au négociant l'argent qu'il a versé, et recouvrera son esclave mâle ou femelle.
§ 282. Si un esclave dit à son maître : tu n'es pas mon maître, il le convaincra en justice comme étant son esclave, et son maître lui coupera l'oreille.
Décrets d'équité, que Hammourabi, le roi puissant, a statués !
http://remacle.org/bloodwolf/erudits/amourabi/code.htm
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
- La Bible d'avant la Bible
- « La Bible et le monde mésopotamien. Réflexion comparative »
La recherche sur les civilisations anciennes et l’étude comparée des religions ont permis d’éclairer de nombreux points obscurs de l’histoire biblique, replacée dans son contexte géographique et historique ; mais elle a souvent conduit à remettre en question l’originalité du message biblique et jusqu’à l’idée de sa révélation . La question biblique, notons-le en passant, est un cas…. C’est avant tout le cas des civilisations du Proche-Orient antique avec lesquelles l’Israël ancien s’est trouvé en contact prolongé ou dont il est issu. Le « choc » des similitudes entre les données bibliques. Textes, institutions. et leur équivalent étranger a entraîné deux modifications majeures dans la compréhension de la Bible. Les similitudes ont suggéré des emprunts là où l’on avait cru voir une trouvaille spécifique ; d’autre part, elles ont accrédité une lecture littérale (voire littéraliste) de la Bible, sur le modèle des grands textes mythiques anciens. Contournant les exégèses traditionnelles, cette lecture « paganisante » du texte a été généralisée pour la Bible et parfois étendue au midrash juif, autorisant l’appellation assez rapide de « mythe hébraïque . Voir Robert Graves et Raphael Patai, Les mythes hébreux,… ».
À ces deux niveaux (diachronique et synchronique) cette lecture s’articule naturellement avec la méthode de la « Critique biblique », qu’on peut sommairement définir comme la tentative de résoudre les difficultés du texte biblique en le recomposant selon des hypothèses chronologiques. Par exemple, la concurrence d’au moins deux noms de Dieu…. Si la Critique biblique se fondait avant tout sur l’étude interne des textes, elle peut à présent élargir son périmètre et appuyer ses conjectures sur les données externes. Entre le « bibliste » ainsi défini et l’archéologue. Ou l’historien comparatiste., se constitue un échange circulaire où l’on pourrait reconnaître un nouvel avatar du « cercle herméneutique » : le bibliste offre à l’archéologue un cadre chronologique préétabli, l’archéologue interprète ses découvertes en fonction de ce cadre initial, et le bibliste trouve dans ces interprétations la confirmation de ses propres conclusions – quitte à les modifier sur des points de détail. La cohérence du système interdisciplinaire lui tient lieu de preuve.
La Mésopotamie
Le cas de la Mésopotamie illustre particulièrement cette problématique. Un épisode marquant du débat à ce sujet est la conférence de… : les trésors archéologiques découverts dans cette région à partir du xixe siècle. Sous l’impulsion notamment de l’Anglais Claudius Rich et du…, et surtout le déchiffrement de l’écriture cunéiforme, nous ont mis en présence de civilisations qui comptent parmi les plus anciennes de l’humanité, et qui se profilent constamment à l’arrière-plan du peuple hébreu et de son histoire. Qu’il suffise de rappeler que le récit biblique s’ouvre et se clôt sur une scène mésopotamienne : le premier Hébreu, Abraham (ou plutôt Abram) sort de la ville d’Ur en Chaldée (aux alentours de – 1700 ?) pour se rendre en Canaan ; et le livre des Chroniques rapporte la destruction du royaume d’Israël par Nabuchodonosor, la déportation des Juifs en Babylonie, puis la proclamation du roi perse Cyrus, vainqueur des Babyloniens, autorisant le retour en terre d’Israël.
L’épopée de Gilgamesh
La question du rapport entre la Bible et la Mésopotamie se pose à plusieurs niveaux et pour plusieurs époques. Je me concentrerai ici sur deux textes qui comptent parmi les pièces les plus connues de ce volumineux dossier. Un autre problème intéressant concerne la relation entre les…. Le premier est l’épopée de Gilgamesh et son récit d’un Déluge universel qu’on a comparé à l’histoire biblique de Noé ; le second est le Code de Hammourabi, où l’on a vu un précurseur, sinon une source, de la législation mosaïque. Je ne prétends pas ici me substituer aux spécialistes des domaines considérés ni offrir le dernier mot sur la question du rapport de la Bible à ces deux grands textes ; mais plutôt, une fois établies les données du problème dans ces grandes lignes, en dégager quelques directions de réflexion dont certaines mériteraient d’être davantage explorées qu’elles ne l’ont été jusqu’ici. Après un bref rappel historique de l’arrière-plan chronologique et littéraire, j’évoquerai les grands traits de similitude entre les textes et les conjectures qu’ils semblent accréditer ; puis sur la base des différences spécifiques ou structurelles qui opposent les deux ensembles, j’ébaucherai la possibilité d’une autre lecture. À mon sens, le débat sur « l’originalité » de la Bible a moins pour enjeu une théologie du texte (« la Bible est-elle révélée ou non ? ») qu’une philosophie de l’histoire culturelle. L’exemple d’Israël comme culture qui transcenderait ses influences n’est pas forcément à penser comme un cas unique (même s’il est exemplaire) ; mais plutôt comme illustration d’une variation particulière à partir d’un fonds culturel commun au Proche-Orient archaïque.
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Le Cadre historique
Les grandes étapes de l’histoire mésopotamienne sont facilement accessibles au lecteur averti, à travers les encyclopédies imprimées ou digitales. Je crois utile cependant d’en rappeler ici les principales sous forme de tableau (tableau 1), en privilégiant les correspondances avec l’histoire biblique. Les dates sont bien sûr à situer avant l’ère chrétienne. J’utilise ici, pour la chronologie générale : Margueron J.-C.….
Tableau 1
Époque Monde mésopotamien Israël biblique IIIe millénaire Entre Sumer et Akkad, l’époque des grandes dynasties archaïques (Ur, Uruk) et de rois légendaires, comme Shulgi et Gilgamesh xviiie siècle Période paléo-babylonienne. 1er empire de Babylone fondé par Hammourabi (Babylone sera prise par les Hittites vers 1594). Abraham, échappé de Ur en Chaldée, passe en Canaan. Il combat le roi ‘Amraphel10 xiiie-xe siècle Concurrence entre l’Assyrie et la Babylonie 11. Période du Moyen Empire assyrien fondé par Assur-Uballit Ier vers 1365-30. Règne de Salmanasar Ier (vers 1274), et de Tiglat Pileser I er (vers 1117-1077). Sortie d’Égypte (vers 1300 ?) et conquête de Canaan. Le roi David (1000-970) et le roi Salomon (970-933) ; construction du Temple de Jérusalem. Schisme entre les royaumes de Judah et d’Israël. xe-viie siècle Période « néo-assyrienne » (apogée puis chute de l’Assyrie) Tiglat Pileser III (747-727) contrôle Babylone, les cités philistines (~ 732) ; inaugure une politique de déportations. Le roi de Judah Ah’az sollicite l’appui de l’Assyrie contre ses voisins rois d’Israël (Peqah’) et de Damas (II rois XVI, 7 sq.) ; dans le Temple il construit l’autel sur le modèle de l’autel syrien (II Chron. XXVIII, Is. VII). Le roi d’Israël Péqah’ est renversé par Osée, avec l’appui de l’Assyrie, tandis que l’occupation de la Transjordanie par l’Assyrie entraîne la déportation des tribus de Ruben, Gad, et (pour moitié) de Ménassé.
La tradition littéraire
Pour ce qui est des traditions littéraires, les textes les plus anciens en notre possession remontent à la période sumérienne ; on peut parler d’une tradition thématique et formelle qui passe du sumérien à l’akkadien (à l’époque paléo-babylonienne) et se perpétue jusqu’au viie siècle, comme nous l’atteste la bibliothèque d’Assurbanipal découverte à Ninive dans la seconde moitié du xixe siècle. On notera que, d’après Jean Bottéro 1992, p. 35-36., un grand tournant se situerait précisément à l’époque de Hammourabi et du premier empire babylonien, où l’on assiste à la reprise des anciennes traditions et à une intense activité littéraire.
Parmi ces textes, dont une bonne partie sont des textes de circonstance (décrets royaux, contrats, etc.), deux ensembles se détachent : les récits mythiques et les recueils de lois.
Parmi les récits mythiques, on connaît l’épopée du roi Shulgi, prince de Sumer ; le récit de l’Enuma Elish, qui raconte la création du monde et l’avènement du dieu Marduk ; l’épopée d’Atrahasis ou « Supersage » (dans la traduction de Bottéro), qui raconte la création de l’homme et de la première humanité, avec un récit circonstancié du Déluge . Voir Bottéro, J., Kramer, S. N., Lorsque les dieux faisaient… ; enfin l’épopée de Gilgamesh dont les multiples versions et remaniements s’échelonnent entre l’époque sumérienne et le viie siècle assyrien ; il semble qu’à l’instar de Shulgi, Gilgamesh ait été une figure historique (xxve siècle ?) mythologisée et finalement divinisée, enrichie de différents apports au cours des siècles. Par-delà le phénomène de tradition et réédition, on soulignera l’adaptation de l’épopée dans différentes langues et cultures du Proche-Orient (hittites, cananéennes), qui rendent plausible la transmission au monde hébraïque ancien. Son influence aurait même atteint le monde grec : on a pu faire des rapprochements entre les poèmes d’Hésiode et l’Enuma Elish, entre l’Iliade d’Homère et l’épopée de Gilgamesh.
Les codes juridiques s’insèrent eux aussi dans une tradition qui remonte jusqu’à l’époque sumérienne et se poursuit jusqu’à la chute de Babylone. Le code de Hammourabi est celui sur lequel nous sommes le mieux renseignés, mais on lui connaît plusieurs antécédents : inscriptions du roi de Lagash au xxive siècle, code du roi Ur-Namma (ou Ur-Nammu) au xxie, code du roi Lipit-Ishtar au xxe, code du roi Dadushah au xviiie (communément appelé code d’Eshnunna). Après Hammourabi, son influence est avérée en Assyrie (lois médio-assyriennes, xe-xie siècle) et en Babylonie (lois néo-babyloniennes entre le xe et le viie siècle). La question se pose d’une influence sur des droits étrangers….
Ces deux grands ensembles (auxquels on pourrait comparer les composantes narrative et législative de la Bible, avec leur prolongement rabbinique : aggadah et halakhah) ne sont pas absolument indépendants l’un de l’autre. La législation royale s’appuie sur un système de représentations religieuses et mythologiques dont on retrouve le détail dans les épopées. Ainsi le Prologue de Hammourabi invoque l’autorité des dieux Anu et Enlil ainsi que la protection du dieu Marduk ; la stèle sur laquelle le code est gravé, respectant une iconographie traditionnelle, nous montre le roi comparaissant devant le dieu du soleil Shamash et recevant de lui la bâton et le cercle, signes du pouvoir royal.
On abordera successivement les questions posées par le mythe de Gilgamesh et par le Code de Hammourabi.
Les grandes étapes de l’histoire mésopotamienne sont facilement accessibles au lecteur averti, à travers les encyclopédies imprimées ou digitales. Je crois utile cependant d’en rappeler ici les principales sous forme de tableau (tableau 1), en privilégiant les correspondances avec l’histoire biblique. Les dates sont bien sûr à situer avant l’ère chrétienne. J’utilise ici, pour la chronologie générale : Margueron J.-C.….
Tableau 1
Époque Monde mésopotamien Israël biblique IIIe millénaire Entre Sumer et Akkad, l’époque des grandes dynasties archaïques (Ur, Uruk) et de rois légendaires, comme Shulgi et Gilgamesh xviiie siècle Période paléo-babylonienne. 1er empire de Babylone fondé par Hammourabi (Babylone sera prise par les Hittites vers 1594). Abraham, échappé de Ur en Chaldée, passe en Canaan. Il combat le roi ‘Amraphel10 xiiie-xe siècle Concurrence entre l’Assyrie et la Babylonie 11. Période du Moyen Empire assyrien fondé par Assur-Uballit Ier vers 1365-30. Règne de Salmanasar Ier (vers 1274), et de Tiglat Pileser I er (vers 1117-1077). Sortie d’Égypte (vers 1300 ?) et conquête de Canaan. Le roi David (1000-970) et le roi Salomon (970-933) ; construction du Temple de Jérusalem. Schisme entre les royaumes de Judah et d’Israël. xe-viie siècle Période « néo-assyrienne » (apogée puis chute de l’Assyrie) Tiglat Pileser III (747-727) contrôle Babylone, les cités philistines (~ 732) ; inaugure une politique de déportations. Le roi de Judah Ah’az sollicite l’appui de l’Assyrie contre ses voisins rois d’Israël (Peqah’) et de Damas (II rois XVI, 7 sq.) ; dans le Temple il construit l’autel sur le modèle de l’autel syrien (II Chron. XXVIII, Is. VII). Le roi d’Israël Péqah’ est renversé par Osée, avec l’appui de l’Assyrie, tandis que l’occupation de la Transjordanie par l’Assyrie entraîne la déportation des tribus de Ruben, Gad, et (pour moitié) de Ménassé.
