JUDAISME
LA RELATION ENTRE LA SPIRITUALITÉ JUIVE ET JERUSALEM
Pour comprendre le lien qui unit le judaïsme et Jérusalem, il nous faut commencer par le récit biblique. Du point de vue juif, le lieu qui est investi d'une sainteté particulière est le Mont Moriah, qu'on appelle de nos jours le Mont du Temple. C'est l'endroit situé sous l'esplanade sur laquelle s'élève actuellement le sanctuaire musulman connu sous le nom de Dôme du Rocher (ou, improprement, de mosquée d'Omar).
Dans la Torah, Jérusalem est désignée sous plusieurs noms : Salem (Chalem), Moriah, Jébus (Yevous), Jérusalem (Yerouchalaïm) et Sion (Tsion). Le nom le plus fréquent, Jérusalem, est cité 349 fois dans la Torah et Sion 108 fois.
La première occurrence du lieu se trouve dans Genèse chap 14/18, lorsqu'Abraham rencontre Melchitsedek, roi de Salem. D'après la tradition juive, le "ligotage" d'Isaac (Genèse chap 22/1-19) eut également lieu dans le" pays de Moriah", à l'endroit actuel du Mont du Temple. Abraham avait choisi ce lieu car il sentait combien la présence de Dieu y était fortement attachée. Le rêve de Jacob où des anges montent et descendent une échelle qui s'élève jusqu'au ciel se déroule également en ce lieu (Genèse chap 28/10-22)
Nous voyons donc que depuis des milliers d'années, le peuple juif a toujours considéré le Mont Moriah comme le lieu où la présence de Dieu se fait sentir de manière plus intense qu'en tout autre lieu au monde, et il n'existe pour les Juifs qu'un seul et unique lieu saint : c'est le Mont du Temple. Et ce lien que les Juifs entretiennent avec lui est toujours actuel.
Trois fois par jour, pendant la prière, les Juifs se tournent vers Jérusalem, et ceux qui se trouvent à Jérusalem se tournent vers le Mont du Temple.
Dans les prières journalières, Jérusalem est mentionnée plusieurs fois, ainsi que dans les "grâces après les repas".
Le Seder de Pessah se termine par "l'an prochain à Jérusalem". C'est également la phrase qui conclut l'office de Yom Kippour.
Le jeûne de Tichaa' BéAv commémore la destruction du premier et du second Temple.
Au cours d'un mariage juif, le marié brise un verre en signe de deuil, en souvenir de la destruction des deux Temples. Il récite ensuite un extrait du psaume 137 : "Si je t'oublie, Jérusalem, que ma main droite m'oublie, que ma langue s'attache à mon palais si je ne me souviens pas de toi, si je ne place pas Jérusalem au sommet de ma joie".
Les Juifs religieux laissent souvent dans leur maison une petite surface de mur brut et sans peinture en souvenir de la destruction des deux Temples.
LA RELATION HISTORIQUE ENTRE LE JUDAÏSME ET JÉRUSALEM
L'histoire la plus ancienne de Jérusalem plonge également ses racines dans la Bible. On peut ajouter aux passages cités précédemment le livre de Josué (chap 10) où l'on voit Adoni-Tsedek, le roi cananéen de Jérusalem, attaquer Gabaon qui avait fait la paix avec les Israélites.
Pendant la période d'environ 400 ans qui sépare l'entrée du peuple juif dans le pays de Canaan de la période des Juges, Jérusalem demeura une ville non-juive. Ce n'est que sous le règne du roi David (environ 1000 ans avant l'ère ordinaire) que Jérusalem fut conquise sur les Jébuséens (Samuel II, chap 5) et devint la capitale politique et spirituelle du peuple juif.
Les archéologues s'accordent à penser que la ville cananéenne primitive et la cité de David se trouvaient à l'emplacement actuel du village arabe de Silwan (kfar ha'Chiloah), en contrebas de la muraille méridionale.
Le roi David acquit "l'aire d'Aravna" sur le Mont Moriah (Samuel II, chap 24/18-25) pour y bâtir un autel à l'Eternel et c'est le roi Salomon, le fils de David, qui y édifia le Temple.
Le Livre des Rois (I, chap 6-8) décrit en détail la construction et l'inauguration du Temple: "ce fut 480 ans après le départ des enfants d'Israël du pays d'Egypte, dans la quatrième année du règne de Salomon que celui-ci édifia le Temple en l'honneur de l'Eternel" (Rois I, ch 6, v 1).
Le Temple de Salomon est également appelé le premier Beit ha'Mikdach ( Temple). Tous les archélologues s'accordent à penser qu'il se trouvait sur le Mont Moriah, probablement à l'emplacement du Dôme du Rocher, mais il n'existe aucune certitude quant à sa situation précise.
Quatre cent dix ans après sa construction, il fut rasé par les Babyloniens lorsqu'ils assiégèrent Jérusalem, et il n'en resta rien.
Après la victoire babylonienne, la plupart des habitants juifs de Jérusalem fut chassée du pays. Cet exil forcé est évoqué dans un verset célèbre du psaume 137 : "Sur les rives des fleuves de Babylone, nous étions assis et nous pleurions en nous souvenant de Sion".
Cinquante ans plus tard, Babylone était conquise par la Perse et les Juifs furent autorisés par Cyrus à retourner à Jérusalem. Sous la conduite de Zéroubavel, puis d'Ezra et de Néhémie, les Juifs rebâtirent le Temple et la muraille de fortification autour de la ville (Néhémie, chap 4-6).
Pendant les deux périodes successives du premier et du second Temple, le Beit ha'Mikdach était le centre vital du monde juif, tant en Israël qu'en Diaspora. Les Juifs du monde entier contribuaient à ses frais d'entretien. Les Cohanim (les prêtres) et les Lévites y assuraient le service et, trois fois par an , au moment des fêtes de Pessah, Soukkoth et Chavouoth, tous les Juifs avaient l'obligation de se rendre en pèlerinage au Temple de Jérusalem.
Le second Temple ( Bayit cheni ) se dressa pendant 420 ans à l'emplacement du premier, sur le Mont Moriah. Il fut remanié à plusieurs reprises mais c'est sous le règne d' Hérode le Grand ( -37 à 4 de l'ère ordinaire) qu'il atteignit sa pleine magnificence. Flavius Josèphe, l'historien juif qui vécut à la fin de la période du second Temple, nous a laissé des descriptions détaillées du Temple d'Hérode et de son environnement (voir "Antiquités juives" chap 15 et "la Guerre des Juifs" chap 5).
La période du second Temple s'achève avec la destruction de Jérusalem par les Romains en l'an 70 de l'ère ordinaire. Il se peut que les Juifs aient tenté, ultérieurement, de reconstruire le Temple, mais ils n'y parvinrent jamais et pendant plus de 600 ans, le site du Mont du Temple fut un champ de ruines. Les seuls vestiges que nous ayons sont les massifs murs de soutènement entourant le Mont Moriah, érigés par Hérode pour servir de sous-bassement à la plate-forme sur laquelle s'élevait le Temple