Rappel du premier message :
J’ai testé pour vous… l’Église de Scientologie
Comment l'Église de Scientologie persuade ses potentiels adeptes de la rejoindre ? Pour s'en rendre compte, Emilie Laystary y est allée incognito. Récit d'immersion
Philosophie libératrice et tournée vers la découverte de soi pour les uns, secte obscure et manipulatrice pour d’autres, la scientologie est un mouvement né aux États-Unis dans les années 50.
Malgré les nombreuses controverses qui ébranlent sa crédibilité, une opinion publique défiante et un traitement médiatique qui lui est souvent hostile, la scientologie compte un nombre croissant d’adeptes. Pour comprendre ce qui fait l’aura de ce mouvement, j’ai décidé d’y mettre moi-même les pieds.
NB : Afin de ne pas travestir l’expérience, je me suis gardée de me présenter comme journaliste et j’ai changé mon identité lors de l’entretien.
Souvenirs ramenés du front
Un RDV à prendre aussi simple qu’une lettre à poster
Je me suis rendue sur le site de l’église de Scientologie de Paris, et comme n’importe quelle personne aurait pu le faire, j’ai pris le numéro de téléphone et j’ai appelé. Je m’attendais naïvement à tomber sur une voix rocailleuse de mec à la dérive… que nenni : après avoir patienté en musique, sur fond de notes mi-pastorales mi-techno ralentie, un homme décroche et j’ai l’impression de parler à un acteur américain (vous savez, la voix du beau gosse à mèche dans les teen-movies), le dynamisme d’un prof d’aquagym en plus.
Ni une ni deux, il me propose un rendez-vous le lendemain à 15h. Et me demande mon prénom. Moi qui avais complètement oublié cette éventualité – je débute en incognito, j’ai un moment d’hésitation. Puis je regarde ma table, et ma crème Clarins qui trône dessus. « Clarence, je m’appelle Clarence », et je raccroche en riant nerveusement, comme après un canular téléphonique quand tu es en 6ème.
Un lieu aussi moderne qu’un labo de prise de sang, aussi cosy qu’un hôtel de province
Le lendemain, je me rends donc à l’église de Scientologie de Paris, dans le 12e arrondissement, quelque part entre Bastille et Gare de Lyon. En arrivant devant le bon numéro, grosse impression d’être devant un cabinet médical : un joli bâtiment à la façade blanche s’offre à moi. Moi qui m’attendais à un discret petit local qui ne paye pas de mine…
La salle d’attente, observatoire des allers et venues dans l’église
A l’intérieur, des tables qui ont la même gueule que celles de mon CDI au lycée, des étagères de livres, des chaises et un coin avec de quoi prendre une petite collation. Les scientologues et leurs adeptes, comme moi, mangent des petits beurres LU et boivent du jus d’orange Minute Maid. Soupir de soulagement.
Autour de moi, des gens vont et viennent. Ils sont bien habillés et ressemblent à n’importe quelle personne dans la rue à la Défense : regard confiant et chemise boutonnée. Deux, trois enfants courent et parlent de dessins animés. Jusqu’ici, tout va bien. Moi qui avais peur d’être observée avec suspicion dans une antre d’habitués à l’obscurantisme, je réalise que ma présence passe presque inaperçue. Même si j’aurais peut-être dû laisser les Van’s rouges à la maison et… une femme, le sourire large comme le tour de taille d’un sumo, m’arrache à mes songes. « Venez avec moi, je vais vous emmener dans la salle de projection ».
La salle de projection, laboratoire du lavage de cerveau
La dame affiche une attitude tellement attentionnée qu’elle manque de naturel : après lui avoir dit que j’allais « plutôt me mettre devant pour mieux voir, parce que je suis à moitié myope et que j’ai oublié mes lunettes », elle s’est mise à me répéter, frénétiquement, qu’il ne fallait absolument pas que je m’inquiète et que tout allait bien se passer.
Toujours avec les zygomatiques tellement contractés que son sourire m’apparaissait de plus en plus crispé. « Tout va bien se passer, oui oui oui mademoiselle, pas d’inquiétude, d’accord ? » À croire que j’allais passer sur la table d’opération après une fracture ouverte. Alors que c’était pas ce qui allait m’attendre, si ?
Le film, propagande infantilisante
Me voilà maintenant assise le dos tout droit comme à la messe, face à un DVD d’initiation, fantastique objet de propagande.
Avec ce DVD d’initiation, on entre dans le dur. Me voilà devant un fantastique objet de propagande, véritable support promotionnel incroyablement racoleur. En effet, cette heure et demi de vidéo est composée de tous les tricks les plus foireux dans l’histoire du blockbuster américain.