La tradition littéraire
Pour ce qui est des traditions littéraires, les textes les plus anciens en notre possession remontent à la période sumérienne ; on peut parler d’une tradition thématique et formelle qui passe du sumérien à l’akkadien (à l’époque paléo-babylonienne) et se perpétue jusqu’au viie siècle, comme nous l’atteste la bibliothèque d’Assurbanipal découverte à Ninive dans la seconde moitié du xixe siècle. On notera que, d’après Jean Bottéro 1992, p. 35-36., un grand tournant se situerait précisément à l’époque de Hammourabi et du premier empire babylonien, où l’on assiste à la reprise des anciennes traditions et à une intense activité littéraire.
Parmi ces textes, dont une bonne partie sont des textes de circonstance (décrets royaux, contrats, etc.), deux ensembles se détachent : les récits mythiques et les recueils de lois.
Parmi les récits mythiques, on connaît l’épopée du roi Shulgi, prince de Sumer ; le récit de l’Enuma Elish, qui raconte la création du monde et l’avènement du dieu Marduk ; l’épopée d’Atrahasis ou « Supersage » (dans la traduction de Bottéro), qui raconte la création de l’homme et de la première humanité, avec un récit circonstancié du Déluge . Voir Bottéro, J., Kramer, S. N., Lorsque les dieux faisaient… ; enfin l’épopée de Gilgamesh dont les multiples versions et remaniements s’échelonnent entre l’époque sumérienne et le viie siècle assyrien ; il semble qu’à l’instar de Shulgi, Gilgamesh ait été une figure historique (xxve siècle ?) mythologisée et finalement divinisée, enrichie de différents apports au cours des siècles. Par-delà le phénomène de tradition et réédition, on soulignera l’adaptation de l’épopée dans différentes langues et cultures du Proche-Orient (hittites, cananéennes), qui rendent plausible la transmission au monde hébraïque ancien. Son influence aurait même atteint le monde grec : on a pu faire des rapprochements entre les poèmes d’Hésiode et l’Enuma Elish, entre l’Iliade d’Homère et l’épopée de Gilgamesh.
Les codes juridiques s’insèrent eux aussi dans une tradition qui remonte jusqu’à l’époque sumérienne et se poursuit jusqu’à la chute de Babylone. Le code de Hammourabi est celui sur lequel nous sommes le mieux renseignés, mais on lui connaît plusieurs antécédents : inscriptions du roi de Lagash au xxive siècle, code du roi Ur-Namma (ou Ur-Nammu) au xxie, code du roi Lipit-Ishtar au xxe, code du roi Dadushah au xviiie (communément appelé code d’Eshnunna). Après Hammourabi, son influence est avérée en Assyrie (lois médio-assyriennes, xe-xie siècle) et en Babylonie (lois néo-babyloniennes entre le xe et le viie siècle). La question se pose d’une influence sur des droits étrangers….
Ces deux grands ensembles (auxquels on pourrait comparer les composantes narrative et législative de la Bible, avec leur prolongement rabbinique : aggadah et halakhah) ne sont pas absolument indépendants l’un de l’autre. La législation royale s’appuie sur un système de représentations religieuses et mythologiques dont on retrouve le détail dans les épopées. Ainsi le Prologue de Hammourabi invoque l’autorité des dieux Anu et Enlil ainsi que la protection du dieu Marduk ; la stèle sur laquelle le code est gravé, respectant une iconographie traditionnelle, nous montre le roi comparaissant devant le dieu du soleil Shamash et recevant de lui la bâton et le cercle, signes du pouvoir royal.
On abordera successivement les questions posées par le mythe de Gilgamesh et par le Code de Hammourabi.
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Les grands textes et les analogies bibliques
Les récits du Déluge
Dans l’épopée de Gilgamesh, le récit du Déluge apparaît en relation avec le personnage de Utanapishti. La rencontre de ce personnage intervient comme une étape dans le long parcours suivi par le héros à la recherche de l’immortalité (recherche finalement soldée par un échec). Utanapishti, qui a eu le bonheur d’acquérir l’immortalité, raconte comment celle-ci lui fut accordée par les dieux après qu’il eut survécu au Déluge. Le récit d’Utanapishti peut être complété par celui que nous offre l’épopée d’Atrahasis (autre nom d’Utanapishti).
Dans leurs grands traits, ces récits du Déluge offrent des analogies frappantes avec le récit biblique, malgré des différences évidentes. Voici dans ses grandes lignes la version de Gilgamesh :
Un décret divin, condamnant l’humanité entière ; un héros averti du danger et chargé de sauver l’espèce humaine et tous les êtres vivants ; l’arche, le Déluge, l’envoi des oiseaux en reconnaissance, la sortie du bateau et le sacrifice final : on retrouve ici la trame sur laquelle est brodée l’histoire de Noé. Certes, les différences entre les deux récits ne manquent pas. Les plus saillantes . Au niveau du détail, les principales différences sont les… s’organisent facilement autour de l’opposition entre polythéisme païen, très nettement anthropomorphe voire zoomorphe et le monothéisme hébraïque, dans lequel l’anthropomorphisme est plus discret, plus facilement interprétable vers l’allégorie. L’épopée akkadienne nous montre Enlil décidé à détruire les hommes simplement parce qu’ils l’empêchent de dormir ; Enlil n’est pas omniscient, le dieu Ea parvient à le tromper pour sauver à son insu Utanapishti ; les dieux, terrorisés par le Déluge, se terrent dans le ciel semblables à des chiens ; mais c’est comme un essaim de mouches qu’ils s’agglutinent autour du sacrifice d’encens offert par le héros. Dans le récit biblique, Dieu s’attriste ou parle « en son cœur », hume le parfum du sacrifice, plante son « arc » dans le ciel comme signe d’alliance avec l’humanité régénérée ; mais ces descriptions se comprendront, dans l’exégèse rabbinique (paraphrase araméenne, commentaires médiévaux), comme des descriptions métaphoriques. D’autre part, le Créateur (qui est unique) assume seul la décision et la réalisation de son projet, alors qu’Enlil est secondé par tout un panthéon (Hadad, Nergal, Ninurta), et parfois désapprouvé par lui (Lilith, Ea). Enfin et surtout, le Dieu hébraïque prend la décision aussi bien de la perte que du sauvetage de l’humanité : la condamnation des vivants (hommes et bêtes) résultait d’un constat à connotation ethico-religieuse : les créatures se sont corrompues et il ne s’agit de l’effacer que pour la reconstruire à nouveaux frais. Dieu sauve Noé et ses enfants pour les charger de la régénération. Les commentaires rabbiniques ajoutent une autre différence….
Ces différences n’ont pas empêché les chercheurs d’admettre une influence globale de l’épopée babylonienne sur le texte biblique . Voir le commentaire de J. Skinner, A Critical and Exegetical… ou à la rigueur de voir dans le récit biblique un avatar parmi d’autres des mythes proche-orientaux anciens . Voir Graves et Patai, op. cit., p. 126 sq. Les auteurs…. Dans les deux cas, les différences seront soit minimisées, soit attribuées à un travail postérieur de transformation. En ce qui concerne l’hypothèse historique (ou historiciste), elle peut s’appuyer sur deux vraisemblances :
Or le vrai problème n’est pas tellement la validité de l’hypothèse historique (défendable ou réfutable comme toute hypothèse scientifique), mais le fait que cette hypothèse tend à éclipser, voire à occulter la question réellement intéressante, à savoir les caractères spécifiques du récit biblique. Influencé ou non par ses antécédents, le texte biblique considéré comme un tout offre une conception radicalement originale du premier devenir de l’humanité, et c’est cela qu’il aurait fallu étudier, tout en considérant l’arrière-plan des cultures antiques. Le problème est que la critique historique, fragmentant le texte en multiples sources au point de le transformer en habit d’arlequin, risque de perdre de vue son originalité – à moins de la mettre au compte de l’exégèse postérieure ; s’il existe un « message » propre au monde hébraïque, celui-ci doit alors quitter le champ des études bibliques pour s’exiler chez les talmudistes ou les médiévistes…
Les récits du Déluge
Dans l’épopée de Gilgamesh, le récit du Déluge apparaît en relation avec le personnage de Utanapishti. La rencontre de ce personnage intervient comme une étape dans le long parcours suivi par le héros à la recherche de l’immortalité (recherche finalement soldée par un échec). Utanapishti, qui a eu le bonheur d’acquérir l’immortalité, raconte comment celle-ci lui fut accordée par les dieux après qu’il eut survécu au Déluge. Le récit d’Utanapishti peut être complété par celui que nous offre l’épopée d’Atrahasis (autre nom d’Utanapishti).
Dans leurs grands traits, ces récits du Déluge offrent des analogies frappantes avec le récit biblique, malgré des différences évidentes. Voici dans ses grandes lignes la version de Gilgamesh :
- le dieu suprême (Enlil) décide l’élimination du genre humain ;
- Ea, le dieu des eaux, à l’insu d’Enlil, s’arrange pour informer son protégé Utanapishti de la catastrophe imminente et lui indique le moyen de se sauver en s’embarquant lui et les spécimens de tous les êtres vivants sur un bateau dont il lui indique les mesures ;
- Utanapishti ment à ses concitoyens sur la finalité de son bateau, et prétend simplement partir habiter chez Ea pour fuir la haine d’Enlil ;
- tous les hommes et les corps de métiers l’aident à la construction du bateau ;
- le bateau a une forme carrée, d’une taille d’environ 60 mètres sur 60. Il est divisé en sept étages et neuf compartiments ;
- Utanapishti embarque avec sa famille, sa maisonnée et les artisans, et des spécimens d’êtres vivants ;
- le Déluge commence. Le nocher aide Utanapishti à fermer l’écoutille. Le Déluge dure sept jours. L’espèce humaine retourne à l’argile ;
- à l’issue des sept jours, le bateau d’Utanapishti accoste au mont Nisir ; au bout de sept jours supplémentaires, Utanapishti lâche successivement une colombe, une hirondelle, un corbeau qui ne revient pas. Utanapishti peut alors sortir du bateau ;
- Utanapishti fait un sacrifice d’encens à tous les dieux. Enlil furieux qu’on ait contrevenu à ses plans est amadoué par Ea ; il octroie l’immortalité à Utanapishti et à sa femme à condition qu’ils aillent vivre au loin, à « l’embouchure des fleuves ».
Un décret divin, condamnant l’humanité entière ; un héros averti du danger et chargé de sauver l’espèce humaine et tous les êtres vivants ; l’arche, le Déluge, l’envoi des oiseaux en reconnaissance, la sortie du bateau et le sacrifice final : on retrouve ici la trame sur laquelle est brodée l’histoire de Noé. Certes, les différences entre les deux récits ne manquent pas. Les plus saillantes . Au niveau du détail, les principales différences sont les… s’organisent facilement autour de l’opposition entre polythéisme païen, très nettement anthropomorphe voire zoomorphe et le monothéisme hébraïque, dans lequel l’anthropomorphisme est plus discret, plus facilement interprétable vers l’allégorie. L’épopée akkadienne nous montre Enlil décidé à détruire les hommes simplement parce qu’ils l’empêchent de dormir ; Enlil n’est pas omniscient, le dieu Ea parvient à le tromper pour sauver à son insu Utanapishti ; les dieux, terrorisés par le Déluge, se terrent dans le ciel semblables à des chiens ; mais c’est comme un essaim de mouches qu’ils s’agglutinent autour du sacrifice d’encens offert par le héros. Dans le récit biblique, Dieu s’attriste ou parle « en son cœur », hume le parfum du sacrifice, plante son « arc » dans le ciel comme signe d’alliance avec l’humanité régénérée ; mais ces descriptions se comprendront, dans l’exégèse rabbinique (paraphrase araméenne, commentaires médiévaux), comme des descriptions métaphoriques. D’autre part, le Créateur (qui est unique) assume seul la décision et la réalisation de son projet, alors qu’Enlil est secondé par tout un panthéon (Hadad, Nergal, Ninurta), et parfois désapprouvé par lui (Lilith, Ea). Enfin et surtout, le Dieu hébraïque prend la décision aussi bien de la perte que du sauvetage de l’humanité : la condamnation des vivants (hommes et bêtes) résultait d’un constat à connotation ethico-religieuse : les créatures se sont corrompues et il ne s’agit de l’effacer que pour la reconstruire à nouveaux frais. Dieu sauve Noé et ses enfants pour les charger de la régénération. Les commentaires rabbiniques ajoutent une autre différence….
Ces différences n’ont pas empêché les chercheurs d’admettre une influence globale de l’épopée babylonienne sur le texte biblique . Voir le commentaire de J. Skinner, A Critical and Exegetical… ou à la rigueur de voir dans le récit biblique un avatar parmi d’autres des mythes proche-orientaux anciens . Voir Graves et Patai, op. cit., p. 126 sq. Les auteurs…. Dans les deux cas, les différences seront soit minimisées, soit attribuées à un travail postérieur de transformation. En ce qui concerne l’hypothèse historique (ou historiciste), elle peut s’appuyer sur deux vraisemblances :
- le récit du Déluge est tellement fantastique, tellement assimilable à une fiction, que l’historien a du mal à admettre un événement effectivement produit et donnant naissance à des traditions diverses chez les peuples du monde antique ;
- chronologiquement, le récit du Déluge est d’abord une tradition mésopotamienne ; les traditions concurrentes qu’on lui connaît (parmi lesquelles se place le récit biblique) lui sont toutes postérieures ; l’hypothèse la plus simple, cantonnée aux données visibles, assimile la version la plus ancienne à la version source, et les autres versions à son développement.
