Stèle de Mésa
Date: 9ème siècle avant notre ère.
La stèle de Mésa, également appelée “pierre moabite”. Ce qui est extraordinaire concernant cette découverte archéologique est que cette stèle n’a pas été trouvée au cours de fouilles mais gisait simplement à la surface du sol.
Fac-similé réalisé par B. Bonte Il existe plusieurs versions de son histoire. Selon l’ouvrage “Sur la pierre et l’argile” d’Henri Michaud, (édité par Delachaux et Niestle - paru en 1958), la stèle aurait été découverte par F. A. Klein, missionnaire allemand, à Dibon (actuellement Dibhan), en 1868. Mais Clermont-Ganneau s’impose de toute évidence comme celui qui l’aurait découvert en premier. À cette époque il travaillait au consulat de Jérusalem. Il entendit parler de cette stèle et en commanda un estampage. Cette reproduction peut être vue au Louvre, aux côtés de la stèle de Mésa originale. Il avait compris que la stèle était d’une valeur inestimable. C’est pour cette raison qu’il en avait commandée la copie. Dès que ce fut réalisé, la reproduction a été mise en pièces lors de combats entre les populations. Clermont-Ganneau voulait acheter la stèle mais les Arabes étaient méfiants. Il était trop impatient. Les autochtones ne comprenaient pas pourquoi il tenait tant à acheter une pierre “sans valeur”. Ils ont alors pensé qu’il y avait un trésor caché à l’intérieur. Afin de le découvrir, ils ont allumé un feu autour, et quand elle a été bien chaude, ils ont déversé de l’eau dessus. La différence de température a fait éclater la stèle en morceaux. Il n’y avait pas de trésor caché à l’intérieur. Clermont-Ganneau a pu acheter les morceaux qui sont maintenant au Louvre. La stèle actuelle a été reconstituée à partir des fragments et du plâtre, selon la reproduction qui avait pu en être faite.
Le matériau de cette stèle est le basalte. Sa dimension est de 124 cm de hauteur sur 71 cm de large. Elle est écrite en Phénicien. Elle date d’environ 800 avant notre ère. Sur cette stèle, Mesha, roi de Moab, raconte l’histoire de sa conquête d’Israël. Pour mieux comprendre le contexte, mentionnons qu’il était un adorateur du dieu Kemosh.
Nous pouvons lire :« C’est moi, Mesha, fils de Kamosh (gad), roi de Moab, le Dibonite.
Mon père a régné trente ans sur Moab et moi, j’ai régné après mon père. J’ai construit ce sanctuaire pour Kamosh de Qerihoh, (sanctuaire) de salut car il m’a sauvé de tous les agresseurs et il m’a fait me réjouir de tous mes ennemis.
Omri fut roi d’Israël et opprima Moab pendant de longs jours, car Kamosh était irrité contre son pays. Son fils lui succéda et lui aussi il dit : “J’opprimerai Moab”.
De mes jours, il a parlé (ainsi), mais je me suis réjoui contre lui et contre sa maison. Israël a été ruiné à jamais. Omri s’était emparé du pays de Madaba et (Israël) y demeura pendant son règne et une partie du règne de son fils, à savoir quarante ans : mais de mon temps Kamosh l’a habité. J’ai bâti Ba’al-Me’on et j’y fis le réservoir, et j’ai construit Qiryatan.
L’homme de Gad demeurait dans le pays de ’Atarot depuis longtemps, et le roi d’Israël avait construit ’Atarot pour lui-même. J’attaquai la ville et je la pris. Je tuai tout le peuple de la ville pour réjouir Kamosh et Moab.
J’emportai de là l’autel de Dodoh et je le traînai devant la face de Kamosh à Qeriyot où je fis demeurer l’homme de Saron et celui de Maharot.
Et Kamosh me dit : “Va, prends Neboh à Israël”.
J’allai de nuit et je l’attaquai depuis le lever du jour jusqu’à midi. Je la pris et je tuai tout, à savoir sept mille hommes et garçons, femmes, filles et concubines parce que je les avais voués à ’Ashtar-Kamosh.
J’emportai de là les vases de Yahwé et je les traînai devant la face de Kamosh. Le roi d’Israël avait bâti Yahas et il y demeura lors de sa campagne contre moi. Kamosh le chassa de devant moi.
Je pris deux cents hommes de Moab, tous ses chefs, et j’attaquai Yahas et je la pris pour l’annexer à Dibon. J’ai construit Qerihoh, le mur du parc et celui de l’acropole, j’ai construit ses portes et ses tours. J’ai bâti le palais royal et j’ai fait les murs de revêtement du réservoir pour les eaux, au milieu de la ville. Or, il n’y avait pas de citerne à l’intérieur de la ville, à Qerihoh, et je le dis à tout le peuple :
“Faites- vous chacun une citerne dans votre maison”. J’ai fait creuser les fossés (autour) de Qerihoh par les prisonniers d’Israël. J’ai construit Aro’er et j’ai fait la route de l’Arnon. J’ai construit Bet-Bamot, car elle était détruite. J’ai construit Bosor, car elle était en ruine, avec cinquante hommes de Dibon, car tout Dibon m’était soumis. J’ai régné ... cent avec les villes que j’ai ajoutées au pays. J’ai construit ... Madaba, Bet-Diblatan et Bet-Ba’al-Me’on. J’ai élevé là ....troupeaux du pays. Et Horonan où demeurait ...
Et Kamosh me dit : “Descends et combats contre Horonan”. J’allai (et je combattis contre la ville et je la pris ; et) Kamosh y (demeura) sous mon règne .... de là ... C’est moi qui ... »
La suite du texte est trop détériorée pour pouvoir être traduite. En hébreu ancien, les mots étaient constitués de consonnes et se lisait de droite à gauche. La stèle est écrite dans une langue proche de l’hébreu. C’est de toute logique puisque les Moabites étaient les descendants de Lot, neveu d’Abraham.
En ce qui concerne le nom divin, elle est d’une importance capitale. A la 18ème ligne, à droite, on peut voir écrit “YHWH”. La forme YHWH du nom divin était bien connue de Mesha et de ses contemporains. Il est intéressant de noter que le récit biblique contenu en II Rois chapitre 3 se rapporte à la même période. Mesha est même mentionné au verset 4 : « Quant à Mésha le roi de Moab, il devint éleveur de moutons, et il payait au roi d’Israël cent mille agneaux et cent mille moutons mâles non tondus »
Le livre “Het verhaal van de bijbel” (L’histoire de la Bible) pages 32-34 (publié par la Société Biblique Belge, 1985, première édition) déclare : "En II Rois chapitre 3, il est mentionné qu’une coalition d’armées d’Israël, Juda et Édom a pénétré le pays de Moab, quand Mesha se levait. Selon ce récit, Moab a été détruit et Mesha a été enfermé dans une forteresse. En sacrifiant son fils, il a évité une défaite totale.” Le récit biblique diffère fortement du rapport qu’en fait Mesha sur la stèle..