Le DVD commence avec une introduction dans laquelle une voix off masculine rauque et rassurante m’explique que la scientologie compte de plus en plus d’adeptes, qu’elle a changé leurs vies et que moi aussi je ferais mieux de rejoindre le mouvement, puisque « la scientologie ne me veut que du bien »… tout ça en mode texte déroulant d’ouverture. Vous savez, ce procédé supposé donner de la consistance, du suspens et de l’intensité à tout texte. Sauf que la vérité, c’est que ça ne marche bien que dans Star Wars :
La vidéo enchaîne avec un laconique « mais pour comprendre la scientologie, il convient de comprendre l’homme qui en a jeté les fondements ». C’est donc parti pour 20 minutes de biographie.
La vie de L. Ron Hubbard, presque plus intéressante que les histoires de Pierre Bellemare « Il a fait se rejoindre la spiritualité de l’Est et la science de l’Ouest : et la scientologie est née ». Grosse inception dans ton cerveau, dont les neurones traduisent grosso modo : c’est un citoyen du monde, il te veut donc du bien.
Je savais que le bonhomme avait fait fortune dans une carrière d’auteur de romans de science fiction, et qu’évidemment, c’est l’argument principal que les sceptiques utilisent pour décrédibiliser la scientologie.
Bah oui, si Jésus avait été concepteur d’émissions de télé-réalité, on l’aurait bien volontiers soupçonné de baratiner, en lui lançant des piques du type « ouais, la Rédemption, j’suis sûr que c’est du pipeau », non ? Je me demandais donc comment la vidéo présenterait L. Ron Hubbard.
Eh bien, la réponse est simple : le DVD ne livre pas tout de suite cette information. Il explique d’abord l’enfance du fondateur. On apprend ainsi que Ron L. Hubbard est né d’une mère très « cultivée pour l’époque » et qu’il a passé sa jeunesse dans les livres de philo (sous-entendu : c’est un homme d’esprit, pas un religieux de coeur). Puis, on nous dit qu’il a beaucoup voyagé, et que ce sont ces voyages qui lui ont conféré une telle connaissance de l’humanité.
À un moment, il y a une phrase un peu mindfucking du type « L. Ron Hubbard a fait se rejoindre la spiritualité de l’Est et la science de l’Ouest : et la scientologie est née », phrase simplette qui te fait une grosse inception dans ton cerveau, dont les neurones traduisent grosso modo : L. Ron Hubbard est un citoyen du monde, il te veut donc du bien. Avec quelques heures de sommeil en moins, j’aurais limite pu applaudir à deux mains.
C’est à ce moment-là que le 2e trick de blockbuster américain arrive : pour illustrer la vie du fondateur et rendre le tout émotionnellement très fort, un effet fondu est appliqué aux images de ses voyages, puis de son visage d’homme sûr de lui. L’écran se divise alors en deux : à droite le sourire avenant de L. Ron Hubbard en noir et blanc (que la voix off appelle désormais « LRH » aile aire hache, pour aller plus vite et puis parce que depuis 30 minutes que la vidéo est lancée, LRH c’est un peu ton pote), à gauche, un paysage de coucher de soleil sur la montagne, en sépia, genre vidéo de yoga méga cheap. Aïe. Même mon oncle, très premier degré dans ses montages de films de mariages de la famille, est moins cliché.
Là où le DVD atteint son climax, c’est quand la voix off, toujours avec son timbre chaud et rassurant, t’explique la genèse de la scientologie. Des images de LRH près de lits de malades défilent, et l’on comprend que le fondateur se trouve dans un hôpital en temps de guerre. Sortez les mouchoirs.
La voix off poursuit, et explique sensiblement la chose suivante : « certains malades n’arrivaient pas à être soignés avec les médicaments, car un truc chelou dans leur spiritualité en bloquait le fonctionnement. LRH a compris quoi, a tout débloqué, et les malades ont été guéris. » Badaboum, et la scientologie est née.
LRH écrit alors un livre, des églises de scientologie ouvrent partout dans le monde, le livre devient un best-seller et sera premier dans le top des ventes publiées dans le New York Times, plusieurs semaines d’affilée. Puis, paysage sur une vallée, légèrement floutée par un vent que l’on devine chaud et rassurant. Comme la voix off, disais-je donc.
Des images de jeunes, beaux et en bonne santé : capital sympathie de la scientologie
Pour souffler un peu après cette parenthèse biographique, la vidéo m’offre maintenant une succession de jeunes qui ont tous l’air sains d’esprit. Regard caméra, ils disent tour à tour « je suis membre de la scientologie et je suis fière », « la scientologie a changé ma vie », « je prenais de la drogue, la scientologie m’a aidé à arrêter », « j’ai parlé de la scientologie à ma meilleure amie ; depuis, elle est beaucoup plus heureuse dans sa vie ».
On dirait des jeunes dans une campagne présidentielle qui manque de naturel ou une pub foireuse pour un campus américain à l’excellent taux de réussite. Là, c’est donc la partie de la vidéo dans laquelle on me vend du rêve et me prouve que la scientologue c’est pas un truc d’illuminé.