Or le vrai problème n’est pas tellement la validité de l’hypothèse historique (défendable ou réfutable comme toute hypothèse scientifique), mais le fait que cette hypothèse tend à éclipser, voire à occulter la question réellement intéressante, à savoir les caractères spécifiques du récit biblique. Influencé ou non par ses antécédents, le texte biblique considéré comme un tout offre une conception radicalement originale du premier devenir de l’humanité, et c’est cela qu’il aurait fallu étudier, tout en considérant l’arrière-plan des cultures antiques. Le problème est que la critique historique, fragmentant le texte en multiples sources au point de le transformer en habit d’arlequin, risque de perdre de vue son originalité – à moins de la mettre au compte de l’exégèse postérieure ; s’il existe un « message » propre au monde hébraïque, celui-ci doit alors quitter le champ des études bibliques pour s’exiler chez les talmudistes ou les médiévistes…
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Le Code de Hammourabi
Pour une Introduction, voir Béatrice André-Salvini, Le Code de…
Longtemps considéré comme le Code le plus ancien du Moyen-Orient antique, le Code de Hammourabi a été découvert en 1901 par une mission archéologique française, non point à Babylone, mais à Suse, capitale de l’Elam antique. Le monument y aurait été amené après la conquête de Babylone au xiie siècle. Le texte est écrit en akkadien et gravé en caractères cunéiformes sur une stèle de basalte haute de deux mètres cinquante. Le sommet de la stèle représente le roi debout en position d’écoute devant le dieu Shamash qui lui présente un bâton et un cercle, symboles de la royauté.
Le texte se compose d’un prologue, d’une liste de sentences, et d’un épilogue lyrique. Le prologue décrit Hammourabi comme un souverain pieux et juste, adoubé par les dieux et spécialement par le dieu Marduk. Roi conquérant, Hammourabi vante sa capacité à garantir l’ordre économique et la justice dans le pays, qui le rend analogue à Shamash, le dieu soleil garant de la justice . « Anu et Enlil nommèrent mon nom Hammourabi – le prince pieux…. La stèle est présentée comme un point de référence, à la fois religieux et juridique ; d’où l’appellation de « code » par la plupart des commentateurs. Certains ont contesté cette qualité de code, pour ne voir dans…. L’épilogue réitère la glorification du roi, et place l’image du roi et la liste des préceptes comme une sorte de référence absolue pour le règlement des différends.
Les dernières colonnes du texte menacent des pires malédictions quiconque enfreindrait la législation du roi.
Le code proprement dit comprend trois cents articles de lois, qui couvrent à peu près tous les domaines de la vie publique et privée et offrent un témoignage indirect sur la vie économique et sociale à l’époque de Hammourabi. On y remarque particulièrement la gestion des propriétés agricoles (notamment les propriétés du roi), le droit familial, la législation sur les esclaves, la punition des coups et blessures. L’exposition des lois n’obéit pas à un ordre synthétique : c’est une succession de cas particuliers, groupés par thèmes, et reliés entre eux selon une logique associative.
Bien des points rappellent ou plutôt semblent annoncer le droit biblique, formulé dans les chapitres centraux du Pentateuque (XXI-XXIII, 19) juste après le « Décalogue » (ch. XX), et communément appelé le « code de l’alliance. Le terme « livre de l’alliance » traduit l’hébreu sefer…».
D’abord la forme stylistique : le choix des cas particuliers à valeur exemplaire ; et la construction syntaxique composée d’une protase conditionnelle et d’une apodose, selon le modèle : « S’il arrive telle ou telle chose, on agira de telle ou telle façon. » Ensuite et surtout les thèmes abordés, qui reflètent une réalité socio-économique, et même une logique juridique relativement voisines. Une comparaison systématique . Voir Henri Cazelles (Études sur le code de l’alliance, Paris,… mettra en parallèle les lois qui concernent l’esclave, les dommages corporels par suite d’une rixe, le talion, accouchement d’une femme enceinte par suite de coups, le bœuf encorneur, le vol de bétail, l’effraction, le pâturage illégal, le dépôt de biens, la garde de bétail. Deux cas sont particulièrement frappants, celui du bœuf encorneur et celui de la rétribution du dommage par le dommage équivalent, communément appelé la peine du talion.
Dans le cas du bœuf encorneur, les deux codes distinguent entre l’animal réputé tranquille et l’animal déjà connu comme violent ; ils fixent un échelonnage des peines, selon que la victime est un esclave ou un homme libre.
Par-delà les différences évidentes et sur lesquelles on reviendra plus loin, la simple juxtaposition des deux traductions semble indiquer l’appartenance des textes à une même conception juridique.
Le second exemple est celui qui retient le plus l’attention parce qu’il concerne une des lois les plus discutées du corpus biblique, à savoir la loi du talion. On comparera les deux extraits suivants :
Ici encore, on remarque des différences très nettes entre la loi mésopotamienne et la loi biblique, qui ne saurait passer pour une simple copie. C’est la conclusion de Cazelles (op. cit.) : le rédacteur…; notons dès à présent que le droit babylonien fixe une échelle des peines (corporelles ou pécuniaires) qui respecte une hiérarchie stricte entre notables, gens du peuple, et esclaves. Le droit biblique distingue lui aussi entre les hommes libres et les esclaves ; cependant il introduit l’égalité des peines entre les hommes libres ; et quant aux esclaves, s’il les considère comme une propriété de leur maître (indemnisé en cas de dommage), il leur reconnaît en même temps le statut d’une personne juridique puisqu’un dommage grave (mutilation. D’après le texte, la perte d’une dent ou d’un œil. Le midrash…) leur fait mériter l’émancipation. Autre différence importante dans l’extension de la loi du talion : en Babylonie, elle s’applique au corps du coupable, mais aussi à ses enfants (le notable qui tue une femme enceinte est châtié par la mort de sa fille) ; le droit biblique ne fera pas payer les enfants pour les pères (cf. Deut. XXIV, 16).
Cependant les similitudes appellent réflexion : peut-on en tirer un enseignement pour la compréhension de la Bible ? Notons que, dans une perspective large, elles facilitent un glissement semblable au glissement observé à propos de Gilgamesh et de la Genèse : on passe de l’antériorité historique à l’idée d’influence, et cette idée finit par occulter les différences spécifiques du récit biblique, mises au compte de constructions ultérieures. Cependant, dans une perspective plus étroite et précise, la référence babylonienne peut contribuer au débat sur le sens du talion en Israël. On sait que le talion, dans le droit rabbinique, est toujours compris comme l’expression d’un dédommagement pécuniaire, la question restant de savoir si la peine corporelle formulée par le texte est une désignation abstraite ou bien une peine réelle commuée en dédommagement. Voir notamment le débat dans le Talmud de Babylone, Traité Baba…. Or le Code de Hammourabi, lui-même comparé à des codes antérieurs dans lesquels le dédommagement pécuniaire était la règle. Voir en particulier le Code d’Ur-Namma., semble avoir innové en posant la peine du talion ; il nous offre donc au moins l’exemple d’un code dans lequel le talion aurait effectivement été appliqué, et l’historien peut en tirer sinon la certitude, du moins la conjecture qu’il en allait de même dans le droit hébraïque ancien .
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Pour une Introduction, voir Béatrice André-Salvini, Le Code de…
Longtemps considéré comme le Code le plus ancien du Moyen-Orient antique, le Code de Hammourabi a été découvert en 1901 par une mission archéologique française, non point à Babylone, mais à Suse, capitale de l’Elam antique. Le monument y aurait été amené après la conquête de Babylone au xiie siècle. Le texte est écrit en akkadien et gravé en caractères cunéiformes sur une stèle de basalte haute de deux mètres cinquante. Le sommet de la stèle représente le roi debout en position d’écoute devant le dieu Shamash qui lui présente un bâton et un cercle, symboles de la royauté.
Le texte se compose d’un prologue, d’une liste de sentences, et d’un épilogue lyrique. Le prologue décrit Hammourabi comme un souverain pieux et juste, adoubé par les dieux et spécialement par le dieu Marduk. Roi conquérant, Hammourabi vante sa capacité à garantir l’ordre économique et la justice dans le pays, qui le rend analogue à Shamash, le dieu soleil garant de la justice . « Anu et Enlil nommèrent mon nom Hammourabi – le prince pieux…. La stèle est présentée comme un point de référence, à la fois religieux et juridique ; d’où l’appellation de « code » par la plupart des commentateurs. Certains ont contesté cette qualité de code, pour ne voir dans…. L’épilogue réitère la glorification du roi, et place l’image du roi et la liste des préceptes comme une sorte de référence absolue pour le règlement des différends.
Que l’homme injustement traité, qui est impliqué dans une affaire, vienne devant l’image de moi-même, le roi de justice, et se fasse lire ma stèle écrite, qu’il entende ainsi mes précieuses paroles ; que ma stèle lui indique son affaire, qu’il voie son cas, que son cœur s’apaise. Qu’il me (loue) ainsi : « Hammourabi, le seigneur qui est comme un père pour son peuple, s’est soumis à l’ordre de Marduk, son seigneur ; il a assuré à jamais le bien-être de son peuple et il a fait régner la justice dans le pays. » Qu’il parle ainsi et qu’il prie pour moi de tout son cœur devant les dieux Marduk, mon seigneur, et Zarpanitu, ma dame (l’épouse de Marduk). Que les esprits protecteurs, les dieux qui entrent dans l’Esagil, et la brique même de l’Esagil, favorisent chaque jour mes accomplissements devant Marduk, mon seigneur, et Zarpanitu, ma dame.
(B. André-Salvini, p. 80)
Les dernières colonnes du texte menacent des pires malédictions quiconque enfreindrait la législation du roi.
Le code proprement dit comprend trois cents articles de lois, qui couvrent à peu près tous les domaines de la vie publique et privée et offrent un témoignage indirect sur la vie économique et sociale à l’époque de Hammourabi. On y remarque particulièrement la gestion des propriétés agricoles (notamment les propriétés du roi), le droit familial, la législation sur les esclaves, la punition des coups et blessures. L’exposition des lois n’obéit pas à un ordre synthétique : c’est une succession de cas particuliers, groupés par thèmes, et reliés entre eux selon une logique associative.
Bien des points rappellent ou plutôt semblent annoncer le droit biblique, formulé dans les chapitres centraux du Pentateuque (XXI-XXIII, 19) juste après le « Décalogue » (ch. XX), et communément appelé le « code de l’alliance. Le terme « livre de l’alliance » traduit l’hébreu sefer…».
D’abord la forme stylistique : le choix des cas particuliers à valeur exemplaire ; et la construction syntaxique composée d’une protase conditionnelle et d’une apodose, selon le modèle : « S’il arrive telle ou telle chose, on agira de telle ou telle façon. » Ensuite et surtout les thèmes abordés, qui reflètent une réalité socio-économique, et même une logique juridique relativement voisines. Une comparaison systématique . Voir Henri Cazelles (Études sur le code de l’alliance, Paris,… mettra en parallèle les lois qui concernent l’esclave, les dommages corporels par suite d’une rixe, le talion, accouchement d’une femme enceinte par suite de coups, le bœuf encorneur, le vol de bétail, l’effraction, le pâturage illégal, le dépôt de biens, la garde de bétail. Deux cas sont particulièrement frappants, celui du bœuf encorneur et celui de la rétribution du dommage par le dommage équivalent, communément appelé la peine du talion.
Dans le cas du bœuf encorneur, les deux codes distinguent entre l’animal réputé tranquille et l’animal déjà connu comme violent ; ils fixent un échelonnage des peines, selon que la victime est un esclave ou un homme libre.
Code de Hammourabi (§ 251-52) :
Si le bœuf d’un homme est connu comme encorneur et que les autorités de son quartier lui font savoir qu’il est connu pour encorner, et qu’il ne couvre pas ses cornes ni ne contrôle son bœuf ; si ce bœuf encorne un notable et cause sa mort, il (le propriétaire) donnera 30 sicles d’argent. S’il s’agit d’un esclave, il donnera 20 sicles d’argent.
Exode (XXI, 28-32) . Par commodité, tous les passages Pentateuque cités ici en… :
Si un bœuf heurte un homme ou une femme et qu’ils en meurent, ce bœuf doit être lapidé et il ne sera point permis d’en manger la chair ; mais le propriétaire du bœuf sera absous. Si ce bœuf était sujet à heurter, déjà antérieurement, que son maître, averti, ne l’ait pas surveillé et qu’il ait fait périr un homme ou une femme, le bœuf sera lapidé et même son maître mérite la mort. Si toutefois une amende lui est imposée, il paiera la rançon de sa vie selon ce qu’on lui aura imposé. Si un bœuf heurte soit un garçon, soit une fille, la même loi lui sera appliquée. Si ce bœuf heurte un esclave ou une esclave, on paiera à leur maître une somme de trente sicles et le bœuf sera lapidé.
Par-delà les différences évidentes et sur lesquelles on reviendra plus loin, la simple juxtaposition des deux traductions semble indiquer l’appartenance des textes à une même conception juridique.
