Le papyrus évoquant la femme de Jésus est un faux
Le papyrus évoquant la femme de Jésus serait un faux
Photo du papyrus de « la femme de Jésus »
Christian Askeland, un expert de papyrus coptes de l’Institut für neutestamentliche Textforschung (Institut pour l’étude des sources du Nouveau Testament) à Münster, a affirmé la semaine dernière que le fragment de papyrus évoquant la « femme de Jésus » est probablement un faux. Il fonde son analyse sur un autre fragment de papyrus, celui de l’Évangile de Jean, envoyé à la chercheuse américaine de l’Université de Harvard
7Karen King avec celui de « la femme de Jésus » qu’elle a publié en 2012. Ce fragment de l’Évangile de Jean est en Lycopolitain, un dialecte copte très rare attesté seulement au IVe et Ve siècle de notre ère. On ne le trouve que dans un seul manuscrit, précisément un manuscrit de l’Évangile de Jean édité par Herbert Thompson en 1924. Le nouveau fragment ne comporte que des débuts de lignes, soit la partie gauche de la page. Or M. Askeland a constaté que les débuts des lignes du nouveau fragment, le long de la marge de gauche, reproduisent exactement les débuts des lignes du manuscrit publié par Thompson, mais en sautant une ligne sur deux, comme si les lignes du codex d’où proviendrait ce nouveau fragment avaient été deux fois plus longues que celles du manuscrit publié par Thompson. Or une telle coïncidence des débuts de lignes entre deux manuscrits d’un même texte n’est jamais observée dans des manuscrits anciens. C. Askeland en conclut qu’un présumé faussaire à suivi de près l’édition de Thompson disponible sur internet depuis 2006. Selon cet expert, il est de loin improbable que les phrases puissent se commencer au même endroit et de la même manière du côté de la marge de gauche dans le papyrus et dans l’édition moderne. Il souligne également que ce fragment et celui de la « femme de Jésus » ont été copiés au moyen de la même plume. Cela lui permet d’affirmer que si le fragment de l’Évangile de Jean est hors de tout doute moderne, et donc faux, il en va de même du second, c’est-à-dire le fragment de la « femme de Jésus ».
Rejoint au téléphone par la Montagne des Dieux, le Professeur Louis Painchaud de l’Université Laval a ajouté qu’il est fort improbable, suite aux trouvailles de Christian Askeland, que ces deux papyrus soient authentiques. Il affirme que le dialecte lycopolitain s’est éteint très tôt et n’est attesté qu’au IVe et Ve siècle de notre ère. Or, comme les résultats de l’étude menée à l’aide du carbone 14 ont démontré que le papyrus de la « femme de Jésus » doit être daté du VIIe ou VIIIe siècle, et comme il s’agit d’un papyrus qui a été rédigé par le même scribe que le papyrus de l’Évangile de Jean, il va de soi que l’on doit dater ce dernier au VIIe ou VIIIe siècle. La présence du dialecte lycopolitain est tout à fait anachronique dans ce dernier papyrus ce qui le rend encore plus suspect. Le fait que le présumé faussaire ait eu recours à un dialecte disparu au VIIe et VIIIe siècle montre une fois de plus, selon M. Painchaud, que l’on a affaire à un faux document. Il ajoute également que le texte comporte des traces de corrections du texte, comme si le présumé faussaire avait voulu que le copte employé dans le texte ressemble davantage à un autre dialecte plus tardif. Comme les chercheurs ont démontré que le papyrus de l’Évangile de Jean a été contrefait à l’époque moderne, il en va dès lors de même pour le papyrus de la « femme de Jésus » qui, rappelons-le, a été rédigé par la même personne et qui a été remis par le même donneur anonyme que l’Évangile de Jean dont on ignore l’origine.
Sources :
Christian AskelandAlin SuciuSerge Cazelais
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