Toi, moi, il, elle, n’importe qui peut trouver en la scientologie le moyen d’améliorer sa vie. À un moment, la tentative de normalisation manque de subtilité : deux filles à l’écran disent de vive-voix, tout sourire « un petit cours de scientologie, puis on va au cinéma ! Comme tout le monde ! » Quelque chose me dit que ces deux-là n’ont pas fait le Cours Florent.
Coucou, je suis une jolie brune adepte de la Scientologie.
Pour crédibiliser la scientologie : des schémas pseudo-logiques pour convaincre
Dans la 3e partie de la vidéo, on entre dans le vif du sujet. À base de couleurs vives et de schémas enfantins, l’église de la scientologie compte bien me convaincre. La voix off m’explique :
– la théorie des 8 dynamiques (en gros, une succession de domaines dans lequel l’homme est supposé « essayé de survivre » tels que l’espèce humaine, le groupe, la créativité etc..), symbolisée par les 8 branches de l’étoile de la scientologie.
Notez le beau paysage en arrière-fond.
– l’échelle des tons (graduée de 0 à 4 sur les humeurs : à 0,05 tu es en proie à une apathie chronique, à 4 tu es heureux et plein de vie. Comprendre ses humeurs, c’est se comprendre soi-même et pouvoir s’améliorer, nous assène la vidéo.)
– l’ARC (un triangle composé de 3 sommets interdépendants : si l’un chute, les autres aussi… Conclusion : il faut bosser ces 3 pans de ta spiritualité, et tout ira bien.)
La discussion avec le scientologue
Le film de 1h30 est à peine terminée qu’un monsieur entre et vient à ma rencontre, sourire large comme toutes les autres personnes rencontrées jusqu’alors. C’est là que mon jeu de rôle reprend. Pour rappel : je me fais passer pour Clarence, une jeune fille venue par curiosité.
« Par curiosité ? Mais vous devez bien avoir quelque chose à régler avec votre spiritualité, pour être venue ici… » Zut, je suis prise de court et je vois à son étonnement que mes questions techniques sur le nombre de scientologues dans ces locaux et le nombre de bureaux risquent de dévoiler la vraie nature de ma visite.
Je me remets dans la peau de mon personnage, et bredouille alors que je suis venue « parce que je me trouve trop stressée » (pourquoi pas). Il enchaîne, enthousiaste, en me demandant pourquoi. Je réponds sans réfléchir : « euh, à cause des exams ». Il acquiesce, l’air grave. « Vous avez bien fait de venir. Nous allons trouver des solutions.»
Il me répond : « C’est une partie de l’histoire que l’on garde secrète, car elle peut être révélatrice d’une vérité trop dure pour les débutants.. ».
Il me parle alors de la scientologie comme moyen de « mettre le doigt sur ce qui ne va pas » dans ma vie. Me demande si tout va bien avec le choix de mes études, mon petit ami, ma famille, mes amis. Je m’installe progressivement dans mon personnage, m’invente des études d’anglais, un petit ami à peu près OK, des parents conciliants mais une trop forte peur de les décevoir qui m’anime. « Je vois, je vois » ponctue t-il, d’un air presque triomphant. J’ai l’impression d’être chez le psy, jusqu’à ce qu’il m’énumère une série de préceptes scientologues, déjà abordés dans la vidéo.
Je décide de l’interrompre. Qu’aura t-il à dire sur cette histoire d’extra-terrestre appelé Xenu, qui a déporté toute une partie de sa planète sur Terre pour pouvoir les tuer ? Ce concept d’âmes intergalactiques qui se baladent en nous et foutent la merde dans notre spiritualité ? En effet, nombreux sont les gens qui pointent du doigt cette partie de l’imagerie scientologiste pour décrier le mouvement en qualifiant sa genèse étymologique ridicule. Fantastique pirouette de sa part :
L’électromètre, escroquerie et caution scientifique ?
Après cet entretien en tête à tête vient le moment d’essayer l’électromètre, une machine composée d’un cadran avec une aiguille et de 2 cylindres métalliques, à tenir dans ses mains. L’utilisation de cet appareil est centrale chez les scientologues.
Monsieur Scientologie m’explique que les cylindres réagissent à l’activité de mon corps, selon les questions qu’il va me poser. Ainsi, quand l’aiguille vire brusquement à droite, c’est que la question posée me gêne et qu’il faut la creuser.
Cette machine est selon moi le top du gros mysticisme à deux francs. Pour cause : comment peut-on réellement prouver que l’aiguille réagit systématiquement en réaction à la question posée, alors que l’appréhension-même de la question peut déjà faire bouger l’aiguille ? Exemple : le scientologue s’apprête à me poser une question, mon activité cardiaque s’accélère avant même d’avoir entendu la question (stress d’appréhension), l’aiguille vire à droite, le scientologue ne le voit pas et pose sa question (son hypothèse), et quand il baisse les yeux l’aiguille est toujours à droite, malgré l’inoffensivité de la question ; sauf qu’il en conclue qu’il vient de toucher un point sensible (pseudo-vérification de son hypothèse).