Le second exemple est celui qui retient le plus l’attention parce qu’il concerne une des lois les plus discutées du corpus biblique, à savoir la loi du talion. On comparera les deux extraits suivants :
Hammourabi, § 196-214 :
Si un homme de la classe des notables crève l’œil d’un autre notable, on lui crèvera un œil. S’il brise l’os d’un autre notable, on lui brisera un os… S’il crève l’œil d’un homme de la classe populaire ou brise l’os d’un homme du peuple, il pèsera 1 mine d’argent (60 sicles). S’il crève l’œil d’un esclave de notable, ou brise l’os d’un esclave de notable, il pèsera la moitié de son prix. Si un notable casse la dent d’un autre notable, son égal, on lui cassera une dent. S’il casse la dent d’un homme du peuple, il pèsera un tiers de mine d’argent. Si un notable frappe la joue d’un autre notable qui est plus âgé que lui (ou d’un statut plus élevé que lui), il sera frappé publiquement de 60 coups de nerf de bœuf. S’il frappe la joue d’un autre notable qui est son égal, il pèsera et livrera 60 sicles d’argent. Si un homme du peuple frappe la joue d’un autre homme du peuple, il pèsera et livrera 10 sicles d’argent. Si l’esclave d’un notable frappe la joue d’un notable, on lui coupera l’oreille. Si un notable frappe un autre notable durant une rixe et lui inflige une blessure, cet homme jurera : « je ne l’ai pas frappé intentionnellement » et il paiera le médecin. S’il meurt à la suite de ce coup, il jurera « je ne l’ai pas frappé intentionnellement » ; si la victime est un notable, il pèsera et livrera une demi-mine (30 sicles) d’argent. Si la victime est un homme de la classe populaire, il livrera un tiers de mine d’argent. Si un notable frappe une femme de la classe des notables et cause une fausse couche pour son fœtus, il pèsera et livrera 10 sicles d’argent pour son fœtus. Si cette femme meurt, on tuera sa fille (la fille du notable). S’il provoque une fausse couche pour le fœtus d’une femme du peuple, il pèsera et livrera 5 sicles d’argent. Si cette femme meurt, il pèsera et livrera 30 sicles d’argent. S’il frappe l’esclave d’un notable et provoque une fausse couche pour son fœtus, il pèsera et livrera 2 sicles d’argent. Si l’esclave meurt, il pèsera et livrera 20 sicles d’argent.
Exode, XXI (22-35). Le principe du talion se rencontre aussi in Lév. XXIV. :
22 « Si, des hommes ayant une rixe, l’un d’eux heurte une femme enceinte et la fait avorter sans autre malheur, il sera condamné à l’amende que lui fera infliger l’époux de cette femme et il la paiera à dire d’experts. 23 Mais si un malheur s’ensuit, tu feras payer corps pour corps ; 24 œil pour œil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied ; 25 brûlure pour brûlure, plaie pour plaie, contusion pour contusion. 26 Si un homme blesse l’œil de son esclave ou de sa servante de manière à lui en ôter l’usage, il le renverra libre à cause de son œil 27 et s’il fait tomber une dent à son esclave ou à sa servante, il lui rendra la liberté à cause de sa dent. 28 Si un bœuf heurte un homme ou une femme et qu’ils en meurent, ce bœuf doit être lapidé et il ne sera point permis d’en manger la chair ; mais le propriétaire du bœuf sera absous. 29 Si ce bœuf était sujet à heurter, déjà antérieurement, que son maître, averti, ne l’ait pas surveillé et qu’il ait fait périr un homme ou une femme, le bœuf sera lapidé et même son maître mérite la mort. 30 Si toutefois une amende lui est imposée, il paiera la rançon de sa vie selon ce qu’on lui aura imposé. 31 Si un bœuf heurte soit un garçon, soit une fille, la même loi lui sera appliquée. 32 Si ce bœuf heurte un esclave ou une esclave, on paiera à leur maître une somme de trente sicles et le bœuf sera lapidé. 33 Si quelqu’un découvre une citerne, ou si, en ayant creusé une, il ne la couvre point et qu’un bœuf ou un âne y tombe, 34 le propriétaire de la citerne doit payer : il remboursera la valeur au maître et l’animal mort lui restera. 35 Mais si, notoirement, ce bœuf a déjà heurté à plusieurs reprises et que son maître ne l’ait pas surveillé, il devra restituer bœuf pour bœuf et le bœuf tué lui restera.
Ici encore, on remarque des différences très nettes entre la loi mésopotamienne et la loi biblique, qui ne saurait passer pour une simple copie. C’est la conclusion de Cazelles (op. cit.) : le rédacteur…; notons dès à présent que le droit babylonien fixe une échelle des peines (corporelles ou pécuniaires) qui respecte une hiérarchie stricte entre notables, gens du peuple, et esclaves. Le droit biblique distingue lui aussi entre les hommes libres et les esclaves ; cependant il introduit l’égalité des peines entre les hommes libres ; et quant aux esclaves, s’il les considère comme une propriété de leur maître (indemnisé en cas de dommage), il leur reconnaît en même temps le statut d’une personne juridique puisqu’un dommage grave (mutilation. D’après le texte, la perte d’une dent ou d’un œil. Le midrash…) leur fait mériter l’émancipation. Autre différence importante dans l’extension de la loi du talion : en Babylonie, elle s’applique au corps du coupable, mais aussi à ses enfants (le notable qui tue une femme enceinte est châtié par la mort de sa fille) ; le droit biblique ne fera pas payer les enfants pour les pères (cf. Deut. XXIV, 16).
Cependant les similitudes appellent réflexion : peut-on en tirer un enseignement pour la compréhension de la Bible ? Notons que, dans une perspective large, elles facilitent un glissement semblable au glissement observé à propos de Gilgamesh et de la Genèse : on passe de l’antériorité historique à l’idée d’influence, et cette idée finit par occulter les différences spécifiques du récit biblique, mises au compte de constructions ultérieures. Cependant, dans une perspective plus étroite et précise, la référence babylonienne peut contribuer au débat sur le sens du talion en Israël. On sait que le talion, dans le droit rabbinique, est toujours compris comme l’expression d’un dédommagement pécuniaire, la question restant de savoir si la peine corporelle formulée par le texte est une désignation abstraite ou bien une peine réelle commuée en dédommagement. Voir notamment le débat dans le Talmud de Babylone, Traité Baba…. Or le Code de Hammourabi, lui-même comparé à des codes antérieurs dans lesquels le dédommagement pécuniaire était la règle. Voir en particulier le Code d’Ur-Namma., semble avoir innové en posant la peine du talion ; il nous offre donc au moins l’exemple d’un code dans lequel le talion aurait effectivement été appliqué, et l’historien peut en tirer sinon la certitude, du moins la conjecture qu’il en allait de même dans le droit hébraïque ancien .
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Arlitto- Admin
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Éléments pour une comparaison structurelle
Comme je l’ai dit au début de ce travail, la question théologique relative à la Bible (révélée ou non) est considérée ici comme secondaire. Ce n’est pas que la mythologie comparée n’ébranle pas les certitudes du croyant, juif ou chrétien, en menaçant de dissoudre l’origine et la signification de leur message. Mais ce « choc » initial peut se dépasser dans une réflexion plus poussée et souvent dans un véritable dialogue. Chez les penseurs chrétiens, à la représentation simpliste de « l’histoire sainte » et de « l’écriture sainte », a succédé une lecture qui accepte l’existence de contenus mythologiques historiquement marqués mais tente d’y repérer l’élaboration du message ou « kérygme » évangélique. On pense ici en particulier aux thèses de Bultmann et à leur développement chez Paul Ricœur. Chez les penseurs juifs d’inspiration rabbinique, le problème se poserait différemment : d’un côté, on ne concéderait rien . Malgré de timides exceptions : voir David Weiss Halivni,… sur le caractère révélé et unitaire de la Torah . Je me concentre ici sur le Pentateuque ou « Torah de Moïse »…, parce que le judaïsme se définit d’abord comme une herméneutique de ce texte et comme une tradition remontant à son origine ; aux yeux de l’érudition traditionnelle, la prophétie hébraïque transmet un contenu spécifique, irréductible aux folklores païens, et le texte de la Torah est le vecteur incontournable de ce contenu.
Mais de l’autre, l’exégèse juive traditionnelle conçoit cette révélation et la tradition qui en découle comme conditionnées par le temps, la langue, les cultures qui les ont vues apparaître et se continuer ; de ce fait, elle admet toujours des ponts, des rencontres, des similitudes, voire des emprunts dans les deux sens. Si donc la Torah est révélée, elle n’en est pas pour cela ineffable ou incomparable. Pour le midrash, la sortie d’Égypte et le don de la Torah (actes fondateurs d’Israël) sont précédés par toute une préhistoire (d’Adam aux « patriarches ») au cours de laquelle une identité hébraïque se dégage des autres ethnies du monde ancien. Abraham a grandi dans la culture mésopotamienne avec laquelle il rompt pour passer en Canaan. Dans ce contexte, les similitudes étudiées ici ne posent pas vraiment de problème et elles seraient même plutôt attendues : concernant l’épopée de Gilgamesh, il n’y a rien d’étonnant à ce que le Déluge et l’histoire de Noé, considérés comme des événements réellement produits, aient inspiré des traditions mythiques différentes, parmi lesquelles une tradition hébraïque, reprise sous une forme particulière dans la révélation de Moïse. Quant au Code de Hammourabi, il serait l’exemple d’élaborations très anciennes de la loi, parmi lesquelles le midrash placerait les lois « noachides », fixées par Noé et ses descendants sur la base de l’alliance contractée après le Déluge.
La question serait plutôt de savoir si une réflexion commune peut s’élaborer entre l’érudition traditionnelle et la recherche historique, chacune possédant ses règles propres. La réponse à cette question doit être nuancée. S’il existe des obstacles évidents à l’intégration pure et simple des deux disciplines, cependant on peut cerner prudemment certaines zones de rencontre, et c’est à l’intérieur de ces zones qu’il conviendrait de travailler. On délimitera le champ de travail à l’aide d’un certain nombre d’hypothèses admises à titre de postulat ; même quand l’historien émet de sérieuses réserves à l’égard de leur validité, il pourra toujours les accepter à titre provisoire et spéculatif, attentif pour le moins à leur valeur heuristique.
Dans le cadre très restreint de cette étude, on se contentera d’une hypothèse de base : l’unité et la cohérence du texte de la « Torah » hébraïque. Cette hypothèse autorise une lecture synchronique. La diachronie n’est pas exclue, mais elle est soumise aux… attentive à dégager certains rapports fixes ou « structures . Sans forcément donner à ce terme le sens précis que lui a donné… ». La comparaison conduite sur cette base évite le réductionnisme d’une culture à l’autre ; elle ouvre la voie à une herméneutique plus large, qui intégrerait de façon raisonnée les données des traditions et des exégèses plus tardives. Cette deuxième herméneutique ne sera pas appliquée ici, et on la réserve à des études ultérieures.
Une fois admis l’unité du texte biblique, on est légitimé à rechercher son contenu propre à partir d’une lecture cohérente. L’examen de la différence permet de penser à nouveau la similitude, fonds commun sur lequel se détachent les caractères de chaque culture. Elle permet aussi, à partir des « choix » bibliques, de renouveler la réflexion sur les textes mésopotamiens.
Comme je l’ai dit au début de ce travail, la question théologique relative à la Bible (révélée ou non) est considérée ici comme secondaire. Ce n’est pas que la mythologie comparée n’ébranle pas les certitudes du croyant, juif ou chrétien, en menaçant de dissoudre l’origine et la signification de leur message. Mais ce « choc » initial peut se dépasser dans une réflexion plus poussée et souvent dans un véritable dialogue. Chez les penseurs chrétiens, à la représentation simpliste de « l’histoire sainte » et de « l’écriture sainte », a succédé une lecture qui accepte l’existence de contenus mythologiques historiquement marqués mais tente d’y repérer l’élaboration du message ou « kérygme » évangélique. On pense ici en particulier aux thèses de Bultmann et à leur développement chez Paul Ricœur. Chez les penseurs juifs d’inspiration rabbinique, le problème se poserait différemment : d’un côté, on ne concéderait rien . Malgré de timides exceptions : voir David Weiss Halivni,… sur le caractère révélé et unitaire de la Torah . Je me concentre ici sur le Pentateuque ou « Torah de Moïse »…, parce que le judaïsme se définit d’abord comme une herméneutique de ce texte et comme une tradition remontant à son origine ; aux yeux de l’érudition traditionnelle, la prophétie hébraïque transmet un contenu spécifique, irréductible aux folklores païens, et le texte de la Torah est le vecteur incontournable de ce contenu.
Mais de l’autre, l’exégèse juive traditionnelle conçoit cette révélation et la tradition qui en découle comme conditionnées par le temps, la langue, les cultures qui les ont vues apparaître et se continuer ; de ce fait, elle admet toujours des ponts, des rencontres, des similitudes, voire des emprunts dans les deux sens. Si donc la Torah est révélée, elle n’en est pas pour cela ineffable ou incomparable. Pour le midrash, la sortie d’Égypte et le don de la Torah (actes fondateurs d’Israël) sont précédés par toute une préhistoire (d’Adam aux « patriarches ») au cours de laquelle une identité hébraïque se dégage des autres ethnies du monde ancien. Abraham a grandi dans la culture mésopotamienne avec laquelle il rompt pour passer en Canaan. Dans ce contexte, les similitudes étudiées ici ne posent pas vraiment de problème et elles seraient même plutôt attendues : concernant l’épopée de Gilgamesh, il n’y a rien d’étonnant à ce que le Déluge et l’histoire de Noé, considérés comme des événements réellement produits, aient inspiré des traditions mythiques différentes, parmi lesquelles une tradition hébraïque, reprise sous une forme particulière dans la révélation de Moïse. Quant au Code de Hammourabi, il serait l’exemple d’élaborations très anciennes de la loi, parmi lesquelles le midrash placerait les lois « noachides », fixées par Noé et ses descendants sur la base de l’alliance contractée après le Déluge.
La question serait plutôt de savoir si une réflexion commune peut s’élaborer entre l’érudition traditionnelle et la recherche historique, chacune possédant ses règles propres. La réponse à cette question doit être nuancée. S’il existe des obstacles évidents à l’intégration pure et simple des deux disciplines, cependant on peut cerner prudemment certaines zones de rencontre, et c’est à l’intérieur de ces zones qu’il conviendrait de travailler. On délimitera le champ de travail à l’aide d’un certain nombre d’hypothèses admises à titre de postulat ; même quand l’historien émet de sérieuses réserves à l’égard de leur validité, il pourra toujours les accepter à titre provisoire et spéculatif, attentif pour le moins à leur valeur heuristique.
Dans le cadre très restreint de cette étude, on se contentera d’une hypothèse de base : l’unité et la cohérence du texte de la « Torah » hébraïque. Cette hypothèse autorise une lecture synchronique. La diachronie n’est pas exclue, mais elle est soumise aux… attentive à dégager certains rapports fixes ou « structures . Sans forcément donner à ce terme le sens précis que lui a donné… ». La comparaison conduite sur cette base évite le réductionnisme d’une culture à l’autre ; elle ouvre la voie à une herméneutique plus large, qui intégrerait de façon raisonnée les données des traditions et des exégèses plus tardives. Cette deuxième herméneutique ne sera pas appliquée ici, et on la réserve à des études ultérieures.
Une fois admis l’unité du texte biblique, on est légitimé à rechercher son contenu propre à partir d’une lecture cohérente. L’examen de la différence permet de penser à nouveau la similitude, fonds commun sur lequel se détachent les caractères de chaque culture. Elle permet aussi, à partir des « choix » bibliques, de renouveler la réflexion sur les textes mésopotamiens.
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Le Déluge biblique
Fidèles à notre projet, il s’agit à présent d’explorer les différences entre les textes pour tenter d’en tirer un schéma global. Revenir sur ce qu’on a déjà esquissé plus haut, à présent dans une visée plus systématique, et dépasser l’opposition simpliste entre un monothéisme « moral » et un polythéisme « immoral » pour saisir des enjeux plus systématiques. Il s’agit de reconnaître la spécificité du contenu biblique, qu’on ne peut réduire au simple reflet de son antécédent babylonien ; mais on se gardera aussi de l’excès inverse, qui consisterait à transformer le texte « païen » en simple négatif ou faire-valoir du texte hébreu. Une lecture (cohérente) de la Genèse devrait au contraire permettre de jeter un éclairage renouvelé sur l’épopée de Gilgamesh.
Quatre points importants méritent d’être soulignés :
Dieu et l’homme
Le récit du Déluge est en relation directe avec l’idée posée par la Genèse de Dieu créateur du monde. Dans le cadre de ce travail je donne au verbe « créer » le sens…. La décision d’effacer la création est exprimée comme une forme de repentir (VI, 6), qui suggère que la création obéissait à un plan ou à une attente, qui n’ont pas été remplis.
La règle enfreinte et confirmée
Le jugement porté par Dieu sur sa créature nous apparaît comme un constat d’ordre religieux ou moral, mais il ne faudrait pas trop presser ces termes. Les termes de « mauvais » ou de « mal », déjà apparu à propos de l’arbre du « Bien et Mal » et de son fruit défendu (Gen. III) possèdent une extension très vaste, couvrant aussi bien les domaines de la vie biologique et de la sexualité que du droit, de la morale et de la religion. De ce fait il concerne aussi bien l’être humain que tous les êtres vivants. Le constat du mal part de l’homme et de ses pensées, mais il s’étend aussi à tous les animaux et à la terre entière, enveloppés dans la même condamnation (v. 10-11). L’aspect juridique apparaît précisément dans l’accusation d’injustice (h’amas, ibid.) appliquée spécialement au vol ou au pillage. Mais tous les niveaux de signification se retrouvent dans le constat général d’après lequel tous les vivants (kol bassar . Au sens littéral : chair.) ont corrompu ou détruit leurs « voies ». La « voie » (derekh), c’est la conduite en général, et particulièrement la conduite sexuelle. Le midrash comprend ainsi la « corruption des voies » comme la…. La justice ou droiture reconnue à Noé (tsaddiq, v. 9) devrait se comprendre avec la même largeur d’acception.
La délivrance et sa condition
Comme on l’a signalé plus haut, le Dieu qui détruit est aussi celui qui sauve. Noé, à la différence de sa génération, est resté fidèle au dessein initial de la création ; à ce titre il sera le bénéficiaire, mais aussi l’agent, de sa régénération. À travers Noé, la collectivité du vivant prend l’aspect d’un sujet moral ou juridique, et le nouveau départ donné à la création s’exprime en termes d’alliance. Comme dans le récit de Gilgamesh, le Déluge et la délivrance aboutissent à un sacrifice (VIII, 20) mais ce sacrifice, préparé ou suggéré par la prescription divine. En plus du couple choisi dans chaque espèce, Noé doit prendre…, a pour réponse la conclusion de l’alliance.
La leçon pour la postérité humaine
L’alliance comporte une bénédiction pour les engendrements, elle réitère la domination de l’homme sur les autres êtres vivants (déjà décernée à Adam), fixe le licite et l’illicite dans l’alimentation, et l’interdiction du meurtre. Encore une fois, la moralité dont il est question dans le récit…. L’exégèse rabbinique en déduit un code de loi fondamental défini comme « lois noachides », contrepartie universelle de ce que sera la loi mosaïque pour Israël. Ainsi le récit du Déluge prend son sens à l’intérieur du sens général de la « Torah » : il constitue une étape fondamentale dans l’histoire de l’humanité, et conditionne celle-ci par un dessein et un contrat d’alliance. Cette alliance universelle préfigure et « encadre » l’alliance spécifique contractée avec Israël lors du don de la Torah.
Si mythe il y a, ce mythe présente l’étiologie d’une relation au monde dans laquelle Dieu garantit par contrat une certaine notion de la vie et de sa protection. Cette vision pourra se comprendre par la postérité dans le sens d’une théologie et d’une éthique rationnelle voire rationaliste, sans cependant épuiser la fécondité du texte et son aspect « mythique ». On notera en particulier que la compréhension métaphorique des anthropomorphismes, pour systématique qu’elle soit. À l’exemple de ce que fait Maïmonide dans le Guide des Égarés., n’atteindrait la vraisemblance historique qu’une fois appuyée sur une sémantique générale étendue aux mythes contemporains de la Bible. Faute de quoi, il faudrait expliquer pourquoi…. Similitudes et différences seraient toujours à comprendre à l’intérieur d’une herméneutique globale, servie par une méthode unifiée et cohérente.
Fidèles à notre projet, il s’agit à présent d’explorer les différences entre les textes pour tenter d’en tirer un schéma global. Revenir sur ce qu’on a déjà esquissé plus haut, à présent dans une visée plus systématique, et dépasser l’opposition simpliste entre un monothéisme « moral » et un polythéisme « immoral » pour saisir des enjeux plus systématiques. Il s’agit de reconnaître la spécificité du contenu biblique, qu’on ne peut réduire au simple reflet de son antécédent babylonien ; mais on se gardera aussi de l’excès inverse, qui consisterait à transformer le texte « païen » en simple négatif ou faire-valoir du texte hébreu. Une lecture (cohérente) de la Genèse devrait au contraire permettre de jeter un éclairage renouvelé sur l’épopée de Gilgamesh.
Quatre points importants méritent d’être soulignés :
Dieu et l’homme
Le récit du Déluge est en relation directe avec l’idée posée par la Genèse de Dieu créateur du monde. Dans le cadre de ce travail je donne au verbe « créer » le sens…. La décision d’effacer la création est exprimée comme une forme de repentir (VI, 6), qui suggère que la création obéissait à un plan ou à une attente, qui n’ont pas été remplis.
La règle enfreinte et confirmée
Le jugement porté par Dieu sur sa créature nous apparaît comme un constat d’ordre religieux ou moral, mais il ne faudrait pas trop presser ces termes. Les termes de « mauvais » ou de « mal », déjà apparu à propos de l’arbre du « Bien et Mal » et de son fruit défendu (Gen. III) possèdent une extension très vaste, couvrant aussi bien les domaines de la vie biologique et de la sexualité que du droit, de la morale et de la religion. De ce fait il concerne aussi bien l’être humain que tous les êtres vivants. Le constat du mal part de l’homme et de ses pensées, mais il s’étend aussi à tous les animaux et à la terre entière, enveloppés dans la même condamnation (v. 10-11). L’aspect juridique apparaît précisément dans l’accusation d’injustice (h’amas, ibid.) appliquée spécialement au vol ou au pillage. Mais tous les niveaux de signification se retrouvent dans le constat général d’après lequel tous les vivants (kol bassar . Au sens littéral : chair.) ont corrompu ou détruit leurs « voies ». La « voie » (derekh), c’est la conduite en général, et particulièrement la conduite sexuelle. Le midrash comprend ainsi la « corruption des voies » comme la…. La justice ou droiture reconnue à Noé (tsaddiq, v. 9) devrait se comprendre avec la même largeur d’acception.
La délivrance et sa condition
Comme on l’a signalé plus haut, le Dieu qui détruit est aussi celui qui sauve. Noé, à la différence de sa génération, est resté fidèle au dessein initial de la création ; à ce titre il sera le bénéficiaire, mais aussi l’agent, de sa régénération. À travers Noé, la collectivité du vivant prend l’aspect d’un sujet moral ou juridique, et le nouveau départ donné à la création s’exprime en termes d’alliance. Comme dans le récit de Gilgamesh, le Déluge et la délivrance aboutissent à un sacrifice (VIII, 20) mais ce sacrifice, préparé ou suggéré par la prescription divine. En plus du couple choisi dans chaque espèce, Noé doit prendre…, a pour réponse la conclusion de l’alliance.
La leçon pour la postérité humaine
L’alliance comporte une bénédiction pour les engendrements, elle réitère la domination de l’homme sur les autres êtres vivants (déjà décernée à Adam), fixe le licite et l’illicite dans l’alimentation, et l’interdiction du meurtre. Encore une fois, la moralité dont il est question dans le récit…. L’exégèse rabbinique en déduit un code de loi fondamental défini comme « lois noachides », contrepartie universelle de ce que sera la loi mosaïque pour Israël. Ainsi le récit du Déluge prend son sens à l’intérieur du sens général de la « Torah » : il constitue une étape fondamentale dans l’histoire de l’humanité, et conditionne celle-ci par un dessein et un contrat d’alliance. Cette alliance universelle préfigure et « encadre » l’alliance spécifique contractée avec Israël lors du don de la Torah.
Si mythe il y a, ce mythe présente l’étiologie d’une relation au monde dans laquelle Dieu garantit par contrat une certaine notion de la vie et de sa protection. Cette vision pourra se comprendre par la postérité dans le sens d’une théologie et d’une éthique rationnelle voire rationaliste, sans cependant épuiser la fécondité du texte et son aspect « mythique ». On notera en particulier que la compréhension métaphorique des anthropomorphismes, pour systématique qu’elle soit. À l’exemple de ce que fait Maïmonide dans le Guide des Égarés., n’atteindrait la vraisemblance historique qu’une fois appuyée sur une sémantique générale étendue aux mythes contemporains de la Bible. Faute de quoi, il faudrait expliquer pourquoi…. Similitudes et différences seraient toujours à comprendre à l’intérieur d’une herméneutique globale, servie par une méthode unifiée et cohérente.
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Le Déluge babylonien
Le contenu spécifique du récit biblique peut à son tour servir de départ pour un nouvel examen de l’épopée babylonienne, en reprenant les quatre points isolés plus haut. Quelques détails supplémentaires, tirés du mythe d’Atrahasis, nous permettront de compléter le récit de Gilgamesh et d’en tirer un enseignement plus global. La complémentarité des deux mythes est bien entendu un postulat.. D’après ce mythe, l’homme a été créé par les dieux subalternes (pas par le dieu suprême, Enlil) pour travailler. Enlil décide l’élimination de l’humanité parce que celle-ci, trop bruyante, l’empêchait de dormir.
Les dieux et l’homme
Au Dieu créateur de la Bible, on peut opposer un dieu suprême (Enlil) et une multiplicité de dieux, souvent identifiables pour nous à des forces naturelles, qui secondent le dessein d’Enlil mais peuvent aussi le désapprouver et même le desservir. Si dessein il y a pour l’homme, c’est celui d’un être subalterne, situé au-dessous des dieux subalternes et appelé à les servir, mais trouvant par là sa raison d’être (c’est finalement cette utilité de l’homme qui écarte de lui la menace d’extermination). L’ordre cosmique s’apparente à l’ordre social et politique, et comporte le même caractère d’arbitraire, mais aussi de sécurité.
La règle enfreinte et affirmée
On reconnaîtrait dans cette fonction sociale la règle directrice essentielle de l’humanité. Cependant le Déluge ne vient pas châtier une infraction à cette règle, à moins d’identifier le « bruit » des hommes à une mise en cause de l’ordre social ou cosmique (ce que le texte n’établit pas). Comme on l’a dit, Enlil décide l’extermination des hommes parce que ceux-ci troublent son sommeil. Peut-on accorder un sens à cette image du dieu dormeur, qui dépasserait l’imagerie naïve ou péjorative ? Certes, il n’est pas exclu que le mythe exprime quelque dérision à l’égard d’un dieu trop lointain, en l’accusant de fainéantise : dans le livre biblique des Rois, le prophète Élie se moquera des prêtres de Baal en leur demandant de vérifier si par hasard leur dieu ne s’est pas endormi (XVIII, 27). Cf. aussi Psaumes, XLVI, 24 : « Lève-toi, pourquoi…. Cependant le sommeil d’Enlil n’est pas forcément signe d’impuissance ou d’imperfection, comme le prouve la décision qu’il inspire. Il serait plutôt le signe d’une certaine plénitude (un repos en soi-même) corollaire d’une absence d’intervention dans le monde. La règle à respecter serait une sorte de « paix industrielle » dans laquelle l’homme éviterait de faire « trop de bruit ».