Pour me convaincre, il me pince et me fait voir l’aiguille qui bascule à droite : « vous voyez, la douleur vous a fait réagir ! »
Il a été maintes et maintes fois prouvé de part et d’autre de l’Internet que cette technique n’est en rien scientifique. Mais pour me convaincre, le monsieur me pince et me fait voir l’aiguille qui bascule à droite :
Le voilà, le rapport avec la vidéo de tout à l’heure, quand le DVD montrait des images d’un G.I à la guerre, à quelques mètres d’une grenade qui explose ! On voyait ensuite le même homme quelques années plus tard, avec ses amis dans un jardin public… un pétard lancé par des gamins éclate, le mec fait 3 bonds en arrière et la voix off commente « vous voyez, toutes vos douleurs passées sont emmagasinées ».
Eh bien pour faire simple : la scientologie vous propose de mettre le doigt sur ces événements qui vous ont fait souffrir et de leur tordre le cou, pour qu’enfin vous soyez libéré. Sauf qu’il n’est pas dit que subir un interrogatoire sur un événement traumatisant de votre vie vous aide vraiment… (parmi les victimes de la scientologie, on trouve des gens qui disent s’être vues forcés de raviver des blessures du passé au point d’en devenir complètement dépressif).
En fait, la force de persuasion de la scientologie réside vraisemblablement dans sa capacité à utiliser des exemples imagés, qui fonctionnent comme des images subliminales que tout esprit trouverait logique. C’est une façon de vous faire acquiescer plus facilement, jusqu’à ce que la croyance en la scientologie s’impose vraiment à vous.
Mon départ précipité
À ce stade de l’expérience, je commence à ressentir un certain malaise, un peu similaire à celui que Titiou Lecocq décrit dans son papier sur le test de scientologie. C’est un peu comme si je réalisais soudainement que j’étais une personne médiocre et bourrée de tares. Vite, il me faut sortir de là, me soustraire aux regards trop bienveillants, aux sourires forcés de clowns que chacun arborait, à tous ces maux imaginaires que l’on prétendait diagnostiquer chez moi. Il est temps de prendre congé.
Avant de me laisser partir, monsieur Scientologie me propose l’achat d’un gros pavé de L. Ron Hubbard, supposé « avoir été écrit pour moi ». Je le décline poliment, pensant très fortement que c’est pas demain la veille que la scientologie me prendra de l’argent. Il insiste alors pour me voir lors d’un deuxième rendez-vous. Je constate qu’il ne cherche pas à tout prix à me vendre ses services immédiatement, probablement une tactique pour ne pas éveiller un peu plus la défiance dont je faisais preuve au début. Stratégique, monsieur Scientologie.
Ce que je conclus de cette expérience
[leftquote]L’arme de la scientologie : enrober son entreprise mercantile de pourtours humanistes et spirituels et solidifier sa crédibilité avec des fondations pseudo-scientifiques.[/leftquote]
Tout cette expérience permet de mieux comprendre que, dans un moment de faiblesse ou une passe difficile dans la vie, une personne déroutée puisse penser trouver en la scientologie un moyen d’aller mieux. Plus encore que n’importe quelle religion, la scientologie sait se montrer très persuasive. Elle a de grosses allures de boîte de com’ et sans trop de recul sur les choses, j’ai la sensation qu’on peut facilement prendre le mouvement comme philosophie inoffensive, défendue par plein de gens tellement souriants que vous pourrez bien accepter de vous confier à eux (un peu, puis de plus en plus), même si cela suppose payer (un peu, puis de plus en plus).
D’ailleurs, cette nuit, j’ai fait de drôles de cauchemars. J’ai rêvé en sépia, comme dans le DVD de la Scientologie. J’étais oppressée et je courais dans un champs, mais mes jambes s’emmêlaient (comme si c’était des cordes) et je devais m’arrêter souvent pour défaire les noeuds. ALLO MAMAN JE PEUX REVENIR À LA MAISON ?
Scientologie
J’ai testé pour vous… l’Église de Scientologie
Comment l'Église de Scientologie persuade ses potentiels adeptes de la rejoindre ? Pour s'en rendre compte, Emilie Laystary y est allée incognito. Récit d'immersion
Philosophie libératrice et tournée vers la découverte de soi pour les uns, secte obscure et manipulatrice pour d’autres, la scientologie est un mouvement né aux États-Unis dans les années 50.