La délivrance et sa condition
Le Dieu biblique choisit un Juste pour préparer la relève de l’humanité et l’avertit de sa décision. Dans l’épopée babylonienne, qui distingue entre le dieu destructeur et le dieu sauveur, le sauvetage d’Utanapishti ne se conçoit que comme la transgression de la volonté suprême par le dieu Ea, qui agit par ruse et en cachette. Cet antagonisme entre un dieu ennemi et un dieu complice des hommes n’est pas sans rappeler l’histoire de Prométhée, à la différence qu’Ea protège seulement un individu, pas l’humanité entière, et qu’il n’est pas châtié pour sa conduite. Mais l’idée reste quand même analogue à celle du mythe grec : les dieux sont à la fois amis et ennemis de l’homme et celui-ci ne doit sa réussite ou sa survie qu’à l’appui de certains d’entre eux. Même si l’homme a sa place dans l’ordre universel, il ne doit pas son salut à une providence universelle mais à une situation de fait à l’intérieur de laquelle on peut « s’arranger ».
À la fin du récit, Enlil furieux d’avoir été grugé se laisse amadouer et octroie l’immortalité à Utanapishti, à la condition pour celui-ci de vivre désormais à l’écart des autres hommes. C’est finalement la seule condition qui est posée comme alternative au Déluge. Il est remarquable que le rôle d’Utanapishti comme père d’une humanité nouvelle soit négligé. En fait Utanapishti a pris avec lui les artisans qui l’ont aidé… au profit de sa destinée exceptionnelle. Tout se passe comme si l’enjeu du débat n’était pas l’avenir de l’humanité, mais le privilège divin accordé à un individu humain. Le privilège est finalement confirmé, mais à la condition de rester précisément une exception et non pas un précédent. Un peu comme si le récit nous disait : le salut existe, mais vous ne le trouverez pas dans une autre réalité que dans celle du mythe, aux confins du monde réel.
La leçon pour la postérité humaine
C’est bien là sans doute la leçon du Déluge dans l’épopée de Gilgamesh. N’oublions pas que Gilgamesh est allé trouver Utanapishti pour lui demander la clé de l’immortalité, or cette clé, il ne pourra jamais l’obtenir ou du moins la conserver. Le mythe pose simultanément la limite de la condition humaine et le statut privilégié de certains êtres d’exception, dieux ou héros divinisés. On peut se demander si cette leçon n’a pas été appliquée par les souverains mésopotamiens pour affermir leur pouvoir ; et la relation étroite qu’ils entretenaient avec les dieux (voir le prologue de Hammourabi) les a fait finalement basculer du côté des immortels. C’est du moins ce qui s’est passé pour Gilgamesh, dont on a vu qu’il a été divinisé.
La ligne de partage ?
Entre la tradition babylonienne et la tradition hébraïque, la ligne de partage essentielle semble bien être la question de la destinée humaine dans son rapport au (x) dieu (x). Le récit babylonien perpétue l’idée d’une destinée mortelle, adoucie par l’appui de certains dieux et par la possibilité de certaines destinées d’exception ; la dichotomie entre héros divinisé et homme ordinaire y joue un rôle essentiel. Le récit biblique pose la possibilité du bonheur humain à travers l’application d’une régulation inspirée par Dieu. Sans doute cette conclusion était-elle attendue, dès le moment où l’on replace le récit de la Genèse dans le cadre de la « Torah » mosaïque avant tout prescriptive. Mais il faut quand même insister sur sa signification globale et sur les valeurs corollaires de responsabilité et de liberté qu’elle favorise, et qu’on retrouvera plus loin dans la comparaison des deux codes de loi.
Ces différences de perspective permettent-elles d’expliquer les différences plus ténues qui séparent les deux traditions ? Une telle investigation nécessiterait une connaissance plus profonde des arrière-plans culturels, connaissance peut-être inaccessible. On peut cependant esquisser un semblant de recherche à propos de l’épisode des oiseaux, où l’on note une variation assez curieuse entre la Genèse et Gilgamesh. À la fin du Déluge, Utanapishti envoie successivement trois oiseaux en reconnaissance : la colombe, l’hirondelle, et le corbeau. Noé, par contre, n’envoie que deux oiseaux et dans un ordre différent : d’abord le corbeau. Il n’est d’ailleurs pas nettement spécifié que le corbeau avait…, et ensuite la colombe. Il n’est pas clair si une symbolique se cache derrière le choix du héros babylonien et de la préférence donnée au corbeau ; mais le choix de Noé présente en revanche une cohérence certaine avec la séparation posée au début du texte entre les animaux purs et les animaux impurs ; cette séparation sous-tendrait le choix de deux oiseaux particuliers et expliquerait la préférence finale de la colombe pour la découverte de la terre habitable. Tout cela ouvre un vaste champ d’interprétations qui sera exploitée par le midrash. Voir en particulier le midrash Bereshit Rabba sur ce passage. mais dont l’historien pourrait aussi tirer profit.
Les conceptions juridiques
La même méthode, appliquée aux parties prescriptives de la Torah, permet d’en éclairer certains traits essentiels. Cette recherche exigerait le complément d’une confrontation critique avec l’exégèse midrashique, mais dans le cadre défini ici, on se limitera aux enseignements les plus accessibles du texte, pris dans son sens obvie.
Le contenu spécifique du récit biblique peut à son tour servir de départ pour un nouvel examen de l’épopée babylonienne, en reprenant les quatre points isolés plus haut. Quelques détails supplémentaires, tirés du mythe d’Atrahasis, nous permettront de compléter le récit de Gilgamesh et d’en tirer un enseignement plus global. La complémentarité des deux mythes est bien entendu un postulat.. D’après ce mythe, l’homme a été créé par les dieux subalternes (pas par le dieu suprême, Enlil) pour travailler. Enlil décide l’élimination de l’humanité parce que celle-ci, trop bruyante, l’empêchait de dormir.
Les dieux et l’homme
Au Dieu créateur de la Bible, on peut opposer un dieu suprême (Enlil) et une multiplicité de dieux, souvent identifiables pour nous à des forces naturelles, qui secondent le dessein d’Enlil mais peuvent aussi le désapprouver et même le desservir. Si dessein il y a pour l’homme, c’est celui d’un être subalterne, situé au-dessous des dieux subalternes et appelé à les servir, mais trouvant par là sa raison d’être (c’est finalement cette utilité de l’homme qui écarte de lui la menace d’extermination). L’ordre cosmique s’apparente à l’ordre social et politique, et comporte le même caractère d’arbitraire, mais aussi de sécurité.
La règle enfreinte et affirmée
On reconnaîtrait dans cette fonction sociale la règle directrice essentielle de l’humanité. Cependant le Déluge ne vient pas châtier une infraction à cette règle, à moins d’identifier le « bruit » des hommes à une mise en cause de l’ordre social ou cosmique (ce que le texte n’établit pas). Comme on l’a dit, Enlil décide l’extermination des hommes parce que ceux-ci troublent son sommeil. Peut-on accorder un sens à cette image du dieu dormeur, qui dépasserait l’imagerie naïve ou péjorative ? Certes, il n’est pas exclu que le mythe exprime quelque dérision à l’égard d’un dieu trop lointain, en l’accusant de fainéantise : dans le livre biblique des Rois, le prophète Élie se moquera des prêtres de Baal en leur demandant de vérifier si par hasard leur dieu ne s’est pas endormi (XVIII, 27). Cf. aussi Psaumes, XLVI, 24 : « Lève-toi, pourquoi…. Cependant le sommeil d’Enlil n’est pas forcément signe d’impuissance ou d’imperfection, comme le prouve la décision qu’il inspire. Il serait plutôt le signe d’une certaine plénitude (un repos en soi-même) corollaire d’une absence d’intervention dans le monde. La règle à respecter serait une sorte de « paix industrielle » dans laquelle l’homme éviterait de faire « trop de bruit ».
La délivrance et sa condition
Le Dieu biblique choisit un Juste pour préparer la relève de l’humanité et l’avertit de sa décision. Dans l’épopée babylonienne, qui distingue entre le dieu destructeur et le dieu sauveur, le sauvetage d’Utanapishti ne se conçoit que comme la transgression de la volonté suprême par le dieu Ea, qui agit par ruse et en cachette. Cet antagonisme entre un dieu ennemi et un dieu complice des hommes n’est pas sans rappeler l’histoire de Prométhée, à la différence qu’Ea protège seulement un individu, pas l’humanité entière, et qu’il n’est pas châtié pour sa conduite. Mais l’idée reste quand même analogue à celle du mythe grec : les dieux sont à la fois amis et ennemis de l’homme et celui-ci ne doit sa réussite ou sa survie qu’à l’appui de certains d’entre eux. Même si l’homme a sa place dans l’ordre universel, il ne doit pas son salut à une providence universelle mais à une situation de fait à l’intérieur de laquelle on peut « s’arranger ».
À la fin du récit, Enlil furieux d’avoir été grugé se laisse amadouer et octroie l’immortalité à Utanapishti, à la condition pour celui-ci de vivre désormais à l’écart des autres hommes. C’est finalement la seule condition qui est posée comme alternative au Déluge. Il est remarquable que le rôle d’Utanapishti comme père d’une humanité nouvelle soit négligé. En fait Utanapishti a pris avec lui les artisans qui l’ont aidé… au profit de sa destinée exceptionnelle. Tout se passe comme si l’enjeu du débat n’était pas l’avenir de l’humanité, mais le privilège divin accordé à un individu humain. Le privilège est finalement confirmé, mais à la condition de rester précisément une exception et non pas un précédent. Un peu comme si le récit nous disait : le salut existe, mais vous ne le trouverez pas dans une autre réalité que dans celle du mythe, aux confins du monde réel.
La leçon pour la postérité humaine
C’est bien là sans doute la leçon du Déluge dans l’épopée de Gilgamesh. N’oublions pas que Gilgamesh est allé trouver Utanapishti pour lui demander la clé de l’immortalité, or cette clé, il ne pourra jamais l’obtenir ou du moins la conserver. Le mythe pose simultanément la limite de la condition humaine et le statut privilégié de certains êtres d’exception, dieux ou héros divinisés. On peut se demander si cette leçon n’a pas été appliquée par les souverains mésopotamiens pour affermir leur pouvoir ; et la relation étroite qu’ils entretenaient avec les dieux (voir le prologue de Hammourabi) les a fait finalement basculer du côté des immortels. C’est du moins ce qui s’est passé pour Gilgamesh, dont on a vu qu’il a été divinisé.
La ligne de partage ?
Entre la tradition babylonienne et la tradition hébraïque, la ligne de partage essentielle semble bien être la question de la destinée humaine dans son rapport au (x) dieu (x). Le récit babylonien perpétue l’idée d’une destinée mortelle, adoucie par l’appui de certains dieux et par la possibilité de certaines destinées d’exception ; la dichotomie entre héros divinisé et homme ordinaire y joue un rôle essentiel. Le récit biblique pose la possibilité du bonheur humain à travers l’application d’une régulation inspirée par Dieu. Sans doute cette conclusion était-elle attendue, dès le moment où l’on replace le récit de la Genèse dans le cadre de la « Torah » mosaïque avant tout prescriptive. Mais il faut quand même insister sur sa signification globale et sur les valeurs corollaires de responsabilité et de liberté qu’elle favorise, et qu’on retrouvera plus loin dans la comparaison des deux codes de loi.
Ces différences de perspective permettent-elles d’expliquer les différences plus ténues qui séparent les deux traditions ? Une telle investigation nécessiterait une connaissance plus profonde des arrière-plans culturels, connaissance peut-être inaccessible. On peut cependant esquisser un semblant de recherche à propos de l’épisode des oiseaux, où l’on note une variation assez curieuse entre la Genèse et Gilgamesh. À la fin du Déluge, Utanapishti envoie successivement trois oiseaux en reconnaissance : la colombe, l’hirondelle, et le corbeau. Noé, par contre, n’envoie que deux oiseaux et dans un ordre différent : d’abord le corbeau. Il n’est d’ailleurs pas nettement spécifié que le corbeau avait…, et ensuite la colombe. Il n’est pas clair si une symbolique se cache derrière le choix du héros babylonien et de la préférence donnée au corbeau ; mais le choix de Noé présente en revanche une cohérence certaine avec la séparation posée au début du texte entre les animaux purs et les animaux impurs ; cette séparation sous-tendrait le choix de deux oiseaux particuliers et expliquerait la préférence finale de la colombe pour la découverte de la terre habitable. Tout cela ouvre un vaste champ d’interprétations qui sera exploitée par le midrash. Voir en particulier le midrash Bereshit Rabba sur ce passage. mais dont l’historien pourrait aussi tirer profit.
Les conceptions juridiques
La même méthode, appliquée aux parties prescriptives de la Torah, permet d’en éclairer certains traits essentiels. Cette recherche exigerait le complément d’une confrontation critique avec l’exégèse midrashique, mais dans le cadre défini ici, on se limitera aux enseignements les plus accessibles du texte, pris dans son sens obvie.