Malgré les nombreuses controverses qui ébranlent sa crédibilité, une opinion publique défiante et un traitement médiatique qui lui est souvent hostile, la scientologie compte un nombre croissant d’adeptes. Pour comprendre ce qui fait l’aura de ce mouvement, j’ai décidé d’y mettre moi-même les pieds.
NB : Afin de ne pas travestir l’expérience, je me suis gardée de me présenter comme journaliste et j’ai changé mon identité lors de l’entretien.
Souvenirs ramenés du front
Un RDV à prendre aussi simple qu’une lettre à poster
Je me suis rendue sur le site de l’église de Scientologie de Paris, et comme n’importe quelle personne aurait pu le faire, j’ai pris le numéro de téléphone et j’ai appelé. Je m’attendais naïvement à tomber sur une voix rocailleuse de mec à la dérive… que nenni : après avoir patienté en musique, sur fond de notes mi-pastorales mi-techno ralentie, un homme décroche et j’ai l’impression de parler à un acteur américain (vous savez, la voix du beau gosse à mèche dans les teen-movies), le dynamisme d’un prof d’aquagym en plus.
Ni une ni deux, il me propose un rendez-vous le lendemain à 15h. Et me demande mon prénom. Moi qui avais complètement oublié cette éventualité – je débute en incognito, j’ai un moment d’hésitation. Puis je regarde ma table, et ma crème Clarins qui trône dessus. « Clarence, je m’appelle Clarence », et je raccroche en riant nerveusement, comme après un canular téléphonique quand tu es en 6ème.
Un lieu aussi moderne qu’un labo de prise de sang, aussi cosy qu’un hôtel de province
Le lendemain, je me rends donc à l’église de Scientologie de Paris, dans le 12e arrondissement, quelque part entre Bastille et Gare de Lyon. En arrivant devant le bon numéro, grosse impression d’être devant un cabinet médical : un joli bâtiment à la façade blanche s’offre à moi. Moi qui m’attendais à un discret petit local qui ne paye pas de mine…
L’Église a pignon sur rue. Les mots « Église de Scientologie » figurent en grand près de l’entrée.
La salle d’attente, observatoire des allers et venues dans l’église
A l’intérieur, des tables qui ont la même gueule que celles de mon CDI au lycée, des étagères de livres, des chaises et un coin avec de quoi prendre une petite collation. Les scientologues et leurs adeptes, comme moi, mangent des petits beurres LU et boivent du jus d’orange Minute Maid. Soupir de soulagement.
Autour de moi, des gens vont et viennent. Ils sont bien habillés et ressemblent à n’importe quelle personne dans la rue à la Défense : regard confiant et chemise boutonnée. Deux, trois enfants courent et parlent de dessins animés. Jusqu’ici, tout va bien. Moi qui avais peur d’être observée avec suspicion dans une antre d’habitués à l’obscurantisme, je réalise que ma présence passe presque inaperçue. Même si j’aurais peut-être dû laisser les Van’s rouges à la maison et… une femme, le sourire large comme le tour de taille d’un sumo, m’arrache à mes songes. « Venez avec moi, je vais vous emmener dans la salle de projection ».
La salle de projection, laboratoire du lavage de cerveau
La dame affiche une attitude tellement attentionnée qu’elle manque de naturel : après lui avoir dit que j’allais « plutôt me mettre devant pour mieux voir, parce que je suis à moitié myope et que j’ai oublié mes lunettes », elle s’est mise à me répéter, frénétiquement, qu’il ne fallait absolument pas que je m’inquiète et que tout allait bien se passer.
Toujours avec les zygomatiques tellement contractés que son sourire m’apparaissait de plus en plus crispé. « Tout va bien se passer, oui oui oui mademoiselle, pas d’inquiétude, d’accord ? » À croire que j’allais passer sur la table d’opération après une fracture ouverte. Alors que c’était pas ce qui allait m’attendre, si ?
Le film, propagande infantilisante
Me voilà maintenant assise le dos tout droit comme à la messe, face à un DVD d’initiation, fantastique objet de propagande.
Avec ce DVD d’initiation, on entre dans le dur. Me voilà devant un fantastique objet de propagande, véritable support promotionnel incroyablement racoleur. En effet, cette heure et demi de vidéo est composée de tous les tricks les plus foireux dans l’histoire du blockbuster américain.
Le DVD commence avec une introduction dans laquelle une voix off masculine rauque et rassurante m’explique que la scientologie compte de plus en plus d’adeptes, qu’elle a changé leurs vies et que moi aussi je ferais mieux de rejoindre le mouvement, puisque « la scientologie ne me veut que du bien »… tout ça en mode texte déroulant d’ouverture. Vous savez, ce procédé supposé donner de la consistance, du suspens et de l’intensité à tout texte. Sauf que la vérité, c’est que ça ne marche bien que dans Star Wars :
La vidéo enchaîne avec un laconique « mais pour comprendre la scientologie, il convient de comprendre l’homme qui en a jeté les fondements ». C’est donc parti pour 20 minutes de biographie.
La vie de L. Ron Hubbard, presque plus intéressante que les histoires de Pierre Bellemare « Il a fait se rejoindre la spiritualité de l’Est et la science de l’Ouest : et la scientologie est née ». Grosse inception dans ton cerveau, dont les neurones traduisent grosso modo : c’est un citoyen du monde, il te veut donc du bien.
Je savais que le bonhomme avait fait fortune dans une carrière d’auteur de romans de science fiction, et qu’évidemment, c’est l’argument principal que les sceptiques utilisent pour décrédibiliser la scientologie.
Bah oui, si Jésus avait été concepteur d’émissions de télé-réalité, on l’aurait bien volontiers soupçonné de baratiner, en lui lançant des piques du type « ouais, la Rédemption, j’suis sûr que c’est du pipeau », non ? Je me demandais donc comment la vidéo présenterait L. Ron Hubbard.
Eh bien, la réponse est simple : le DVD ne livre pas tout de suite cette information. Il explique d’abord l’enfance du fondateur. On apprend ainsi que Ron L. Hubbard est né d’une mère très « cultivée pour l’époque » et qu’il a passé sa jeunesse dans les livres de philo (sous-entendu : c’est un homme d’esprit, pas un religieux de coeur). Puis, on nous dit qu’il a beaucoup voyagé, et que ce sont ces voyages qui lui ont conféré une telle connaissance de l’humanité.
À un moment, il y a une phrase un peu mindfucking du type « L. Ron Hubbard a fait se rejoindre la spiritualité de l’Est et la science de l’Ouest : et la scientologie est née », phrase simplette qui te fait une grosse inception dans ton cerveau, dont les neurones traduisent grosso modo : L. Ron Hubbard est un citoyen du monde, il te veut donc du bien. Avec quelques heures de sommeil en moins, j’aurais limite pu applaudir à deux mains.
C’est à ce moment-là que le 2e trick de blockbuster américain arrive : pour illustrer la vie du fondateur et rendre le tout émotionnellement très fort, un effet fondu est appliqué aux images de ses voyages, puis de son visage d’homme sûr de lui. L’écran se divise alors en deux : à droite le sourire avenant de L. Ron Hubbard en noir et blanc (que la voix off appelle désormais « LRH » aile aire hache, pour aller plus vite et puis parce que depuis 30 minutes que la vidéo est lancée, LRH c’est un peu ton pote), à gauche, un paysage de coucher de soleil sur la montagne, en sépia, genre vidéo de yoga méga cheap. Aïe. Même mon oncle, très premier degré dans ses montages de films de mariages de la famille, est moins cliché.
Là où le DVD atteint son climax, c’est quand la voix off, toujours avec son timbre chaud et rassurant, t’explique la genèse de la scientologie. Des images de LRH près de lits de malades défilent, et l’on comprend que le fondateur se trouve dans un hôpital en temps de guerre. Sortez les mouchoirs.
La voix off poursuit, et explique sensiblement la chose suivante : « certains malades n’arrivaient pas à être soignés avec les médicaments, car un truc chelou dans leur spiritualité en bloquait le fonctionnement. LRH a compris quoi, a tout débloqué, et les malades ont été guéris. » Badaboum, et la scientologie est née.
LRH écrit alors un livre, des églises de scientologie ouvrent partout dans le monde, le livre devient un best-seller et sera premier dans le top des ventes publiées dans le New York Times, plusieurs semaines d’affilée. Puis, paysage sur une vallée, légèrement floutée par un vent que l’on devine chaud et rassurant. Comme la voix off, disais-je donc.
Des images de jeunes, beaux et en bonne santé : capital sympathie de la scientologie
Pour souffler un peu après cette parenthèse biographique, la vidéo m’offre maintenant une succession de jeunes qui ont tous l’air sains d’esprit. Regard caméra, ils disent tour à tour « je suis membre de la scientologie et je suis fière », « la scientologie a changé ma vie », « je prenais de la drogue, la scientologie m’a aidé à arrêter », « j’ai parlé de la scientologie à ma meilleure amie ; depuis, elle est beaucoup plus heureuse dans sa vie ».
On dirait des jeunes dans une campagne présidentielle qui manque de naturel ou une pub foireuse pour un campus américain à l’excellent taux de réussite. Là, c’est donc la partie de la vidéo dans laquelle on me vend du rêve et me prouve que la scientologue c’est pas un truc d’illuminé.
Toi, moi, il, elle, n’importe qui peut trouver en la scientologie le moyen d’améliorer sa vie. À un moment, la tentative de normalisation manque de subtilité : deux filles à l’écran disent de vive-voix, tout sourire « un petit cours de scientologie, puis on va au cinéma ! Comme tout le monde ! » Quelque chose me dit que ces deux-là n’ont pas fait le Cours Florent.