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Re: Le code d'Hammourabi vs la Bible
Le Dieu d’Israël
Le programme de justice défini par Hammourabi s’insérait dans un ordre cosmologique à l’intérieur duquel les dieux garantissaient l’autorité du roi et son rôle de médiateur et de protecteur. Dans toute affaire, le plaignant ou la victime qui demandent justice étaient invités à se référer au code dont le texte public jouxtait l’image du dieu protecteur. Il y a là sans conteste une avancée capitale de la conception du droit, en principe dégagé du secret et de l’arbitraire. Le droit civil est représenté et défendu par le roi, lui-même appuyé par un droit divin. Cependant, si le pouvoir du roi absorbe tout, la question reste posée de l’application effective de la justice au niveau des particuliers.
Dans le cas d’Israël, si l’on recherche une structure globale analogue à celle du code babylonien, on la trouve dans la relation qui unit le Dieu législateur et le peuple récepteur de la loi. Ici, point de stèle comportant l’image du dieu et du roi ; point de roi, s’attribuant le privilège et le mérite de la législation. Mais un événement fondateur : la révélation du Sinaï, dont le peuple est le témoin et le gardien ; la loi, donnée à tous (non à une classe spéciale), est introduite par dix grands principes gravés sur les « tables de l’alliance », déposées au cœur du sanctuaire (Ex, XXV, 21). Le Deutéronome évoque aussi une exposition publique de la loi,… ; son détail sera rédigé sur parchemin et les exemplaires confiés aux prêtres et aux Anciens (Deut., XXXI, 9). Les traductions de « tables de la loi » et de « dix…. Et si Dieu est la source de la loi et Moïse son intermédiaire, ce Dieu n’a pas de représentation physique (pas d’image). Comme le rappelle Moïse dans le Deutéronome (Deut., IV,… et l’intermédiaire, « le plus humble des hommes » (Nomb., XII, 3), tend à s’effacer : la loi est donnée pour être étudiée et répétée par tous, « proche » de leur bouche et de leur cœur (Deut., XXX, 14), ce qui n’exclut pas le recours aux experts dans les cas difficiles (Ex, XVIII, 21-22 ; Deut., XVII). Mutatis mutandis, à la position de Hammourabi, intronisé par Marduk comme roi de justice, ce n’est pas Moïse qu’il faudrait comparer, mais bien le peuple hébreu dans son entier. Ce peuple-roi n’a d’autre roi que le Créateur lui-même, auquel il doit sa libération de l’esclavage en Égypte.
Valeur de la vie humaine
Le premier grand trait spécifique qu’on peut reconnaître dans le code hébreu est le prix qu’il attache à l’intégrité de la vie humaine. On a déjà mentionné cette différence capitale, opposant le talion biblique au talion mésopotamien : chaque individu humain y apparaît comme une personne juridique distincte, au moins en ce sens qu’il ne saurait payer de sa vie la faute d’un autre. Le fils ne paie pas pour le père. Dans le Code de Hammourabi au contraire, le talion s’étend aux enfants, considérés comme le corps ou la possession du père. Voir les lois 210 (si un homme tue une femme enceinte, sa fille….
Cette importance attachée à la vie humaine entraîne une peine plus grave dans le cas des dommages : dans une loi de Hammourabi qu’on a citée plus haut, le propriétaire d’un bœuf signalé comme encorneur et qui a causé mort d’homme doit payer 30 sicles d’argent ; pour le droit biblique (Ex, XXI, 29), il est passible de la peine de mort. Le commentaire rabbinique y voit un châtiment céleste, non une… mais il peut sauver sa vie au moyen d’une rançon ; l’animal dangereux est abattu.
Enfin le meurtre par inadvertance, s’il semble gracié par Hammourabi (sur la foi d’un serment. Voir la loi 207.), il est sanctionné par l’exil temporaire dans la loi de Moïse (Nomb., XXXV, 15).
Égalité des hommes libres
La seconde différence concerne le statut des hommes libres, qui jouissent des mêmes droits devant la loi. Le droit mésopotamien faisait la différence entre les « notables » (awîlu) et les « gens du peuple » (mushkên) . Voir B. André-Salvini, op. cit., p. 39. ; le même dommage causé à un notable entraînait la peine du talion, alors qu’il coûtait seulement une indemnité en argent pour un roturier. Mais dans le cas du droit biblique, le talion. Ou l’indemnité pécuniaire, si l’on admet que le talion pouvait… est la règle pour tous. On retrouve ce principe à propos du kidnapping : le Code de Hammourabi punit de mort l’enlèvement du fils d’un notable (§ 14) ; le droit biblique applique cette peine au rapt d’un Hébreu en général. Ex, XXI, 16. Le texte hébreu dit « un individu » (ish) ; pour… (pour le vendre en esclavage).
Le statut de l’esclave
La loi biblique distingue entre l’esclave hébreu, vendu à ses frères pour une durée de sept ans, et l’esclave étranger asservi à perpétuité. Lév., XXV, 44-46 ; le droit rabbinique le désigne communément…. Comme je l’ai déjà signalé, cet esclave étranger n’est pas la simple propriété de son maître : il garde une dignité juridique, puisqu’en cas de lésion grave causée par son maître, il gagne son émancipation. Le midrash halakhah comprend cette loi dans un sens encore plus…. L’assassinat d’un esclave est quant à lui passible de la peine de mort, sinon par un tribunal, du moins par la justice céleste. Ex, XXI, 20. Le texte stipule : « il sera vengé ». Les….
La valeur de liberté
Par-delà le droit reconnu aux esclaves, ce qui est le plus frappant dans le code biblique est la valeur de la liberté. Le Dieu auquel Israël est soumis est le Dieu qui l’a libéré de l’esclavage en Égypte, thème qui revient très fréquemment ; l’Égypte est mentionnée non seulement comme terre de l’origine, mais comme le lieu de l’esclavage par excellence, beyt ‘avadim, la maison, mais aussi l’économie esclavagiste. Le Dieu libérateur devient, certes, le nouveau maître d’Israël ; mais ce service n’a rien à voir avec la servitude des dieux ou des rois humains, puisqu’il se définit comme une alliance ou un contrat, engageant la participation volontaire et réciproque des deux parties. Comme l’a noté José Faur. Voir José Faur, The Horizontal Society. Understanding the…, cette dimension réciproque et librement consentie de la loi, sa diffusion intégrale dans le peuple, bouleversent la conception du religieux et du politique communément admise dans le monde antique. L’autorité transcendante de la loi circonscrit en fait une autonomie paradoxale. La thèse de Faur dépasse ainsi la thèse ancienne d’Isaac…, au sein de laquelle l’individu échappe au pouvoir des hiérarchies.
On pourrait analyser cette autonomie à propos de plusieurs lois bibliques, par exemple le Shabbat, qui abolit un jour par semaine la détermination de l’homme pour le travail ; cette abolition se réclame à la fois de la création du monde en sept jours et de la délivrance de la servitude en Égypte (Ex, XX, 11 ; Deut., V, 14-15). D’où le scandale causé par cette loi dans l’Antiquité…. Mais c’est dans les lois relatives aux esclaves que ses applications sont les plus évidentes, surtout si on les compare à leur parallèle mésopotamien. Ici le droit biblique n’apparaît pas seulement comme une variante du droit proche-oriental ancien ; il semble en prendre l’exact contre-pied.
Le Code de Hammourabi multiplie les mesures pour fortifier l’institution de l’esclavage. On essorille un esclave qui prétend indûment être un homme libre (§ 282. Si un esclave dit à son maître : « tu n’es pas mon maître », il…), et l’on punit de mort la complicité dans l’évasion d’un esclave (§ 15-16. § 15 : Si un homme aide un esclave du palais, une esclave du…). La loi biblique ne statue pas sur la revendication mensongère de l’esclave, mais par contre elle prescrit le droit de refuge pour l’esclave fugitif (Deut., XXIII, 16-17) : « Ne livre pas un esclave à son maître, s’il vient se réfugier de chez son maître auprès de toi. Laisse-le demeurer chez toi, dans ton pays. D’après le commentaire rabbinique, le réfugié est un esclave…, en tel lieu qu’il lui plaira, dans telle de tes villes où il se trouvera bien ; ne le moleste point. »
On ajoutera à cette loi le statut très spécial de l’esclave hébreu, dont la vente ne peut excéder la durée de six années (Ex, XXVI, 2). Le Code de Hammourabi prévoit bien la sortie d’un esclave après…. Comme on sait, si l’esclave hébreu refuse d’être émancipé, on lui poinçonne l’oreille contre le linteau de la porte et il devient alors esclave « à perpétuité », le ‘olam (ibid., v. 6 ; le droit rabbinique comprend cette concession « à perpétuité » comme la durée du jubilé en cours. Le temps biblique est réglé par le « shabbat de la terre », qui…). On ne peut s’empêcher de voir dans ce poinçonnage de l’oreille une forme atténuée de l’essorillement. L’esclave est toujours châtié au niveau de l’oreille. Réminiscence lointaine du droit archaïque sur les esclaves ? le…; mais tandis que l’esclave babylonien est puni quand il veut fuir l’esclavage, l’esclave hébreu est puni quand il veut rester asservi. On retrouve là l’idée fondamentale énoncée plus haut : la loi s’adresse aux Hébreux qui sont sortis d’Égypte, c’est-à-dire aux Hébreux libérés de l’esclavage. Entrer sous le joug de la loi garantit l’accès à la liberté. « Car ils sont mes esclaves, à moi, qui les ai fait sortir du pays d’Égypte ; ils ne doivent pas être vendus à la façon des esclaves » (Lév. XXV, 42). Il est tout à fait remarquable que c’est cette loi, relative à la limitation de l’esclavage, qui ouvre le code des lois mosaïques. Symboliquement pour nous (mais peut-être pas pour son auteur),….
Conclusion
Notre enquête comparative proposait d’aller au-delà de la ressemblance ou dissemblance de surface, pour poser la question des caractères spécifiques des deux cultures. Les points communs reconnus entre les deux récits du Déluge (l’épopée de Gilgamesh, la Genèse), puis entre les deux codifications (Hammourabi, Exode) établissent une parenté évidente entre les deux systèmes, assez analogue à la parenté de deux systèmes linguistiques (en l’occurrence l’akkadien et l’hébreu). Les parties narratives reflètent ce qu’on pourrait appeler une pensée « mythique » ou « pré-rationnelle », caractérisée par une certaine représentation du divin, de son rapport au monde et à l’homme, avec la priorité donnée à la fonction étiologique et à la causalité surhumaine ou surnaturelle. Le terme de « surnaturel » est approximatif, parce qu’il…; quant à la législation, qui renvoie en gros à la même réalité socio-économique analogue (celle du Proche-Orient ancien), elle obéit à certains grands principes communs : l’origine ou la caution divine, le catalogue jurisprudentiel et casuistique, l’échelonnage des ressources pénales (talion, compensation pécuniaire), pour ne citer que ce dont il a été question ici.
Cependant chaque culture a imprimé à ce fonds commun sa marque particulière ; à supposer une influence d’un système sur l’autre, il est indéniable que cette influence a été transcendée dans le sens d’une élaboration originale. On peut parler, mutatis mutandis. En postulant d’une part et comme on l’a dit, l’unité…, de deux visions distinctes de l’homme. En Babylonie, à la conscience de la destinée humaine mortelle et de son naturel « bruyant » (violent et injuste) s’oppose l’idée religieuse et juridique d’un ordre protecteur, assuré par le roi et garanti par les dieux. Le droit s’oppose à la violence arbitraire, mais parce qu’il émane d’un roi doté du pouvoir absolu. Côté hébreu, la destinée humaine apparaît comme en projet, indissociable d’une prescription et d’un « guidage » divins, encadrés par la réciprocité d’une alliance contractée aux niveaux universel (les Noachides) et particulier (le peuple hébreu). Comparé au droit babylonien, le droit biblique présente un aspect quasiment « révolutionnaire ». Il parle à une communauté d’esclaves émancipés, et affirme simultanément leur libération et leur accès à une dignité royale et sacerdotale, conditionnées par la discipline de vie prescrite au Sinaï. Voir notamment Ex XIX, 6, qui évoque « un royaume de prêtres et…. Corrélativement, on assiste à une restriction du pouvoir politique, toujours soumis à l’autorité de la loi héritée par le peuple entier. Voir la remarque de Shmuel Trigano dans Le Judaïsme et l’esprit…. La transcendance d’une loi partagée par une communauté responsable et le privilège accordé à la relation éthique ont inspiré les penseurs du droit politique moderne. ]Voir à ce sujet Blandine Barret-Kriegel, « Judaïsme et État de… et la philosophie éthique d’un Buber ou d’un Levinas.
Ces ouvertures vers notre modernité ne doivent cependant pas faire oublier les aspects plus marqués historiquement du texte biblique. C’est peut-être là, d’ailleurs, un des grands bénéfices de la méthode comparative : prévenant les envolées du philosophe ou de l’allégoriste, elle nous ramène au sol historique et concret de la civilisation hébraïque ancienne, et à son appartenance au monde antique. En s’inspirant de « l’arc herméneutique » défini par Ricœur. Voir notamment Du Texte à l’action. Essais d’herméneutique,…, on pourrait dire qu’il faut prendre le risque de la réduction (au mythes, aux législations contemporaines) pour mieux saisir le contenu propre du texte et sa signification pour nous. On s’aperçoit alors que la dimension « mythique » du texte a encore bien des choses à nous apprendre, bien plus que ce pouvait imaginer une lecture d’inspiration aristotélicienne ou néo-kantienne.
https://www.cairn.info/revue-pardes-2012-1-page-15.htm#
Le programme de justice défini par Hammourabi s’insérait dans un ordre cosmologique à l’intérieur duquel les dieux garantissaient l’autorité du roi et son rôle de médiateur et de protecteur. Dans toute affaire, le plaignant ou la victime qui demandent justice étaient invités à se référer au code dont le texte public jouxtait l’image du dieu protecteur. Il y a là sans conteste une avancée capitale de la conception du droit, en principe dégagé du secret et de l’arbitraire. Le droit civil est représenté et défendu par le roi, lui-même appuyé par un droit divin. Cependant, si le pouvoir du roi absorbe tout, la question reste posée de l’application effective de la justice au niveau des particuliers.