Coucou, je suis une jolie brune adepte de la Scientologie.
Pour crédibiliser la scientologie : des schémas pseudo-logiques pour convaincre
Dans la 3e partie de la vidéo, on entre dans le vif du sujet. À base de couleurs vives et de schémas enfantins, l’église de la scientologie compte bien me convaincre. La voix off m’explique :
– la théorie des 8 dynamiques (en gros, une succession de domaines dans lequel l’homme est supposé « essayé de survivre » tels que l’espèce humaine, le groupe, la créativité etc..), symbolisée par les 8 branches de l’étoile de la scientologie.
Notez le beau paysage en arrière-fond.
– l’échelle des tons (graduée de 0 à 4 sur les humeurs : à 0,05 tu es en proie à une apathie chronique, à 4 tu es heureux et plein de vie. Comprendre ses humeurs, c’est se comprendre soi-même et pouvoir s’améliorer, nous assène la vidéo.)
– l’ARC (un triangle composé de 3 sommets interdépendants : si l’un chute, les autres aussi… Conclusion : il faut bosser ces 3 pans de ta spiritualité, et tout ira bien.)
La discussion avec le scientologue
Le film de 1h30 est à peine terminée qu’un monsieur entre et vient à ma rencontre, sourire large comme toutes les autres personnes rencontrées jusqu’alors. C’est là que mon jeu de rôle reprend. Pour rappel : je me fais passer pour Clarence, une jeune fille venue par curiosité.
« Par curiosité ? Mais vous devez bien avoir quelque chose à régler avec votre spiritualité, pour être venue ici… » Zut, je suis prise de court et je vois à son étonnement que mes questions techniques sur le nombre de scientologues dans ces locaux et le nombre de bureaux risquent de dévoiler la vraie nature de ma visite.
Je me remets dans la peau de mon personnage, et bredouille alors que je suis venue « parce que je me trouve trop stressée » (pourquoi pas). Il enchaîne, enthousiaste, en me demandant pourquoi. Je réponds sans réfléchir : « euh, à cause des exams ». Il acquiesce, l’air grave. « Vous avez bien fait de venir. Nous allons trouver des solutions.»
Il me répond : « C’est une partie de l’histoire que l’on garde secrète, car elle peut être révélatrice d’une vérité trop dure pour les débutants.. ».
Il me parle alors de la scientologie comme moyen de « mettre le doigt sur ce qui ne va pas » dans ma vie. Me demande si tout va bien avec le choix de mes études, mon petit ami, ma famille, mes amis. Je m’installe progressivement dans mon personnage, m’invente des études d’anglais, un petit ami à peu près OK, des parents conciliants mais une trop forte peur de les décevoir qui m’anime. « Je vois, je vois » ponctue t-il, d’un air presque triomphant. J’ai l’impression d’être chez le psy, jusqu’à ce qu’il m’énumère une série de préceptes scientologues, déjà abordés dans la vidéo.
Je décide de l’interrompre. Qu’aura t-il à dire sur cette histoire d’extra-terrestre appelé Xenu, qui a déporté toute une partie de sa planète sur Terre pour pouvoir les tuer ? Ce concept d’âmes intergalactiques qui se baladent en nous et foutent la merde dans notre spiritualité ? En effet, nombreux sont les gens qui pointent du doigt cette partie de l’imagerie scientologiste pour décrier le mouvement en qualifiant sa genèse étymologique ridicule. Fantastique pirouette de sa part :
– C’est une partie de l’histoire que l’on garde secrète, car elle peut être révélatrice d’une vérité trop dure pour les débutants. Vous savez, comme quand on assiste à un accident trop violent. Vous voyez ? Les images sont choquantes donc elles restent imprimées dans votre esprit, même avant d’aller vous coucher ?
– Euh, oui.
– Eh bien c’est la même chose avec cette partie de l’histoire. On ne l’aborde que quand la personne est pleinement avancée dans son travail spirituel. Pour le moment, concentrez-vous sur vous-même.
– Ah d’accord.
L’électromètre, escroquerie et caution scientifique ?
Après cet entretien en tête à tête vient le moment d’essayer l’électromètre, une machine composée d’un cadran avec une aiguille et de 2 cylindres métalliques, à tenir dans ses mains. L’utilisation de cet appareil est centrale chez les scientologues.
Monsieur Scientologie m’explique que les cylindres réagissent à l’activité de mon corps, selon les questions qu’il va me poser. Ainsi, quand l’aiguille vire brusquement à droite, c’est que la question posée me gêne et qu’il faut la creuser.