Dans le cas d’Israël, si l’on recherche une structure globale analogue à celle du code babylonien, on la trouve dans la relation qui unit le Dieu législateur et le peuple récepteur de la loi. Ici, point de stèle comportant l’image du dieu et du roi ; point de roi, s’attribuant le privilège et le mérite de la législation. Mais un événement fondateur : la révélation du Sinaï, dont le peuple est le témoin et le gardien ; la loi, donnée à tous (non à une classe spéciale), est introduite par dix grands principes gravés sur les « tables de l’alliance », déposées au cœur du sanctuaire (Ex, XXV, 21). Le Deutéronome évoque aussi une exposition publique de la loi,… ; son détail sera rédigé sur parchemin et les exemplaires confiés aux prêtres et aux Anciens (Deut., XXXI, 9). Les traductions de « tables de la loi » et de « dix…. Et si Dieu est la source de la loi et Moïse son intermédiaire, ce Dieu n’a pas de représentation physique (pas d’image). Comme le rappelle Moïse dans le Deutéronome (Deut., IV,… et l’intermédiaire, « le plus humble des hommes » (Nomb., XII, 3), tend à s’effacer : la loi est donnée pour être étudiée et répétée par tous, « proche » de leur bouche et de leur cœur (Deut., XXX, 14), ce qui n’exclut pas le recours aux experts dans les cas difficiles (Ex, XVIII, 21-22 ; Deut., XVII). Mutatis mutandis, à la position de Hammourabi, intronisé par Marduk comme roi de justice, ce n’est pas Moïse qu’il faudrait comparer, mais bien le peuple hébreu dans son entier. Ce peuple-roi n’a d’autre roi que le Créateur lui-même, auquel il doit sa libération de l’esclavage en Égypte.
Valeur de la vie humaine
Le premier grand trait spécifique qu’on peut reconnaître dans le code hébreu est le prix qu’il attache à l’intégrité de la vie humaine. On a déjà mentionné cette différence capitale, opposant le talion biblique au talion mésopotamien : chaque individu humain y apparaît comme une personne juridique distincte, au moins en ce sens qu’il ne saurait payer de sa vie la faute d’un autre. Le fils ne paie pas pour le père. Dans le Code de Hammourabi au contraire, le talion s’étend aux enfants, considérés comme le corps ou la possession du père. Voir les lois 210 (si un homme tue une femme enceinte, sa fille….
Cette importance attachée à la vie humaine entraîne une peine plus grave dans le cas des dommages : dans une loi de Hammourabi qu’on a citée plus haut, le propriétaire d’un bœuf signalé comme encorneur et qui a causé mort d’homme doit payer 30 sicles d’argent ; pour le droit biblique (Ex, XXI, 29), il est passible de la peine de mort. Le commentaire rabbinique y voit un châtiment céleste, non une… mais il peut sauver sa vie au moyen d’une rançon ; l’animal dangereux est abattu.
Enfin le meurtre par inadvertance, s’il semble gracié par Hammourabi (sur la foi d’un serment. Voir la loi 207.), il est sanctionné par l’exil temporaire dans la loi de Moïse (Nomb., XXXV, 15).
Égalité des hommes libres
La seconde différence concerne le statut des hommes libres, qui jouissent des mêmes droits devant la loi. Le droit mésopotamien faisait la différence entre les « notables » (awîlu) et les « gens du peuple » (mushkên) . Voir B. André-Salvini, op. cit., p. 39. ; le même dommage causé à un notable entraînait la peine du talion, alors qu’il coûtait seulement une indemnité en argent pour un roturier. Mais dans le cas du droit biblique, le talion. Ou l’indemnité pécuniaire, si l’on admet que le talion pouvait… est la règle pour tous. On retrouve ce principe à propos du kidnapping : le Code de Hammourabi punit de mort l’enlèvement du fils d’un notable (§ 14) ; le droit biblique applique cette peine au rapt d’un Hébreu en général. Ex, XXI, 16. Le texte hébreu dit « un individu » (ish) ; pour… (pour le vendre en esclavage).
Le statut de l’esclave
La loi biblique distingue entre l’esclave hébreu, vendu à ses frères pour une durée de sept ans, et l’esclave étranger asservi à perpétuité. Lév., XXV, 44-46 ; le droit rabbinique le désigne communément…. Comme je l’ai déjà signalé, cet esclave étranger n’est pas la simple propriété de son maître : il garde une dignité juridique, puisqu’en cas de lésion grave causée par son maître, il gagne son émancipation. Le midrash halakhah comprend cette loi dans un sens encore plus…. L’assassinat d’un esclave est quant à lui passible de la peine de mort, sinon par un tribunal, du moins par la justice céleste. Ex, XXI, 20. Le texte stipule : « il sera vengé ». Les….
La valeur de liberté
Par-delà le droit reconnu aux esclaves, ce qui est le plus frappant dans le code biblique est la valeur de la liberté. Le Dieu auquel Israël est soumis est le Dieu qui l’a libéré de l’esclavage en Égypte, thème qui revient très fréquemment ; l’Égypte est mentionnée non seulement comme terre de l’origine, mais comme le lieu de l’esclavage par excellence, beyt ‘avadim, la maison, mais aussi l’économie esclavagiste. Le Dieu libérateur devient, certes, le nouveau maître d’Israël ; mais ce service n’a rien à voir avec la servitude des dieux ou des rois humains, puisqu’il se définit comme une alliance ou un contrat, engageant la participation volontaire et réciproque des deux parties. Comme l’a noté José Faur. Voir José Faur, The Horizontal Society. Understanding the…, cette dimension réciproque et librement consentie de la loi, sa diffusion intégrale dans le peuple, bouleversent la conception du religieux et du politique communément admise dans le monde antique. L’autorité transcendante de la loi circonscrit en fait une autonomie paradoxale. La thèse de Faur dépasse ainsi la thèse ancienne d’Isaac…, au sein de laquelle l’individu échappe au pouvoir des hiérarchies.
On pourrait analyser cette autonomie à propos de plusieurs lois bibliques, par exemple le Shabbat, qui abolit un jour par semaine la détermination de l’homme pour le travail ; cette abolition se réclame à la fois de la création du monde en sept jours et de la délivrance de la servitude en Égypte (Ex, XX, 11 ; Deut., V, 14-15). D’où le scandale causé par cette loi dans l’Antiquité…. Mais c’est dans les lois relatives aux esclaves que ses applications sont les plus évidentes, surtout si on les compare à leur parallèle mésopotamien. Ici le droit biblique n’apparaît pas seulement comme une variante du droit proche-oriental ancien ; il semble en prendre l’exact contre-pied.
Le Code de Hammourabi multiplie les mesures pour fortifier l’institution de l’esclavage. On essorille un esclave qui prétend indûment être un homme libre (§ 282. Si un esclave dit à son maître : « tu n’es pas mon maître », il…), et l’on punit de mort la complicité dans l’évasion d’un esclave (§ 15-16. § 15 : Si un homme aide un esclave du palais, une esclave du…). La loi biblique ne statue pas sur la revendication mensongère de l’esclave, mais par contre elle prescrit le droit de refuge pour l’esclave fugitif (Deut., XXIII, 16-17) : « Ne livre pas un esclave à son maître, s’il vient se réfugier de chez son maître auprès de toi. Laisse-le demeurer chez toi, dans ton pays. D’après le commentaire rabbinique, le réfugié est un esclave…, en tel lieu qu’il lui plaira, dans telle de tes villes où il se trouvera bien ; ne le moleste point. »
On ajoutera à cette loi le statut très spécial de l’esclave hébreu, dont la vente ne peut excéder la durée de six années (Ex, XXVI, 2). Le Code de Hammourabi prévoit bien la sortie d’un esclave après…. Comme on sait, si l’esclave hébreu refuse d’être émancipé, on lui poinçonne l’oreille contre le linteau de la porte et il devient alors esclave « à perpétuité », le ‘olam (ibid., v. 6 ; le droit rabbinique comprend cette concession « à perpétuité » comme la durée du jubilé en cours. Le temps biblique est réglé par le « shabbat de la terre », qui…). On ne peut s’empêcher de voir dans ce poinçonnage de l’oreille une forme atténuée de l’essorillement. L’esclave est toujours châtié au niveau de l’oreille. Réminiscence lointaine du droit archaïque sur les esclaves ? le…; mais tandis que l’esclave babylonien est puni quand il veut fuir l’esclavage, l’esclave hébreu est puni quand il veut rester asservi. On retrouve là l’idée fondamentale énoncée plus haut : la loi s’adresse aux Hébreux qui sont sortis d’Égypte, c’est-à-dire aux Hébreux libérés de l’esclavage. Entrer sous le joug de la loi garantit l’accès à la liberté. « Car ils sont mes esclaves, à moi, qui les ai fait sortir du pays d’Égypte ; ils ne doivent pas être vendus à la façon des esclaves » (Lév. XXV, 42). Il est tout à fait remarquable que c’est cette loi, relative à la limitation de l’esclavage, qui ouvre le code des lois mosaïques. Symboliquement pour nous (mais peut-être pas pour son auteur),….
Conclusion
Notre enquête comparative proposait d’aller au-delà de la ressemblance ou dissemblance de surface, pour poser la question des caractères spécifiques des deux cultures. Les points communs reconnus entre les deux récits du Déluge (l’épopée de Gilgamesh, la Genèse), puis entre les deux codifications (Hammourabi, Exode) établissent une parenté évidente entre les deux systèmes, assez analogue à la parenté de deux systèmes linguistiques (en l’occurrence l’akkadien et l’hébreu). Les parties narratives reflètent ce qu’on pourrait appeler une pensée « mythique » ou « pré-rationnelle », caractérisée par une certaine représentation du divin, de son rapport au monde et à l’homme, avec la priorité donnée à la fonction étiologique et à la causalité surhumaine ou surnaturelle. Le terme de « surnaturel » est approximatif, parce qu’il…; quant à la législation, qui renvoie en gros à la même réalité socio-économique analogue (celle du Proche-Orient ancien), elle obéit à certains grands principes communs : l’origine ou la caution divine, le catalogue jurisprudentiel et casuistique, l’échelonnage des ressources pénales (talion, compensation pécuniaire), pour ne citer que ce dont il a été question ici.
Cependant chaque culture a imprimé à ce fonds commun sa marque particulière ; à supposer une influence d’un système sur l’autre, il est indéniable que cette influence a été transcendée dans le sens d’une élaboration originale. On peut parler, mutatis mutandis. En postulant d’une part et comme on l’a dit, l’unité…, de deux visions distinctes de l’homme. En Babylonie, à la conscience de la destinée humaine mortelle et de son naturel « bruyant » (violent et injuste) s’oppose l’idée religieuse et juridique d’un ordre protecteur, assuré par le roi et garanti par les dieux. Le droit s’oppose à la violence arbitraire, mais parce qu’il émane d’un roi doté du pouvoir absolu. Côté hébreu, la destinée humaine apparaît comme en projet, indissociable d’une prescription et d’un « guidage » divins, encadrés par la réciprocité d’une alliance contractée aux niveaux universel (les Noachides) et particulier (le peuple hébreu). Comparé au droit babylonien, le droit biblique présente un aspect quasiment « révolutionnaire ». Il parle à une communauté d’esclaves émancipés, et affirme simultanément leur libération et leur accès à une dignité royale et sacerdotale, conditionnées par la discipline de vie prescrite au Sinaï. Voir notamment Ex XIX, 6, qui évoque « un royaume de prêtres et…. Corrélativement, on assiste à une restriction du pouvoir politique, toujours soumis à l’autorité de la loi héritée par le peuple entier. Voir la remarque de Shmuel Trigano dans Le Judaïsme et l’esprit…. La transcendance d’une loi partagée par une communauté responsable et le privilège accordé à la relation éthique ont inspiré les penseurs du droit politique moderne. ]Voir à ce sujet Blandine Barret-Kriegel, « Judaïsme et État de… et la philosophie éthique d’un Buber ou d’un Levinas.
Ces ouvertures vers notre modernité ne doivent cependant pas faire oublier les aspects plus marqués historiquement du texte biblique. C’est peut-être là, d’ailleurs, un des grands bénéfices de la méthode comparative : prévenant les envolées du philosophe ou de l’allégoriste, elle nous ramène au sol historique et concret de la civilisation hébraïque ancienne, et à son appartenance au monde antique. En s’inspirant de « l’arc herméneutique » défini par Ricœur. Voir notamment Du Texte à l’action. Essais d’herméneutique,…, on pourrait dire qu’il faut prendre le risque de la réduction (au mythes, aux législations contemporaines) pour mieux saisir le contenu propre du texte et sa signification pour nous. On s’aperçoit alors que la dimension « mythique » du texte a encore bien des choses à nous apprendre, bien plus que ce pouvait imaginer une lecture d’inspiration aristotélicienne ou néo-kantienne.
https://www.cairn.info/revue-pardes-2012-1-page-15.htm#