Cette machine est selon moi le top du gros mysticisme à deux francs. Pour cause : comment peut-on réellement prouver que l’aiguille réagit systématiquement en réaction à la question posée, alors que l’appréhension-même de la question peut déjà faire bouger l’aiguille ? Exemple : le scientologue s’apprête à me poser une question, mon activité cardiaque s’accélère avant même d’avoir entendu la question (stress d’appréhension), l’aiguille vire à droite, le scientologue ne le voit pas et pose sa question (son hypothèse), et quand il baisse les yeux l’aiguille est toujours à droite, malgré l’inoffensivité de la question ; sauf qu’il en conclue qu’il vient de toucher un point sensible (pseudo-vérification de son hypothèse).
Pour me convaincre, il me pince et me fait voir l’aiguille qui bascule à droite : « vous voyez, la douleur vous a fait réagir ! »
Il a été maintes et maintes fois prouvé de part et d’autre de l’Internet que cette technique n’est en rien scientifique. Mais pour me convaincre, le monsieur me pince et me fait voir l’aiguille qui bascule à droite :
« Vous voyez, la douleur vous a fait réagir. Maintenant, repensez à cette douleur. Ah, vous voyez : l’aiguille bouge de nouveau. Le souvenir de la douleur vous fait presque autant souffrir que la douleur elle-même. Eh bien la scientologie, c’est ça : se débarrasser de l’influence des douleurs emmagasinées dans le passé et faire en sorte qu’elles ne touchent plus votre comportement d’aujourd’hui. »
Le voilà, le rapport avec la vidéo de tout à l’heure, quand le DVD montrait des images d’un G.I à la guerre, à quelques mètres d’une grenade qui explose ! On voyait ensuite le même homme quelques années plus tard, avec ses amis dans un jardin public… un pétard lancé par des gamins éclate, le mec fait 3 bonds en arrière et la voix off commente « vous voyez, toutes vos douleurs passées sont emmagasinées ».
Eh bien pour faire simple : la scientologie vous propose de mettre le doigt sur ces événements qui vous ont fait souffrir et de leur tordre le cou, pour qu’enfin vous soyez libéré. Sauf qu’il n’est pas dit que subir un interrogatoire sur un événement traumatisant de votre vie vous aide vraiment… (parmi les victimes de la scientologie, on trouve des gens qui disent s’être vues forcés de raviver des blessures du passé au point d’en devenir complètement dépressif).
En fait, la force de persuasion de la scientologie réside vraisemblablement dans sa capacité à utiliser des exemples imagés, qui fonctionnent comme des images subliminales que tout esprit trouverait logique. C’est une façon de vous faire acquiescer plus facilement, jusqu’à ce que la croyance en la scientologie s’impose vraiment à vous.
Mon départ précipité
À ce stade de l’expérience, je commence à ressentir un certain malaise, un peu similaire à celui que Titiou Lecocq décrit dans son papier sur le test de scientologie. C’est un peu comme si je réalisais soudainement que j’étais une personne médiocre et bourrée de tares. Vite, il me faut sortir de là, me soustraire aux regards trop bienveillants, aux sourires forcés de clowns que chacun arborait, à tous ces maux imaginaires que l’on prétendait diagnostiquer chez moi. Il est temps de prendre congé.
Avant de me laisser partir, monsieur Scientologie me propose l’achat d’un gros pavé de L. Ron Hubbard, supposé « avoir été écrit pour moi ». Je le décline poliment, pensant très fortement que c’est pas demain la veille que la scientologie me prendra de l’argent. Il insiste alors pour me voir lors d’un deuxième rendez-vous. Je constate qu’il ne cherche pas à tout prix à me vendre ses services immédiatement, probablement une tactique pour ne pas éveiller un peu plus la défiance dont je faisais preuve au début. Stratégique, monsieur Scientologie.
Ce que je conclus de cette expérience
[leftquote]L’arme de la scientologie : enrober son entreprise mercantile de pourtours humanistes et spirituels et solidifier sa crédibilité avec des fondations pseudo-scientifiques.[/leftquote]
Tout cette expérience permet de mieux comprendre que, dans un moment de faiblesse ou une passe difficile dans la vie, une personne déroutée puisse penser trouver en la scientologie un moyen d’aller mieux. Plus encore que n’importe quelle religion, la scientologie sait se montrer très persuasive. Elle a de grosses allures de boîte de com’ et sans trop de recul sur les choses, j’ai la sensation qu’on peut facilement prendre le mouvement comme philosophie inoffensive, défendue par plein de gens tellement souriants que vous pourrez bien accepter de vous confier à eux (un peu, puis de plus en plus), même si cela suppose payer (un peu, puis de plus en plus).
D’ailleurs, cette nuit, j’ai fait de drôles de cauchemars. J’ai rêvé en sépia, comme dans le DVD de la Scientologie. J’étais oppressée et je courais dans un champs, mais mes jambes s’emmêlaient (comme si c’était des cordes) et je devais m’arrêter souvent pour défaire les noeuds. ALLO MAMAN JE PEUX REVENIR À LA MAISON ?